LA LANGUE BASQUE ET LE MAGYAR.
Il existe depuis longtemps de nombreuses hypothèses sur l'origine de la langue Basque.
Vers les années 1860, le prince Louis-Lucien Bonaparte, linguiste distingué, trouve des similitudes entre les langues finno-ougriennes, dont le Magyar et la langue Basque.
Voici ce rapporta à ce sujet Jules Vinson :
"...Les Basques n'offrent au surplus, au point de vue anthropologique, jusqu'à présent du moins, aucun caractère original et distinct autre que leur langage. Rien dans leurs mœurs ne leur est propre : c'est en vain qu'on a voulu retrouver chez eux la coutume bizarre de la couvade, observée encore aujourd'hui, dit-on, par les natifs de l'Amérique du sud et dans les plaines de la Tartarie. Elle consiste en ce que, lorsqu'une femme vient d'accoucher, le mari se met au lit avec le nouveau-né et le "couve" pour ainsi dire. Aucun voyageur moderne ou contemporain n'a retrouvé cette coutume chez les Basques ; quant aux témoignages historiques, ils se réduisent à un passage de Strabon que rien ne prouve s'appliquer aux ancêtres des Basques actuels et à diverses allusions de livres des deux derniers siècles. Ces allusions visent toujours les Béarnais, au dialecte desquels est emprunté le mot même de couvade.
Le prince L.-L. Bonaparte a découvert que "la lune" se dit en roncalais goikoa ; avec le préfixe jaun "seigneur", c'est le mot "Dieu" en basque actuel. Il a rappelé à cette occasion "le culte de la lune des anciens Basques". Le seul témoignage en faveur de ce culte est un passage de Strabon (Liv. III, IV, 16) où il est dit que les Celtibères et leurs voisins septentrionaux honorent un certain dieu anonyme par des danses devant leurs portes, la nuit, à la pleine lune. Mais il faudrait établir d'abord que les Celtibères et leurs voisins du nord étaient Basques.
PRINCE LOUIS LUCIEN BONAPARTE |
Un autre passage de Strabon a fourni des arguments aux ibéristes. Il dit (liv. III, IV, 18) que chez les Cantabres les filles héritent au détriment de leurs frères. M. Eug. Cordier a voulu, après Laferrière (Histoire du droit français), établir que cette disposition est l'origine du droit de primogéniture, sans distinction de sexe, qu'on retrouve plus ou moins dans toutes les coutumes de la région occidentale des Pyrénées. Il a développé cette théorie dans son intéressante étude sur l'Organisation de la famille chez les Basques (Paris, 1869). Mais un habile jurisconsulte de Bayonne, M. Jules Balasque, a démontré au t. II de ses remarquables Études historiques sur la ville de Bayonne (Bayonne, 1862 à 1875), qu'il n'y avait là rien de proprement basque et qu'il fallait y voir seulement, comme dans le privilège contraire de "juveignerie" de certaines coutumes septentrionales, une application du principe essentiellement celtique ou gallique de la conservation du patrimoine.
LIVRE ETUDES HISTORIQUES SUR LA VILLE DE BAYONNE DE JULES BALASQUE |
En résumé, rien de moins établi, rien de moins sérieusement démontré que la théorie ibérienne. Le mot ibère est une expression vague, indéfinie et dont la signification exacte est assez obscure.
C'est parce que je crois nécessaire, à notre époque, de n'employer, dans une étude scientifique, que des termes de signification tout à fait précise, qu'en traduisant l'essai de M. Ribary, j'ai partout rendu nyelvtudomany par "science du langage" (qui en est la traduction littérale) ou par "linguistique", mais jamais par "philologie comparée". Pour être comparée, la philologie n'en est pas moins une science historique, tandis que notre science, qu'on la nomme glottique, glottologie, science du langage, linguistique, est exclusivement l'étude positive des phénomènes naturels. Ce point est aujourd'hui, ce me semble, tout à fait hors de doute, et il n'y a pas lieu d'y revenir après les travaux décisifs de Schleicher, de MM. Curtius, Chavée, Hovelacque, Pezzi et autres maîtres autorisés.
ESSAI SUR LA LANGUE BASQUE 1877 PAR JULES VINSON |
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