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mardi 29 juin 2021

UN GUIDE POUR LE VOYAGEUR EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN 1877 (troisième partie)

  

GUIDE DE VOYAGE EN 1877.


Vers la fin du 19ème siècle, apparaissent des guides de voyage pour les voyageurs désirant se rendre en Hego-Alde, dans les  provinces Basques du Sud.




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GUIDE DU VOYAGEUR EN GUIPUZCOA 1877


Voici ce que rapporta à ce sujet, M. L. Capistou, en 1877 :



"Province du Guipuzcoa.


Itinéraire.

La Bidassoa. — Ile des Faisans. — Béhobie. — Enderlaza. - Irun. - Fontarabie. - Renteria.— Lezo. — Oyarsun (vallée d'). — Passages (les). — Alza.


La Bidassoa. — L'Île des Faisans.



Le petit fleuve que l'on traverse sur un magnifique pont de pierre, en sortant de la station de Hendaye, pour se rendre à Irun par la voie ferrée, sert de limite frontière entre la France et l'Espagne, depuis la borne de Endarlaza jusqu'au cap Figuier.



Sa position internationale lui a donné une célébrité que n'ont jamais obtenue des cours d'eau d'un régime plus considérable ; car il a vu se dérouler sur ses deux rives les grandes choses dont nous parle l'histoire des deux pays voisins, autrefois ennemis, s'épuisant constamment en luttes acharnées, mais aujourd'hui liés d'amitié par d'intimes intérêts.



La Bidassoa prend sa source au sommet des montagnes de Navarre ; elle se nomme Baztan, dans la partie comprise entre Santesteban et le col de Maya. Lors du traité de délimitation de la frontière franco-espagnole, en 1856, ses eaux furent déclarées neutres, depuis le mont Chouhille jusqu'à la mer ; c'est-à-dire que les deux nations renoncèrent volontairement à leur propriété, afin d'éviter le renouvellement des difficultés qui avaient été diverses fois suscitées.



Depuis, les faits de la dernière guerre civile et la question de la contrebande ont fait apporter une modification essentielle au traité de 1856. Finalement, les eaux de la Bidassoa ont été déclarées communes aux deux pays.



Les Espagnols eurent, autrefois, la prétention d'une propriété exclusive sur la Bidassoa. L'historien Mariana, en parlant de l'entrevue qui eut lieu entre Louis XI et Henri IV de Castille, en 1463, sur les bords de ce fleuve, raconte que le monarque espagnol, accompagné d'une suite brillante, franchit la Bidassoa sur un bac, et que, au moyen de son bâton, il marqua sur la berge française la ligne des plus hautes eaux, en disant au roi de France : "Ici encore je suis sur mes terres."



Philippe de Comines, qui accompagnait Louis XI dans son voyage, oublie de parler de cet incident, auquel peut-être le monarque français ne prêta aucune attention, préoccupé qu'il était de choses bien plus sérieuses.



Du reste, l'histoire ne consacre pas cette prétention de l'Espagne sur la propriété du petit fleuve. Ainsi, en 1526, lorsque François Ier, le vaillant prisonnier de Pavie, fut échangé contre ses deux enfants, en exécution du traité de Madrid, l'échange se fit au milieu de la Bidassoa, sur un ponton placé à égale distance des deux rives, chacune d'elles étant occupée par des troupes appartenant aux deux nations.



Trois ans plus tard, en 1529, le traité de Cambrai (Traité des Dames), racheta les fils de François 1er moyennant la somme de deux millions d'écus d'or, payables de la façon suivante : d'abord 1 200 000 écus comptant, sur la Bidassoa, en échange des princes ; puis l'acquit d'une dette de 400 000 écus, contractée par Charles-Quint envers Henri d'Angleterre, et enfin remise d'un reliquaire, contenant un morceau de la vraie croix, engagé par le père de l'empereur contre un prêt de 50 000 écus. Pour les 400 000 écus restant, l'Espagne ne les exigeait qu'après l'expiration d'un certain délai.



Eh bien, malgré tant de précautions et de minuties ridicules, l'échange faillit échouer.



Le 1er juillet (26 mai d'après les auteurs espagnols) 1530, le grand-maitre de France avait fait ranger, à Hendaye, en face de Fontarabie, 32 bêtes de somme, portant les 1 200 000 écus d'or, lorsqu'il apprit que, sans avis aucun, et sur de faux renseignements sans doute, le connétable de Castille avait fait ramener vers Saint-Sébastien les fils du roi de France. Montmorency envoya un de ses écuyers au connétable pour le sommer de faire son devoir, le menaçant de l'accuser publiquement de félonie.



Le traité de Cambrai fut exécuté néanmoins le jour même dans les formes prévues et sans aucun autre incident. Les fils de France furent débarqués à Hendaye, au milieu de l'allégresse générale et conduits à St-Jean-de-Luz, dans la litière de la reine. Dans cette ville, ils furent reçus par toute la population, à la lueur des torches.



François Ier, qui s'était mis en route pour venir au devant d'eux, les rencontra sur la route de Bazas, à un endroit qu'on nomme l'Abbaye, sur le territoire de la commune de Captieux (Gironde). C'est en cet endroit que fut célébré le mariage du roi de France avec la sœur de l'empereur Charles Ier d'Espagne (V d'Allemagne).



On voit, par cette relation historique, que la Bidassoa n'était pas une propriété exclusive de l'Espagne, et que les eaux du petit fleuve étaient considérées comme neutres, dans les grandes circonstances.



En novembre 1615 eut lieu sur la Bidassoa l'échange d'Anne d'Autriche, fiancée de Louis XIII et d'Elisabeth de France, fiancée de Philippe III.



Cet échange fut opéré également sur un ponton, placé dans les eaux du fleuve, à égale distance des deux rives.



A l'occasion du mariage de Louis XIV avec l'infante d'Espagne, Marie-Thérèse, fille de Philippe IV, que précéda d'un an le traité de paix des Pyrénées, la Bidassoa fut encore une fois le terrain neutral sur lequel les représentants de la France et de l'Espagne discutèrent les intérêts et les droits des deux pays.



Non loin du pont de Béhobie, en face des ruines d'un château-fort, qui fut, dit-on, construit en 1203 par ordre du roi de Castille, Alphonse VIII, se trouve au milieu de la Bidassoa une petite île, restée célèbre dans l'histoire et connue sous le nom d'Ile des Faisans ou de la Conférence.



En 1659, on construisit sur cette île une sorte de pavillon muni de galeries couvertes, aboutissant l'une et l'autre à un pont de bateaux reliant chaque bord du fleuve. Dans ce pavillon se réunirent en conférence le cardinal Mazarin, assisté de son secrétaire, M. de Lionne, et le ministre espagnol D. Luis de Haro, assisté du chevalier Colona. Là, durant quatre ou cinq mois, furent presque chaque jour aux prises les deux illustres politiques. Là, se signèrent les préliminaires du traité des Pyrénées, qui mit fin aux guerres désastreuses qui divisaient les deux pays.



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TRAITE ÎLE DES FAISANS 6 JUIN 1660
PAYS BASQUE D'ANTAN



Le traité fut solennellement juré dans l'île des Faisans, le 6 juin 1660, entre les deux monarques, à genoux, et la main sur l'Evangile, en présence des deux cours. On raconte que, pendant la messe, le roi d'Espagne ayant aperçu M. de Turenne, il ne put s'empêcher de s'écrier, de façon à ce que tous l'entendissent : "Voilà un homme qui m'a bien souvent ôté le sommeil !"



Déjà, le 3, avait eu lieu, à Fontarabie, le mariage civil de Louis XIV et de l'Infante. D. Luis de Haro et l'évêque de Fréjus furent les fondés de pouvoir des illustres contractants. Le 7, le roi de France alla, suivi des grands de sa cour, chercher l'Infante dans l'île des Faisans, et se rendit avec elle à Saint-Jean-de-Luz, où le mariage définitif fut célébré le 10, au milieu d'une pompe et d'une magnificence bien dignes du grand roi et de celle qui devenait son épouse.



Conformément au traité du 2 décembre 1856, l'île des Faisans, déclarée propriété commune à l'Espagne et à la France, a été ornée plus tard d'un monument commémoratif, édifié aux frais des deux pays, sur le même modèle que celui qui fut érigé en 1660, et que le temps et les hommes avaient détruit.



Ce monument est orné de l'inscription suivante, en espagnol et en français :

EN MÉMOIRE DES CONFÉRENCES DE MDCLIX, PAR LESQUELLES LOUIS XIV ET PHILIPPE IV,  PAR UNE HEUREUSE ALLIANCE, MIRENT FIN AUX GUERRES QUI DIVISAIENT LES DEUX NATIONS,

CETTE ÎLE FUT RESTAURÉE PAR NAPOLÉON III, EMPEREUR DES FRANÇAIS ET ISABELLE II, REINE DES ESPAGNES,

L'AN MDCCCLVI.



pais vasco antes pausu
MONUMENT ÎLE AUX FAISANS BEHOBIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Le pont de Béhobie, en bois, est aussi la propriété des deux pays ; chacun est obligé d'entretenir en bon état la part qui touche sa frontière.



En amont, sur la rive française, se trouve le petit bourg de Biriatou, pittoresquement posé sur une colline dominant à pic la Bidassoa. En face, du côté de l'Espagne, se trouvent La Puncha et Lastaola, deux points qui ont été fréquemment cités durant la dernière guerre carliste. A quatre kilomètres plus loin, en suivant la rive gauche du cours d'eau, sur une belle route qui conduit en Navarre, l'on trouve le village de Enderlaza. Le pont de fer qui traversait la Bidassoa, sur ce point, fut détruit en avril 1873, par le célèbre curé Manuel Santa-Cruz, lequel fit à la même époque fusiller impitoyablement vingt-sept malheureux carabineros qu'il venait de faire prisonniers au pont même d'Enderlaza, où ils s'étaient fortifiés.



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PONT D'ENDARLAZA VERA DE BIDASOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les montagnes espagnoles qui bordent la Bidassoa sont très riches en minerai. Deux puissantes Sociétés exploitent les mines d'Enderlaza, dont les produits sont conduits au moyen d'un chemin de fer aérien jusqu'auprès de Lastaola, d'où ils sont transportés ensuite jusqu'à Irun, à l'aide des wagonnets d'un tramway.



La peña du Haya ou des Trois-Couronnes se dresse majestueusement au-dessus des contreforts dont la Bidassoa baigne la base. Cette montagne a une altitude d'environ 900 mètres au-dessus du niveau de la mer. Elle est percée en certains endroits par d'immenses galeries dont on attribue l'œuvre aux Romains. Un torrent, produisant le plus bel effet, descend du flanc de la peña et se jette, bondissant de roche en roche, dans une sorte de ravin formé par la montagne de San Marcial et les collines de Santa Elena ; — à certains endroits l'on dirait une lame d'argent en constant mouvement sur le flanc rouillé de la peña.



La montagne de San Marcial a pris son nom de l'ermitage qui la couronne. Le 1er juillet 1522, un sanglant combat fut livré entre Français et Espagnols sur le flanc de cette montagne ; l'avantage resta à ceux-ci, et c'est en honneur de leur victoire qu'ils dédièrent à saint Marcial, dont c'était ce jour-là la fête, la petite chapelle existant encore aujourd'hui.



Le 1er août 1794, un autre combat eut lieu au même endroit, entre les soldats de la République, aux ordres de Moncey et de Làborde, et les troupes espagnoles commandées par le comte de Colomera. Le général Dessein franchit le gué de Béhobie et attaqua de front les batteries qui couvraient le camp de San Marcial, pendant que le général Muller tournait la position du côté de Lastaola. Le camp fut enlevé , et l'armée de Colomera, mise en déroute, ne dut son salut qu'au dévouement des bataillons wallons et des régiments de Reding et d'Ultonia, qui, appuyés par le bataillon provincial de 'l'uy, couvrirent la retraite et se firent écharper aux environs d'Oyarsun.



L'occupation du camp de San Marcial détermina la capitulation de Fontarabie, qu'assiégeait Fregeville, la prise de Passages, qui eut lieu le 3 août, celle de Saint-Sébastien, qui eut lieu le 4, et celle de Tolosa, le 5 du même mois.



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BATAILLE DE SAN SEBASTIAN
AOÛT 1813



Le 31 août 1813, dans le but de dégager le général Rey, enfermé dans Saint-Sébastien, le maréchal Soult ordonna à Villate et à Reille, cantonnés entre Biriatou et Béhobie, d'attaquer la formidable position de San Marcial, occupée par les Anglo-Espagnols, que commandait le général Manuel Freire.



Depuis l'aube jusqu'au soir, les troupes françaises attaquèrent cinq fois, formées en colonne d'assaut ; mais leur bravoure ne put venir à bout des difficultés de l'entreprise.



L'ermitage de San Marcial était converti en une véritable forteresse,, entouré de tranchées et de parapets à l'abri desquels les défenseurs faisaient des ravages sans nombre dans les rangs des assaillants.



Dans cet ermitage, en souvenir de leur succès, les Espagnols placèrent, le 30 juin 1815, sur l'un des côtés de l'autel, l'inscription suivante, incrustée dans une plaque de marbre noir :

Pour perpétuer la mémoire du glorieux triomphe remporté sur les Français le 31 août 1813, par le 4e corps d'armée, aux ordres du général Freire, la ville d'Irun érigea ce monument le 30 juin 1815, sous le règne de Fernando VII. L'histoire rapportera, en honneur de l'Espagne, la gloire de ce fait d'armes.



Au centre de la petite chapelle se trouve un sépulcre, recouvert par une dalle en marbre noir, portant cette inscription presque effacée :

Ce sépulcre renferme les restes des héros morts dans la bataille du 31 août 1813. La ville d'Irun fit ce religieux dépôt en 1815.



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BATAILLE DE SAN MARTIAL 31 AOÛT 1813
PAYS BASQUE D'ANTAN



Pour être complète, l'inscription devrait dire si ce sont les cendres des Espagnols ou des Français qui sont dans le sépulcre, et auxquels s'applique le titre de héros. En effet, quels furent les héros, dans cette sanglante journée ?



Les vainqueurs, qui combattirent à l'abri des parapets, ou les vaincus, qui attaquèrent cinq fois des positions inaccessibles, méprisant la mort et n'obéissant qu'au devoir ?


A suivre...





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