LA REINE VICTORIA AU PAYS BASQUE EN 1889.
Le 7 mars 1889, la reine Victoria d'Angleterre et les 57 personnes de sa suite arrivent en gare de la Négresse, à Biarritz, par train spécial.
REINE VICTORIA D'ANGLETERRE |
Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans
son édition du 8 février 1939, sous la plume de Jacques Liebault :
"Il y a cinquante ans.
Le séjour de la Reine Victoria à Biarritz.
Biarritz s’apprête à fêter joyeusement le cinquantenaire de la venue à Biarritz de la reine Victoria, en mars 1889. A l’intention de nos lecteurs, nous avons ici rassemblé quelques points de repère nécessaires au rappel de cette villégiature royale et des conséquences heureuses qui en découlèrent pour notre Côte Basque.
L’exposition qui se prépare sera, au surplus, le meilleur des développements et des commentaires à ces brèves notes.
Rappelons déjà comment, au milieu de 1935, l’Exposition de Bagatelle, à Paris, s’étendait jusque et surtout sur le séjour d’Edouard VII à l’Hôtel du Palais, en marge de l'Edouard VII, d’André Maurois, ou de son Disraëli.
Pour nos excellents confrères, Jules Aubert, le doyen des journalistes bayonnais et de la petite histoire locale, M. Michel Parrot-Lagarenne, auteur de tant de brillants reportages (le dernier en date est l’admirable reportage relatif aux fiançailles d’Alphonse XIII, dans une villa de la Négresse), ce fut alors - ou vers cette époque - l'occasion d’évoquer le séjour de la reine Victoria à Biarritz.
En mars 1936, s'il nous souvient bien, Mme Renée Dominique fit la plus brillante des conférences sur ce sujet à Biarritz-Association, toujours magistralement présidée par le docteur Larue de Charlus. Là encore, fut apporté une belle moisson de détails inédits.
Notre but est plus humble : celui de donner un résumé d'ensemble de ce séjour à l’usage de nos lecteurs amis.
L’arrivée - Le séjour à Biarritz - Fêtes et excursions.
C’est, sur le conseil de ses médecins que, déjà âgée de 70 ans, la reine Victoria venait chercher calme et repos. Sa fille, la princesse Béatrice de Battenberg, et son gendre le prince de Battenherg l'accompagnaient. Le souvenir des temps heureux du Second Empire, de la guerre de Crimée, de Napoléon III et de l'impératrice Eugénie avaient aussi incité sans peine la reine Victoria, impératrice des Indes, au choix de Biarritz. Disons tout de suite que le séjour de la reine chez nous fut un enchantement pur et simple, pour elle-même comme pour les siens : accueil, paysages, excursions, tout fut incomparable aux yeux de la souveraine.
ALPHONSE XIII ET LA PRINCESSE DE BATTENBERG PAYS BASQUE D'ANTAN |
Les préparatifs furent consciencieux dès l’annonce de la royale visite. Les trains de plaisir amenèrent la foule des grands jours dans notre ville. Quant au train de la reine, le cocher avait pris place à côté du mécanicien, selon les règles du protocole d’un temps qui ignorait l’automobile. Train spécial, bien entendu ! où les Hindous de haute taille, au pittoresque costume, accompagnaient à Biarritz, la souveraine en frappant l'imagination des foules d’alors, où l'ère des grands voyages n'était point encore commencée, où chacun restait sagement chez soi, ne dépassant guère Bordeaux, vers le Nord, et Biarritz l’été ou aux grandes occasions.
LA REINE VICTORIA BIARRITZ MARS 1889 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Tel était le cas en l'occurrence. Tandis que le docteur Augey, maire de Biarritz, vivement ému par la royale arrivée, avait multiplié les préparatifs de toute sorte. Son impatience ne fit que croître jusqu’à l'arrivée solennelle du 7 mars 1889, qui revit dans les journaux du temps.
Le Pavillon La Rochefoucauld.
Le pavillon de La Rochefoucauld — un nom illustre dans l'histoire de Biarritz, dont il faudra dire, quelque jour, les origines était entouré de futaies admirables qui charmèrent la souveraine. En dehors, peut-être d'un nom sur une station du tramway B.L.B. (Bayonne-Lycée-Biarritz), il n’en reste à peu près rien. Propriété du comte de ce nom, a-t-on dit, le domaine passa à son héritier le comte Pignatelli, puis, en 1916. à M. Saint-Jean, négociant à Bordeaux, et peut-être encore à cause du séjour de la reine, à l'honorable sir Alfred Anson. Mais le pavillon a été à peu près entièrement reconstruit.
PAVILLON DE LA ROCHEFOUCAULD BIARRITZ PAYS BASQUE D'ANTAN
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A Biarritz, la reine visita la chapelle de Notre-Dame de Guadelupe, qui avait été celle de l’impératrice Eugénie, au temps de l’expédition du Mexique. On a rappelé de même comment, en "victoria" naturellement (le nom n’a pas d’autre origine) la reine alla jusqu’au bout du Rocher de la Vierge, la passerelle ayant été exceptionnellement dégagée de ses entraves habituelles.
Dans sa splendeur, Biarritz offrait alors comme un cour passagère, brillante et princière, prête à accueillir la souveraine : telle, par exemple, la princesse Frédérica de Hanovre, si mêlée évidemment aux origines de la dynastie anglaise, dont la villa au Bois de Boulogne, conserva, a écrit récemment, notre distinguée confrère Y.B.D., une photo où "Sa Majesté y est représentée avec son fidèle écossais et dans la victoria au gentil poney".
Le temple anglican de Biarritz reçut l’illustre souveraine, d'autant plus que son porche se décorait des armoiries des régiments britanniques et des noms des officiers anglais tombés en braves sur les champs de bataille de nos régions en 1813-1814. Nos "cimetières anglais" reçurent ainsi sa pieuse visite du souvenir, de la fidélité et de la reconnaissance de la souveraine au nom de l’Angleterre. L’un des épisodes les plus éloignés de la grande bataille de la Nive, en décembre 1813, était la maison de Barroilhet : la vieille maison qui y subsiste toujours reçut la visite de la reine, fidèle à ces traditions historiques qui font la force d’un peuple. Ne prétendait-on pas aussi que cette maison avait servi de refuge, quelques années auparavant, à Don Carlos ? La chose est fort plausible : diverses familles accueillirent fort bien Don Carlos —- celui de la deuxième guerre carliste —- M. Laborde, à Biarritz, conseiller général, était légitimiste et le Préfet des Basses-Pyrénées, M. Nadaillac, était de coeur avec le prétendant : de là, le roman bien connu de Pierre Benoît.
A Saint-Etienne de Bayonne, la pittoresque villa François abritait la vieillesse de Bourbaki, ami de Napoléon III, le commandant de l’armée de l'Est aux jours sombres de 1871, mais aussi le chef de la division qui avait secouru les Anglais à Inkermann, sur les champs de bataille de Crimée, la reine s'attarda à contempler le panorama du grand Adour.
Visites.
Elle visita, bien entendu, Bayonne et Saint-Jean-de-Luz. La Société chorale de Bayonne, avec sa bannière aux nombreuses médailles, frappée en l'occurrence d'un petit pavillon anglais, vinrent donner un exemple de leur science musicale à La Rochefoucauld, sous la direction de M. Péria. D'un salon voisin, la reine les écoutait, entourée du prince et de la princesse de Battenberg, de la princesse Frédérica de Hanovre, au marquis de Lorne, de lord Rutland, de lord Churchill, de lord Lytton ambassadeur à Paris. Les Bayonnais chantèrent "Le Fugitif" et les "Martyrs aux Arènes", nous dit M. Jules Aubert. Mais le reine réclama des airs régionaux : alors de sa belle voix, Auguste Dordosgoïty entonna le chant célèbre des tilloliers, accompagné de tous aux refrains. Suivit la ballade de l'"Africaine" et, bien entendu, le chant final du "God Save the Queen" clôtura la fête, tandis qu’un excellent souper attendait nos chanteurs-musiciens.
La curiosité de la souveraine était inlassable. A deux reprises, elle visita le château Boulart. Arrêtant sa voiture devant l’une des librairies de Biarritz, elle fit acheter plusieurs livres régionaux par le général Ponsonbv.
CHÂTEAU BOULART BIARRITZ PAYS BASQUE D'ANTAN |
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