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mercredi 19 février 2025

LA VIE DANS LA COMMUNE DE SAINT-ESTEBEN EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE AUTREFOIS (troisième partie)

 

LA VIE À SAINT-ESTEBEN AUTREFOIS.


Depuis 1936, Don José Miguel de Barandiaran, prêtre, chercheur et scientifique, originaire d'Ataun, en Guipuscoa, fait des enquêtes d'ethnologie et d'archéologie en Pays Basque français.



pays basque basse-navarre maison barandiaran
BLASON DE ST-ESTEBEN BASSE-NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta au sujet de ses recherches sur Saint-Esteben, en Basse-Navarre, le Bulletin 

du Musée Basque N°20, en 1941, sous la plume de José Miguel de Barandiaran :



"Eusko - Folklore.

Documents et questionnaires.

Année XXI Sare, Janvier-Juin 1941 N° CLI-CLVI

Traits de la vie populaire de Dohozti.



IV. — Alimentation.



Par le mot janari on désigne les aliments.



Quatre repas se prennent généralement durant la journée, à savoir : askari, bazkari, atsaldeko-askari et auhari.



Askari est le repas qui se prend vers les 7 heures du matin. Il consiste en œufs et en lard (arrautza eta xingarra), auxquels on substitue parfois des galettes de maïs et du lait.



Bazkari se prend à midi. Il comprend généralement salda, c'est-à-dire du bouillon avec des tranches de pain et saltsa qui consiste eh pommes de terre — ou tomate — avec du lard.



Atsaldeko-askari (= repas de l'après-midi) a lieu approximativement à cinq heures du soir. On y sert du pain et du fromage ( = ogi eta gasna). En hiver, on supprime fréquemment cette collation.



Auhari est le dîner, lequel a lieu à 7 heures, ou 8 heures du soir en hiver, plus tard en été. Il consiste en salda (soupe de légumes et tranches de pain) et esnia artoakin (lait et pain de maïs).



Dans ces derniers temps, la coutume s'est introduite de déjeuner le matin avec du café avant d'entreprendre un travail quelconque.



La pièce de la maison où se font et se prennent les repas est la cuisine. Seul le goûter se sert dans les champs, c'est-à-dire sur le lieu où l'on travaille, pendant l'époque estivale.



Des quatre repas, le plus important est celui de midi, celui que l'on nomme bazkari. Durant l'été, qui est l'époque du grand travail, les rations sont améliorées et on boit du vin.



En certaines occasions, comme pour la fête patronale du village ou autres festivités importantes, comme aussi  pour fêter quelque heureux événement familial, on mange de la viande au repas de midi. Tous les huit jours, passe par le village un boucher de Hasparren qui vend de la viande de bœuf. Au cours de tels repas, l'ordre des plats qui se servent sur la table est le suivant : salda, adagia (viande bouillie), saltsa et errakia (viande rôtie de bœuf, de poulet, etc.).



Au repas de midi, on boit généralement du cidre (en basque, sagar-ano), remplacé parfois par du vin (en basque, ano), à l'époque des plus grands travaux, c'est-à-dire durant l'été, comme nous l'avons déjà dit précédemment.



Tous les membres de la famille s'assoient à la même table et, en général, mangent ensemble, se plaçant indistinctement à la place qui lui convient. Seul le chef de famille occupe, du moins dans mainte maison, une extrémité de la table qui est considérée comme étant la place d'honneur.



Aujourd'hui, chaque commensal mange dans son assiette, mangeant sa salda avec une cuiller de métal, la saltsa, la viande et le lard avec une fourchette et le fromage avec sa main. Il y a quarante ans, la coutume était que tous les membres de la famille mangeassent dans un plat commun la saltsa et xingarr, en les prenant avec les doigts de la main droite au moyen de morceaux de pain de blé ou de maïs.



La cuiller et la fourchette sont en métal et se nomment respectivement : kollera et furtxeta.



Avant et après chaque repas, les commensaux ont l'habitude de se signer.



Le jeûne est observé dans les jours prescrits par l'Eglise. Ces jours-là, le matin, on prend seulement du café ; à midi, le repas est plus abondant qu'à l'ordinaire ; le soir, le dîner est moins copieux que d'habitude.



Presque tous les habitants fabriquent du pain de ménage dans leur propre four et peu nombreux sont ceux qui achètent du pain chez le boulanger.



Le pain de ménage est de deux sortes : celui que l'on nomme ogi est fait de farine de blé, celui que l'on nomme arto est fait de farine de maïs.



Une petite quantité de farine délayée dans l'eau tiède fermente suffisamment durant sept ou huit heures pour qu'elle puisse être utilisée comme levure. Elle reçoit le nom de altxagarri.



Le jour où la etxekoandere ( = maîtresse de la maison) se dispose à fabriquer du pain, elle met dans un grand pétrin nommé ohaska, un bon tas de farine auquel elle ajoute un peu de levure et le pétrit à la main en y ajoutant de l'eau chaude. Elle enveloppe ensuite dans des linges blancs la pâte ainsi obtenue, lui conservant la chaleur jusqu'à ce qu'elle ait fermenté. Elle la divise ensuite en morceaux de quatre à cinq kilos auxquels elle donne la forme d'un grain de blé si la pâte est faite avec cette céréale ou la forme d'un disque aplati sur un des côtés, si la pâte est de farine de maïs. Elle les introduit ensuite dans le four chauffé pour la cuisson.



Dans toutes ces opérations, il est rare que les hommes interviennent.



C'est aussi la femme qui, dans toutes les maisons, fait des tourtes de maïs. Pour cela, elle pétrit une petite portion de farine de maïs dans de l'eau chaude à laquelle elle ajoute un peu de sel. Elle divise ensuite la pâte en morceaux de la grosseur du poing. Elle aplatit chacun d'eux avec ses mains pour leur donner la forme d'un disque très mince. Elle les étend sur une plaque de fer disposée près du foyer pour les cuire. Elle complète immédiatement l'opération en exposant ces tourtes à la chaleur du foyer pendant quelques instants. Les tourtes ainsi faites doivent être mangées encore chaudes.



Beaucoup d'habitants fabriquent le fromage (en basque gasna) en quantité suffisante pour la consommation familiale. Ils le font aussi bien avec du lait de vache qu'avec du lait de brebis. Ils utilisent généralement pour cela la présure d'agneau (en basque gatzagi). On emploie aussi aujourd'hui de la présure liquide qui s'achète dans les pharmacies. Pour cette opération, on fait usage d'un récipient appelé garlanda.



Quand le lait est bien caillé, on le bat dans le même récipient et sans autre instrument qu'à la main, on sépare le petit lait tandis qu'on recueille la pâte caillée dans le fond et sur les bords du récipient.



On donne au fromage une forme demi-ronde.



Autrefois, le petit lait (en basque gaxur) était consommé en famille ; aujourd'hui, on le donne aux cochons. L'action de boire le petit lait s'exprime en basque par les mots : gaxura yan.



Avec le lait de brebis on fait aussi du caillé (en basque, gaztambera) en utilisant pour cela la même sorte de présure et le même vase dont on se sert pour cailler le lait destiné à faire des fromages.



La crème de lait se nomme esne gaina. Quelques femmes en font du beurre en la remuant et en la pressant avec les mains ou au moyen d'une louche.



Le lait aigre se dénomme esne-mina.



On n'utilise le lait d'ânesse que dans des cas très rares, en médecine, par exemple.



L'hiver est l'époque où l'on tue les cochons pour la consommation familiale. Chaque habitant en tue un ou deux par an.



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MORT DU COCHON
PAYS BASQUE D'ANTAN



Tuer le cochon et le dépecer constitue le travail particulier des hommes. Les opérations qui s'en suivent sont effectuées uniquement par les femmes.



Le sang est recueilli dans un chaudron. Avec le sang, auquel on ajoute de la chair de la tête de l'animal et de l'oignon, le tout assaisonné de sel et de poivre, on fait les boudins (en basque odolgi) dont l'enveloppe est constituée par les intestins du porc (intestin = hertzi). On fait cuire ensuite les boudins dans de l'eau.



On fait aussi de la saucisse de ménage (en basque : lukainka). Elle se fait avec les parties maigres du cochon que l'on taille bien menu, c'est-à-dire avec ce qu'en basque on appelle ginharri-gorri, auquel on ajoute de l'ail (baatxuri), du piment ou poivre rouge (biperr) et du sel (gatz). Des intestins de bœuf servent d'enveloppe. Les saucisses de ménage se conservent dans la graisse (en basque, uri).



Les boudins, au contraire, ne se conservent pas, mais sont consommés vite après leur fabrication.



Quand un paysan tue son porc, il offre un ou deux boudins, auxquels il ajoute un peu de maigre et de foie, au yaun Erretora (= monsieur le Curé) et aux auzo (voisins).



Dans quelques maisons, on tue aussi, en hiver, quelques brebis, tant pour la consommation familiale qu'à l'occasion d'un événement où l'on compte inviter à sa table des gens du dehors.



Avec les tripes et les poumons de la brebis, taillés bien menu et auxquels on ajoute de l'oignon et du poivre, on fait une saucisse dénommée plantxeta. L'estomac de l'animal (en basques, pantzoil) et les intestins servent d'enveloppe. La plantxeta doit être consommée de suite, car elle ne se conserve pas longtemps. 



Amarrain ( = truite), aingira (= anguille) et txipa (= vairon) sont les poissons qui se pèchent dans la rivière Arberoue et ses affluents à Dohozti. Mais cette pêche est de peu de rendement et quelques habitants seulement s'y consacrent plutôt pour leur propre consommation que pour en obtenir un gain positif.



Les escargots ne se mangent pas. C'est un plat qui répugne aux goûts culinaires des habitants de Dohozti. Mon informateur, qui demeura quelque temps en Gascogne, non loin de Bayonne, rapporte que, dans ce pays, le fait de voir manger des escargots était pour lui une chose nouvelle.



Comme légumes et comme condiments, il se mange du porria (= poireau), karrota (= carotte), aza (= chou), koflura (= chou-fleur), tipula (= oignon), baatxuri (= ail), tomate, biperr (= piment), lursagarr (= pomme de terre), ilharr (= haricot), ilharraxihi (= petit pois), baba ( = fève), perrexill (= persil), xarbota ( = thym)."



A suivre...




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