PREMIER ANNIVERSAIRE DU BOMBARDEMENT DE GUERNICA EN 1938.
Le bombardement de Guernica est une attaque aérienne réalisée le lundi 26 avril 1937 par 44 avions de la Légion Condor allemande nazie et 13 avions de l'Aviation Légionnaire italienne fasciste.
Le bilan des victimes a été (et l'est encore) longtemps controversé, avec un bilan officiel de 1654
morts et de plus de 800 blessés, mais aussi des chiffres plus récents entre 126 et 300 victimes.
Voici ce que rapporta le journal l'Aube, dans ses éditions du 26 et 27 avril 1938, sous la plume
de Jean Richard :
- le 26 avril 1938 :
"Anniversaire de la mort d'une cité.
26 avril 1937! une date rouge parmi d’autres dates rouges à l’éphéméride bientôt double de la guerre espagnole.
Guernica, cité de paix, cité étrangère aux horreurs d’alentour, où l’Euzkadi gardait avec respect les reliques de son passé. Guernica où vivaient presque uniquement des femmes et des enfants et puis, autour du curé, d'autres hommes, des blessés de la guerre voisine. Guernica, cité sainte, cité-refuge des Basques, était détruite en quelques heures par une aviation mercenaire.
Essai de guerre totale dont furent victimes des centaines d'innocents, le crime était de ceux devant lesquels hors les partis, hors les religions, hors les races, l’unanimité eut dû se faire dans l’indignation.
Il n’en fut rien. D'aucuns nièrent l’évidence encore fumante des ruines et les témoignages successifs, également précis, également concordants que les rescapés du massacre apportèrent au monde. D’autres trouvèrent des raisons au geste assassin.
Et nous avons dit, comme aujourd’hui, nous le rejetons :
La mort de Guernica nous a tellement émus et indignés parce que ce crime n’admettait aucune circonstance atténuante. Il n’était pas besoin, en vérité, d’être de droite ou bien de gauche pour le condamner. Il suffisait d’être des hommes pour s'incliner "humainement" sur la tombe immense d’une ville et en méditer l'épitaphe qui pourrait marquer son emplacement :
"Ci-gît Guernica, cité de paix, exécutée sans raison le 26 avril 1937 !"
Un appel du président d’Euzkadi
M. de Aguirre, président d’Euzkadi, a lancé, à l’occasion de l’anniversaire de la destruction de Guernica, l’appel suivant :
"En ce premier anniversaire de la barbare destruction de Guernica par les avions allemands au service de Franco, je renouvelle la protestation la plus énergique au nom du peuple basque, victime de la violence et de la rapine.
Guernica symbolise éternellement la paix et le droit.
Jamais ceux qui l’ont détruit et qui ont osé plus tard dissimuler leur horrible action par la calomnie et la fausseté ne pourront invoquer ces principes. La conscience honnête de l'humanité a déjà dicté son jugement irrévocable.
Guernica est, en outre, le sanctuaire de la liberté basque, le berceau de la démocratie la plus ancienne et la plus féconde qu’ont connu les siècles. A son ombre a prospéré pacifiquement le peuple basque. Sa destruction signifie un avertissement sérieux pour tous les peuples qui rendent encore un culte à la liberté et a la personnalité humaine brutalement ignorée par les systèmes qui tiennent la force pour unique raison.
Le territoire d’Euzkadi matériellement occupé, aussi bien là-bas que dans l'exil, l'âme basque élève unanime, plus dynamique que jamais, un cri de revendication et de protestation. Le Gouvernement basque le fait en son nom, maintenu par l’adhésion enthousiaste de son peuple, dont l’esprit ne se rendra jamais par la force.
Les Basques ont lutté et luttent pour la défense de leur propre existence et des principes de valeur universelle qui ont rendu possible la grandeur spirituelle des peuples.
Aujourd’hui, 26 avril, anniversaire de la destruction de Guernica, les Basques s’adressent par mon intermédiaire à toutes les consciences saines de l’humanité, pour les inviter à s'associer spirituellement à notre protestation et à garder un moment de silence ou à élever une prière en mémoire de tant de victimes innocentes sacrifiées par l’ambition et la violence. C'est là un acte qui, dans son symbolisme, signifiera que sont encore nombreux dans le monde ceux qui veulent voir cheminer les peuples par les routes de paix, de liberté et de progrès.
Président Aguirre"
- le 27 avril 1938 :
"De Mauriac à Claudel.
En cet anniversaire du massacre de Guernica, M. Victor Montserrat publie une nouvelle édition de son livre si exact et si poignant, Le Drame d’un peuple incompris: la guerre au pays basque (Chez H.-G. Payre) augmenté d'une préface de M. François Mauriac. Nous avons déjà parlé de l'ouvrage lui-même lors de son apparition. Il est aujourd'hui mis au point de manière aussi scrupuleusement attentive à servir la justice et la vérité. Qu'il nous soit permis de souligner surtout cette préface qui est un acte.
GUERNICA - GERNIKA 1937 PAYS BASQUE D'ANTAN |
"Un martyr chasse l'autre", écrit Mauriac. L'illustre écrivain ne veut pas, cependant, que, même en une époque aussi cruelle que la nôtre on oublie ce martyre de tout un peuple : "....Entre tous les peuples assassinés, poursuit-il, le Basque seul partage avec son Maître le privilège d'être insulté sur la croix. A ceux de ses adversaires qui le condamnent de bonne foi, nous demandons de lire et de méditer cette nouvelle édition du livre de Victor Monserrat : Le Drame d’un peuple incompris". Avec quelle force, avec quelle loyauté, Mauriac ne signale-t-il pas que l'on ne saurait sérieusement reprocher au peuple basque de ne s'être pas révolté. Depuis quand, en effet, la rébellion contre le pouvoir établi serait-elle devenue un devoir dans la morale catholique? Toute notre enfance, nous avons entendu louer saint Sébastien, certes, d'avoir préféré obéir à Dieu qu'aux hommes. Nous avons entendu louer saint Maurice et ses compagnons martyrs de s’être laissé tuer jusqu'au dernier plutôt que de sacrifier aux idoles. Mais nous n’avons jamais entendu dire qu'ils eussent dû susciter une insurrection militaire.
Au surplus, il n'a jamais été demandé aux Basques par le gouvernement légal d'abdiquer leur foi. Très exactement, c'est au contraire le gouvernement franquiste qui s'est déclaré contre leur langue, contre leurs mœurs et leurs usages millénaires, contre tout ce qui faisait le caractère propre d'un vieux peuple fier et libre. "Tout de suite, écrit encore Mauriac, cette Chrétienté basque a été traitée en ennemie par les rebelles. On ne lui a pas laissé de choix; elle a été précipitée dans la guerre ; et, dès les premières semaines, elle a eu ses martyrs — ses prêtres martyrs". C'est alors que Mauriac se retourne vers Claudel. Il faudrait citer tout le pathétique et puissant appel qu'il lui adresse pour qu'il n'oublie point dans le martyrologe espagnol tous ces représentants du Christ, exécutés dans quelles conditions effroyables ! Car derrière les noms qu’il énumère, il y a des atrocités sans nom. Je n’en veux pour preuve que ce Don José de Ariztimuno qui, comme le Christ, ressemblait plus à un ver qu’à un homme lorsque les bourreaux l'achevèrent.
GUERNICA - GERNIKA 1937 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire