L'ABBÉ DIHARASSARRY EN 1890.
En 1889, l'évêque "concordataire "Jauffrey est nommé à Bayonne, pour rallier, de gré ou de force, le clergé Basque à la République.
BIARRITZ 1890
PAYS BASQUE D'ANTAN
PAYS BASQUE D'ANTAN
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal L'Univers, dans son édition du 15 janvier 1890 :
"La persécution.
...A moi personnellement, et c'est votre seconde accusation, vous reprochez la publication d'un catéchisme électoral basque et français.
"Je constate, dites-vous que cette publication (la lettre à l'Avenir) permet d'ajouter foi aux bruits d'après lesquels ce prêtre (votre serviteur) serait l'auteur du catéchisme électoral basque et français."
Vous constatez cela, monsieur le ministre ? Puisque vous le dites, ce doit être vrai. Et cependant la chose m'étonne fort. J'ai beau, en effet, relire ma lettre à l'Avenir et le catéchisme électoral, je ne vois pas du tout, mais du tout, comment ceci procède de cela, comment de ce que j'ai écrit cette lettre, on peut conclure que j'ai écrit aussi ce catéchisme. Mais soit ; vous tenez, monsieur le ministre, à ce que le catéchisme électoral soit mon œuvre. Accordé, et j'avoue, et j'accepte pleinement la paternité de ce travail. Me, me adsum qui feci. Et puis, monsieur le ministre ?
Que trouvez-vous à reprendre dans ce catéchisme, même au regard des théories républicaines ? Ce catéchisme (puisque vous l'avez lu, vous devez le savoir) est un simple exposé, calme et mesuré, des principes de la théologie catholique en matière électorale. Rien de plus, rien de moins. Cet enseignement, comme la vérité, s'adapte à tous les temps, à tous les lieux, à tous les régimes. Vrai aujourd'hui, il était vrai hier et le sera demain, aussi bien dans la république unitaire de notre pays que dans la grande Fédération américaine, sous la monarchie constitutionnelle de Belgique comme sous l'autocratie des czars. Pourquoi donc m'imputer à crime la publication du catéchisme ?
Voyons, là franchement, monsieur le ministre, l'avez-vous lu ? Non, n'est-ce pas ? On vous aura seulement dit, on vous aura répété que ce catéchisme attaque les institutions républicaines. Peut-être même vous aura-t-on cruellement mystifié, comme ce pauvre M. Goirand, député de je ne sais plus où, lequel, dans son rapport sur l'élection de Mauléon, cite comme extraites de mon catéchisme cinquante grandes lignes qui n'y ont jamais figuré. Ces cinquante lignes, oui, sont nettement antirépublicaines ; mais mon catéchisme ? Mon catéchisme est catholique, voilà tout. Que si cependant vous persistiez à le déclarer antirépublicain, alors, monsieur le ministre, vous avoueriez donc que la république est l'ennemie du catholicisme. Mais cela, c'est vous qui le diriez, monsieur le ministre, point moi ni mon catéchisme ; et, comme je l'écrivais à l'Avenir à propos des républicains du cru qui poussaient des cris de paons blessés contre ce catéchisme, "il ferait vraiment beau voir les voleurs s'insurger contre un prédicateur — écrivain — catholique, qui enseignerait tout bonnement, avec le septième commandement de Dieu, qu'il n'est permis ni de voler ni de coopérer à un vol !"
Ainsi, monsieur le ministre, votre second grief, basé sur la publication du catéchisme électoral, tombe de lui-même ; il suffit, pour le réduire à néant, de jeter les yeux sur cet opuscule. L'on se convaincra, en effet, qu'il ne contient pas une seule assertion dont ne pût s'accommoder une république respectueuse de la liberté des consciences chrétiennes. Le catéchisme se tient dans la région des principes, il n'aborde pas la discussion des faits.
Venons au troisième et dernier grief.
"M. Diharassarry, écrivez-vous, a observé les règles tracées dans ledit catéchisme avec une ardeur et une passion" intolérables.
A ce coup, monsieur le ministre, vous m'embarrassez ; je cherche une expression parlementaire pour qualifier cette accusation comme elle le mérite : mais je n'en trouve pas, et force m'est de vous déclarer tout net que c'est une pure bêtise. Et l'on voit une fois de plus que vous ne connaissez pas le premier mot de ce dont vous parlez et jugez. Eh quoi ! monsieur le ministre, vous articulez que j'ai "observé avec ardeur et passion les règles tracées dans le catéchisme électoral !" Vous vous imaginez donc, sur la foi de vos pourvoyeurs d'accusations, que ce catéchisme traite des droits et des devoirs du clergé en matière d'élections ? Mais non, monsieur le ministre, ce catéchisme s'adresse à l'électeur catholique, quel qu'il soit, et tout particulièrement à l'électeur ignorant, embarrassé de connaître au point de vue religieux la valeur des divers candidats. Ce catéchisme, en deux mots, dit et prouve à l'électeur catholique que jamais il ne lui est permis de voter pour un candidat qu'il sait être l'ennemi de l'Eglise.
Pour être convaincu de cette obligation, monsieur le ministre, je n'avais personnellement pas besoin du catéchisme, puisque c'est moi qui l'ai fait. Et quelle ardeur, je vous prie, et quelle passion pouvais-je apporter à observer les règles tracées dans ce catéchisme, à mettre en pratique l'enseignement que j'y développe ? Il ne s'agit là, encore un coup, ni des droits du clergé, ni des devoirs spéciaux des citoyens à qui leur position sociale donne une influence dont ils doivent user pour le bien de la religion et de la patrie ; il s'agit tout uniment de voter pour un candidat catholique, ou tout au moins respectueux de la liberté de l'Eglise : et c'est ce que j'ai fait, de grand cœur, mais sans passion, il n'y avait pas lieu. Me reprochez-vous aussi ce vote, monsieur le ministre ? Ce ne serait pas sérieux, et j'ajoute que, n'eût été l'ardeur de la passion antireligieuse qui vous guide ou plutôt vous égare, vous vous seriez épargné le ridicule de cette troisième accusation.
BIARRITZ 1890 PAYS BASQUE D'ANTAN |
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