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vendredi 28 février 2020

MAURICE RAVEL UN MUSICIEN BASQUE (troisième partie)


MAURICE RAVEL.


Joseph Maurice Ravel est un compositeur Basque né à Ciboure (Basses-Pyrénées) le 7 mars 1875 et mort à Paris le 28 décembre 1937.


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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 



Voici ce que rapporta le journal Mercure de France, dans son édition du 1er février 1938 :


"Maurice Ravel.




... D'aucuns essayèrent de brouiller les cartes. Rien n’est cependant plus nettement original et personnel que le génie des deux musiciens : Ravel est venu quelque quinze ans après Debussy. Il a su naturellement utiliser l’enrichissement dont son devancier avait doté l’art sonore. Mais s’il existe entre eux cette parenté qui est naturelle et nécessaire chez deux artistes contemporains dont les ouvrages s’inspirent obligatoirement des idées, des manières de sentir particulières à une époque, leurs moyens d’expression diffèrent totalement et on ne trouverait point d’exemple chez Ravel de cette gamme par tons entiers dont l’emploi est si fréquent chez Debussy. Calvocoressi, Roland Manuel, Alfredo Casella, Alfred Cortot ont excellemment démontré qu’entre le génie de Ravel et le génie de Debussy, il y a l’abîme qui sépare deux artistes aussi originaux l’un que l’autre. Rien que leur musique de piano suffirait à les caractériser : Debussy — la remarque est de M. Alfred Cortot — se complaît à revêtir certains enchaînements très simples de vaporeuses arabesques qui n’ont d’autre origine que le plaisir physique des sonorités cristallines, les délices du timbre en soi. Ravel avive les rythmes, accuse reliefs et saillies ; la notation pianistique semble n’être souvent chez lui qu’un premier état de sa conception. La liste est longue de ses œuvres de clavier qu’il adapte ensuite à l’orchestre. Et même on le voit "revêtir les géniales maladresses de la version pianistique des Tableaux d’une Exposition, de Moussorgsky, d’une instrumentation qui suscite ce surprenant phénomène : les maladresses disparaissent, le génie s’accuse".




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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 


Daphnis et Chloé demeurera un sujet d’émerveillement pour les auditeurs futurs, comme pour ceux du premier soir. Depuis le 8 juin 1912, date de la création au Châtelet par la troupe de Diaghilew, les années passent et n’ont d’autre effet que de nous apporter des raisons nouvelles d’aimer cette "symphonie chorégraphique" (c’est le titre que Ravel lui donna), de la mieux comprendre et, à mesure qu’elle devient classique, d’en mieux pénétrer le charme en oubliant ce qui en fit la nouveauté. Certes, il est mieux de la voir au théâtre, animée par la chorégraphie pour laquelle elle est faite, et d’autant plus que sous la forme des suites d’orchestre qui en ont été tirées, les chœurs en sont ordinairement bannis. Mais, même au concert, cette musique demeure vivante. Elle l’est sans viser le moins du monde à se faire descriptive. Elle ne recherche jamais ce qu’on appelle le pittoresque ; mais cet orchestre étonnamment divisé, chatoyant, auquel les voix se mêlent parfois, ces rythmes si variés, cette luxuriante floraison, ces épanouissements d’accords, cette tendre douceur d’un nocturne suivi d’un "lever du jour" qui est une des plus belles pages que jamais symphoniste ait écrites, tout fait de Daphnis et Chloé un pur chef-d’œuvre. Il n’y en a point dont la lecture comme l’audition réservent tant de joie à qui les veut pénétrer ; l’art de Ravel, qu’on en étudie les procédés, les moyens ou qu’on en éprouve les effets, est de toute manière pur enchantement. Il a des trouvailles imprévues, mais qui, toutes voulues, préméditées, assurent quelque infaillible résultat, au point de nous faire croire parfois à la présence dans l’orchestre d’instruments inconnus. Et Roland-Manuel, commentant ce "lever du jour", a pu dire que Ravel avait réussi à y évoquer l’inaudible et que nulle part son art ne s’était immiscé davantage dans la familiarité du mystère. 



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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 


La composition de Daphnis et Chloé occupa Ravel de 1907 à 1911, mais dans l’intervalle, d’autres ouvrages d’importance virent le jour : sept Chansons (Française, Italienne, Espagnole, Hébraïque, Ecossaise, Flamande et Russe) en 1910, un Menuet, pour piano, sur le nom d’Haydn (1909), et les Valses Nobles et Sentimentales (qui, après avoir été éditées sous ce titre pour le piano, en 1911, devinrent, orchestrées pour un ballet de Mlle Trouhanova, dont la première eut lieu le 12 avril 1912, Adélaïde ou le Langage des Fleurs). Ces Valses Nobles et Sentimentales avaient été présentées au public dans les conditions les plus bizarres : le Comité de la jeune S. M. I. voulut donner un concert composé d’ouvrages inédits et anonymes ; l’auditoire désignerait s’il le pouvait les auteurs. Les Œdipes écoutèrent Louis Aubert qui interprétait les Valses ; et si quelques bulletins les attribuèrent bien à leur légitime auteur, beaucoup en firent hommage à quantité d’autres musiciens. Ravel a pris pour épigraphe cette phrase des Rencontres de M. de Bréot : "Le plaisir délicieux et toujours nouveau d’une occupation inutile." Plaisir délicieux, certes, mais dont le raffinement n’alla point sans épouvanter quelques timides ; ne découvrait-on point dans la septième valse un passage "polytonal" où sur une main gauche qui frappe successivement ut bécarre et fa naturel, la droite fait entendre do dièze, sol dièze, do dièze, et aggrave ce jeu aux mesures suivantes ? 



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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 

En 1913, Ravel met en musique Trois Poèmes de Mallarmé (Soupir, Placet futile, Surgi de la croupe et du bond) et les accompagne du piano, de deux flûtes, deux clarinettes, et du quatuor à cordes, dosant les sonorités de ces instruments avec un art exquis. La même année, il orchestre le Prélude du Fils des Etoiles, de Satie, et des fragments de La Khovantchina, de Moussorgski (ces deux ouvrages restés inédits, ainsi qu’une orchestration du Carnaval de Schumann, faite l’année suivante, Kaddish, psalmodie hébraïque, d’abord publié pour chant et piano, puis orchestré ainsi que Meyerke et L’Enigme éternelle — trois Mélodies hébraïques, de caractère très divers, allant de la prière fervente à l’ironie, — sont de 1913 et du début de 1914. De même époque encore Prélude et A la Manière de Borodine et de Chabrier (pour piano). La guerre le surprend alors qu’il compose le Trio en la mineur, pour piano, violon et violoncelle qu’il ne pourra terminer qu’en 1915. Il est alors à Saint-Jean-de-Luz, rêvant d’enclore en cet ouvrage toute la poésie du pays basque. Il l’abandonne pour s’engager et parvient à se faire envoyer au front. En 1917, malade, affaibli, il est réformé, et, convalescent à Lyons-la-Forêt, il écrit une suite de six pièces pour le piano, Le Tombeau de Couperin, monument de pur style français, dédié à la mémoire du grand claveciniste. Le Trio est un digne pendant du Quatuor ; dans la passacaille, le compositeur s’est diverti à confier aux notes les plus graves du piano le thème de cette danse ; mais ce n’est là ni la seule originalité, ni le seul mérite de cette pièce. Quant au Tombeau de Couperin, des six morceaux originels (Prélude, Fugue, Forlane, Rigaudon, Menuet, Toccata), Ravel orchestra les premier, troisième, quatrième et cinquième pour les Ballets Suédois de Rolf de Maré qui en donnèrent la première représentation, sous la direction de M. D.-E. Inghelbrecht, le 8 novembre 1922. 

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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 

Depuis longtemps une collaboration devait unir les deux noms de Colette et de Ravel sur l’affiche d’un ballet. La poste aux armées, conte Roland-Manuel, perdit le manuscrit d’un scénario d’un Ballet pour ma fille que la trop confiante Mme Colette lui avait remis ; Ravel, rendu à la vie civile, protesta qu’il n’avait pas de fille, et le titre fut changé. L’Enfant et les Sortilèges naquit ainsi. Mais point tout de suite. Diaghilew avait demandé à Ravel un poème chorégraphique ; Ravel écrivit La Valse, et Diaghilew, quand il l’eut, ne la monta point. L’auteur dut attendre que Mme Ida Rubinstein la mît à la scène dix ans plus tard ; mais, dans l’intervalle, les grands concerts avaient rendu populaire cette extraordinaire Valse, dont on ne sait si elle est une page ironique ou sincère, où l’auteur parfois se moque de lui-même, mais qui, assurément, est un chef-d’œuvre. 

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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 

La Sonate pour violon et violoncelle, en quatre parties, sans accompagnement (1920-1922), est une autre gageure : M. Emile Vuillermoz définit exactement le double plaisir qu’elle procure, en remarquant qu’il y a deux façons très différentes d’écouter la Sonate ou le duo de Ravel. En effet vous pouvez tout aussi bien vous délecter du "fini", du poli de ce travail d’ajustage, que vous enchanter des sonorités de ces deux instruments que, par un raffinement singulier, le compositeur emploie à l’état pur. Et dans l'andante, ce dilettante vous montrera qu’il sait aussi le secret de vous élever très haut et même vous attendrir sans emprunter les recettes sentimentales. Plus tard, en 1924, avec sa Sonate pour violon et piano en trois parties, Ravel redonnera une nouvelle démonstration de son extraordinaire maîtrise, en infligeant un nouveau démenti à ceux qui s’obstinent à confondre sa discrétion et sa pudeur avec une prétendue sécheresse. 





L'Enfant et les Sortilèges fut donné à Monte-Carlo au printemps de 1925 avant que d’être représenté à l’Opéra-Comique, le 1er février 1926. Commencée entre deux mouvements de la Sonate pour violon et violoncelle, abandonnée capricieusement, puis reprise, la partition, exigée par contrat, fut achevée en 1924. Le livret de Colette propose au musicien des thèmes d’une savante naïveté : un enfant rage sur ses devoirs d’écolier, déchire ses livres et ses cahiers, martyrise les bêtes familières, commet cent méfaits, puis, sa colère passée, croit pouvoir demeurer en paix. Mais les choses, qui ont une âme, et les bêtes, qui sont pleines de sagesse, vont faire comprendre à l’enfant que la cruauté des hommes est stupide. Elles entreprennent de se venger, quand, dans la bagarre, un écureuil est blessé. L’enfant a pitié et panse la plaie du petit animal. Son geste le sauve. 



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COMPOSITEUR MAURICE RAVEL 

Animer — au sens propre du mot : donner l’âme et la vie — une théière de Wedgwood, une tasse de porcelaine chinoise, des problèmes d’arithmétique, écrire un duo de matous, faire parler le feu, évoquer la cendre, inventer des modes d’expression convenant aux génies familiers, aux dieux lares, aux animaux, aux personnages d’une tenture, — bergers et pastourelles, — c’est la succession de miracles réalisés sans apparent effort dans L'Enfant et les Sortilèges. En dépit des complications d’une orchestration qui exige un piano-luthéal, une flûte à cou lisse et... une râpe à fromage, l’originalité de cette musique est tout intérieure. Ravel est devant les choses comme l’enfant qu’il met en scène ; la science de sa musique n’est qu’un moyen, et toujours si judicieusement utilisé qu’il semble, à l’audition, le seul qui ait été susceptible d’exprimer ce qu’il fallait dire. Son art, en même temps, s’est allégé, dépouillé, mais sans s’assécher. Au contraire, jamais il n’a été plus tendre qu’en ces pages où l’âme d’un enfant capricieux se laisse dompter par une larme. 





Le public parisien accueillit avec une incompréhensive ironie quelques-unes des pages les plus significatives de la partition. C’est la règle, semble-t-il. Mais ce qui est plus grave, c’est que ce chef-d’œuvre dort sur les rayons des archives où sont rangés les "matériels" lyriques, et que, sans le bon vouloir des maîtres de la Radiophonie, les voix de L'Enfant et les Sortilèges seraient demeurées muettes. Nous sommes ingrats, et notre ingratitude est compliquée d’ignorance."




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