LA BÉATIFICATION DE MICHEL GARICOÏTS EN 1923.
Michel Garicoïts, natif d'Ibarre, en Basse-Navarre en 1797, a été le fondateur des Prêtres du Sacré-Coeur de Jésus.
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SAINT MICHEL GARICOÏTS
PAYS BASQUE D'ANTAN
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Je vous ai déjà parlé de cette béatification dans deux articles précédents, le 26/03/2019 et le
27/04/2019.
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal La Croix, dans son édition du 19 avril 1923 :
"...Les vertus du Vénérable.
Sa vie et ses œuvres nous les ont déjà révélées. Il est bon cependant d’en mettre quelques-unes en relief.
Ce fut un caractère. Sa volonté s’affirma dès son jeune âge ; son humeur était parfois batailleuse. Des efforts généreux, la grâce implorée, atténuèrent le tempérament, l’assoupliront sans diminuer son énergie. Du Basque, il gardait la persévérance tenace dès qu’il se croyait dans la voie où Dieu le voulait. Devant l’épreuve, devant les difficultés, il ne se déconcerte ni ne se décourage ; il y reconnaît une volonté supérieure et s’établit dans une paix profonde. Quand, avec son évêque, il s’entretient de la règle à donner à ses missionnaires, il penche d’instinct du côté de saint Ignace, pendant que Mgr Lacroix regarde du côté de saint Sulpice. Mais sa volonté se fond dans celle de son évêque, de son supérieur.
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Ses devises sont significatives ; elles ont une allure guerrière. En avant ! Dieu le veut ! Mon Dieu ! me voici, sans retard, sans réserve, sans retour. Dieu tout, moi rien. Soyez, disait-il, idoneus, expeditus, dispositus, ce qu’il traduisait ainsi : "Préparez-vous. Le soldat en garnison apprend sa théorie et se rompt à l'exercice. Débarrassez-vous. Pas de sac au dos, témoin Bugeaud en Afrique ; c’est la condition de la victoire. Disposé à tout. Allez où Dieu voudra, quand il voudra, autant qu’il voudra."
C’est un sage. Avec une prudence toute paternelle, il maintient chacun dans le devoir, et le devoir, c’est la fidélité à se conformer à la règle, expression de fa volonté de Dieu, sans aller au delà, sans rester en deçà. Il s'indigne contre les usurpateurs de la volonté divine : "Avec vos protestations, s’écrie-t-il, vos réserves, vos distinctions et toute votre théologie, vous serez des perfides. J’appelle perfides ces esprits mécontents qui se plaignent de tout, murmurent toujours et n’aperçoivent pas la main de Dieu qui dirige les événements heureux et malheureux".
Il veut que chacun se tienne à sa place et n’en sorte pas. Il donne sur ce sujet des conseils pratiques qui témoignent d'une expérience et d’une sagesse admirables. Nous en citerons un seul exemple. Nous en pourrions citer un grand nombre.
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"Mgr d’Astros, disait-il, m’envoya à Igon, j'y allai ; on me dit de ne pas y revenir, je ne revins pas. Quelques jours après, on me rappelle, j’obéis. Une fois aumônier, je faisais ce qu'on me disait de faire. Je me serais rendu nuisible, impossible mille fois à Igon, si je n'avais pris le parti de m’effacer entièrement en tout ce qui ne me regardait pas. On envoie ici ou là des Sœurs, telle supérieure à Pau, telle à Tarbes. Ou’est-ce que cela me faisait ? L’aumônier doit être un auxiliaire et non un embarras."
Que le P. Garicoïts ait pratiqué toutes les vertus chrétiennes à un degré héroïque, cela ressort, non seulement du spectacle de sa vie, mais encore des nombreuses dépositions faites par des témoins au procès apostolique du vénérable serviteur de Dieu.
Nous ne parlerons que de sa foi, de son humilité, de son obéissance.
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La foi du Vénérable.
Sa foi de Basque est restée intacte. Professeur de théologie, il craignait "d’altérer la pureté de sa foi par trop de raisonnements et de démonstrations". Une science bien comprise, une humilité sincère le préservèrent de tout péril. Un jour, se reportant à ses jeunes ans, aux temps de sa foi naïve, il laissa échapper cet aveu charmant : "Je crains d’avoir une foi moins vierge que sous le chaume d'Ibarre, aux premiers catéchismes de ma bonne mère."
Sa foi se réglait sur un vif sentiment de l’infinie grandeur de Dieu et de sa petitesse. "Plus les dogmes de la révélation, disait-il, sont profonds et incompréhensibles, plus ils sont dignes de la majesté du Créateur et de la soumission parfaite de la créature." Il se rencontrait avec saint François de Sales, qui à écrit cette belle sentence : "Les âmes bien nées qui ont de la piété et de la droiture croient aisément les choses qui font honneur à la religion, et elles les croient avec d’autant plus de plaisir qu’elles paraissent plus admirables, plus difficiles à croire."
Pour lui, le Pape est roi dans l’Eglise. Pour lui, l’Eglise est le premier des gouvernements, le modèle et l’appui des autres. Pour lui, l’évêque a mission et grâce d’état. Sa volonté, quelle qu’elle soit, est la volonté de Dieu. Il réglera sa conduite sur sa foi.
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Saint François d'Assise ou saint Vincent de Paul par l’humilité.
Au procès apostolique sur les vertus du vénérable P. Garicoïts, un témoin affirme que Mgr Lacroix a déclaré que le serviteur de Dieu était un saint François d'Assise, un saint Vincent de Paul par l'humilité.
Ses origines humbles, il les rappelait volontiers, non par une vanité affectée, mais pour se maintenir dans la modestie et combattre les bouffées d'orgueil qui auraient pu l’induire en tentation : "Je n'étais, disait-il, qu’un pâtre ignorant et grossier. Je n’étais qu’un massacre, un obstacle aux desseins de Dieu." Au milieu des siens, il recherche les emplois les plus bas, les plus pénibles. "Parmi nous, disait-il, les plus mauvais emplois et les plus vieilles choses devraient être emportés d’assaut." Sa chambre ne comportait aucun luxe, rien de superflu. C’était l’appartement d'un pauvre : un lit de bois grossier sans rideaux trois chaises de paille, une table, une Vierge, un Christ en plâtre. Sa nourriture était plus que frugale ; il ne mangeait habituellement, que d’un plat. On ne l’entendit jamais se plaindre de la nourriture ou réclamer d’un mets. "Ce serait bien à moi, disait-il, à faire le délicat, à moi qui n'aurais dû manger que de la méture toute la vie !"
Mgr Lacroix a fait un vif éloge de son humilité : "Ce prêtre vénéré se montrait toujours modeste, prêt à céder, à servir et obliger ; il ne cherchait jamais à capter les louanges de personne ; impossible de le louer ; il s’anéantissait sans cesse. Il louait les autres, il était charmé de leur succès ; pour lui, il s'abaissait dans la poussière. Il parlait comme son âme pensait ; il se contentait de dire oui pour affirmer la vérité, de dire non pour repousser le mensonge."
Il réalisait sa devise : Dieu tout, moi rien. Dieu à sa place, moi à la mienne.
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L'obéissance, notre étendard .
L'obéissance fut la vertu favorite du vénérable Michel Garicoïts, celle qui est, peut-être, la plus mise en relief par sa vie, ses œuvres, son exemple. Dans le décret sur l’héroïcité de ses vertus, Benoit XV le dit : "Il suffit d'avoir jeté un regard sur les pages de la vie de cet admirable serviteur de Dieu pour comprendre que l'obéissance a été sa vertu principale, celle qui nous permet de mieux saisir son caractère."
"L’obéissance, dira-t-il aux membres de son Institut, sera notre étendard. Car, pour ne point parler des autres motifs de cette nouvelle fondation, il semble que Dieu l’ait ménagée par une disposition particulière de la Providence, en haine de cet esprit d’insubordination et d’égoïsme, qui est le fléau de notre temps."
Lui, cependant, toujours patient, toujours paternel, était impitoyable devant la désobéissance. Sans hésitation, il affirmait sa devise : obéir ou se séparer, et il la mettait en pratique. Un supérieur local ne tient pas compte de ses ordres et agit à son gré. Il lui écrit : "Pourquoi donc avez-vous foulé aux pieds mes ordres les plus formels ?... Je n’ai plus qu’à vous dire : Allez trouver Monseigneur et arrangez-vous avec lui.,. Vous voilà, désormais, mutile, impossible dans la communauté."
Il avait en horreur l’esprit d’indépendance qui "critique tout et s’élève au-dessus de toute autorité même ecclésiastique". « C’est une rage, de nos jours, écrivait-il, que l’esprit d’indépendance et la substitution de sa volonté à celle de Dieu...Voilà le crime et le malheur de notre époque, malheur général, universel... On préfère se livrer consciencieusement et pieusement à l’idolâtrie de ses propres idées. Quoi de plus désolant ! On désobéit en prétendant obéir, en opposant des propres lumières à celles de l'Eglise et du Pape."
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Quelques-uns de ses missionnaires d’Amérique rêvent d’un titre de missionnaires apostoliques. Il s’est opposé à tout ce qui pourrait ressembler à une ambition. Les missionnaires sollicitent l’appui de Mgr de Salinis. Le vénérable fondateur leur écrit une lettre sévère, les reprend de cette démarche intempestive et irrégulière. "Quand donc comprendrons-nous que le premier, le plus indispensable et en même temps le plus précieux de nos devoirs, c'est de nous présenter constamment à Dieu et à ses évêques, en reconnaissant et en confessant notre néant, en nous abandonnant à eux, effacés et dévoués, en leur disant, chacun du fond de l’âme : Me voici."
On a déjà vu par les pages qui précèdent la place que l’évêque tenait dans son esprit et dans son cœur. Il eut vraiment le culte de l’évêque. Dans une lettre, il écrit : "Je vous recommande le plus grand respect pour Monseigneur ; il a mission et grâce d’état. Pour nous, sa volonté, quelle qu’elle soit, est la volonté de Dieu même."
Dans une conférence, il s’écrie: "Si l'évêque m’ordonnait de partir à l'extrémité du monde, sans aucune ressource, sur un navire sans voile ni gouvernail, je partirais tout de suite. Si je ne me trouvas» pas à ce moment-là à Bétharram, je n’y retournerais pas pour prendre mes effets."
Son obéissance était donc entière. Elle se nuançait d’une confiance sans réserve, vraiment filiale. Il ne faisait rien sans consulter son évêque ; il le consultait jusqu'à l'importunité, a-t-on pu écrire. En souriant, Mgr Lacroix disait : "J’ai vu hier le P. Garicoïts ; il est venu avec son petit carnet chargé de projeta et de questions ; c’est là son habitude."
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Ses œuvres le suivent. Mort il parle encore.
Quand la mort a fait son œuvre, tout s’efface ; les meilleurs, comme les plus célèbres de leur temps, tombent bientôt dans l’oubli. On ne sait même plus leurs noms. C’est à peine si, au milieu de cet écroulement universel, quelques-uns surnagent. Le P. Garicoïts fut de ceux-là.
Son œuvre est debout. Sa Congrégation, transformée, poursuit son existence au milieu des tribulations et des succès. Douze ans après la mort de son fondateur, eu 1875, elle obtient de Pie IX un Bref laudatif, peu après un Bref approbatif. Elle cessa alors d’être diocésaine et de vivre sous la juridiction de l'évêque de Bayonne. Elle est désormais placée sous la protection du Saint-Siège. Elle connaîtra, comme toutes les Congrégations religieuses, la persécution ; quelques-unes de ses œuvres seront saccagées ; d'autres surgiront et manifesteront sa vitalité. Elle a aujourd’hui des établissements en Amérique, dans la Palestine, en Extrême Orient. "Ne nous hâtons pas disait le P. Garicoïts, ne substituons pas nos propres idées à celles de Dieu et de l’évêque. N’enjambons pas sur la Providence." Dieu, en effet, vient à son heure ; il ne manque jamais.
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Le P. Garicoïts se survit lui-même. Sur sa tombe, ce fut un immense et touchant concert de louanges et de regrets. La piété populaire ne s’en tint pas là. On venait des environs, de loin pour le consulter, implorer ses prières. Le pèlerinage recommence. On s'agenouille sur la pierre qui couvre sa dépouille ; on prie ; on le croit tout-puissant auprès de Dieu, on l’invoque, on lui demande des miracles. Et le sépulcre de l’humble serviteur de Dieu devient glorieux. Des mères y portent leurs enfants malades ; d’autres demandent des conversions. Les prières sont exaucées. On crie au prodige. Et l’on vient plus nombreux auprès de celui que le peuple appelle le saint de Bétharram.
Mgr Ducellier, successeur de Mgr Lacroix, est témoin de cette émotion populaire. Il étudiera la vie du P. Garicoïts. Après enquête approfondie, à son tour il est plein d’admiration pour les vertus du serviteur de Dieu. Répondant à une inspiration providentielle, le 3 août 1880 il ouvre le procès informatif. Le dossier est des plus riches en preuves et en documents. Aussi, le 16 mai 1899, Léon XIII signe le décret d’introduction de la cause du serviteur de Dieu. Et dès lors le P. Garicoïts est honoré du titre de Vénérable. La procédure suit son cours. Vient le procès apostolique des vertus et des miracles in specie, le plus difficile, celui qui est décisif souvent.
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