UN CRIME À ASCAIN EN 1880.
En 1880, Ascain est le théâtre d'un horrible assassinat.
ASCAIN
PAYS BASQUE D'ANTAN
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Je vous ai déjà parlé de ce crime dans quatre articles précédents, le 5/01/2019 , le 17/02/2019, le
28/03/2019 et le 29/04/2019.
Voici la suite de cette affaire et ce que raconta à ce sujet, la presse, dans diverses éditions :
- Le Petit Journal le 2 décembre 1881 :
"Les crimes d'Ascain.
Cour d'Assises des Basses-Pyrénées.
Audiences des 28 et 29 novembre.
Après huit audiences, la cause est enfin terminée. Avant d'en indiquer le résultat, achevons notre compte rendu.
De même que le 2 mai 1880, le 27 juillet 1879 était un dimanche. On a vu que le 2 mai de l'an dernier, avant d'assassiner la belle-sœur de son maître, Marie Noblia avait assisté à la célébration de la messe. Le 27 juillet de l'année précédente, Jean-Baptiste Sougaret avait commencé sa journée, lui aussi, en se rendant à l'office.
L'après-midi, on le vit çà et là, dans la montagne. Le soir, il fut aperçu dans des auberges ; dans l'une, entre autres, en compagnie d'Etienne Jolimon, dit Haraneder. Personne ne rencontra plus Jolimon à dater de ce moment, et le jeudi suivant, son corps était retiré de la Nivelle, qui coule dans la direction d'Ascain.
ASCAIN 1900 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Jean Hassaldéguy, laboureur à Hendaye, qui distingua le cadavre en longeant la rivière au soleil levant, courut avertir M. Bortcha, son patron. On courut chez le juge de paix. Des voisins aidèrent à amener sur la berge l'épave humaine.
On remarqua au cou deux plaies dont l'une l'avait traversé de part en part. La première impression fut que le pauvre Haraneder avait glissé en suivant la nuit le bord dépourvu de parapet du cours d'eau encaissé entre des rochers à pic. Les blessures étaient attribuées par les uns à la chute. D'autres disaient que des morsures de crabes pouvaient les avoir causées.
Il ne fut procédé à aucun examen médical sérieux. On connaît déjà cette circonstance étrange. Voici comment elle a été présentée aux débats :
M. le docteur Argeliez, à Saint-Jean-de-Luz.
—Je n'ai pas fait l'autopsie du cadavre de Haraneder, parce que je n'avais reçu aucune mission à cet égard. Je ne l'ai examiné que superficiellement. Il me sembla que la blessure du cou n'avait pas de profondeur. J'ai regretté de ne pas avoir été requis par la justice pour déshabiller le cadavre et faire des constatations complètes, que je ne me crus pas alors le droit d'établir.
M. Guilbeau, médecin, maire et suppléant de justice de paix à Saint-Jean-de-Luz.
— C'est plutôt comme magistrat que comme médecin que je me suis transporté sur les lieux où était le cadavre de Jolimon-Haraneder. Bien ne m'a frappé dans la lésion que je remarquai au cou et qui pouvait avoir été causée par des crabes. Je fis cependant des réserves pour mon appréciation, puisque M. le docteur Argeliez allait donner son avis.
M.Toulet, ancien juge de paix à Saint-Jean-de-Luz.
— J'ai vu le cadavre de Haraneder, et croyant à une asphyxie, comme le pensait aussi M. Guilbeau, les hommes de l'art n'exprimant pas l'idée qu'il put y avoir un crime, je ne crus pas devoir requérir l'autopsie.
M. Seltzek, adjudant de gendarmerie, autrefois maréchal des logis à Saint-Jean-de-Luz.
— Je n'ai pas vu de blessure sur le cadavre de Jolimon-Haraneder et je n'y ai pas fait d'ailleurs grande attention en entendant dire que la mort pouvait être accidentelle.
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Ainsi, l'un des médecins attendait qu'on l'invitât à une expertise complète ; l'autre, étant en même temps suppléant du juge de paix, ignorait si on l'avait appelé comme docteur ou comme magistrat ; le juge de paix, n'entendant pas les hommes de l'art prononcer le mot de crime, se tenait coi ; et le maréchal des logis de gendarmerie, qui ne pouvait faire davantage, s'en rapportait au juge de paix et aux médecins.
Le parquet s'émut, cependant. Un mandat d'amener fut lancé contre Sougaret. On savait qu'il avait voué rancune à Jolimon. Une fois, à Cibourre, il l'avait poussé du haut d'un pont, essayant de précipiter Haraneder dans la mer.
Sougaret parvint à se disculper. Une ordonnance de non-lieu fut rendue en sa faveur. Redevenu libre, il s'efforça, a-t-on prétendu, d'intimider les personnes qui avaient déposé contre lui, et ses menaces répandaient la terreur dans la région.
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La plus terrible charge est formulée par Marie Noblia. La nuit du 27 au 28 juillet 1879, raconte-t-elle, le meunier rentra au moulin vers trois heures, pâle, défait, les habits souillés de sang. "Je viens de tuer un homme", dit-il. Marie étant occupée à allumer du feu, Jean-Baptiste, jeta dans les flammes un lourd bâton pointu qu'il portait :
"Je l'ai, ajouta-t-il, tué avec ceci." Il recommanda le silence à sa confidente et déclara qu'il allait prendre ses précautions pour n'avoir rien à redouter.
Après avoir assassiné Jolimon, Sougaret, à en croire Marie Noblia, avait caché le corps, dans les broussailles. Il sortit la nuit suivante avec trois amis intimes, emportant une chemise blanche. Il avait eu le sang-froid de prendre la mesure du cou de sa victime et de choisir un col capable de le serrer assez étroitement pour faire croire à la mort par strangulation autant que par immersion.
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On déshabilla le cadavre, on remplaça la chemise tachée de rouge, on le rhabilla et on le lança dans la Nivelle. Le meunier paya 900 fr. à Barro-Larretch père et fils et 700 fr. à Lassagua. C'étaient ses trois complices. La chemise ensanglantée fut brûlée par Marie ; elle lava le pantalon de son amant, le fit sécher et le reprisa avec soin.
— Inventions ! s'écrie l'accusé en haussant les épaules.
Sougaret a tenté deux fois de recourir au suicide, tout comme Marie Noblia.
— Vous vouliez échapper aux dangers qui vous menaçaient, vous soustraire au châtiment de vos crimes ?
— Non, c'était la mort de ma belle-sœur qui me navrait, c'étaient les fausses accusations portées contre moi à propos de la mort de Jolimon, qui causaient mon désespoir.
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