UN CRIME À ASCAIN EN 1880.
En 1880, le village d'Ascain connaît un fait divers sordide.
ASCENSION RHUNE ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
Je vous ai déjà parlé de ce crime dans un article précédent.
Voici ce que raconta à ce sujet, la presse, dans La Petite Gironde, le 26 novembre 1881 :
"Cour d’Assises des Basses-Pyrénées.
Présidence de M. Rouget, conseiller.
Les crimes d'Ascain.
Assassinats. — Avortements. — Meurtres.
Suite de l'audience du mercredi 23 novembre.
La séance est reprise à cinq heures trente-cinq.
Pascal Capendeguy, dit Tripero, laboureur et aubergiste à Ciboure : j'ai assisté à la dispute qui s'engagea chez moi, après déjeuner, entre Etienne Haraneder et Sougaret. Sougaret ne porta aucun coup à Haraneder et celui-ci partit le premier de mon établissement.
Marie Etcheverry, 21 ans, couturière à Saint-Jean-de-Luz : L’accusé Sougaret est venu chez ma grand’mère le dimanche 27 juillet, à neuf heures du soir, demander à boire. Il nous dit qu’il voulait aller à Serres ; puis il prit la direction de la rive gauche de la Nivelle.
Sougaret ; interpellé, dit qu’il a parlé du village de Sara et que ce n’était pas le jour indiqué.
Le témoin affirme qu’il s’agissait bien de Serres, et que cela se passait le dimanche 27 juillet, jour de la fête de Serres.
Joséphine Etcheverry, journalière à Saint-Jean-de-Luz : Ce témoin confirme la déclaration qui vient d’être entendue.
Marguerite Etchevers, femme Alsouarena, à Ciboure : Le jour de la fête de Serres, ce témoin a entendu la conversation de Sougaret avec Joséphine Etcheverry.
Joachim Albero, domestique chez Tripero, à Ciboure : Ce témoin a rencontré Sougaret le jour de la disparition de Jolimon, à neuf heures et demie du Soir, suivant le chemin qui conduit à Ascain.
Manuel Artola, aubergiste à Saint-Jean-de-Luz : Le même jour, Sougaret est allé chez lui vers dix heures du soir.
Elisabeth Olaisola; épouse Hourcade, à Saint-Jean-de-Luz : Le lendemain du crime d’Ascain, je vis passer devant ma maison Marie Noblia et sa sœur. Je leur demandai des nouvelles de ce crime et je les appelai. Elles me parurent inquiètes à propos des recherches judiciaires.
Larraing, bouvier à Urrugue, maison Souhara : Je revenais de Serres, je rencontrai Etienne Haraneder, qui, un peu pris de vin, marchait dans la direction d’Ascain. Il était minait ou minuit et demi.
FRONTON CHOURIO ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
L’audience est levée, à sept heures moins dix et renvoyée à demain à onze heures.
Audience du jeudi 24 novembre 1881.
La séance est ouverte à 11 heures 1/2.
On continue l’audition des témoins.
Joseph Lastiry, maçon à Saint-Jean-de-Luz : Un jour, d’Ascain à Saint-Jean-de-Luz, j’aperçus du sang coagulé sur la route, sur une étendue de dix à douze mètres, du côté de la rivière. C’était le jour où l’on transportait le corps d’Haraneder à Ascain.
Catherine Saint-Martin, femme Tucoulet, à Ascain : Le mardi qui suivit la disparition de Haraneder, j’aperçus sur la route d’Ascain à Saint-Jean-de-Luz des gouttelettes de sang.
Bernard Etcheverry, laboureur à Ascain : J’ai entendu dire, je ne sais par qui, qu’on avait remarqué des taches de sang sur la route.
Jean-Baptiste Doratcague, journalier à Saint-Jean-de-Luz : J’ai accompagné Martin Haraneder le mercredi, je crois, pour la recherche du cadavre. J’ai aperçu des graines de trèfle répandues sur la route d’Ascain.
Mme Madeleine Bertrand, veuve Sanslero, marchande à Saint-Jean-de-Luz : Etienne Haraneder vint le dimanche 27 juillet m’acheter pour trois francs de graine de farouche. Environ vingt jours avant le crime d’Ascain, Maria Noblia m'acheta la corde qui a servi à serrer le cou de la femme assassinée.
L’accusé Sougaret renouvelle ses dénégations.
ATTELAGE ET CIDRE DE CONTREBANDE ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
Bernard Sorreguieta, laboureur à Ascain : J’ai été appelé à fournir des renseignements sur la manière dont on pouvait passer la rivière près de là maison Doria, appartenant à M. Jouvet.
Marie Etcheverry, femme Haraneder, à Ascain : Je suis la mère d’Etienne Haraneder. Une femme, nommée Dolorès, vint me dire un jour, environ deux mois après la mort de mon fils, que Sougaret avait demandé une chemise à un jeune homme.
Mon fils Etienne m’avait parlé de la haine que Sougaret lui portait. Ses chemises étaient de toile grossière à trois grands plis sur le devant, sauf une plus fine à petits plis, qu’Etienne ne portait pas le jour de sa mort.
Victorin Zugarramundy, domestique à Saint-Pée : A l’époque de la mort d’Etienne Haraneder, j’étais domestique chez Baptiste Haraneder. J’ai vu un pantalon, couvert de boue dans le bas, qui était étendu sur une haie près du moulin de Sougaret. Je trouvai Marie Noblia et lui demandai à quelle heure Sougaret était rentré dans la nuit du dimanche au lundi. Elle me dit que c’était vers trois ou quatre heures du matin. J’ai entendu dire que Marie Noblia était la maîtresse de Sougaret et qu elle avait été enceinte des œuvres de celui-ci.
Quand Marie Noblia eut quitté le moulin et après qu'elle fut remplacée par Françoise Elissalde, j’ai remarqué qu’elle parlait avec Sougaret quand ils se rencontraient. Marie Noblia avait de fréquentes discussions avec Françoise Elissalde. J’ai entendu dire que Sougaret devait épouser Marie Noblia, et, d’autres fois, qu’il devait se marier avec Françoise Elissalde. Le jour du crime, Marie Inda me prévint de ce qu'elle venait de voir au moulin. J’accourus, et je trouvai au dehors Sougaret qui se lamentait.
Le témoin décrit le spectacle qui s’offrit à ses regards dans l'intérieur de la maison et rappelle les remarques qu'elle fit de la porte brisée, des empreintes de mains ensanglantées qui étalent restées sur la porte et sur le sol, c’est l’empreinte de la main droite qui figurait sur le plancher. Sougaret dit que le crime avait dû être suivi de vol, constata la perte de son argent et exprima la pensée que c étaient des bohémiens qui avaient probablement fait le coup. Il paraissait désolé et parlait de se détruire.
Sur une question de Me Guichenné, l’accusée Marie Noblia, interpellée, explique qu’elle a donné le coup de hache avec la main gauche, et que c’était la main gauche qui avait été couverte du sang jaillissant de la plaie.
FABRICANT DE CHISTERAS ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
Il est deux heures, la séance est suspendue.
La séance est reprise à deux heures et demie.
Le témoin Victorin Zugarramundy, rappelé sur la demande de MM. les jurés, et interpellé, déclare ne pouvoir pas affirmer si le pantalon teint figurant parmi les pièces à conviction est le pantalon qu’il a vu un jour sécher et dont il a parlé ; mais il ajoute que c’était un pantalon foncé, plus foncé que celui que l’accusé Sougaret porte en ce moment.
Jean-Baptiste Jolimon-Haraneder, laboureur à Ascain : Vers midi, j’ai vu sécher dans le jardin du moulin le pantalon de Sougaret plein de boue jusqu’au genou.
M. le Président fait remarquer que dans une précédente confrontation, Marie Noblia n’avait pas été d’accord avec le témoin sur l’heure à laquelle le pantalon se trouvait à sécher.
Marie Noblia déclare que le pantalon a été exposé au jardin, ce même jour, à deux reprises.
Le témoin continue sa déposition : Je vis Sougaret qui me demanda ce qu’il y avait de nouveau, mais sans me rien dire concernant Etienne. Un jour, mon frère profita de cinq francs d’arrhes que Sougaret avait perdus par suite d’un enjeu avec lui. Depuis lors, Sougaret lui cherchait souvent querelle et lui réclamait, par des menaces, le remboursement de ces cinq francs.
L'accusé Sougaret, interpellé, se défend d’avoir usé de menaces.
ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
Le témoin Jolimon soutient que lui-même avait été maltraité une fois par Sougaret et qu’il a été souvent inquiété par lui, à tout propos et à propos de rien. Sougaret a dit dans une circonstance au nommé Duperrou qu’il les tuerait, lui et son frère Etienne. J’ai toujours entendu dire que Marie Noblia était la maîtresse de Sougaret, et celui-ci m’a dit un jour : "Marie Noblia veut me quitter ; je suis perdu si elle me quitte." Je sais qu’après le départ de cette fille, les rapports se sont continués entre elle et Sougaret.
Quatre jours après l’assassinat de Françoise Elissalde, je vis dans la maison Sougaret une chemise d’homme tachée de sang, cachée sous un matelas et à propos de laquelle Sougaret me dit: "Je pense que cette chemise a été mise ici pour me compromettre."
Marie Noblia, interpellée, déclare que cette chemise, qui se trouve dans les pièces à conviction, est une des chemises de Sougaret, mais elle ne peut expliquer comment ni par qui elle avait été cachée entre deux matelas. Elle ne sait pas non plus pour quoi elle portait des taches de sang.
L'accusé Sougaret, interpellé, se plaint des déclarations du témoin et parle des services qu’il lui a souvent rendus: Je ne l’ai pas jeté à l’eau, ajoute-t-il, un jour qu’il était ivre et que je l’ai reconduit chez lui.
M. Jean-Baptiste Darricarrère, lieutenant des douanes à St-Jean-de-Luz : Le 27 juillet 1879, à 9 heures du soir, je rencontrai Etienne Haraneder, qui était en état d’ivresse. Il voulait boire avec moi, je refusai naturellement.
Marie-Josepha Mendeguy, à Ascain: Un mois après la mort de Jolimon, elle a entendu dire que le cadavre était resté caché sous des broussailles ; elle a entendu parler aussi des graines de farouche qu’on avait trouvées dans un fourré.
Dolorès Dufau, blanchisseuse à Ascain : Le lendemain de la fête de Serres, j’ai vu des traces de sang sur la route à gauche, en remontant de Saint-Jean-de-Luz vers Ascain.
Thomas Artosarena, 12 ans, domestique à Bidart : Je sais que ma grand’mère (le précédent témoin) a vu des taches de sang sur la route. Elle me le dit le soir même.
M. Alexis Patès, greffier de la justice de paix à Saint-Jean-de-Luz : Me trouvant auprès du cadavre d’Etienne Haraneder, après sa découverte, j’entendais le frère parler avec animation avec d’autres personnes présentes. Je demandai ce qu’il disait ; on me répondit qu’il protestait contre l’idée, émise par quelques assistants, que la mort d’Etienne fût accidentelle. Le procès-verbal dressé par le juge de paix et par moi, son greffier ne porte aucune mention des blessures du cou. Je les ai cependant bien remarquées et regrette que cette omission ait été faite. La chemise était boutonnée au cou et me parut être une chemise changée.
SERRES ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
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