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samedi 25 mai 2019

L'ACCUEIL DES RÉFUGIÉS À BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1914


L'ACCUEIL DES RÉFUGIÉS À BAYONNE EN 1914.


Le Pays Basque, et la ville de Bayonne en particulier, va accueillir des milliers de réfugiés venant du Nord de la France pendant la première Guerre Mondiale.




HISTOIRE GUERRE 1914 1918
AFFICHE DE BENJAMIN GOMEZ POUR LES SINISTRES DU NORD



Voici ce que rapporta la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans plusieurs 

éditions :


  • Le 30 avril 1918 :



"Nouvelles Locales.



Bayonne.



Un chapitre de l’Histoire de la guerre et la solidarité nationale.




M. Garat, député-maire de Bayonne, nous adresse le rapport suivant : 


A nos souscripteurs. 




Un magnifique élan de générosité anime les nombreux et fidèles souscripteurs qui, depuis le début de la guerre, ne cessent de verser à la Mairie de Bayonne des dons destinés à secourir l’infortune des réfugiés venus des régions envahies, provinces belges et départements français. 


premiere guerre mondiale
APPEL DU COMITE DES REFUGIES BAYONNE NOVEMBRE 1914
PAYS BASQUE D'ANTAN


Je voudrais les remercier au nom du Comité et leur exposer dans un résumé succinct le résultat de nos efforts et la bonne marche d’une organisation qui ne peut fonctionner que grâce à leurs subsides. 



Nous avions songé à convoquer nos souscripteurs à une conférence ; mais nous avons pensé que beaucoup d’entre eux, empêchés par la maladie, l’âge ou les occupations ne pourraient se rendre à cette invitation et nos préférences se sont arrêtées à un rapport pour lequel nous demandons aux journaux de nous accorder l’hospitalité de leurs colonnes. En mettant une fois de plus à contribution la presse locale et régionale, nous tenons à lui exprimer notre gratitude pour le concours désintéressé et empressé qu’elle prête à l’œuvre des réfugiés. 



Dès les premiers coups de l’ennemi, les réfugiés ont afflué vers notre pays privilégié. La Ville de Bayonne en a reçu jusqu’ici 2 600 environ. 



A la première heure un Comité était organisé. Il n’a cessé de fonctionner. Il comprend encore tous les membres du début, dames à qui incombent les soins du linge et du vestiaire, visites des familles et plus particulièrement des enfants et des vieillards ; bayonnais dévoués qui prélèvent sur leur repos et même leurs occupations le temps de diriger l’administration du Comité ; Conseillers municipaux et personnel de la Mairie. 



Sa tâche est ardue. Une œuvre de réfugiés exige une action incessante et complexe. De multiples objets, des quantités de détail, une activité de tous les instants, des nécessités impérieuses, des situations enchevêtrées, c’est la tâche quotidienne, le labeur ininterrompu qui s’imposent à ceux qui s’occupent des réfugiés. 



Immédiatement prêt à fonctionner, notre comité dès le premier moment a donné des résultats pratiques. 



refugies premiere guerre mondiale
APPEL DES MAIRES DES DEUX CANTONS DE BAYONNE OCTOBRE 1914
PAYS BASQUE D'ANTAN


En septembre 1914, nous recevions 240 petits enfants parisiens que la menace sur la capitale amenait parmi nous. 



A quelques jours de là, le gouvernement belge nous envoyait 105 petits garçons et leurs professeurs. Ces enfants au moment de l’invasion de la Belgique rodaient à l’abandon, réfugiés dans les caves des environs, abandonnés, secourus par nos soldats qui les appelaient les "Lapins de l’Yser". S'inspirant de ce principe de conservation nationale qu’il fallait "sauver la graine pour sauver la race" les autorités belges accueillirent avec empressement l’offre de la Ville de Bayonne d’hospitaliser ces nombreux enfants pendant la durée de la guerre. 



Il y a quelques jours, il nous a été demandé d’en accueillir 40 de plus, que la nouvelle ruée allemande laissait sans foyer. Nous les avons pris en charge. 



Les petits belges sont installés à Camp de Prats, vaste domaine ombragé sur les hauteurs dominant la Ville. Ils s’instruisent et vivent paisiblement sous la direction de leurs maîtres dévoués. Peu à peu, ils oublient les visions d’horreur sanglantes qu’ont vu leurs regards d’enfants. Presque tous orphelins, ils ont assisté au spectacle du mas sacre de leurs parents perpétrés par les Allemands sous leurs yeux. 



Nous leur donnons un métier et les préparons de préférence aux travaux agricoles. La guerre finie, nous les rendrons à leur chère et héroïque Patrie. 


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OFFICIERS TCHECOSLOVAQUES ET JOSEPH GARAT 28 AOÛT 1914
PAYS BASQUE D'ANTAN


Sur le chiffre de 2 600 réfugiés reçus à Bayonne tous n’y sont pas restés. Dès l’arrivée des convois, il est procédé aux soins d’hygiène et à un recensement détaillé. Nos préoccupations vont ensuite vers un placement convenable suivant l’âge, le sexe, les capacités, la condition sociale. Cette opération de triage n’est pas toujours commode. 



Le réfugié est un être malheureux qui après le départ précipité devant l’invasion allemande se trouve forcément désaxé. L’adaptation à un milieu tout nouveau, après les fortes émotions ressenties, ne se fait pas sans difficultés. On y arrive grâce à la bonne volonté des uns et la patience des autres. Nous plaçons la plus grande partie des réfugiés (fermes et travaux agricoles, industrie et commerce, domestiques) après un séjour plus ou moins prolongé dans nos quatre centres, la Citadelle, Refuge d’Anglet, Casernements de Marrac, établissements de la Nive. Nous restent seulement les plus éclopés, les plus jeunes et les plus âgés, les familles nombreuses, qui ne peuvent être mêlés sans inconvénients à la vie ordinaire ou livrés à eux-mêmes."



  • Le 1er mai 1918 :

"Un chapitre de l’Histoire de la guerre et la solidarité nationale (Suite du rapport de M. Garat).



Cette catégorie est hospitalisée de préférence à Anglet dans les vastes bâtiments des Bonnes sœurs du Refuge, situés au milieu de la forêt de pins. On y trouve : un groupe de vieillards, dont huit ont de 90 a 99 ans ; un orphelinat de petits garçons de Bapaume dirigé par des religieuses ; les Allemands ont gardé les enfants au-dessus de 13 ans ; beaucoup de familles au-dessus de trois enfants. Parmi les plus intéressantes : la famille C..., le père bûcheron et ses trois garçons ont été pris par les Allemands, la mère nous reste avec 7 enfants ; la famille L..., le mari berger emmené en captivité avec son fils aîné, la mère aveugle est notre hôte avec ses sept enfants, depuis l’an dernier. 



Je cite quelques exemples d’infortunes prises sur le vif ; il y en a d’autres, parfois morales et cachées, aussi poignantes. 



Quelques enfants, dont les parents disparurent dans la rafale suivent les convois. Nous les mettons à Camp de Prats avec nos orphelins bayonnais. Un métier leur est donné. 



Le dernier convoi arrivé hier s'élevait à 354 personnes surtout des enfants et des femmes du Nord, de la Somme, du Pas-de-Calais. Plusieurs de ces malheureux ont été atteints aux yeux et à la poitrine par les gaz asphyxiants. 



Chaque centre est sous la surveillance particulière d’un conseiller municipal. Une gérante, personne de confiance, assistée du personnel nécessaire, en assure la direction. 



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VOLONTAIRES TCHECOSLOVAQUES BAYONNE OCTOBRE 1914
PAYS BASQUE D'ANTAN


La cuisine est faite avec de bons aliments. Voici le menu d’une semaine prise au hasard du 9 au 15 décembre. 




Citadelle.


Dimanche. — Déjeuner : potage légumes haricots, rôti. Dîner : Potage légumes, viande hachée dans riz et carottes. 

Lundi. — Déjeuner : potage légumes ragoût bœuf. Dîner : potage légumes, œufs coque, salade de pommes de terre. 

Mardi. — Déjeuner : consommé légumes, bouilli, choux farcis. Dîner : potage légumes, bœuf mode. 

Mercredi. — Déjeuner : potage légumes, croquettes de viande, choux au jus. Dîner : potage légumes, bœuf, nouilles. 

Jeudi. — Déjeuner : consommé légumes, bœuf, petits pois. Dîner : consommé légumes, rôti de bœuf, choux farcis. 

Vendredi. — Déjeuner : potage légumes, veau, haricots. Dîner : potage légumes, œufs, nouilles. 

Samedi. — Déjeuner : consommé légumes, veau, nouilles. Dîner : potage légumes, bœuf mode. 



Refuge. 


Déjeuner : potage légumes, rôti de bœuf, riz au jus ; dîner : potage légumes, œufs coque, pommes de terre salade. 

Déjeuner : potage légumes, gras doubles ; dîner : potage légumes, ragoût de pommes de terre et carottes, œufs. 

Déjeuner : Consommé légumes, ragoût de bœuf ; dîner : potage légumes, haricots, œufs coque. 

Déjeuner : potage légumes, rôti de veau, haricots ; Dîner : potage légumes, biftecks, purée de pommes de terre. 

Déjeuner : potage légumes, rôti de veau, lentilles au gras ; Dîner : potage légumes, purée de pois, œufs. 

Déjeuner : soupe légumes, bœuf rôti, nouilles au jus ; Dîner : potage légumes, purée de pois, œufs. 

Déjeuner ; soupe légumes, rôti de veau, haricots au gras ; Dîner : potage légumes, sardines fraîches, bardots. 




A moins de parti pris ou d’exigences impossibles à satisfaire, nos rapatriés ne peuvent se plaindre de l’alimentation qu’ils reçoivent. 



Les premiers avaient été confiés à la générosité et à la compassion des habitants. Mais le nombre des fugitifs nous a obligés d’employer une méthode différente. 



Nous en plaçons le plus possible. Mais tous ceux qui ne peuvent se suffire par leur travail et les familles nombreuses vivent en commun au Refuge, à la Citadelle, à Marrac et à la Nive



Cette mesure fut prise par le Comité pour éviter les graves inconvénients que pouvait présenter l'abandon de ces familles avec des allocations in suffisantes à un moment où la cherté de la vie est excessive, Or, on ne pouvait pas espérer de femmes chargées d’enfants ou de vieillards déprimés qu’ils puissent, par les bénéfices du travail, augmenter leurs trop faibles allocations. Le meilleur moyen, malgré les inconvénients que peut présenter la vie en commun était donc de les grouper au lieu de les laisser exposés aux dures privations que le Comité a pu constater chez les personnes de cette catégorie qui n’acceptaient pas de vivre en commun. 



Quant au vestiaire, il a fourni et il fournira encore quantité d’objets et de vêtements utiles, tout en se montrant économe des ressources restreintes dont il dispose. 



Les listes de souscriptions publiées disent assez combien s’exerce en faveur de ces infortunés la générosité des Bayonnais. La population tout entière peut se rendre compte des attentions dont ils sont entourés, l’accès des locaux qu'ils occupent étant libre à tout le monde. 



Le Comité s’emploie de son mieux à procurer du travail aux réfugiés ; toutes facilités leur sont données pour rejoindre les endroits où ils sont réclamés : on examine avec tout l’intérêt possible leurs demandes ou réclamations ; on veille à ce que les soins médicaux ne leur manquent pas. 



La mairie informée que 3 000 évacués sont dirigés sur l’arrondissement de Bayonne, a pris les mesures d’organisation nécessaires pour les recevoir. Un service de gérance et de cuisine ont été organisés dans chacun des quatre locaux devant servir de dépôt avec une réserve pour qu’ils trouvent au milieu de nous les premiers secours. Ces 3 000 infortunés ne séjourneront pas tous à Bayonne qui n’en conservera que 1 200 environ ; les autres seront dirigés, par les soins du Comité, dans les villages de l’arrondissement. C’est un gros chiffre, 1 210 dans une ville déjà encombrée de tant d'éléments étrangers et une lourde tâche de plus va s’imposer au Comité des réfugiés pour assurer le ravitaillement de tant de tant de familles. Mais rien ne sera impossible avec les concours avertis et dévoués qui se présentent, l’élan généreux qui continue à se manifester et enfin avec les sentiments de vive sympathie et de profonde compassion que les pauvres infortunés inspirent aux membres du Comité et à la population tout entière. 



Comme argent de poche, chaque réfugié adulte touche 0.25 par jour, chaque enfant, 0.10. 



Les enfants doivent aller à l’école choisie par leurs parents. 



Toutes les croyances sont rigoureusement respectées. 



Nous donnons le logement et le repas du soir à ceux qui travaillent au dehors. 



Tout réfugié peut quitter son centre quand bon lui semble, mais tant qu'il y demeure, il doit se soumettre au règlement commun. 



Nos comptes sont à la disposition de nos souscripteurs. Nous sommes heureux chaque fois qu’ils veulent visiter les différents centres. 



En terminant, je voudrais rendre hommage au zèle et au dévouement des membres du comité. Sa tâche a été souvent difficile depuis 1914, pour aider tant de détresses matérielles et morales. L’ardeur de chacun s’est maintenue au même diapason. Nous attendons encore quelques milliers d'évacués ; ceux-là comme les premiers, comme tous ceux qui sont venus par la suite et tous ceux qui viendront après, seront les bienvenus parmi nous. 



Le Comité de Bayonne s’emploiera à adoucir leur sort de tous ses moyens et de toutes ses forces. 



Bayonne, le 27 avril 1918."


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