L'ACCUEIL DES RÉFUGIÉS À BAYONNE EN 1914.
Le Pays Basque, et la ville de Bayonne en particulier, va accueillir des milliers de réfugiés venant du Nord de la France pendant la première Guerre Mondiale.
AFFICHE DE BENJAMIN GOMEZ POUR LES SINISTRES DU NORD |
Voici ce que rapporta la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans plusieurs
éditions :
- Le 30 avril 1918 :
"Nouvelles Locales.
Bayonne.
Un chapitre de l’Histoire de la guerre et la solidarité nationale.
M. Garat, député-maire de Bayonne, nous adresse le rapport suivant :
A nos souscripteurs.
Un magnifique élan de générosité anime les nombreux et fidèles souscripteurs qui, depuis le début de la guerre, ne cessent de verser à la Mairie de Bayonne des dons destinés à secourir l’infortune des réfugiés venus des régions envahies, provinces belges et départements français.
APPEL DU COMITE DES REFUGIES BAYONNE NOVEMBRE 1914 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Je voudrais les remercier au nom du Comité et leur exposer dans un résumé succinct le résultat de nos efforts et la bonne marche d’une organisation qui ne peut fonctionner que grâce à leurs subsides.
Nous avions songé à convoquer nos souscripteurs à une conférence ; mais nous avons pensé que beaucoup d’entre eux, empêchés par la maladie, l’âge ou les occupations ne pourraient se rendre à cette invitation et nos préférences se sont arrêtées à un rapport pour lequel nous demandons aux journaux de nous accorder l’hospitalité de leurs colonnes. En mettant une fois de plus à contribution la presse locale et régionale, nous tenons à lui exprimer notre gratitude pour le concours désintéressé et empressé qu’elle prête à l’œuvre des réfugiés.
Dès les premiers coups de l’ennemi, les réfugiés ont afflué vers notre pays privilégié. La Ville de Bayonne en a reçu jusqu’ici 2 600 environ.
A la première heure un Comité était organisé. Il n’a cessé de fonctionner. Il comprend encore tous les membres du début, dames à qui incombent les soins du linge et du vestiaire, visites des familles et plus particulièrement des enfants et des vieillards ; bayonnais dévoués qui prélèvent sur leur repos et même leurs occupations le temps de diriger l’administration du Comité ; Conseillers municipaux et personnel de la Mairie.
Sa tâche est ardue. Une œuvre de réfugiés exige une action incessante et complexe. De multiples objets, des quantités de détail, une activité de tous les instants, des nécessités impérieuses, des situations enchevêtrées, c’est la tâche quotidienne, le labeur ininterrompu qui s’imposent à ceux qui s’occupent des réfugiés.
Immédiatement prêt à fonctionner, notre comité dès le premier moment a donné des résultats pratiques.
APPEL DES MAIRES DES DEUX CANTONS DE BAYONNE OCTOBRE 1914 PAYS BASQUE D'ANTAN |
En septembre 1914, nous recevions 240 petits enfants parisiens que la menace sur la capitale amenait parmi nous.
A quelques jours de là, le gouvernement belge nous envoyait 105 petits garçons et leurs professeurs. Ces enfants au moment de l’invasion de la Belgique rodaient à l’abandon, réfugiés dans les caves des environs, abandonnés, secourus par nos soldats qui les appelaient les "Lapins de l’Yser". S'inspirant de ce principe de conservation nationale qu’il fallait "sauver la graine pour sauver la race" les autorités belges accueillirent avec empressement l’offre de la Ville de Bayonne d’hospitaliser ces nombreux enfants pendant la durée de la guerre.
Il y a quelques jours, il nous a été demandé d’en accueillir 40 de plus, que la nouvelle ruée allemande laissait sans foyer. Nous les avons pris en charge.
Les petits belges sont installés à Camp de Prats, vaste domaine ombragé sur les hauteurs dominant la Ville. Ils s’instruisent et vivent paisiblement sous la direction de leurs maîtres dévoués. Peu à peu, ils oublient les visions d’horreur sanglantes qu’ont vu leurs regards d’enfants. Presque tous orphelins, ils ont assisté au spectacle du massacre de leurs parents perpétrés par les Allemands sous leurs yeux.
Nous leur donnons un métier et les préparons de préférence aux travaux agricoles. La guerre finie, nous les rendrons à leur chère et héroïque Patrie.
OFFICIERS TCHECOSLOVAQUES ET JOSEPH GARAT 28 AOÛT 1914 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Sur le chiffre de 2 600 réfugiés reçus à Bayonne tous n’y sont pas restés. Dès l’arrivée des convois, il est procédé aux soins d’hygiène et à un recensement détaillé. Nos préoccupations vont ensuite vers un placement convenable suivant l’âge, le sexe, les capacités, la condition sociale. Cette opération de triage n’est pas toujours commode.
Le réfugié est un être malheureux qui après le départ précipité devant l’invasion allemande se trouve forcément désaxé. L’adaptation à un milieu tout nouveau, après les fortes émotions ressenties, ne se fait pas sans difficultés. On y arrive grâce à la bonne volonté des uns et la patience des autres. Nous plaçons la plus grande partie des réfugiés (fermes et travaux agricoles, industrie et commerce, domestiques) après un séjour plus ou moins prolongé dans nos quatre centres, la Citadelle, Refuge d’Anglet, Casernements de Marrac, établissements de la Nive. Nous restent seulement les plus éclopés, les plus jeunes et les plus âgés, les familles nombreuses, qui ne peuvent être mêlés sans inconvénients à la vie ordinaire ou livrés à eux-mêmes."
- Le 1er mai 1918 :
"Un chapitre de l’Histoire de la guerre et la solidarité nationale (Suite du rapport de M. Garat).
Cette catégorie est hospitalisée de préférence à Anglet dans les vastes bâtiments des Bonnes sœurs du Refuge, situés au milieu de la forêt de pins. On y trouve : un groupe de vieillards, dont huit ont de 90 a 99 ans ; un orphelinat de petits garçons de Bapaume dirigé par des religieuses ; les Allemands ont gardé les enfants au-dessus de 13 ans ; beaucoup de familles au-dessus de trois enfants. Parmi les plus intéressantes : la famille C..., le père bûcheron et ses trois garçons ont été pris par les Allemands, la mère nous reste avec 7 enfants ; la famille L..., le mari berger emmené en captivité avec son fils aîné, la mère aveugle est notre hôte avec ses sept enfants, depuis l’an dernier.
Je cite quelques exemples d’infortunes prises sur le vif ; il y en a d’autres, parfois morales et cachées, aussi poignantes.
Quelques enfants, dont les parents disparurent dans la rafale suivent les convois. Nous les mettons à Camp de Prats avec nos orphelins bayonnais. Un métier leur est donné.
Le dernier convoi arrivé hier s'élevait à 354 personnes surtout des enfants et des femmes du Nord, de la Somme, du Pas-de-Calais. Plusieurs de ces malheureux ont été atteints aux yeux et à la poitrine par les gaz asphyxiants.
Chaque centre est sous la surveillance particulière d’un conseiller municipal. Une gérante, personne de confiance, assistée du personnel nécessaire, en assure la direction.
VOLONTAIRES TCHECOSLOVAQUES BAYONNE OCTOBRE 1914 PAYS BASQUE D'ANTAN |
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