MAURICE RAVEL.
Joseph Maurice Ravel est un compositeur Basque né à Ciboure (Basses-Pyrénées) le 7 mars 1875 et mort à Paris le 28 décembre 1937.
COMPOSITEUR MAURICE RAVEL |
Voici ce que rapporta le journal Mercure de France, dans son édition du 1er février 1938 :
"Maurice Ravel.
... Une élégante et sensible contribution au "Tombeau" élevé à Ronsard par la Revue Musicale au moment du tricentenaire, Ronsard à son âme ; une Rhapsodie de Concert pour violon et piano (orchestrée bientôt (Tzigane, en 1925), et nous arrivons à une autre merveille, les Trois Chansons Madécasses, une "commande" de Mrs. Coolidge, que Ravel composa en 1925, sur des paroles d’Evariste Parny. En 1915, pendant la guerre, il avait écrit pour chœur mixte sans accompagnement Trois Chansons de France, s’appuyant dans Nicolette, dans Trois beaux oiseaux et dans la Ronde, sur la musique populaire, comme sur un tremplin solide mais qui donne un envol infiniment léger à la mélodie. Dans les Chansons madécasses, Ravel ne cherche point à faire de l’exotisme ; là encore il reste lui-même en s’inspirant du texte de Parny — un texte du XVIIIe siècle qui traduit une chanson d’amour : Nahandove, ô belle Nahandove ; une chanson belliqueuse : Aoua ! Aoua ! Méfiez-vous des blancs, habitants du rivage ! et puis une chanson voluptueuse, Il est doux de se coucher durant la chaleur, sous un arbre touffu... L’accompagnement de piano, flûte et violoncelle est exquis. En 1927 paraissent Rêves, texte de Léon-Paul Fargue, puis la contribution de Maurice Ravel à l’œuvre collective de dix musiciens, L’Eventail de Jeanne, pour lequel il écrit une Fanfare initiale (donné d’abord chez Mme Jeanne Dubost, ce ballet fut interprété à l’Opéra par les enfants des classes de danse). Tout est étrange dans cette Fanfare qui, vers son milieu, porte pour indication de mouvement wagneramente, et qui, comme le dit Roland-Manuel, commence comme une sonnerie de trompes d’insectes pour finir dans le style du Crépuscule des Dieux.
MAURICE RAVEL |
Maurice Ravel n’était encore qu’illustre. Le Boléro le rendit populaire. Il le devint presque du jour au lendemain, comme une vedette de music-hall ou une star de cinéma. Les gosses des faubourgs sifflèrent do, si, do, ré, do, si, la, do, do, la, do... tout comme ils sifflaient Valencia ou Pedro. Le phonographe et la Radio répandirent à travers le monde l’obsession de ce rythme. Créé à l’Opéra en novembre 1928 par Mme Ida Rubinstein, le Boléro est une œuvre d’une maîtrise déconcertante : une simple phrase, un rythme de danse espagnole bien frappé, obsédant, enflé dans un crescendo obtenu bien plus par l’adjonction de timbres nouveaux à chaque reprise, et puis le battement incessant de la caisse claire qui scande impitoyablement la phrase, une percussion grossissant elle aussi de reprise en reprise, et jusqu'à la violence, jusqu’au déchirement, et cela sans une seule modification du rythme, sans un changement de valeur, crée une véritable hallucination. Elle est comme un motif au pochoir, répété indéfiniment sur un panneau, mais dans des tons différents, jusqu’au dernier qui, au lieu de peinture, serait flamme. Et Ravel n’emploie ici ni castagnettes, ni tambour de basque, ni grelots, aucun des instruments qui, d’ordinaire, sont usités par les musiciens désireux d’évoquer l’Espagne à peu de frais. Curieuse musique, critiquée aussi vivement qu’idolâtrée. Les suffrages de ceux qui, d’ordinaire, n’aiment la musique qu’en fonction de la mode ont nui au Boléro dans l’esprit de certains autres. Ces querelles, sans doute, amusaient Ravel. Un matin que l’on répétait un de ses ouvrages, comme je lui parlais de Daphnis, il fit une pirouette et me dit, coupant court : "Mon chef-d’œuvre ? C’est le Boléro !"
MME IDA RUBISTEIN |
Il écrivit coup sur coup deux Concertos pour le piano. Le premier fut créé par Mme Marguerite Long au cours d’un festival Ravel dirigé par un jeune musicien portugais, M. de Freitas-Branco, le 14 janvier 1932. Le succès tut triomphal et valut au chef d’orchestre une réputation — méritée — de "prince de la baguette". Mme Marguerite Long dut entreprendre une tournée pour faire connaître le Concerto de Ravel dans les capitales européennes. L’auteur, se pliant aux exigences du genre, avait voulu faire œuvre brillante. Il ne se dispensa point pour cela de faire œuvre profonde. Divisé classiquement en allegro, adagio et finale en rondo, ce concerto est étincelant; le mouvement lent fait chanter une longue phrase dont la séduction est irrésistible.
MME MARGUERITE LONG |
Le Concerto pour la main gauche fut écrit à l’intention du pianiste manchot Paul Wittgenstein, qui en donna la première audition à Paris le 17 janvier 1933, avec le concours de l’Orchestre Symphonique de Paris. Les trois mouvements se jouent sans interruption, ce qui contribue à imprimer à l’ouvrage un caractère d’unité et de force singulier. Le second mouvement est une sorte de rag-time d’un très curieux effet rythmique. Parfaitement différent du premier, ce second concerto doit être mis au même rang : c’est une œuvre de premier ordre.
PIANISTE PAUL WITTGENSTEIN |
En 1934, un chant suprême, un adieu... Don Quichotte à Dulcinée, crée aux Concerts Colonne le 1er décembre par M. Martial Singher. C’est encore une fois vers l’Espagne que Ravel s’est tourné. Trois chansons composent le recueil ; la première est romantique, la deuxième épique, la troisième est une chanson à boire. Trois chansons, trois rythmes de danses, une "guajira", où alternent les mesures à 6/8 et à 3/4 ; la seconde, un "zortzico", à 5/4 ; la dernière, une "jota aragonese". Trois chansons pleines de vie, trois tableaux ramassés, concis, où pas un détail n’est inutile, où tout est sobre, jusque dans la violence... Et ce fut tout.
MARTIAL SINGHER |
On l’apercevait parfois encore au concert, en compagnie de son cher Maurice Delage. Et puis on ne le vit plus.
MAURICE RAVEL ET MAURICE DELAGE SOURCE GALLICA BNF.FR |
Il avait toujours été réservé, et son ironie même n’était guère qu’un vêtement dont, par pudeur, il couvrait sa tendresse. Il n’aimait point qu’on s’occupât de sa personne, ne recherchait que la perfection de ses œuvres et non les satisfactions de la vanité. En 1919, très simplement, il refusa la croix de la Légion d’honneur. Il avait toujours vécu près de sa mère qu’il chérissait. Quand elle mourut, il demeura inconsolable. Le dévouement de son frère, le zèle affectueux de quelques intimes ou disciples — Maurice Delage, Roland-Manuel, Manuel Rosenthal — adoucirent cependant la solitude qu’il recherchait dans sa maison de Montfort-l’Amaury, où il s’était entouré de bibelots précieux. Il réservait aux jeunes le meilleur accueil et les conseils qu’il a donnés ont toujours été judicieux et bienveillants.
MAURICE DELAGE PAR CATHERINE STRAVINSKY |
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