AUTOUR DE BAYONNE EN 1855.
Le Pays Basque en 1855 est une destination prisée par les premiers touristes aisés, qui peuvent venir de Paris à Bayonne en train.
PHARE BIARRITZ 1905 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette nationale ou le Moniteur universel, dans son édition
du 20 mai 1855, sous la plume d'A. Germond de Lavigne :
"Autour de Bayonne.
...Et de l’autre côté du rivage, les riches campagnes du Labourd, et au loin, tout au loin, les montagnes bleues couronnées de neige, les belles vallées qu’habite ce noble peuple basque, dont l'histoire est aussi vieille que le monde, dont les moeurs sont dignes d'étude, dont l'idiome curieux a traversé les siècles sans jamais se modifier.
Un Basque disait à je ne sais quel grand personnage : "Nous ne datons plus."
Euskariens, Cantabres, Vascons et Basques, tous ces noms appartiennent au même peuple, issu des premiers maîtres de la péninsule transpyrénéenne et duquel ont parlé tour à tour Sénèque, Diodore de Sicile, Lucain, Mariano, Garibaï, Strabon et tant d’autres. Maîtres d’abord de toute l’Espagne, puis seulement des riches vallées qui s'étendent de l'Ebre à l’Adour, ils eurent sans cesse une grande influence sur la destinée des peuples qui s’agitaient autour d'eux ; et ils parurent sur tous les champs de bataille, contre les Romains, contre les Goths, contre les Maures et contre les Aquitains, faisant toujours pencher la balance du côté de ceux des combattants à qui leur concours était assuré.
COSTUME BASQUE PAR FEILLET 1852 PAYS BASQUE D'ANTAN |
De cette fédération puissante, il ne reste plus aujourd'hui que sept provinces, la haute Navarre, la Biscaye, l’Alava et le Guipuzcoa en Espagne, et en France le Labourd, la basse Navarre et la Soule. Ces hommes, frères par l’origine et par la langue, sont devenus, par la politique, étrangers les uns aux autres et souvent ennemis ; et pendant que les Basques transpyrénéens conservent, au milieu des misères de la jeune Espagne, des ombres de leurs privilèges et de leur organisation démocratique, les Basques de France sont devenus citoyens, sous le même niveau que leurs voisins les Gascons, qu’ils ont tant combattus, tant molestés, tant dédaignés.
Néanmoins, il est aujourd'hui encore, parmi les montagnards des deux versants des Pyrénées, des Cantabres de la vieille race qui ne pensent pas que tout soit dit sur leur avenir, et qui sourient en inities à la pensée d'une reconstitution de l’antique fédération des Basques. S'ils n’espèrent pas encore, du moins ils rêvent la réunion à venir des sept provinces, qui formeraient une petite république sous le protectorat des deux grandes puissances. A leurs yeux, la création tant sollicitée d’un département de l'Adour, composé des arrondissements basques de Bayonne et de Mauléon, eût été une première forme donnée à leurs songes.
La langue basque a traversé toutes ces vicissitudes, pure, intacte et toujours originale, preuve éclatante de l’antique origine des hommes qui la parlent.
CIBOURE PAR FEILLET 1852 PAYS BASQUE D'ANTAN |
D’où vient-elle? d'où dérive-t-elle ? quel autre dialecte a contribué à la former ? grec, latin, hébraïque ou arabe ? Nul ne le dit. Il paraît prouvé, au contraire, qu’elle est plus ancienne que tous, et qu’elle n’a d’analogie qu’avec le breton et le gallois, derniers vestiges, comme elle le serait, de l’antique langue de nos pères les Celtes.
Elle est difficile et soumise à des règles nombreuses de grammaire et de syntaxe ; on l’appelle, non le basque, mais l'eskuara ; elle compte encore des adeptes dévoués ; elle a été le but des études d’un grand nombre de savants, et l’un d'eux, Guillaume de Humboldt, lui a consacré deux traités célèbres.
Littérairement, l’eskuara a peu produit, et il est étrange que, doué d’une imagination ardente, pourvu d’un idiome qui est apte, malgré son apparence inculte, à toutes les combinaisons du style et de la poésie, le peuple basque n’ait pas produit autre chose que des pastorales, et çà et là quelques poésies.
LES POEMES BASQUES PAYS BASQUE D'ANTAN |
A part des épisodes empruntés à la Bible et à la mythologie, les souvenirs de Roland, ceux des chevaliers de la Table ronde, de Clovis, d’Alaric, de la guerre des Maures, de Napoléon, fournissent matière à ces pastorales, qui ont leurs règles poétiques aussi inflexibles que l’a été chez nos classiques la loi des trois unités. Les auteurs sont des pâtres ou des chasseurs d’isards, qui vivent presque toute l’année dans la solitude, au milieu des traditions naïves dont leur esprit est nourri ; les acteurs, c'est tout un village ; les spectateurs, toute une contrée.
Le théâtre se dresse en plein vent, au milieu d’une vallée, dans la clairière d une forêt. Pour l’ornement de la scène, pour la meilleure exécution d’une oeuvre dont on a parlé un an et souvent deux ans à l’avance, on met en réquisition toutes les richesses, toutes les parures, les bijoux âgés de deux siècles, les costumes de toutes les époques. L’orchestre se compose du tambourin et de la flûte, qui constituent la musique nationale ; les comparses sont des troupes d'empereurs et de Sarrasins, qui, pour se déployer plus à l'aise, évolutionnent sur la pelouse, tout autour de la scène, sur laquelle ils apparaissent au moment décisif.
PASTORALE ORDIARP 1909 PAYS BASQUE D'ANTAN |
La pièce commence par un long prologue que récite l’auteur ou l’un des acteurs, sur le ton de la mélopée grecque, et qui esquisse à grands traits le sujet de la pastorale. Puis parait Attila en uniforme de garde national, ou Roland drapé dans le caban d’un officier d'un cantonnement voisin, ou le Cid en habit noir, ou le roi Hérode affublé d’une robe de fantaisie. Les jeunes Basquaises prennent part à ces fêtes, et leur plus grand plaisir est de remplir des rôles d'hommes, de revêtir les costumes de notre siècle et de singer, de l’air le plus comique, les airs terribles des héros du drame.
C’est là tout ce que fournit le sol basque en fait de monuments de littérature nationale. Bien peu existent autre part que dans la mémoire des acteurs, la tradition les y conserve, et si quelques uns ont eu les honneurs de la transcription, ils sont précieusement conservés par certaines familles comme un poétique patrimoine. On peut y ajouter quelques elhezahar comme ceux que j’ai entendus la veille de la chasse aux palombes, des chansons de bardes et quelques poésies de courte haleine.
Parmi les auteurs de ces dernières, il faut citer surtout Oyenhart, qui fit un célèbre recueil de proverbes, la sagesse de ce digne peuple.
PROVERBES BASQUES OIHENART PAYS BASQUE D'ANTAN |
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