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mercredi 13 juillet 2022

JEAN BOROTRA LE TENNISMAN BASQUE ET LE RÉGIME DE VICHY EN OCTOBRE 1940

JEAN BOROTRA ET VICHY EN 1940.


Jean Laurent Robert Borotra, né le 13 août 1898 à Biarritz et mort le 17 juillet 1994 à Arbonne, est un joueur de tennis et homme politique français.

Surnommé "le Basque bondissant", il est l'un des "Quatre Mousquetaires".

D'août 1940 à avril 1942, il est commissaire général à l'éducation physique et aux sports du gouvernement de Vichy.







Voici ce que rapporta à ce sujet le journal La Petite Gironde, le 3 octobre 1940, sous la plume de 

René Labbe :



"Quelques heures au Commissariat Général aux Sports.



Le "Polytechnicien" Jean Borotra, chef des sportifs de France. - Le professionnalisme rigoureusement contrôlé réservé à une élite. - Une caisse centrale des sports est créée. - Le nombre des clubs doit diminuer. - La politique des terrains de jeux. - Anciens et jeunes, tous au travail.



Lorsque M Ybarnégaray — alors sous-secrétaire d’Etat à la jeunesse et à la famille — fit appel à M. Jean Borotra pour lui confier les fonctions de commissaire général à l’éducation physique et aux sports, tous les milieux furent unanimes pour estimer que choix plus judicieux ne pouvait être fait.



Toutefois, et faute de documentation précise, sans doute, on se réjouit pour le seul motif que M, Borotra avait été le "représentant-type" du joueur de tennis français. On rappela que le "Basque bondissant" pouvait exciper du plus brillant palmarès sportif. On se plut à souligner qu’il avait été l’un des "quatre mousquetaires" à qui nous devions la conquête et la possession, durant plusieurs années consécutives, de la Coupe Davis. On établit que M. Jean Borotra comptait, à son actif, près de cinquante titres de champion national et International. Ceci, qui émanait d’excellents sentiments, était un des à côtés du sujet. 



Nous avons, en effet, la certitude que le choix de M. Jean Borotra fut beaucoup plus fonction de son "curriculum vitae"... civil et de son standing moral que de son incomparable valeur de tennisman. 



Elève de l’Ecole polytechnique, le commissaire général aux sports conserve la formation, l’empreinte de l'établissement de la rue Descartes. Ingénieur, il a gardé le culte des solutions précises, des réalités mathématiques. Industriel, il possède le souci des plans productifs.



C’est à ces qualités-là, plus qu’à son seul bagage sportif, que M. Jean Borotra doit d’avoir été confirmé dans ses attributions par M. le maréchal Pétain. 



C’est un "réalisateur" que les sportifs de France ont à leur tête. C’est à un adepte des formules concises, apurées, efficientes, qu'est confié le soin de "créer" l'éducation physique et de "régénérer le sport". C'est, enfin, à un homme qui voulut — pour aussi alléchantes qu'aient été les offres qui lui furent faites — demeurer intégralement amateur, que revient le soin de "nettoyer" la conscience du Sport français. 



Et ceci devait être affirmé en préambule parce que, trop généralement, on omit de le faire.



Depuis que le commissaire général à l’éducation physique et aux sports a regagné, avec une partie de ses services, les bureaux de la rue de Tilsitt, c'est, l'on s'en doute, une activité fiévreuse qui anime cet arrière-plan de l’Etoile. 



Si l'accueil y est d’une affabilité courtoise, les conversations durent peu. Minimum de temps, maximum de rendement. Il ne peut-être, là, question d’interview. Encore moins de déclarations sensationnelles, mais creuses, comme nous en connûmes trop, hélas ! 



Cependant, latitude est donnée à ceux qui ont vraiment quelque chose à dire d'exposer leurs vues, et, le cas échéant, d'apporter leurs suggestions. 



M. Foulon, choisi par M Jean Borotra comme collaborateur immédiat, les écoute d'une oreille attentive et s'emploie à concilier des points de vue qui peuvent, de prime abord, paraître opposés.



Certes, nous savons que les milieux sportifs s'étonnent, parfois, de ne point posséder des directives précises. Leur désir est légitime de connaître dans quel sens exact doivent être conduits leurs efforts. Qu'il nous soit permis de leur dire que des motifs, fort divers, ne permettent pas de dresser aussi rapidement que le voudraient les esprits impatients la charte définitive de l’éducation physique et des sports. 



La précarité des communications entre les deux zones complique la tâche. Certains points essentiels — telle la révision ou la modification de la loi du 1er Juillet 1901 régissant les Associations — ne peuvent être acquis qu'après intervention du conseil d'Etat. Enfin, du fait même que le commissaire général se refuse à envisager les solutions provisoires pour ne bâtir rien que de définitif et durable, la prudence s'impose, sans quoi rien de viable ne pourrait être crée. 



Education physique et sports doivent marcher de pair dans la formation de la jeunesse française. Concilier ces deux éléments qui vécurent en marge l'un de l'autre est oeuvre particulièrement ardue. 



Pour y pourvoir, le crédit Temps doit être largement accordé. Tous le comprendront. 



Nous pouvons cependant apporter, ici, une affirmation que d’aucuns jugeront sensationnelle. Elle a trait au futur régime du professionnalisme. 



On se souvient de la déclaration incisive... et prématurée de la suppression radicale du professionnalisme, sauf en cyclisme. Cette déclaration, faite à Pau, nous amena, dans la "Petite Gironde" du 18 août, à dire que "supprimer sans entendre" était solution imprudente ; qu'au surplus, on ne pouvait ignorer les services réels rendus par le professionnalisme. 



Et nous demandions — voici quelques lustres que nous ressassons l'antienne — que le professionnalisme, épuré, fut dirigé, surveillé par les amateurs. 



L’avis a prévalu. Après consultation du comité d’amateurisme, composé de MM. Rimet, Massard, Méricamp, Charles Denis et Foulon, le professionnalisme ne sera pas systématiquement évincé. Plusieurs sports pourront utiliser les services des professionnels. Mais ne pourront être professionnels, en nombre limité, que les athlètes et joueurs d’élite capables moralement, physiologiquement, sportivement de servir la cause du sport. Inutile d'ajouter que le contrôle sera sévère, draconiennes les conditions d'admissibilité, de recrutement. 



Et c'est là solution de sagesse qui fermera la porte aux mécomptes et déconvenues. Le professionnel "ouvrier spécialisé dans le sport et non plus manœuvre", voilà l'idée force sur quoi s’appuiera le futur statut. 



Le bon sens et l'honnêteté sportive y trouvent leur compte. C’est la façon la plus efficace de bannir des milieux sportifs français le cancer de l’amateurisme marron. 



Deux autres décisions peuvent être, maintenant, rendues publiques.



La première vise la modification du Comité national des sports. Le C.N.S. ne comprendra, désormais, que les présidents de certaines Fédérations. C’est le commissaire général qui désignera lui-même les membres du C.N.S. 



D'autre part, le principe est admis de la création d’une caisse centrale rattachée au commissariat général. Une répartition équitable des fonds permettra aux "sports pauvres" de vivre et de prospérer. Ainsi disparaîtra le scandale des "Fédérations riches et égoïstes", qui refusaient, systématiquement, de venir au secours des Fédérations défavorisées.



Dans le discours qu'il prononça le 7 septembre dernier à la radio de Vichy, M. Jean Borotra précisait : 

"Il n’est pas admissible qu'il y ait deux Fédérations pour un seul sport et qu’une poussière de clubs se dispute la faveur des pratiquants et du public dans la même ville." 



Par la suite, un renseignement indiquait qu'une ville de moins de 50 000 habitants ne devrait plus compter qu'un seul club. Le renseignement est erroné. Il n’entre point, dans les intentions du commissaire général, de ne considérer que la seule densité de population. Il estime, au contraire, que l'émulation doit jouer pleinement entre les clubs d’une même ville. Mais il désire, avant de l'imposer, qu'un très net effort de compression soit réalisé. Le nombre des clubs doit diminuer, la "poussière de clubs" disparaître. 



Les Sociétés sportives l’ont-elles, exactement, compris. Nous ne le croyons guère : rares sont les velléités de fusion ou de tentatives de fusion qui se sont manifestées jusqu’ici .



Que l’on nous permette — et c’est presque un conseil — de dire aux clubs qu'ils doivent envisager rapidement et de leur plein gré la mise en train des regroupements indispensables. Mieux vaut traiter cette question de plein consentement que de voir imposer fusions et suppressions de manière impérative. Et le sentiment du commissariat général est formel sur ce chapitre là.



Toutes les Sociétés sportives devront être "enregistrées" par le commissariat général. Cet enregistrement pourra être supprimé ou refusé. Dès lors, le club devra disparaître. Cette mesure s’étend également aux Fédérations. 



Que les clubs établissent leurs calendriers en tenant compte des difficultés présentes de déplacement. Cela les incitera tout aussitôt à réserver le meilleur de leurs soins... et de leurs ambitions à la mise sur pied de compétitions locales. 



Qu’enfin, les Associations sportives réalisent un effort collectif pour la meilleure utilisation des installations existantes.



Nous indiquions, tout à l'heure, que le commissaire général avait à charge et la "régénération" du sport et la "création de l’éducation physique", principalement pour la jeunesse. 



C'est à ce dernier problème que, logiquement, il fallait "d’abord" s’attaquer. On ne s'étonnera donc pas de constater que, jusqu’ici M. Jean Borotra ait voulu lui consacrer le principal de son effort. 



Sur ce point, la politique du commissaire général se cristallise en une phrase : "Auprès de chaque école, un terrain de jeux ; dans chaque école, un éducateur." Cette politique de bâtisseur vaut d'être exposée. 



Beaucoup de terrains existent en France, la majorité convient au sport ; peu sont aptes aux jeux.



 Indiquons les caractéristiques du terrain-type. 



Situé à moins d’un kilomètre de l'école, il doit avoir une superficie de 5 000 mètres carrés pour une école de 20 à 40 enfants, 15 000 mètres carrés pour plus de 40 élèves. Le sol, perméable, devra comporter la présence ou la proximité d’une source d’eau ou d’une adduction d’eau.



Indépendamment des terrains d'entraînement (35 m. X 60 m pour les écoles de 20 à 40 élèves, 50 m. X 85 m. pour les écoles de plus de 40 élèves), on devra s’efforcer de réaliser des terrains de jeux : balle au panier (28 mètres X 16 m.), volley-ball (22 mètres X 11 m.), pelote (25 mètres X 16 m.), football et rugby — pour les écoles de plus de 40 enfants seulement — (90 mètres X 60 m.). 



Le plateau d'évolution et les terrains de jeux établis sur sol préparé recevront une chape de 5 à 8 centimètres d'épaisseur constituée soit par un manteau de gravier et de terre grasse formant liant, soit en gazon. Le gazonnement s’établira avec du ray-grass, du fétuque, du pâturin des prés, de l'agrostide ou du trèfle blanc. Damé et roulé légèrement, le terrain ne peut être d’une pente maximum supérieure à 1 %. 



Les pistes seront constituées par une fondation et par une chape. La fondation (moellons, pierres, briques, gros mâchefer, à l’exception des gravats et des vieux plâtres) aura une épaisseur de 0 m. 25 à 0 m. 30. La chape de 0 m. 05 à 0 m. 06 sera constituée par de la cendrée (mâchefer fini ou, à défaut, par du gravillon ou du gros sable mélangé avec de la terre argileuse formant liant. Les pistes seront bordées, au ras du sol, par une lisse en béton ou en briques. Les pistes en gazon sont déconseillées du fait des frais d’exécution et d'entretien qu’elles entraînent.



Les terrains seront clôturés, sommairement, par des lisses en bols ou deux rangs de fils de fer sur poteaux de faible hauteur : 1 mètre à 1 m. 20. 



Un vestiaire-abri sera édifié : 60 mètres carrés pour les écoles de 20 à 40 enfants, 100 mètres carrés pour les écoles de plus de 40 enfants. Il comportera, obligatoirement, une installation sommaire de douches : 2 ou 3 pommes pour la cabine des garçons, autant pour les filles. L’alimentation en eau chaude sera assurée par une chaudière à bois. Un lavabo rudimentaire (tôle ou béton) sera installé dans chaque cabine. 



Le vestiaire, pourvu de bancs et de patères, sera divisé en deux pièces : une pour les filles, une pour les garçons. 



Comment seront créés et entre tenus les terrains de jeux ? 



La commune devra, obligatoirement, fournir le terrain. L’Etat prendra à sa charge 80 % des frais d'aménagement, les 20 % complémentaires devront être couverts par la commune.



C'est la main-d’œuvre disponible dans la région : camps de jeunesse, chômeurs qui procédera à l’édification du gros œuvre. Pour tout le reste — et avec quelle ardeur ne s'y livreront-ils pas — les enfants des écoles participeront à l'aménagement et à l'entretien de leur terrain.



Un terrain de jeux dans chaque commune, un terrain qui sera le bien propre des enfants parce qu'eux-mêmes auront collaboré à son édification, un terrain dont chacun pourra dire : "Il est un peu à moi", et qu’ainsi l’on aimera davantage, un terrain que l’on édifiera, que l’on fréquentera "dans la joie", voilà n’est-il pas vrai, un programme splendide dont le parfait sportsman qu'est M. Raymond Rodel est chargé par le ministère de l'intérieur d'assurer et de surveiller la réalisation.



Nous avons connu, quelques heures durant, l'activité ordonnée de la rue de Tilsitt. 



Brièvement, nous avons évoqué, avec les collaborateurs de M. Jean Borotra, tous sportifs convaincus, les souvenirs... d’avant-guerre. Et par fois l'émotion nous étreignait. 



Longuement, nous avons causé de ce que pouvait, de ce que devait être demain. Et je vous affirme que, tous, nous avions la conviction profonde qu’il ne tenait qu’à nous, qu’à tous, qu’il soit réconfortant, consolateur. Une lueur de fierté, d'espoir, faisait briller les yeux. 



Il y a, au commissariat général, un chef véritable, un animateur, qui sait ce qu'il veut, mais à qui manquent encore, il faut le dire, les moyens d'appliquer son programme.



Puisse le gouvernement les lui accorder sans retard. 



Il y a, aussi, une Equipe qui se dévoue sans compter, avec la foi dans le sport qu’elle a conservé intacte. 



Faites confiance à Jean Borotra et à ses équipiers. Ils le méritent.



Le 7 septembre, le commissaire général, s'adressant aux "anciens", disait : 


"Donnez l’exemple de l'initiative, de l'ingéniosité, de la ténacité. Si cela est nécessaire, prenez la pioche et la pelle et mettez-vous au travail... 

 

Pour amener les jeunes sur le chemin des stades, que les anciens rechaussent à nouveau les souliers à pointes, les chaussures à crampons... 


C'est à nous, les sportifs, à donner les premiers l’exemple du travail, de l’énergie joyeuse, de la volonté, de la discipline..." 



Anciens du sport, Jean Borotra compte sur vous jeunes de l’éducation physique et des clubs, écoutez vos aînés ; ils seront de sagaces mentors. 



Soyez "propres" : moralement, physiquement, sportivement. A ce compte-là, bien des erreurs funestes de naguère pourront être réparées, bien des espoirs nous demeureront encore permis."





(Source : Wikipédia)




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