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mercredi 20 juillet 2022

UNE BALADE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN JANVIER 1917 (première partie)

UNE BALADE AU PAYS BASQUE EN 1917.


Le Pays Basque, au début des années 1900, est une terre d'excursions.





pays basque autrefois labourd quai
QUAI DES BASQUES BAYONNE 1917
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta à ce sujet la revue hebdomadaire illustrée En Route, le 4 janvier 1917, sous 

la plume de Robert Scheffer :



"Le Pays Basque.


Au pays basque, Bayonne fait un pittoresque et, en quelque sorte, historique portail. Non pas que Bayonne, ancienne capitale du Labourd, soit resté, à proprement parler, une cité basque. L’élément indigène a été refoulé peu à peu plus vers l’intérieur, et le véritable pays basque commence à quelques kilomètres plus bas, à Bidart, petite station située au sud de Biarritz, qui lui-même est intermédiaire et de population panachée. Néanmoins, les caractéristiques bérets bleus des Basques y sont nombreux, et l’idiome euskarien y résonne, fréquent. 



La ville qui, par endroits, évoque déjà l'Espagne, apparaît, avec ses clochers, ceinte de verdure ; l’Adour, limpide et large, augmenté de la Nive qui l’y rejoint, l’embellit de sa courbe lumineuse. Elle est petite et charmante avec ses fortifications plantées d’arbres magnifiques, sa haute cathédrale la dominant de son antiquité, le pont des sept arches sur l’Adour, les petits ponts sur la Nive, sa place d’armes spacieuse et ensoleillée, les arcades de la rue principale, et confortable par ses cafés dorés où glaces et chocolats sont savoureux. Dans le lointain se profilent les Pyrénées, aboutissant à la Rhune dont les deux cornes pointent vers le ciel. L’Adour ondule au long de belles collines pour se déverser droitement dans l’Atlantique, dans lequel s’avance, noire, l’estacade qui protège la barre. La promenade, douce au cycliste, est plaisante sur la route qui festonne les bords du fleuve. Et le touriste qui, de la barre mourant sur la falaise, en côtoiera le bord escarpé et désert pour rejoindre Biarritz, ne regrettera pas la légère fatigue, distrait qu’il en sera par le spectacle de la mer illimitée d’une part, et, de l’autre, par la lande qui se creuse et remonte vers la montagne.

 



pays basque autrefois labourd adour fleuve
ADOUR RADE BAYONNE 1917
PAYS BASQUE D'ANTAN



Sans doute il est plus simple de se rendre à Biarritz par les différents chemins de fer et tramways qui s’y relient, où l’impression de surprise sera plus grande, au sortir de la gare, après avoir traversé une rue banale, de déboucher devant la mer glauque et toujours en mouvement, hérissée de récifs brunâtres, déferlant sur une merveilleuse plage dorée qui s’accote au nord au promontoire où se dresse le phare, vigie des marins et paisible contemplateur des joueurs de golf sur le plateau qu’il surmonte. Traversé un tunnel sous le rocher de l’Atalaye, c’est un autre paysage qui se révèle. Delà la crique du Port-Vieux, ce sont les hautes falaises argentées de la côte basque qui se déroulent, jadis arides, maintenant couronnées de parfois intempestives villas. Car Biarritz est devenu un lieu de luxe occupé par des hôtels somptueux, de riches constructions, rendez-vous de l'étranger opulent en toute saison, ce qui s’explique entre autres par un climat d’une rare égalité, commun d’ailleurs à tout le pays basque du littoral, d’où les nuits d’hiver sont plus tièdes qu’en Provence, si les journées y sont chaudes. (On prétend qu’il y a quatre saisons à Biarritz : celle des Anglais, l’hiver ; celle des Russes, le printemps ; l’été, celle des Espagnols ; l’automne, celle des Français. A part la saison espagnole, cela est fort arbitraire.) Devant l’Atalaye, et relié à elle par un pont suspendu, surgit l’îlot de la Vierge, sur lequel la grande houle vient se briser dans un superbe tumulte, et, dans les fortes tempêtes, submergeant même le sommet de l’îlot. On peut s’isoler de la mer en descendant le versant opposé, où se dessine un parc, appelé "Bois de Boulogne", autour d’un étang ovale et noir qui porte bien son nom de "Lac de la Négresse". L’endroit est recueilli, du rêve que ne disloque point le vent du large y réside. 



pays basque autrefois labourd lac
LAC DU BOIS DE BOULOGNE BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



Mais voici la petite église de Bidart, ses maisonnettes blanches et déjà le claquement sec des pelotes contre les murs. Un chant se fait entendre : Ene maitea, barda non zinen. Nik borthanoa yoiteau ? (Ma bien-aimée, où étiez-vous hier soir, quand je frappais à la porte ?) Est-ce ce chant, en est-ce un autre? Les impressions se déplacent. Après Biarritz fastueux et cosmopolite, le cadre est autre soudain, et national dans son exiguïté. La mélopée avertit d’un changement. Il semble que l’atmosphère vibre plus pure, le paysage est plus rustique, se soulève en molles ondulations d’un vert bleuâtre, où les lointains hameaux scintillent, cependant que la falaise abrupte s’abaisse vers une mer irritée. C’est peut-être le soir ; il y a de la volupté dans l’air, conviant à la danse les gars robustes à bérets plats, les jeunes filles au chignon enserré dans les foulards de couleur. Bienveillant, le curé regarde. Il sait bien qu’il n’a guère à blâmer, puisque, le moment venu, il sera toujours appelé pour bénir. Or, Bidart est peu fréquenté, mais a un hôte auguste, la reine Nathalie de Serbie, qui s’y fit construire un château dans un site isolé, en surplomb de l’Océan, pendant à l’ancien palais à Biarritz, devenu hôtel de l’impératrice Eugénie... 


pays basque autrefois château reine
CHÂTEAU REINE NATHALIE DE SERBIE BIDART
PAYS BASQUE D'ANTAN


Guéthary, jouxte Bidart, il n’y a pas si longtemps petit village pour villégiature de tout repos, a beaucoup gagné en importance, et de nombreuses et belles maisons se sont édifiées sur ses collines, sans trop altérer sa physionomie originelle. Il s’étend sur un espace assez considérable, montant de la mer vers une hauteur où culmine l'église, par groupes séparés d’habitations émergeant de bouquets d’arbres, entourées de champs de maïs et de pâturages, Les collines sont basses et faciles, coupées d’étroits vallons où fleurit l’aubépine. 



La falaise s’y ouvre et, dans l’intervalle, s’offre une petite plage où la houle arrive apaisée, à défaut de port. Les pêcheurs hissent leurs barques sur un plan incliné pavé de dalles. 



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PORT DE GUETHARY
PAYS BASQUE D'ANTAN



La vue sur l’Océan, moins éblouissante, moins grandiose qu’à l’Atalaye de Biarritz, est vaste néanmoins et c’est une belle excursion que de se rendre par la falaise bordée d’ajoncs, de tamaris aussi, dont les pentes embaument, tapissées de thym, semées d’œillets, d’immortelles, de courtes gentianes roses, jusqu’à Saint-Jeau-de-Luz. On aura plaisir à visiter le petit village d’Ahetz, situé à 5 ou 6 kilomètres dans l’intérieur, par un sentier sinueux qui, passant entre des bois de chênes, se perd parfois dans des prairies qui bordent des coteaux boisés, avec au-dessus, lointaines, les dentelures violettes des Pyrénées d’un velours si doux à l’œil qu’on serait tenté de les caresser. C’est un séjour champêtre et paisible que Guéthary, mais animé quotidiennement par les parties de pelote qui se livrent devant le grand fronton. 





pays basque autrefois plage labourd
PLAGE DE GUETHARY 1917
PAYS BASQUE D'ANTAN



De là, il est facile d’atteindre, par les montagnes russes de la grand’route, Saint-Jean-de-Luz, dont, au dernier ressaut, on aperçoit la conque étincelante, spacieuse, au dessin noble, jumelle de celle de Saint-Sébastien, avec son musoir tutélaire et que la tempête fissura pourtant, les voiliers au repos dans un azur marin d’une humeur changeante, les pinces des rochers de Sainte-Barbe et de Socoa, entre lesquelles l’océan bombé monte vers l’horizon ; la Rhune, la Haya, la longue croupe du Yaizquibel se sont rapprochées, et, plus nettes, les montagnes de la Guipuzcoa délimitent au sud l’angle du golfe de Biscaye



Saint-Jean-de-Luz est une ville ancienne où se sont conservés différents monuments de style. Le plus connu est le château de Louis XIV dont les tourelles en encorbellement retiennent immédiatement la vue. Là, de fait, habita en 1660 le grand roi, dont le mariage avec l’infante Marie-Thérèse fut célébré en grande pompe. Mlle de Montpensier nous a laissé dans ses mémoires une relation des plus curieuses de ce séjour et de la cérémonie. "On partit pour aller à la messe. Il y avait un pont dans la rue, tout tapissé par en bas du logis de la reine à l'église. La reine avait un manteau royal de velours violet semé de fleurs de lys, un habit blanc, des sacs de brocart, force pierreries et une couronne sur la tête. Pour le roi, j’avoue que je ne me souviens pas précisément comme il était habillé ; je crois qu’il était fort brodé d’or, et Monsieur aussi ; qu’ils avaient des cordons de chapeau de diamants." Voilà qui éblouit... et qui contraste avec la tenue des touristes actuels... 



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CHÂTEAU LOHOBIAGUE SAINT-JEAN-DE-LUZ 1917
PAYS BASQUE D'ANTAN



Saint-Jean-de-Luz est séparé de Ciboure par la Nivelle ; à vrai dire, les deux petites villes n’en forment qu’une, mais tandis que la première garde un caractère aristocratique, Ciboure est d'aspect plus primitif et de cachet entièrement basque. Ses habitants sont marins. Il s’y trouve aussi une population croisée de Basques et de Gitanes, qu’on désigne sous le nom de cascarots ; et les cascarotes ne laissent pas d’être une des parures du lieu, d'une beauté étrange et fort capiteuse. En longeant la rade on arrive aux falaises de Socoa, feuillets de schiste miroitants sur lesquels la mer, par gros temps, se brise et rejaillit en prodigieuses fusées. 



pays basque autrefois kascarots
CASCAROTES
PAYS BASQUE D'ANTAN



Un des grands charmes de Saint-Jean-de-Luz, c’est la campagne verdoyante qui l’entoure, la vallée de la Nivelle dont il occupe le débouché. C’est également un excellent centre d’excursions ; et précisément, cette vallée de la Nivelle nous engagera dans les régions montagneuses, et tout de suite nous mènera à Ascain, d’où se fait l’ascension de la Rhune, ce Righi du pays basque, et de ce chef un peu banalisée. 



Ascain même est un clair et propre village, situé à la base de la montagne, qui s’élève fièrement au-dessus de lui, à 90 mètres de hauteur. L’ascension en est facile par des bosquets de châtaigniers et de chênes d’abord, puis par des pentes dénudées, plus raides, semées de roches. Le sommet est allongé, se redresse en deux cornes ; du côté espagnol descend abruptement vers une forêt de hêtres dont le tapis s’étale sur les flancs arrondis de la montagne. Le panorama est immense, apparaît la lumineuse plaine de France, bien au delà de l’Adour, l’océan que frange d’or et d’argent la plage à perte de vue, aux étages successifs des Pyrénées dont les pics noirs se dressent parmi des neiges. En face, c’est la Haya, déchiquetée, farouche, et l’ouverture sur l'Ibérie. 



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DEPART DES TOURISTES ASCAIN
PAYS BASQUE D'ANTAN



Le piéton bien avisé descendra sur Vera, en Espagne. Il rejoindra sans peine une route excellente qui, par de beaux sites boisés, le conduira jusqu’à cette pittoresque cité que domine de sa masse une église trapue. L’arche mauresque d’un pont enjambe la Bidassoa, modeste encore et qui ne prévoit pas l’ampleur de son embouchure. Ici, cela est basque, mais cela est aussi espagnol ; en quelques heures de marche, on se sent transporté fort loin. Et l’on pourra descendre le cours de la Bidassoa jusqu’à Irun, agréablement, d’où le chemin de fer vous ramène à Saint-Jean-de-Luz.



D’Ascain, pénétrant plus avant, on arrivera, en franchissant un col entre la Rhune et un de ses contreforts, à Sare, agreste station d’été. Les excursions y sont diverses ; il en est deux d’un intérêt particulier ; celles de la grotte de Lesia et les Palombières."



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GROTTE DE SARE
PAYS BASQUE D'ANTAN



A suivre...




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