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lundi 7 janvier 2019

UNE MANIFESTATION POUR LA PÊCHE À SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN OCTOBRE 1934


MANIFESTATION EN 1934 POUR LA PÊCHE.


Dans les années 1930, l'industrie de la pêche et de la conserve de poissons traverse une grave crise en France, et en particulier au Pays Basque.


AFFCIHE ST JEAN DE LUZ ET CIBOURE 1934
PAYS BASQUE D'ANTAN


Je vous ai déjà parlé, à plusieurs reprises de la situation du port de pêche de Saint-Jean-de-

Luz, par exemple en 1932 ou 1933.



Voici ce que rapporta pour 1934 la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans 

plusieurs éditions :


  • le 31 octobre 1934 :

"La manifestation des marins de Saint-Jean-de-Luz.



Deux chalutiers en mer pour nourrir les pêcheurs.



Un cortège se déroule pendant que nous paraissons.



Ainsi que nous l’avons dit, la manifestation d’aujourd’hui réunit dans une commune protestation, les usiniers, les mareyeurs et les marins. 




Devant le danger qui menace notre port, tout le monde a fait bloc, et il est probable que la population tout entière s’associera à la manifestation en fermant les magasins de 2 heures à 4 heures. 




Mardi matin, dans la cour de la maison du Syndicat des Marins a commencé la distribution gratuite du poisson, faite aux marins par la Maison Elissalt. Cette maison a seule l’autorisation de faire sortir ses deux chalutiers dont la pêche alimentera les marins pêcheurs en grève forcée.




Nous savons que la manifestation sera calme et digne et que tous les éléments étrangers à la pêche et à l’industrie luzienne et cibourienne en seront impitoyablement écartés. 




Souhaitons que cette protestation de toute une ville aboutisse à une solution acceptable de la crise actuelle, et pousse les pouvoirs publics à aider par tous les moyens en leur pouvoir le retour à la vie de notre port, qui, ne l’oublions pas occupe une place très importante dans l’industrie de la conserve de la sardine. 



La manifestation du monde de la pêche s'est déroulée dans un ordre parfait à St-Jean-de-Luz


Saint-Jean-de-Luz, 31 octobre. 


La manifestation annoncée hier en signe de protestation par les usiniers, mareyeurs et marins de Saint-Jean-de-Luz et Ciboure, s’est déroulée cet après-midi à Saint-Jean-de-Luz. 



Le soleil n'a pas voulu la favoriser et c'est sous la pluie, qui ne cessera presque pas, qu'à 14 h. 20 le cortège s'ébranle de la place Louis-XIV

ts portant une couronne entourée d'une banderole sur laquelle on lit "Hommage des marins basques à M. Louis Barthou". 




Viennent ensuite : MM. Hiribarren, maire de Saint-Jean-de-Luz ; Duhau, maire de Ciboure ; puis Lannepouquet, maire d'Hendaye, conseiller général ; de Coral, conseiller d'arrondissement, maire d’Urrugne ; Lalague, Pommereau, Claverie, adjoints au maire de Saint-Jean-de-Luz ; Petit de Meurville, Magne, Remes, Soubelet, Claverie, Ladousse, Bidégaray, Corquet, Aragon, conseillers municipaux de Saint-Jean-de-Luz et de Ciboure




On remarque dans l'ordre suivant les usiniers et mareyeurs : MM. Letamendia, Elissalt, Barrère, Monny père et fils, Badiola, Diharce, etc...




Puis c'est la longue théorie des marins, tous en cote bleue d'une méticuleuse propreté, suivie des ouvrières des usines, dont plusieurs portent leurs enfants sur les bras. 



Plusieurs pancartes sont portées par les marins, à égale distance. 




On lit sur la première "Syndicat des Marins" ; sur les autres : "Contre l’envahissement des conserves étrangère", "Protection douanière", "Maintien du travail français"... 




La couronne est déposée au pied du monument aux Morts, puis le cortège reprenant sa marche se dirige vers la gare. Il suit l'itinéraire suivant : Boulevard des Pyrénées, rue Chauvin-Dragon. boulevard Victor-Hugo, place Louis-XIV, rue Gambetta, boulevard Thiers, rue Saint-Jacques. place Louis XIV, pont de Ciboure, quai de Ciboure jusqu'au monument aux Morts, allée Pocalette. Puis c'est le retour vers St-Jean-de-Luz et la dislocation devant la mairie, c’est à-dire un parcours de 5 km environ.




La manifestation s’est déroulée dans l’ordre le plus parfait. Le cortège s’étalait sur plus de trois cents mètres de longueur et on peut évaluer à plus de deux mille le nombre des marins.




Ainsi que nous l’avions fait pressentir hier, tout le commerce de Saint-Jean-de-Luz et de Ciboure a pris part aussi à la manifestation. 




En effet, tous les commerçants avaient fermé leurs magasins, y compris les banques et même, ce qu'on ne pouvait manquer de remarquer, les Pompes Funèbres. 



D’autre part, d'innombrables curieux s'étaient massés un peu partout sur le passage du cortège. 




Pendant une partie de l'après-midi, la physionomie de Saint-Jean-de-Luz était totalement transformée. Elle ressemblait à celle des villes espagnoles lors des dernières émeutes. Une différence cependant : le calme le plus complet et un silence presque absolu au passage du long cortège témoignaient de la gravité de la situation. 




Au moment de la dislocation, MM. Hiribarren et Lannepouquet ont prononcé quelques paroles de remerciements pour la parfaite tenue de cette manifestation et ont assuré les marins et ouvriers de leur concours pour mettre au plus tôt un terme à une aussi tragique situation."



  • le 1er novembre 1934 :

"Dans leur manifestation les marins de Saint-Jean-de-Luz ont demandé protection contre la ruine qui les menace. 



Le Conseil des ministres a désigné M. Herriot comme arbitre.




C’est dans le calme le plus complet que s’est ouverte la journée de mercredi, réservée à la grande manifestation de protestation qui unissait dans un même sentiment de solidarité, ainsi que l’a dit mercredi la "Gazette", pêcheurs, usiniers, mareyeurs, ouvriers et ouvrières d’usine, et toute la population luzienne. Tout le monde comprend la gravité de l’heure. Des décisions qui seront prises en haut lieu dépendent le présent et l’avenir de notre port menacé dans tout ce qui fait sa vie, dans tout ce qui assure l’existence de centaines de pêcheurs et de leurs familles, d’importantes usines de conserves, et par contre-coup, de notre commerce de détail local. 




Nulle trace d’agitation ou de fièvre durant la matinée. La distribution gratuite du poisson, s’effectue dans le plus grand ordre au siège syndical des marins. Dans le port la vie est arrêtée, et l’on ne voit même plus, en rade, les petits bateaux qui d’habitude s’y livrent à la petite pèche. En ville, c’est le courant habituel des ménagères qui vont aux provisions, et le mouvement ralenti, d’une ville d’eaux privée de visiteurs. 




A l’heure fixée pour la manifestation, on voit affluer de toutes parts vers la place Louis XIV, la masse sombre des cottes bleues des marins pêcheurs, la foule des ouvriers et ouvrières d’usines, tandis que devant la mairie se groupent autour de MM. Hiribarren, maire, Lannepouquet, conseiller général, de Coral, conseiller d’arrondissement, et Duhau, maire de Ciboure, les conseillers municipaux des deux communes et les chefs d’usines et de comptoirs de mareyage. 




Le cortège s’organise avec ordre. En tête, deux enfants portent une grande couronne cravatée d’un ruban tricolore sur lequel figure l’inscription : "Hommage des marins de Saint-Jean-de-Luz à M. Louis Barthou". Elle sera déposée au monument aux Morts de la guerre. 




Au premier rang du cortège, le maire de Saint-Jean-de-Luz et le maire de Ciboure sont encadrés par M. Lannepouquet, conseiller général, et M. de Coral, conseiller d’arrondissement. Puis viennent nos trois adjoints : MM. Lalague, Pommereau et Claverie, et le groupe des conseillers municipaux des deux communes, parmi lesquels nous reconnaissons MM. Petit de Meurville, Magne, Rèmes, Denis, Etcheverrigaray, Soubelet, Claverie, Ladouce, Bidegaray, Aragon, Corquet, etc... 




Les usines et la marée étaient représentées par MM. Elissalt, Barrére, Mony, Vicendorkv, Badiola, Diharce, Pommereau, Letamendia, etc... 




Puis viennent l’impressionnante masse des 600 marins pêcheurs en cotte bleue, marchant en rangs serrés en silence et dans un ordre parfait. Ils sont suivis de centaines d’ouvriers et d’ouvrières d’usine et de la marée. Quelques femmes portent leur petit enfant dans les bras. 




Dominant le groupe des marins, quelques pancartes où nous relevons en noir sur fond blanc les inscriptions suivantes : "Syndicat des Marins", "Protection douanière", "Maintien du travail français", "Contre l’envahissement des conserves étrangères". 




Le cortège qui se développe sur une longueur de 300 ou 400 mètres, après s’être arrêté au monument aux Morts, pour le dépôt de la couronne, parcourt les principales artères de Saint-Jean-de-Luz. Puis il gagne Ciboure, d’où, après avoir longé les quais, il revient place Louis XIV, par la rue Pocalette et la route nationale. 




Sur tout le parcours les magasins sont fermés en signe de sympathie et de solidarité. La population en masse jalonne l’itinéraire, et regarde en silence le défilé du long cortège. 




Au moment de la dislocation, M. Lannepouquet, conseiller général, placé à une fenêtre de la mairie, donne lecture de la requête suivante : 


"Les marins pécheurs du port de Saint-Jean-de-Luz-Ciboure, les ouvriers et ouvrières d’usines, réunis en une manifestation pacifique au nombre de 4 000, appuyés par les mareyeurs, armateurs, saleurs, usiniers et commerçants de Saint-Jean-de-Luz, prient Messieurs les maires de Saint-Jean-de-Luz et Ciboure, de bien vouloir attirer à nouveau l’attention de M. le Préfet des Basses-Pyrénées sur la situation tragique du Port de Saint-Jean-de-Luz-Ciboure en lui demandant de bien vouloir insister à nouveau auprès du gouvernement pour qu’il prenne les mesures susceptibles de protéger utilement l’industrie de la pêche et d’assurer ainsi l’écoulement du poisson apporté par les marins du port dont l’activité se trouve actuellement paralysée. Demandent instamment qu’une enquête soit immédiatement prescrite par le gouvernement sur une situation qui entraîne la misère dans la région."




Cette lecture est couverte d’applaudissements. Le maire de Saint-Jean-de-Luz, M. Hiribarren, après avoir reçu la requête des mains de M. Lannepouquet, assure les assistants que la requête sera transmise le soir même à M. le Préfet. Il termine en félicitant les protestataires de l’ordre et de la dignité qui ont présidé à la manifestation. 




La foule se dispersa alors sans cris, presque en silence, et un quart d’heure après, nul n’aurait pu dire qu’un grand mouvement venait de secouer la population entière de Saint-Jean-de-Luz et de Ciboure. 




Une simple remarque soulignera le calme et le sérieux de la manifestation : un seul agent de police marchait en tête du cortège. Point n’était besoin de mesures d'ordre spéciales. Tout le monde sentait la gravité de l'heure. Marins, industriels, ouvriers d'usine, commerçants comprenaient qu’en en moment se joue l’avenir et la vie des deux communes soeurs, Saint-Jean-de-Luz et Ciboure. Le dur labeur de nos marins complété par le travail de nos usiniers et mareyeurs qui constitue la vie de toute la population, est en péril. 




En ce moment où le pain quotidien est pour tous une source d'anxieuses appréhensions, c'est la possibilité de gagner ce pain quotidien qui est mise en jeu. 




Certes, nous ne nous dissimulons pas les difficultés d'ordre divers auxquelles se heurtent dans cette question nos ministres, et spécialement le ministre du commerce. Mais c’est ici, pour nous, une question de vie ou de mort. C’est la froide vérité que nous exposons sans passion, en regardant un avenir qui s'annonce angoissant si une prompte solution n'est pas apportée à une crise qui peut être mortelle. 




L’unanimité de l’appel au secours qui monte vers nos gouvernants prouve bien la réalité du mal et l'urgence qu'il y a à y apporter un remède immédiat.




On nous annonce l’arrivée prochaine de trois délégués ministériels. L’un représentera le ministre du Commerce ; un autre le ministre de la Marine marchande, le préfet, enfin, représentera le ministre de l'Intérieur. 




Puisse, de leur délibération, sortir le geste sauveur qui nous délivrera de la hantise de noirs lendemains et peut-être de la faim. 




Nous l'affirmons et l’on peut nous croire : jamais S.O.S. ne fut plus justifié."









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