LA PELOTE BASQUE À PARIS EN 1904.
En 1900, les Parisiens découvrent la pelote Basque, lors des Jeux Olympiques d'été qui ont lieu à Paris.
FRONTON NEUILLY 1900 |
Au début du vingtième siècle, il y a à Neuilly sur Seine trois lieux où se pratique la pelote
Basque :
- au N° 66 de la rue Borghèse,
- au N° 65 du boulevard Bineau,
- au N° 54 de la rue de Lonchamp, au Cercle St-James.
Je vous ai déjà parlé dans un article précédent de la pelote Basque à Paris.
Voici aujourd'hui, à ce sujet, un second article du journal La Justice, dans son édition du 25
avril 1904, sous la signature de F. E. H. Batardy :
"La pelote Basque.
Il y a quelques mois, à peine, le vieux parc de St-James, à Neuilly près Paris, s'ouvrait, tout en fête, devant un public des plus élégants.
Là, disait-on, devaient se trouver réunis les plus grands noms de l'aristocratie française, du monde artistique et littéraire et de la politique.
Dans la rue de Longchamp, des équipages fringants, des automobiles légers et rapides déposent sans cesse à l'entrée du vieux parc la foule élégante du "Tout-Paris mondain".
Je pénètre à grand'peine dans la vieille propriété de Mme Hirsch, emporté comme malgré moi par la foule qui se presse, véritable flot humain, venant là pour assister à l'inauguration du fronton basque.
C'est l'événement du jour, c'est le grand évent sportif ! Chacun veut voir le jeu de la pelote basque, dont les journaux racontent les succès en Espagne et en Amérique ; chacun veut connaître ces beaux athlètes qui ont nom : Munita, Landa, Melchior, Salazar, Arrué, Diharce, Urrutia, Americano et d'autres, engagés à prix d'or et qui vont offrir au public, impatient et avide de voir, le spectacle d'un tournoi admirable et empoignant.
PELOTARI MUNITA PAYS BASQUE D'ANTAN |
PELOTARI LANDA PAYS BASQUE D'ANTAN |
PELOTARI MELCHIOR PAYS BASQUE D'ANTAN |
PELOTARI ARRUE PAYS BASQUE D'ANTAN |
PELOTARI DIHARCE PAYS BASQUE D'ANTAN |
PELOTARI AMERICANO PAYS BASQUE D'ANTAN |
C'est au milieu d'un silence presque solennel que les joueurs — les pelotaris — font leur entrée sur la cancha — ainsi désigne-t-on l'emplacement du jeu, long d'une soixantaine de mètres sur 17 mètres de large.
Notre confrère, Victor Laborde, de l'Auto, présente au public les deux équipes, comprenant chacune un avant droite, un avant gauche et un arrière.
Les joueurs, vêtus de blanc, le béret et la ceinture rouges on bleus, suivant l'équipe, ont la main garnie d'une chistera, sorte de jouet en vannerie ; de forme allongée, creux et recourbé, destiné à recevoir la pelote.
Nos athlètes ont fort bel aspect et le public leur fait bon accueil : leur succès semble certain.
Un mur en ciment d'environ 15 mètres de haut, parfaitement uni, termine l'une des extrémités de la cancha : c'est le fronton.
FRONTON NEUILLY 1900 |
Tout est prêt ; une pelote tant enrubannée - la pelote d'honneur - va heurter le fronton avec un bruit sec, et rebondit au-dessus dés joueurs : la partie est engagée !
Le public assiste alors à un duel émotionnant : happée au vol avec une adresse et une agilité surprenantes, la pelote est renvoyée au fronton d'un geste large et puissant, rapide comme une flèche, elle revient, repart, frappant le fronton pour rebondir encore.
C'est à peine si, de temps en temps, la pelote touche le sol : prompt comme l'éclair, le pelotari bondit sur elle et la cueille au premier bond. On dirait d'une hirondelle happant une mouche au passage.
Mais le pelotari ne garde pas longtemps Sa proie ; une seconde au plus et il essaie maintenant une balle basse qui, rasant le sol, va frapper le fronton avec la rapidité d'un trait. C'est l'attaque des avants.
Prodigieusement agile, tacticien subtil et prompt, l'ennemi ressaisit cette pelote désespérée avec une incroyable adresse et la renvoie au fronton plus rapide encore ; mais l'angle est mal calculé, la pelote file obliquement, tandis qu'un cri retentit : mala ! La pelote est sortie des limites de la cancha faisant perdre un point à l'équipe malheureuse.
Cinq mille spectateurs sont là, massés dans les tribunes, applaudissant à tout rompre ces incomparables athlètes.
C'est un spectacle magnifique bien digne du cadre où il se déroule. L'arène est une merveille de bon goût : d'élégantes tribunes, d'une architecture à la fois légère et gracieuse, ont été élevées des deux côtés de la cancha, protégées par un treillis contre les dangereux écarts de la pelote.
C'est à peine si l'on a le temps d'admirer l'installation que, tout de suite, la partie reprend plus acharnée, plus émotionnante encore. Les pelotaris se surpassent en adresse et en agilité. Ils bondissent en avant, à droite, à gauche, avec des mouvements de félins, toujours happant la pelote dans leur chistera, avec une précision de coup d'oeil et de geste vraiment admirable.
Tantôt l'on assiste à une de ces passes superbes au cours desquelles la pelote est reprise jusqu'à 93 fois de suite. Le public ovationne.
Quelle bonne et saine émotion ! Ah ! les merveilleux athlètes que ces petolaris, et comme ils donnent bien l'impression d'hommes supérieurement doués, joignant la force musculaire à la grâce et à l'élégance des mouvements !
Tantôt les avants d'une équipe attaquent l'arrière de l'autre et se livrent entre eux à une lutte épique.
Dix fois, vingt fois, quarante fois de suite la pelote vole du fronton à l'arrière dont le courage et la force ne fléchissent jamais, malgré l'effort presque surhumain qu'il déploie pour soutenir ce dur combat.
On ne sait vraiment qui des deux on doit le plus admirer : ou l'avant qui fait rebondir la pelote jusqu'à soixante mètres de distance et plus, ou l'arrière qui la renvoie contre le fronton en un effort superbe.
Joué par de tels athlètes, le jeu de la pelote basque est captivant au plus haut degré. Il n'est pas de sport qui offre un intérêt aussi soutenu ; il n'en est certes pas qui surpasse en beauté celui-là.
La fougue des pelotaris emballe littéralement les spectateurs qui aiment généralement les courageux athlètes. Si les pelotaris brillent par leur adresse, leur agilité et leur entrain, ils ne brillent pas moins pour leur courage. Il faut les voir soutenir sans broncher les plus rudes combats ; ces hommes-là sont extraordinaires de résistance, tout en eux dénote un merveilleux organisme, le seul qui permette ces beaux et puissants efforts athlétiques.
Combien, parmi les joueurs de balle au tamis - de beaux athlètes aussi ceux-là - feraient d'excellents pelotaris ?
Ce sont, à mon avis les mieux préparés pour la pratique du sport basque, assurément le plus beau sport qui soit au monde. Les professionnels du tamis n'apprendront peut-être pas sans intérêt que les plus fins pelotaris sont payés, pour jouer en Espagne, de trois à cinq mille francs par mois.
Si ceci peut les engager à abandonner le gant pour la chistera, je ne les en blâmerai point. Mais on ne devient pas un bon pelotari du jour au lendemain. Il faut de l'entraînement, beaucoup d'entraînement et, je crois, aussi un peu de sang espagnol dans les veines.
La pelote basque verra t-elle son introduction en Belgique ?
LES AMIS DE LA BALLE BELGIQUE 1904 |
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