LE JUGEMENT DE L'ABBÉ MOULAT EN 1946.
En décembre 1946, l'Abbé Moulat, directeur du Pensionnat Saint-Bernard, comparaît devant le Tribunal Correctionnel de Bayonne.
PENSIONNAT SAINT-BERNARD BAYONNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien L'Humanité, le 5 décembre 1946, sous la plume de
Georges Royer :
"Le Tribunal Correctionnel de Bayonne juge : les fautes de l'abbé Moulat.
Bayonne, 4 décembre.
— Un événement qui fait grand bruit au pays basque, c'est la comparution devant la justice de l'abbé Moulat, directeur du collège des jésuites, qui avait transformé son pensionnat en maison trop hospitalière pour les hitlériens de tout poil.
Quelle sera l’attitude de la "justice" de M. Teitgen devant les délits qu’elle sera contrainte de juger ?
Nous l’examinerons en temps utile. Bornons-nous pour l’instant à rapporter objectivement les faits tels qu’ils ont été portés à notre connaissance par les témoins les plus autorisés.
En juillet 1945...
Par un bel après-midi ensoleillé de la fin du mois de juillet 1945, un monsieur d’allure respectable heurtait le porche du collège Saint-Bernard, établissement d’enseignement libre qui éduque très chrétiennement la jeunesse dorée de Bayonne.
— De la part du père Bollaert, dit le visiteur.
Il fut aussitôt introduit dans le bureau du directeur, l’abbé Moulat, affable ecclésiastique, frère de la Compagnie de Jésus, qui comptait alors dans les soixante et quelques printemps. L’entretien fut bref.
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Après le dîner, l’abbé Moulat fit quérir son hôte.
— Le père Bollaert est-il toujours en bonne santé ?
Il est en bonne santé, mon père. Je l'ai vu à Paris il n’y a pas deux jours. Il m’a confié que, depuis le mois de mai, il achemine et reçoit par votre intermédiaire le courrier qui franchit clandestinement la frontière d’Espagne,
L’abbé Moulat acquiesce de la tête. Il n’avait pas été sans remarquer le fort accent flamand de son interlocuteur,
— Vous êtes Belge, sans doute, ainsi que le père Bollaert ?
— Nationaliste flamand, mon père, tout comme lui. Et comme lui aussi traqué par la police de mon pays pour mon activité politique pendant toutes ces années, j’ai dû franchir clandestinement la frontière franco-belge, je me nomme Ruyssphaert... J’ai grand besoin de votre aide.
— Je puis vous faire passer la frontière et vous acheminer comme de coutume au père des frères jésuites à Bilbao...
— Ce n'est pas là tout à fait ce que je désire, mon père. Et si vous le permettez, je vais vous exposer en détail le but de ma visite.
— Je vous écoute.
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La confession.
— Depuis quelque six mois je m’occupe de mettre à l’abri de la police nos amis qui retrouvent en Belgique dans une situation trop exposée... De plus, il est important que ceux d’entre nous qui n’ont pas été contraints d’abandonner la place restent en relation permanente avec nos amis d’Espagne.
"Quelques jours auparavant, en effet, trois jeunes Belges, avec mon fils Gérard, convoyant vers la frontière, avaient été arrêtés à Bayonne. D’autres filières avaient été décelées par la police. Mon fils avait dû rentrer précipitamment à Paris se réfugier auprès du père Bolaert, puis aller me retrouver en Belgique, sans avoir rempli sa mission. Il a été très heureux pour nous que nos amis d’Espagne aient réussi — grâce à vous — à rétablir la connexion.
Et nos trois amis belges sont en prison et je voudrais vous demander en premier lieu si vous pouvez intercéder en leur faveur."
— Vous aurez l’obligeance de me consigner par écrit tous les renseignements nécessaires. Soyez assuré que je tenterai tout ce qu’il est possible.
— Puis-je compter sur vous, mon père, pour continuer d’acheminer nôtre courrier, ainsi que les hommes se présentant à vous de notre part ?
— Assurément.
— Sans indiscrétion, mon père, peut-on vous demander quelles sont les filières que vous utilisez ?
— M. Aguirré, d'Hendaye, qui m’a été envoyé par le père Xavier, se charge de passer le courrier. Je remets les fugitifs aux mains de Léonce Armendaritz, un Espagnol répétiteur à notre collège. Il connaît parfaitement les régions de Sare, Arnéguy. On ne saurait trouver meilleur guide...
"...Vous êtes ici chez vous, monsieur Ruyssphaert. Serez-vous longtemps notre hôte ?"
— Je rends visite demain aux pères jésuites de la rue Montpensier, à Pau, qui sont en relation avec les pères de Saint-Sébastien. Le père Bollaert m’a prié de les voir.
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