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mardi 3 octobre 2023

L'AFFAIRE PORTAGO AU PAYS BASQUE EN FÉVRIER 1938 (deuxième partie)

L'AFFAIRE PORTAGO EN FÉVRIER 1938.


En février 1938, en pleine guerre civile espagnole, éclate au Pays Basque Nord "l'affaire Portago".


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MARQUIS DE PORTAGO 1938


Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien Le Populaire, dans son édition du 10 février 1938, 

sous la plume de Jean-Maurice Herrmann :



"Comment furent arrêtés le Marquis de Portago et ses complices.



Des précisions intéressantes sont apportées sur l'affaire de falsification de passeports et d'introduction en France de matières vénéneuses, dans lesquelles sont impliqués le marquis de Portago et deux autres Espagnols.



D'après les déclarations faites par M. Ceugnard, commissaire divisionnaire à la Sûreté nationale, les autorités françaises avaient été avisées que des Espagnols franchissaient la frontière d'Hendaye, porteurs de passeports de la République espagnole falsifiés.



En accord avec les autorités préfectorales, M. Ceugnard établit un service de surveillance très rigoureux sur les divers points de la frontière des Basses-Pyrénées. Une surveillance fut également exercée dans les principales localités du département où résident des Espagnols.



On découvrit ainsi, à Bayonne, un passeport qui, à l'examen, se révéla avoir été complètement transformé. Le porteur déclara qu'il lui avait été remis par le marquis de Portago, pour se rendre à Irun. Il croyait savoir que deux ou trois passeports semblables existaient.



A la suite de cette découverte, le procureur de la République décerna un mandat d'amener contre le marquis de Portago, qui fut arrêté à Saint-Jean-de-Luz à son retour d'Espagne, où il se rendait presque chaque jour.



Pendant ce temps, une autre arrestation était opérée à Biarritz, celle de l'Espagnol Jesus-Maria Martin, âgé de 29 ans, demeurant à Saint-Sébastien.



Celui-ci, qui était également suivi depuis son passage à la frontière, était interpellé à sa sortie d'un magasin sur la place Clemenceau. Conduit à Bayonne, dans le bureau du commissaire spécial, il y passa toute la nuit avant d'être amené hier après-midi devant M. Bannel, juge d'instruction.



Une troisième arrestation a été opérée pour complicité : celle d'un nommé Escoriaza.



Les trois inculpés ont été conduits à nouveau, hier soir, à 18 heures, devant le juge d'instruction de Bayonne, qui a poursuivi un interrogatoire qu'il reprendra à 20 h. 30.



Les mandats de dépôt ont été transformés en mandats d'écrou.



A la Sûreté nationale on annonçait hier soir l'"audition" d'un quatrième individu sur lequel on ne donnait aucun renseignement.



Des ampoules suspectes.



Martin reconnut qu'il avait été chargé de surveiller des ennemis du gouvernement Franco.



Il ajouta qu'on lui avait confié des "ampoules". Sur lui furent, en effet, saisies deux ampoules contenant un produit qui n'a pu être déterminé. Une des ampoules a été envoyée à la Sûreté nationale à Paris qui la remettra au Laboratoire municipal. L'analyse de son contenu sera faite par M. Kling.



Martin avait remis une de ces ampoules suspectes à Escoriaza. Elle a été retrouvée.



Il se serait agi de supprimer certaines personnes gênant les rebelles espagnols et dont on aurait la liste.



L'interrogatoire de Martin achevé, l'étudiant a été inculpé d' "introduction en France de matières vénéneuses."



Perquisitions.



A Biarritz, où le marquis de Portago était très connu dans la colonie étrangère, son arrestation a produit un très gros effet de surprise. Diverses perquisitions ont été opérées la veille.



Le marquis de Portago étant en instance de divorce, n'habitait plus la villa "Le Pélican", propriété de sa femme (une richissime Anglaise). Il s'était installé chez son frère, le marquis de Mora Taria, à la villa "Le Rêve", rue Lavigerie.



C'est pour cette raison que les policiers se rendirent mardi soir dans cette propriété. Cette perquisition, qui fut rapide, leur permit de saisir huit grosses et lourdes malles qu'ils ont transportées hier après-midi au Palais de Justice de Bayonne.



Dans le courant de l'après-midi, le marquis de Portago a assisté, en présence du magistrat instructeur, à l'ouverture d'un coffre à son nom dans une banque de Biarritz.



Des émetteurs de T. S. F. ?



Il y a quelque temps, venait s'installer à l'hôtel d'Angleterre, à Saint-Jean-de-Luz fréquenté par les Espagnols franquistes, un représentant français d'une marque américaine d'appareils émetteurs de téléphonie sans fil. Il chercha à vendre dans la région ces appareils auxquels s'intéressèrent les Espagnols franquistes. Les démonstrations se déroulaient dans l'hôtel même, entre deux chambres, où des essais de conversations, fort peu concluants du reste, eurent lieu. 



La police, alertée, fit venir et interrogea le représentant, ainsi que le directeur de l'hôtel. L'affaire en resta là et le représentant regagna Paris.



L'enquête s'efforce de savoir si des "réalisations" n'ont pas été poussées plus loin.



Contrebande d'armes.



Enfin, une autre hypothèse est aussi formulée, celle de trafic d'armes.



Il y a quelques mois, on s'en souvient, des saisies de ballots de fusils-mitrailleurs et de cartouches furent opérées par les douaniers, du côté de Sare. Or, un renseignement parvenu à la police, tendrait à prouver que de nouveaux stocks d'armes allemandes, d'une valeur de plusieurs millions de francs, auraient été entreposé à Vera, petit village de la Navarre espagnole, situé à quelques kilomètres de la frontière de Sare.



Jusqu'à présent, aucun passage n'a été signalé, mais la surveillance a été renforcée.



Le complot du C.S.A.R.

Le Colonel Cachier, Administrateur de Sociétés, Chef du 3e Bureau du C. S. A. R., ne sait rien...



Un chef du C.S.A.R. qui, devant le juge d'instruction, blâme avec véhémence les agissements du C.S.A.R. ! - telle est l'attitude qu'a eue hier devant le juge Béteille, Georges Cachier, directeur de sociétés industrielles, lieutenant-colonel en retraite.



Il résulte pourtant de l'enquête et des déclarations du témoin Thomas Bourlier que Cachier était chef du 3e bureau de l'état-major du C.S.A.R., chargé des "opérations" militaires futures de la conjuration. Il dissimulait son nom, pour dès raisons de bienséance et de prudence à la fois, sous le pseudonyme de "Fontaine" et des conférences ont eu lieu chez lui sous la présidence de Duseigneur et d'Eugène Deloncle.



Cachier déclare qu'il s'agit là de mensonges émanant de gens malintentionnés à son égard. Pauvre chéri !



Parmi tous ses coïnculpés, il ne connaîtrait qu'Eugène Deloncle, pour l'avoir rencontré à l'Entente Européenne en 1935.



EUGENE DELONCLE VERS 1940
Par Auteur inconnu — Gayle Brunelle, Stephanie Annette Finley-Croswhite, Assassination in Vichy: Marx Dormoy and the Struggle for the Soul of France, University of Toronto Press, 2020., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=96249723



- "En 1936, dit-il, des usines étaient occupées, j'étais menacé, on inscrivait des signes cabalistiques sur ma porte."


Encore un qui avoue que la victoire du Front Populaire et la fureur fasciste qui en résulta sont à la base du complot réactionnaire !


- "Au cours de conversations, poursuit-il, nous conclûmes, Deloncle et moi, que les gens d'ordre devaient prêter main-forte à l'armée et à la police en cas de putsch communiste" (air connu !)


- Mais, avec quoi ? demande le juge.


- Eh bien ! répond l'inculpé fort sérieusement, avec les armes individuelles que nous pouvions avoir, revolvers, fusils de chasse, etc...



Le chef de la section des opérations militaires du C.S.A.R. à l'en croire, n'aurait jamais attrapé de méningite. Il n'aurait eu besoin que de conceptions stratégiques fort réduites.



Mais, Cachier qui voudrait bien être mis en liberté provisoire, (à moins qu'il ne borne ses ambitions au séjour momentané dans quelque clinique comme le général Duseigneur), essaye de démontrer au juge que l'esprit du C.S.A.R. ne l'anime pas pour un sou.


- Pour rien au monde, dit-il, je n'aurais participé à la préparation de la guerre civile. Je ne connais aucun dépôt d'armes. Les dépôts d'armes ? Je les considère comme une absurdité !



Et l'inculpé s'étendit assez longuement sur ce thème qui certainement ne sera pas du goût de son grand chef et ami Eugène Deloncle."




Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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