... Si les Armendaritz de Saint-Pée et ceux d'Arberatz ont fait peu parler d'eux, il n'en est pas de même de ceux d'Espagne qui eurent de brillantes carrières. Joseph, jeune encore, devint capitaine-général des armées du roi, chevalier de la Toison d'Or et de Santiago, vice-roi du Pérou et enfin, en 1711, marquis de Castelfuente. Il mourut sans enfants et eut pour héritier son neveu, Firmin-Joaquin, qui épousa Claude de Mont-Réal, fille et héritière de Ignace de Mont-Réal-Monein, baron d'Armendaritz. C'est ainsi qu'un Armendaritz redevint, après un siècle et demi, chef de la branche aînée de la famille.
De ce mariage naquirent cinq enfants dont l'aîné, Arnaud-Jean-Baptiste-Firmin, en 1757. Il servit en Espagne comme son père, devint lieutenant-général des armées du roi, gentilhomme de la chambre et titulaire de plusieurs titres honorifiques. Après une carrière bien remplie, il se retira à Armendaritz où il mourut, en 1733, sans laisser de postérité. il fut le dernier du nom qui ait fait sa résidence du domaine ancestral. Une de ses soeurs, Marie-Josèphe-Claude, héritière des biens, épousa, en 1778, Henry Bachoué, comte de Barraute.
Les Bachoué appartenaient à une ancienne famille du Béarn qui comptait plusieurs branches. Deux frères servirent sous Henry de Navarre, en 1569, et l'un d'eux, l'ancêtre du nouveau seigneur d'Armendaritz, acquit en février 1699, pour 20 076 livres, la seigneurie de Barraute. Cette terre étant noble, lui donna le droit de siéger aux Etats de Béarn où il entra, pour la première fois, en Avril 1609.
C'est le petit-fils de ce dernier, Henry, comte de Barraute, capitaine au Régiment des Bandes Béarnaises et chevalier de Saint-Louis, qui épousa l'héritière de la seigneurie d'Armendaritz. Il s'y fixa et y vécut jusqu'à la Révolution. Arrêté comme suspect, sous la terreur, il resta deux ans et demi en prison et mourut peu après sa libération. Son petit-fils hérita des biens qui furent transmis à sa fille mariée à M. d'Antillon et, après diverses combinaisons qui ne présentent aucun intérêt, le domaine sortit de la famille pour passer à M. Illareborde, un enfant du pays, qui en est le propriétaire actuel.
Il ne reste des Barraute que leur tombeau dans l'église du village. On peut lire sur les pierres tombales les noms de Arnaud-Jean-Baptiste-Firmin, celui de sa femme, Whilelmine Alavoine de Bergue, ceux de Claude de Barraute et de son mari, François d'Antillon. Dans quatre reliquaires on remarque des cheveux de femme, une ceinture avec boucle dorée et deux décorations dont l'une la croix de Saint-Louis et l'autre la croix du Lys.
Le domaine de Jaureguia se trouve dans une des parties du pays basque les plus reculées et les moins fréquentées. En outre il est sur un plateau élevé, loin de la route conduisant de Hasparren à Iholdy par Saint-Esteben, et peu visible de loin. On s'explique dès lors qu'il soit inconnu à beaucoup de personnes qui passent près de lui sans se douter de son existence, ce qui est regrettable. Tant comme édifice qu'à cause de sa situation des plus pittoresques, il mérite une visite de tous ceux qui s'intéressent au passé de notre pays.
Ce château occupe un des plus vastes domaines du pays d'Arberoue. Du plateau découvert sur lequel il se trouve, il domine la région jusqu'aux hauteurs de Méharin, de Luxe et les montagnes du Lantabat, tandis que, à ses pieds, s'étend la pittoresque vallée dont le village d'Armendarits occupe le centre et qu'au loin, se détachent les crètes de l'Iparla et la chaîne bordant à l'Ouest la vallée de Baïgorry.
Cette vue magnifique suffirait pour faire de cette belle propriété une résidence de choix. Mais ce qui ajoute à son agrément, c'est le château lui-même et ses alentours immédiats.
Il se trouve au milieu d'une vaste terrasse d'où un bel escalier de pierre, fort bien conservé, conduisait à un jardin aujourd'hui disparu. Une eau abondante, amenée par une canalisation souterraine d'une source peu éloignée, alimentait un bassin et une fontaine en pierre de taille dont les motifs de décoration n'existent plus. Des étables, des granges, de greniers, formant une installation agricole vaste et bien comprise font suite au château. Quant à celui-ci, inhabité depuis longtemps, en partie démeublé, il ne donne plus qu'une vague idée de ce qu'il a été autrefois, bien que plusieurs de ses parties soient encore en excellent état.
C'est un bâtiment rectangulaire à deux étages comprenant un grand nombre de pièces et flanqué de quatre tours d'angle carrées. Au rez-de-chaussée, on remarque une immense cuisine avec une cheminée faite pour recevoir des arbres entiers, un fourneau potager sur lequel une douzaine de casseroles pouvaient prendre place à la fois, deux fours, des éviers et de nombreuses dépendances. Au même étage, sont de vastes pièces ayant servi de salon et de salle à manger et, dans une tour, une chapelle avec son autel, ses images de piété et les objets servant au culte.
CHÂTEAU JAUREGUIA ARMENDARITS BASSE-NAVARRE
Le premier étage, auquel conduit un double escalier de bois, possède de beaux restes d'une luxueuse habitation avec planchers marquetés, encadrements de portes ouvragés et dorés, plafonds décorés avec goût, etc... Une des chambres qui fixe le plus l'attention est celle où fut logé Don Carlos, lorsque vaincu et obligé de quitter l'Espagne, après la seconde guerre civile, il accepta l'hospitalité du comte de Barraute, au château d'Armendaritz. La tapisserie représente les grandes scènes de la conquête de l'Amérique rendue dans un style naïf et pittoresque. Dans une chambre voisine ce sont les Muses dont on distingue fort bien conservées : Melpomène, muse de la tragédie, Calliope celle de la poésie, Polymnie celle de l'éloquence, Thalie pour la comédie et Uranie pour l'astronomie.
TROIS MUSES
Mais ce qu'on ne saurait décrire, c'est la multiplicité des alcôves, des passages, tout un monde de coins et de recoins ainsi que de vieux meubles archaïques de tous genres épars çà et là et qui sont bien en harmonie avec le milieu environnant. Aussi en sort-on imprégné du passé, évoquant les scènes dont toutes ces vieilles choses ont été les témoins, regrettant de voir ces vastes pièces inhabitées mais avec l'espoir que ce ne sera pas pour toujours.
Le domaine de Jauréguia en effet est actuellement la propriété d'un homme qui connaît la valeur des choses, père de nombreux et beaux enfants et qui aime son pays. Il convient de lui faire crédit et peut-être reverrons-nous l'ancien manoir d'Armendaritz renaissant à la vie, devenir le séjour d'une nombreuse famille de vrais Basques dans cette partie du pays qui n'a pas été et ne sera sans doute pas de longtemps envahie par les étrangers."
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