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mercredi 19 mars 2025

LA VIE DANS LA COMMUNE DE SAINT-ESTEBEN EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE AUTREFOIS (quatrième partie)

  

LA VIE À SAINT-ESTEBEN AUTREFOIS.


Depuis 1936, Don José Miguel de Barandiaran, prêtre, chercheur et scientifique, originaire d'Ataun, en Guipuscoa, fait des enquêtes d'ethnologie et d'archéologie en Pays Basque français.



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BLASON DE ST-ESTEBEN BASSE-NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta au sujet de ses recherches sur Saint-Esteben, en Basse-Navarre, le Bulletin 

du Musée Basque N°20, en 1941, sous la plume de José Miguel de Barandiaran :



"Eusko - Folklore.

Documents et questionnaires.

Année XXI Sare, Janvier-Juin 1941 N° CLI-CLVI

Traits de la vie populaire de Dohozti.



... Quelques habitants possèdent des vignes (mahasti) de peu d'étendue, avec le raisin (en basque, mahats) desquelles on fabrique le vin (en basque, ano) qui se consomme à la maison. On le fabrique aujourd'hui dans un appareil moderne destiné à presser le raisin et que l'on nomme brensa (= pressoir). Autrefois, on le faisait dans un grand récipient en bois dans lequel le raisin était en premier lieu pressé avec les pieds et ensuite pressé au moyen d'un pressoir en bois lequel faisait partie du récipient. Cet engin rustique se nommait lako.



Dans beaucoup de maisons on fait du cidre (en basque sagarrano). Pour cela, on pile premièrement les pommes avec des masses et ensuite on les presse. Le liquide qu'on obtient ainsi est recueilli dans des barriques où on le laisse fermenter.



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CIDRE DE CONTREBANDE ASCAIN
PAYS BASQUE D'ANTAN


Une autre sorte de cidre est celui que l'on appelle pitarra. C'est celui qui résulte de la fermentation dans une cuve ou une barrique d'un mélange d'eau et de pommes préalablement pressées.



En mélangeant de la noix, du sucre et de l'alcool on obtient une liqueur appelée odeno, qu'on substitue parfois au café.



Gaziza est le nom d'une autre boisson domestique.



Les hommes fument du tabac (et non autre chose), depuis l'âge de quinze ou seize ans. Les femmes ne fument pas.



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ATTELAGE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les anciens fumaient généralement avec une pipe en bois ; plus anciennement on employait des pipes en os et aussi en terre. Pour allumer la pipe, quelques-uns emploient le suarri (silex) et l'amadou, comme nous l'avons déjà dit par ailleurs.



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VIEIL HOMME AVEC PIPE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les jeunes hommes fument la cigarette.



Ils croient que de fumer, cela facilite la digestion des aliments.



Certaines familles possèdent des abeilles, desquelles on obtient du miel qui se consomme lorsque l'alimentation domestique l'exige.



L'opération qui consiste à enlever le miel aux abeilles a lieu en novembre. Pour cela on tue d'abord l'essaim en l'enfumant avec de la fumée de soufre et ensuite on recueille les rayons (en basque, bleska).



Les fruits que l'on récolte principalement à Dohozti sont les suivants : sagarr (= pomme), bertxika (= pêche), abrigot (— abricot), madari (= poire),  (= prune), gerezi (= cerise), gaztan (= châtaigne), mizpira (= nèfle), hurr (= noisette), intzahurr (= noix), piku (= figue), rosella (= groseille), gaziza (= cassis).



Parmi les aliments autrefois en usage, selon les souvenirs de mon informateur, il faut mentionner le pain de seigle (en basque, zekale) que l'on fabriquait à la maison.



V. — La vie domestique.



Aujourd'hui chaque maison etxe — est habitée généralement par une même famille.




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MAISON BASQUE 1892
PAYS BASQUE D'ANTAN


La famille est ici une association du mari et de la femme conjointement avec leurs enfants non encore émancipés (ou qui ne se sont pas établis au dehors dans un état) et avec les générations d'ancêtres qui habitèrent la même maison où vivent leurs descendants actuels.



Il existe fréquemment une association matrimoniale, de sorte que des ménages — celui du père et de la mère et celui de l'héritier marié, c'est-à-dire celui du fils ou de la fille qui, en se mariant s'associe à eux — habitent la même maison, formant une famille et une entité économique.



Le propriétaire d'une et sa femme sont seuls désignés sous les nom de nagusi et etxekoandere respectivement, précédé du nom de leur maison: Ainsi on dit : Argaineko nagusia ( = le maître d'Argaine), Argaineko etxekoanderia (la maîtresse d'Argaine).



Le mari et la femme se donnent mutuellement le traitement respectueux de zu, qui équivaut à l'Vd espagnol et au vous français. Si, avant de contracter mariage, ils se traitaient par i (= tu), depuis le jour où ils se marient, ils se disent zu. Ils disent i à leurs enfants et à leurs domestiques, mais ils sont traités de vous par ceux-ci.



C'est à l'homme que revient principalement le soin et la direction des travaux agricoles et du bétail. La femme l'aide dans les travaux des champs.



L'allaitement et l'éducation des enfants sont à la charge de la femme, ainsi que les travaux de la cuisine, la propreté de la maison, l'achat et l'entretien des vêtements et du linge domestique, l'achat et la vente de la volaille et de ses produits, etc...



Les parents désignent comme héritier un de leurs enfants, presque toujours l'aîné — fils ou fille — lequel se conforme généralement aux formalités matrimoniales qui précèdent le mariage de l'héritier. Dans ces mêmes formalités on signale certaines obligations familiales du nouveau ménage et les relations morales et économiques de la double famille ou de l'association matrimoniale qui naît alors.



Avec le nouveau ménage, la continuité de la famille est assurée ainsi que l'inaliénabilité de la maison et de son foyer, car il faut remarquer que le domaine ou patrimoine familial passe indivis aux mains de l'héritier, c'est-à-dire : l'etxalde ou maison avec ses dépendances et accessoires, terres et chemins, constructions complémentaires, l'hilarri ( = sépulture), elizaleki (= place à l'église) et l'hilbide ou chemin par où l'on conduit à l'église les défunts de la maison. Il n'est pas régulier cependant que la maison soit transmise à l'héritier du vivant de ses parents.



Les autres fils reçoivent leur dot, puisqu'une quantité équivalente aux trois-quarts du patrimoine familial doit être répartie entre tous les frères.



En cas de désaccord entre le père, la mère et le jeune ménage qui leur est associé, c'est celui-ci qui quitte la maison, en recouvrant ce qui leur est attribué dans ce cas en vertu des conventions matrimoniales.



Les frères de l'héritier qui travaillent à la journée hors de la maison gardent pour eux leur salaire, sauf en cas de nécessité de leurs père et mère. Mais s'ils travaillent dans la maison paternelle, ils ne reçoivent aucune rémunération comme salaire durant la vie du père et de la mère. A la mort des parents, ou à l'âge de trente ans, ils reçoivent leur dot et sont rétribués pour les travaux qu'ils effectuent à la maison. Ils peuvent ensuite continuer à y travailler et sont payés à la journée.



Quand un ménage n'a pas de successeur, il adopte généralement un neveu comme héritier. Ce fils adoptif se nomme en basque : omdokoin.



Il n'existe pas dans les maisons de pièces ou de chambres à coucher destinées spécialement à certains membres de la famille.



Certaines maisons possèdent un domestique (en basque, mutil) ou une servante (en basque, neskato), comme auxiliaire dans les travaux des champs.



Les domestiques sont traités comme les membres de la famille et vivent en commun avec leurs maîtres dans leur maison où ils dorment et où ils mangent à la même table.



Ils sont payés à l'année. Un bon domestique reçoit une paie (soldata) de 2 000 fr. par an à laquelle s'ajoute la nourriture, le logement et l'entretien des vêtements usagés. A une servante, on donne 1 500 fr. Les maîtres avaient coutume, autrefois, d'acheter les vêtements pour leurs domestiques, tant ceux des jours fériés que ceux des jours ouvrables ; aujourd'hui il n'en est plus ainsi. Néanmoins, au terme de leur contrat et au moment de prendre congé de leurs maîtres, ceux-ci leur remettent une certaine somme à titre de cadeau.



Si le domestique quitte la maison volontairement, sans attendre la fin de son contrat annuel, il n'a pas le droit de recouvrir, avant la fin du délai restant à courir, les salaires correspondant au temps où il a travaillé dans la maison. Mais si, l'année étant commencée, c'est le maître qui renvoie son domestique, il doit lui remettre aussitôt la paye correspondant au temps qu'il a passé à son service.



Pour certains labeurs, comme le charroi du foin ou du blé, qui doivent être promptement exécutés, surtout sous la menace de la pluie, on fait appel aux voisins. Ceux-ci accourent, faisant don de leur travail par esprit de solidarité et d'assistance mutuelle.



On emploie quelquefois des journaliers pour effectuer des travaux agricoles urgents. On les désigne en basque sous les noms de alokanta et pakanta. On leur donne la nourriture plus sept ou huit francs par jour.



Une Question.



Cher lecteur, pouvez-vous faire une description détaillée des coutumes et opérations dont il est question dans les lignes précédentes telles qu'elles se pratiquent dans votre village ?



Envoyer les réponses à M. José Miguel de Barandiaran, "Ibarsoroberri", Sare (Basses-Pyrénées).

José Miguel de Barandiaran.



Note du traducteur — On peut remarquer que l'auteur emploie la graphie basque tx concurremment avec tch. La première de ces graphies est ordinairement celle du basque espagnol etxea, alors que l'orthographe du basque français impose etchea. La prononciation est la même dans les deux cas."



A suivre...




Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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