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vendredi 21 mars 2025

L'ÉGLISE DE SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE (huitième et dernière partie)

  

L'ÉGLISE DE SAINT-JEAN-DE-LUZ.


L'église Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean-de-Luz est renommée pour son retable du 17ème en bois doré et pour y avoir vu y célébré le mariage du roi Louis XIV le 9 juin 1660.

L'église est classée au titre des monuments historiques par arrêté du 7 mars 1931.




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INTERIEUR EGLISE SAINT JEAN-BAPTISTE
SAINT-JEAN-DE-LUZ D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet le bulletin de la Société des sciences, lettres & arts de Bayonne, du 

1er juillet 1932, sous la plume de Pierre Dop : 



"... Le clocher— Nous avons déjà dit que le porche au-dessus duquel le clocher est élevé porte la marque du XVe siècle comme tout ce qui subsiste de l'ancienne église gothique, et que le premier étage de la tour remonte aussi à la même époque.



Le deuxième étage fut sans doute une oeuvre du XVIe siècle. Il est indiqué dans le dessin de 1612 déjà cité. Mais il y paraît de plan carré et non octogonal comme il l'est en réalité. Nous estimons ne pas devoir nous arrêter à cette divergence. Outre que l'auteur se montre peu soucieux de l'exactitude du détail, il faut reconnaître qu'à la distance d'où la vue a été prise, la forme octogonale se distingue difficilement.



Dans le même dessin, nous relevons aussi la couverture assez inclinée du clocher.



Quant au 3ème étage, il date de la seconde moitié du 17ème siècle. En effet, dans les Archives Municipales de St-Jean-de-Luz, figure un acte daté du 17 juillet 1685, et intitulé : Accord pour la construction de la charpente du clocher de ce lieu passé entre MM. les curé, bayle, jurats et marguilliers de St-Jean-de-Luz et quelques charpentiers de ce lieu.



Il en ressort qu'en 1685 le clocher a été surélevé. Il y est parlé d'une bâtisse de muraille à effectuer par les maçons.



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CLOCHER EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les comptes du sr Dithurbide, bayle à cette époque, parlent aussi de construction, redification (sic) du clocher et de nombreux charrois de pierre furent effectués par les bouviers d'Acotz, comme le révèlent certains articles de ces comptes.



La couverture fut faite en plomb. Nous le tirons de documents postérieurs dont nous parlerons plus loin. Ce procédé auquel on eut recours malgré son prix coûteux est l'indication que l'inclinaison donnée à cette couverture rendait impossible l'emploi plus économique de tuiles, et que cette inclinaison était fort prononcée. Il s'agissait donc d'une sorte de flèche. L'on reporta sur cette flèche la girouette ou croix de fer, de l'ancien clocher, dont on dora les branches.



C'est alors que la tour obtint la forme la plus élégante. Elle la garda peu de temps. Le 27 novembre 1706, vers midi, la foudre tomba sur la pointe du clocher et y mit le feu.



Avant l'invention du paratonnerre, c'était un accident fréquent dans l'histoire des édifices religieux et, s'il s'est raréfié depuis lors, un événement récent (15 avril 1930) nous force à reconnaître que tout danger de ce genre n'est pas définitivement écarté.



La couverture en plomb se mit à fondre sous la chaleur du brasier, et le plomb fondu tombant en gouttières empêcha pendant près d'une heure l'attaque du feu par les nombreux habitants de St-Jean-de-Luz et de Ciboure qui s'étaient rassemblés autour de l'église. Dès que le métal en fusion eût cessé de couler, des hommes montèrent dans la tour et s'appliquèrent à jeter dehors les poutres et les grosses pièces de bois qui étaient enflammées. Ces pièces tombèrent soit sur le toit de la nef et ceux des deux maisons voisines attenantes au porche, soit sur le cimetière et dans la rue. Les deux petits toits qui existent encore au-dessus des escaliers des deux côtés du clocher furent fortement endommagés. Le corps principal de l'église commença aussi à brûler. Cependant on travailla avec tant d'ardeur et d'énergie qu'assez rapidement on se rendit maître de l'incendie. A l'aide de cordages on hissait l'eau jusqu'en haut. Les dirigeants de la communauté eurent aussi l'idée de faire mettre en pièces des voiles de navires, de les mouiller abondamment et d'en recouvrir les cloches qui risquaient de se fondre. Ce moyen les préserva efficacement.



Nous recueillons ces détails dans le procès-verbal d'une assemblée de notables qui se tint deux jours après.



Cette assemblée vota une résolution demandant à l'Intendant de la Province l'autorisation de prendre sur les revenus communaux de l'année suivante de quoi restaurer le clocher et indemniser les particuliers pour les voiles, cordages et outils, sacrifiés dans la lutte contre le sinistre. Et "elle donna pouvoir auxd. sieurs bayle et jurats de faire mettre une petite couverte de thuile soutenue d bois au-dessus dudit clocher pour empescher que les planches et les poutres quy soutiennent les cloches ne se pourrissent". Deux jours après, soit le 1er novembre, les travaux furent adjugés à Bernard de Celhaye pour la somme de 170 livres.



Ces travaux étaient faits à titre provisoire. On relève ceci dans l'intitulé des dépenses qui les concernent : la couverture quon y fit mette presentemt estant par provision sous une forme basse en attendant quelle soir mise à sa perfection.



Cependant cette couverture est restée définitive et elle a donné au clocher de St-Jean-de-Luz la silhouette qu'il conserve de nos jours.



La tour est flanquée de deux escaliers destinés à l'accès des galeries par l'extérieur de l'église. Celui du côté nord remonte à 1675. Nous le savons par une reconnaissance de la Communauté au profit de Hayet d'Etchebiague, marguillier, qui avait permis que le terrain du cimetière affecté à la sépulture de sa maison fut recouvert par les degrés de pierre de cet escalier, et qui reçut en compensation une sépulture à l'intérieur de l'église.



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ESCALIER EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN 




L'escalier méridional, tel qu'il existe aujourd'hui, date de 1750. Il succédait à un escalier en bois, qui fut démoli "par ordre des supérieurs à l'occasion du passage de Madame la Dauphine de France", Marie-Thérèse d'Espagne, en 1745. Cinq ans plus tard, il fut orné de sa belle rampe en fer forgé, oeuvre d'un ouvrier d'Accotz, Pierre Detcheverry, dit Briquet, qui y a gravé l'inscription suivante : "Fait par M. Detcheverry dit Briquet en 1755".



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ESCALIER MERIDIONAL EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN 



Une restauration de cette rampe a été habilement exécutée il y a quelques années. Cependant de nouvelles réparations se montrent nécessaires.



Les ouvertures— Dans la construction du XVIIe siècle, on conserva dans le mur méridional les 3 fenêtres hautes qui seraient de la fin du XVIe siècle ou peut-être des années 1635-1636, suivant ce que nous avons déjà avancé, et très vraisemblablement on continua à se servir des petites baies géminées léguées par l'édifice antérieur, jusqu'au jour où l'on pratiqua les grandes ouvertures qui en amenèrent la fermeture.



Quand on éleva le mur septentrional, on ménagea 6 petites fenêtres, car, dans le contrat du 30 novembre 1669 avec les entrepreneurs Lespinette et Barthe, il est stipulé que "lesd. entrepreneurs fairont les ouvertures pour donner de la lumière de la façon que le sieur Michel de Hayet sieur Dechebiague leur a déjà indiqué", et dans les comptes de Jean de Casabielhe un article a trait à "14 grands sheuilles de fer pour sept fenestres scavoir six du costé du nort et une du costé du sud". Celle-ci est aujourd'hui bouchée. On en voit les traces près de celles de la porte murée. Quant à celles du nord, il n'en reste plus que quatre. Les deux autres disparurent avec la percée d'une grande baie en 1769.



Les deux grandes baies des chapelles latérales du côté sud sont datées de 1650. Du côté nord, elles ne portent pas de date, mais elles remontent certainement comme les premières à l'époque où l'église fut reconstruite pour la dernière fois.



Le millésime de 1701 figure au-dessus de celles du choeur.



En 1760 et 1761, on ouvrit 4 grandes croisées, dont 3 sur le mur méridional et une sur le mur septentrional. Ces dates sont inscrites sur la clé de l'arc. Elles nous sont données aussi par les comptes de la fabrique, où figure la dépense d'un homme de garde, payé une livre par nuit, tout le temps que les croisées restèrent ouvertes quand on les construisit.



Dans le courant du XIXe siècle, les fenêtres du choeur et des chapelles latérales furent ornées de verrières sur lesquelles des images de saints sont représentées : saint Pierre et saint Jean-Baptiste dans le choeur, saint Sébastien et saint Jacques-le-Majeur dans les chapelles de gauche, saint Augustin et sainte Jeanne dans celles de droite. Les dégâts occasionnés par la foudre le 15 avril 1930 ont nécessité le remplacement des deux vitraux portant les figures de saint Jacques et de sainte Jeanne. La maison Mauméjean a exécuté ce travail.



La petite porte communiquant avec le porche est, nous en avons déjà parlé, un vestige de l'église gothique.



Le grand portail qui remplaça la porte par laquelle passa Louis XIV est de la même époque que la reconstruction de l'église et fut fait en 1664. La dépense figure dans les comptes du marguillier de Haraneder de Monségur, et il est à remarquer qu'elle fut rejetée par le vérificateur de ces comptes parce qu'on trouvait l'ouvrage "inutile et incommode".



Son état actuel date de 1868.



Voici ce que nous lisons dans le procès-verbal de la réunion du Conseil de Fabrique du 6 janvier 1867 :


La disposition primitive du portail de l'église de Saint-Jean-de-Luz a été modifiée à une époque que l'on ne saurait préciser par une maçonnerie pleine au moyen de laquelle l'une des portes jumelles a été fermée. Des lézardes dans le mur de l'édifice furent vraisemblablement le motif déterminant de ce changement. Cette modification est bien regrettable au double point de vue des lignes irrégulières que présente actuellement ce portail privé de sa symétrie et de la gêne qu'éprouve le service religieux notamment dans les diverses processions de l'année. La largeur de la porte actuelle est d'un mètre 70 cent, ouvrant un passage à peine suffisant pour le dais et pour l'affluence des fidèles qui accompagnent le St-Sacrement.



Depuis longtemps la population de St-Jean-de-Luz formait le voeu de restaurer le portail en élargissant l'entrée de l'église sans toutefois diminuer en rien la solidité du mur de l'église. Ce qui arrêtait cet élan général, c'était l'insuffisance des ressources financières.


Des dons volontaires et spontanés généreusement offert par les habitants à la fabrique ont permis au Conseil qui administre ses ressources de prendre les dispositions nécessaires pour faire exécuter l'oeuvre de cette restauration.


Le Conseil Municipal de son côté s'associant au voeu de la population a voté 1 000 francs dans le budget supplémentaire de l'exercice 1866 pour l'exécution du travail projeté.



Un plan dressé par M. Sansberro, architecte, fut rejeté par l'Administration. Un autre plan fut demandé à M. Bertrand, architecte à Bayonne, et le devis correspondant se monta à près de 8 500 francs. Un curieux incident fut soulevé par ce dernier architecte à propos de la statue de saint Jean-Baptiste placée entre les deux portes. Il craignait que la vue de cette statue ne nuise à l'ensemble des lignes architecturales du portique. Le Conseil trouva que "la question soulevée était grave en ce sens qu'elle pouvait froisser le sentiment public de la population par la substitution de tout autre saint à la place du patron de l'église de la paroisse, et décisions de l'architecte pourraient produire sur l'esprit de la population". 



Cette impression fut sans doute contraire aux vues de l'homme de l'art, et celui-ci ne les maintint pas, car la statue de saint Jean-Baptiste ne fut pas enlevée du portail. Elle y figure encore. Mais ce n'est pas la même. L'actuelle date de 1890, et l'ancienne, qui était détériorée, a été reléguée sous le porche.



La porte septentrionale de l'église est surmontée du millésime de 1663. L'auvent qui en abrite l'entrée date seulement de 1861.



Avant de terminer l'historique des ouvertures de l'église, mentionnons une délibération de la Société Révolutionnaire de St-Jean-de-Luz qui s'intitulait "Club des Amis de la Constitution de St-Jean-de-Luz" ou encore "Club des Amis de la liberté et l'égalité de St-Jean-de-Luz". Le 28 octobre 1792, cette société établit un "projet de fête à donner pour célébrer l'abolition "de la royauté et la résurrection de la république". S'attaquant à tous les souvenirs de la monarchie, elle demanda, le 31 octobre, avec "le moyen et la manière de célébrer ces fêtes... que la porte où Louis quatorze a entré (sic) à l'église soit ouverte..."



Par bonheur ce voeu ne fut pas réalisé, et le souvenir de la porte fermée dont les pierres gardent la trace, fortifié par une inscription lapidaire placée il y a quelques années, reste respecté.




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PORTE FERMEE ET SCELLEE EGLISE ST-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



V. Conclusion.



Voici en quelques mots les points essentiels à dégager de notre étude historique.



Une église existait à St-Jean-de-Luz au XIIe siècle. L'édifice, sur lequel des renseignements nous manquent, était sûrement plus ancien, et il venait sans doute après d'autres.



Il a été rebâti en style gothique probablement au XVe siècle. Le fait mérité d'être rapproché de l'incendie par les Espagnols en 1419.



Succédant peut-être à une reconstruction intermédiaire ou à des modifications importantes, une réfection pour raison d'agrandissement fut effectuée dans la seconde partie du XVIIe siècle. Elle nous a donné l'édifice actuel."







Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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