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samedi 21 décembre 2024

L'ÉGLISE DE SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE (cinquième partie)

  

L'ÉGLISE DE SAINT-JEAN-DE-LUZ.


L'église Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean-de-Luz est renommée pour son retable du 17ème en bois doré et pour y avoir vu y célébré le mariage du roi Louis XIV le 9 juin 1660.

L'église est classée au titre des monuments historiques par arrêté du 7 mars 1931.




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INTERIEUR EGLISE SAINT JEAN-BAPTISTE
SAINT-JEAN-DE-LUZ D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet le bulletin de la Société des sciences, lettres & arts de Bayonne, du 

1er juillet 1932, sous la plume de Pierre Dop : 



"Chapitre II. Histoire de l'Eglise.



II. — L'Eglise primitive.



Un fait reste acquis, et nous le tenons des documents écrits, signalés précédemment. Une église existait à St-Jean-de-Luz au XIIe siècle, et certainement d'une fondation antérieure à cette époque.



Or, comme nous tâcherons de nous en rendre compte par un examen de l'édifice, tel que nous le possédons aujourd'hui, les parties les plus anciennes ne paraissent pas remonter au delà du XVe siècle.



Cet édifice a donc succédé à un ou plusieurs autres.



Est-il érigé à la même place ?



On ne découvre dans la construction actuelle, tout au moins au-dessus du sol, aucun vestige que l'on pourrait faire remonter au XIIe siècle. Cependant on ne peut rien en conclure d'une façon absolue. Des fouilles qui n'ont jamais été faites pourraient amener des découvertes. On sait aussi que l'usage liturgique veut que les matériaux d'une église démolie servent à celle qui la remplace.



M. l'abbé Haristoy doute que la première église de St-Jean-de-Luz fût à l'emplacement de celle d'aujourd'hui. Il estime peu vraisemblable qu'on l'ait édifiée à l'une des extrémités de l'agglomération ancienne, tout près de marécages — ces marécages, disparus de nos jours, mais qui bordaient encore il y a cinquante ans la partie méridionale de la ville. — Considérant la situation du primitif hôpital ou hôtellerie affectée aux pèlerins de Saint-Jacques, tout près de l'embouchure de la Nivelle, dans la partie envahie par la mer, et celle du débouché de la route de Bayonne jusqu'en 1740 par le vallon du lac, il verrait volontiers cette première église dans les environs d'une ligne reliant les deux points considérés. A notre avis, ce point de vue repose sur des bases trop légères. Nous sommes portés davantage à adopter l'opinion que l'église, au moins trois fois reconstruite au cours de son existence, a toujours occupé le même site.



En effet, à part quelques exceptions datant surtout des temps modernes, c'est le cas ordinaire qu'un lieu de culte garde sa destination à travers les âges. Il est même arrivé aux époques de conversion que le culte chrétien se soit tout simplement installé dans les temples païens bâtis par les Romains et que, plus tard, des églises aient été édifiées sur l'emplacement même de ces temples.



Nous ne voulons pas dire par là que l'église de St-Jean-de-Luz ait succédé à un sanctuaire païen. On ne reconnaît pas le moindre indice d'une installation romaine sur les lieux occupés par la ville, et même, pour certaines considérations, nous écartons l'hypothèse de cette installation, contraire aux principes des Romains qui se jugeaient, loin des côtes, mieux à l'abri des coups de main.



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CLOCHER EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Cependant, il nous est impossible d'avancer d'une façon sûre les raisons qui ont motivé le choix de l'emplacement.



On pourrait en proposer de bien diverses. Celle qui nous semble la plus vraisemblable est la proximité de la demeure du baron, puisqu'il y eut baron et baronnie.



Précisément les Archives Municipales possèdent un document de 1670, où nous relevons qu'une maison qui était au seigneur ou baron se trouvait en face de la grande porte de l'église, maison qui était entrée dans le domaine de la communauté avec la cession de la baronnie par le chapitre de Bayonne et qui servait de boucherie à l'époque où il en est fait mention.



Devons-nous y voir la demeure même des barons, tout au moins de ceux qui précédèrent les vicomtes de Labourd dans la possession de la baronnie, et sur lesquels aucun renseignement n'est venu jusqu'à nous ?



D'autre part, voici ce que nous lisons dans l'édition de 1855 de Saint-Jean-de-Luz historique et pittoresque, par M. Léonce Goyetche :



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LIVRE SAINT-JEAN-DE-LUZ HISTORIQUE ET PITTORESQUE 1856
DE LEONCE GOYETCHE



"Dans des fouilles qui ont été récemment pratiquées pour la fondation d'une maison nouvelle, les pics des ouvriers se sont heurtés contre les restes indestructibles de la maison abbatiale. On a reconnu les voûtes presque intactes des caveaux et des cellules de pierre qui formaient des substructions inférieures et devaient servir de prison de ville".



Il est très regrettable que le renseignement ne soit pas accompagné d'indications sur l'emplacement de cette maison.



Bien qu'ancienne, une seule y correspond à notre connaissance, c'est la maison Duplom, au n° 6 de la rue de République. On y trouve en effet deux caves voûtées, en forme de larges couloirs parallèles, des murs épais, des substructions puissantes. Peut-être y a-t-il une certaine confusion dans le renseignement recueilli par M. Goyetche. Ses déductions nous paraissent aussi trop affirmatives. Plus prudemment, nous en resterons aux suppositions. Faut-il voir dans les sous-sols de la maison Duplom les vestiges du château ou de la tour dont l'existence à l'époque féodale s'impose à notre esprit ? L'emplacement serait très admissible si l'on se reporte à l'état primitif des lieux.



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CHOEUR EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


III. — L'Eglise du XVe siècle.



S'il nous est impossible de recueillir quelque donné sur les premières églises de St-Jean-de-Luz, si, en ce qui concerne celle que nous possédons, il n'existe pas non plus de documents écrits antérieurs au XVIIe siècle, du moins essaierons-nous d'obtenir certaines indications par une étude approfondie de l'édifice lui-même.



L'église porte les traces d'une construction plus ancienne à laquelle elle a succédé. Ces intéressants vestiges se composent d'un pilier monocylindrique encastré dans l'angle sud-ouest, et des restes d'une nervure enchâssée dans le mur occidental.



On suit le fût du pilier depuis le niveau du sol jusqu'à une hauteur voisine du troisième étage des galeries, où il s'épanouissait en arcs. La naissance de ces arcs reste visible et indique une voûte en pierre construite sur croisées d'ogives.



La nervure conservée en relief sur le mur occidental est incomplète. Ce qui en subsiste près du pilier ne dépasse pas le plancher de la troisième galerie. On retrouve un morceau de la partie opposée au-dessus de cette galerie. A l'aide de ces deux restes, on peut, par la pensée, reconstituer l'ensemble qui affectait la forme d'un arc brisé.



Ces vestiges sont peu de chose, suffisants cependant pour nous permettre de fixer un point certain.



Il a fixé précédemment une église de style gothique.



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NEF GALERIES ORGUES EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Cette constatation très nette nous invite à rechercher, dans le monument actuel, les parties qui subsistent encore de cette ancienne église.



Tout d'abord, c'est l'angle unissant le mur méridional au mur occidental, c'est-à-dire l'angle sud-ouest, qui, à l'intérieur, encastre la vieille colonne que nous avons indiquée, et qui, à l'extérieur, est épaulé par un contrefort l'enveloppant. C'est aussi le mur occidental, tout au moins dans la section où il porte des fragments de nervure.



Quant au mur méridional, les restaurations qu'il a subies au XVIIe siècle, comme nous le verrons plus tard, ne nous permettent pas les mêmes précisions. Sur toute sa longueur, une différence d'appareillage se remarque bien au-dessus des trois fenêtres hautes. En second lieu, une reprise de construction est également visible entre le bras du transept et le contrefort le plus voisin, près de la porte murée. Mais on ne retrouve pas sur ce mur, comme à l'angle sud-ouest, traces quelconques de piliers ou de nervures engagées.



Par contre, appartient certainement au monument antérieur le porche, avec sa petite porte donnant accès à l'intérieur de l'église. Cette porte n'est pas, en effet, dans l'axe de la nef actuelle : elle correspond à celui de l'ancienne nef, déterminé par la nervure dont on voit encore des fragments sur le mur occidental.



Enfin, il faut très vraisemblablement rattacher à l'église gothique le premier étage de la tour, dont l'un des côtés se confond précisément avec ce même mur occidental, et ce premier étage constituait sans doute, en dehors de sa toiture, l'ancien clocher tout entier.



Pouvons-nous déterminer les dimensions de l'ancien édifice ?



Du chevet nous n'avons aucun vestige. Pour la nef, la hauteur de la voûte est indiquée par le dessin de la nervure dont les restes se voient sur le mur occidental. On peut l'évaluer à 17 mètres environ. La longueur est impossible à déterminer.



Quant à la largeur, elle nous est donnée par deux indices : à l'extérieur, par une reprise de construction marquée en ligne verticale sur le mur occidental tout près de la face nord de la tour ; à l'intérieur, par la nervure que porte ce mur. Cette largeur est inférieure à l'actuelle de 5 mètres environ.



Quelles données recueillons-nous encore ?



La nef était unique. Le développement de la nervure nous le révèle.



La voûte ogivale était de plan barlong, car la naissance de l'arc diagonal, visible sur la colonne malgré les mutilations qu'elle porte, est en dehors de la bissectrice de l'angle formé par les deux autres arcs.



La structure de dette église comportait-elle des galeries latérales ? Nous en doutons. Les nervures des voûtes, descendant très bas, le permettaient difficilement, et, s'il y en a eu, ces galeries n'avaient qu'un étage, ou deux tout au plus.



Quelle époque convient-il d'assigner à sa construction ?



Toutes nos observations concordent pour lui reconnaître un âge qui n'est pas antérieur au XVe siècle. Nos préférences vont même pour que la plus grande partie du monument appartienne au milieu ou à la seconde moitié du XVe siècle.



Le profil des nervures rappelle, autant que nous pouvons nous en rendre compte, ceux que l'on donnait à cette époque.



D'autre part, voici les remarques que nous faisons dans le porche.



La forme des deux ouvertures nord et sud est un arc brisé à quatre centres.



Celle de la petite porte est un arc surbaissé en anse de panier. On sait que ce sont là des formes appartenant aux dernières productions gothiques, et, pour notre pays, éloigné des centres artistiques, nous devons tenir compte, dans l'emploi des formes et procédés nouveaux, d'un retard que l'on apprécie généralement à une cinquantaine d'années.




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PLAN EGLISE SAINT-JEAN-DE-LUZ
DESSIN BULLETIN SOCIETE SCIENCES ARTS LETTRES BAYONNE JUILLET 1932


Voici une indication plus précise qui nous est fournie par l'histoire.



L'ouverture méridionale du porche est surmontée d'un écusson qui a subi les outrages du vandalisme révolutionnaire. C'était l'écusson royal de France aux trois fleurs de lys. Malgré la mutilation, la pierre a gardé l'empreinte de ces trois fleurs. Cela nous donne une date extrême dans le recul du temps : 1450, car c'est l'année que les Anglais furent chassés du Labourd et que le pays rentra sous la domination du roi de France.



Sur le saillant de l'angle sud-ouest de l'église, est placé un contrefort, selon la bissectrice de l'angle formé par les deux murs. C'est un procédé qui n'a pas paru avant la fin du XIVe siècle.



Enfin, les deux baies géminées, aujourd'hui bouchées, que l'on remarque sur le mur méridional, sont couronnées d'arcs en accolade. Nous trouvons encore là l'indication du XVe siècle, qui est l'époque la plus reculée à attribuer à cette forme d'ouverture."



A suivre...







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