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vendredi 15 mars 2019

LA PEÑARROYA À ANGLET EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1929 (première partie)


LA PEÑARROYA À ANGLET EN 1929.


Dès 1925, il y a à Anglet, en bordure de l'Adour, un projet d'implantation d'une usine pour la production électrolytique du zinc.


pays basque autrefois
LA POUDRERIE ANGLET BLANCPIGNON
PAYS BASQUE D'ANTAN


Une très forte opposition se manifesta dès l'annonce du projet, de la part des Conseils 

municipaux des villes concernées, ainsi que des associations de défense de l'environnement...


Je vous ai déjà parlé de ce projet  d'implantation de la Pennaroya, dans un article précédent.



Voici ce que rapporta la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans plusieurs 

éditions :



  • le 1er août 1929 :

"La Penarroya et nos représentants. 



La défense de la Côte Basque. La démarche à Pau.  Une lettre de M. Petit. Au Syndicat du bâtiment.




Les représentants de la Côte Basque : Biarritz, Bayonne, Anglet, se sont rendus à Pau, hier, ainsi qu’il avait été annoncé, pour protester, une fois de plus auprès de M. le préfet des Basses-Pyrénées contre l’installation d'une industrie dont l’exploitation est jugée néfaste à Blancpignon et à la Côte Basque voisine.



labourd autrefois
PAROISSE OUVRIERE DE BLANCPIGNON ANGLET
PAYS BASQUE D'ANTAN



M. Le Barillier, maire d’Anglet, dont la présence était nécessaire, hier, dans sa commune, tout justement à cause du même péril, qu’il combat avec, on le sait, quelle ardeur, avait demandé à MM. Garat et Simonet de joindre sa protestation, au nom de ses administrés, à celles qu’ils apportaient au nom des habitants de Bayonne

maire homme politique pays basque
ALBERT LE BARILLIER MAIRE D'ANGLET
PAYS BASQUE D'ANTAN




homme politique maire depute pays basque
JOSEPH GARAT MAIRE DE BAYONNE
PAYS BASQUE D'ANTAN

M. le Dr Dulout, adjoint au maire de Biarritz, bien placé pour exprimer l’avis de la Côte Basque, n’était ni moins formel, ni moins énergique que M. Garat — lequel a mené, tous ces jours-ci, une campagne ardente, née de ses plus intimes convictions et à la lumière des documents recueillis de toutes parts, contre l’industrie dont il s’agit. 




M. le préfet a entendu avec attention les raisons qui lui ont été exposées et il en a paru impressionné. Il a proposé, nous dit-on, de réunir le Conseil de préfecture. Les délégués lui auraient fait observer que renseigné comme il l’était, il se trouvait maître dans le département qu’il administre. 




Cette décision interviendra certainement avant que s’écoulent bien des heures. Nous persistons à croire que les intérêts d’une région touristique comme la nôtre ne seront pas sacrifiés à ceux d’une entreprise étrangère et qu’on se rendra compte, à Pau, que nuire à la Côte Basque, de la façon la plus grave, ce serait nuire en même temps aux intérêts touristiques de tout le département. 




C'est l’évidence même et nous sommes convaincu qu’il ne sera pas nécessaire de faire appel à une juridiction plus haute pour que cette vérité première soit reconnue.




Une lettre de M. Petit ancien maire de Biarritz.

M. Petit, ancien maire de Biarritz, a adressé à M. Garat, député, maire de Bayonne, la lettre que voici : 

Je viens de lire votre article du journal "Le Sud-Ouest" du 29 juillet. 



Devant une question d’intérêt général dont vous soulignez l’extrême gravité, il n'y a plus de divergence d’opinion, les ressentiments personnels s’effacent et seul apparaît le devoir impérieux de s’unir pour éviter à notre région les conséquences d’une décision, qui, si elle était suivie de la réalisation dont on nous menace, serait une véritable catastrophe pour toute la région.



Sans doute suis-je tenu, comme ancien maire de Biarritz, à une prudente et correcte réserve, mais je ne puis oublier, et mon devoir est de rappeler à la population de Biarritz, que déjà il y a environ deux ans, j’avais, d’accord avec les municipalités de Bayonne et d’Anglet, fait voter par mon Conseil municipal et à l’unanimité une première protestation. La situation n’a pas changé depuis, cette protestation demeure avec toute sa force et toutes ses raisons. 



A aucun prix et sous aucun prétexte, pas de fonderie de plomb ou de zinc à quelque point que ce soit de notre admirable région touristique. 



Même en admettant qu’au seul point de vue technique toutes les précautions d’hygiène puissent être prises (ce dont je doute fort) il n’en restera pas moins cette menace entre toute redoutable du plus dangereux prétexte fourni aux stations étrangères rivales pour éloigner sournoisement de notre Côte Basque notre clientèle habituelle. 



J’ai confiance dans l’actuel Conseil municipal de Biarritz au sein duquel siègent une douzaine de mes anciens collègues, et je suis certain qu'il saura, sans plus de perte de temps et avec une précision telle que tout équivoque se trouvera enfin dissipé, confirmer la protestation jadis votée et qui plus que jamais reste l’écho de l’opinion unanime de la population. 



Veuillez bien agréer, Monsieur le Maire et Député, l’assurance de mes sentiments distingués. 


Joseph Petit, ancien maire de Biarritz."



pays basque autrefois
L'ADOUR A BLANCIPIGNON ANGLET
PAYS BASQUE D'ANTAN


  • le 2 août 1929 :

"L’Affaire de la Penarroya.




Au Syndicat de défense des intérêts généraux de Blancpignon.




Comment il expose les raisons qui justifient la protestation générale contre la Penarroya.




Le Syndicat de Blancpignon se propose de publier les différents arguments que, depuis la première heure, il n’a cessé de faire valoir sur tous les terrains : interventions de tous les instants auprès de M. le préfet à l’occasion de chaque fait nouveau parvenu à sa connaissance ; 



Communication du dossier établi par ses soins, à chacun des membres du Conseil départemental d’hygiène ; à M. l’inspecteur divisionnaire du Travail ; à M. l’Inspecteur d'Académie ; à MM. le président du Conseil, le ministre de l'Instruction publique, le ministre du Travail, au président du Conseil d’administration de la Penarroya lui-même, ainsi qu’à tous les protestataires qui se sont dressés avec nous contre la Penarroya et à la documentation desquels nous nous sommes efforcés de coopérer. 



Il croit intéressant de commencer cet exposé par la publication du document ci-contre, pétition établie par lui dès la première heure et qui fut revêtue de cinq cents signatures. 



On verra qu’elle présentait exactement l’aspect général de la question et que, depuis trois ans, les arguments qu'elle expose, loin d’être diminués ou disparus, sont toujours debout et n’ont pu que se renforcer à la lumière des enquêtes des faits d’expériences et des explications techniques qui en furent la pierre de touche. 




Nous, soussigné, habitant à Blancpignon, déclarons protester de toutes nos forces contre le projet d’installation de la Société Penarroya dans notre quartier. 



Notre opposition se fonde essentiellement sur le "caractère nettement toxique" des industries dont il s’agit, car cette nocivité, naturellement discutée et déclarée inexistante par la Société intéressée, n’en découle pas moins manifestement à nos yeux des considérations suivantes : 


1. Ces industries sont classées parmi "les première et deuxième catégories" d’industries vénéneuses, ce qui est évidemment la reconnaissance officielle des dangers qu’elles impliquent ;



2. "Les rapports" fournis sur la questions par plusieurs ingénieurs qualifiés sont "nettement affirmatifs" ; 



3. La simple lecture du rapport technique établi par la Société même et déposé au dossier, est absolument suggestive et ne laisse, non plus, le moindre doute sur ce point : 


Une cheminée de 100 mètres ; 

Des masques obligatoires ; 

Cette proportion reconnue de gaz sulfureux parmi les produits expulsés et qu’il nous est impossible d’admettre comme exceptionnelle et négligeable (ainsi qu’on nous y invite) en raison des imperfections des fabrications et des accidents toujours possibles, ainsi que de la forte densité du gaz sulfureux ; 


Ce sont là indiscutablement des éléments suffisamment symptomatiques et probants ; 



4. Les précédents auxquels nous pouvons nous référer parlent puissamment dans le même sens : 


Procès intenté à Saint-Gobain par la ville de Bayonne et les propriétaires circonvoisins pour préjudices nettement constatés ; 


Exemple des habitants les plus proches soudainement obligés d’évacuer leur demeure sous le brusque afflux de gaz vénéneux, fait d’ordre accidentel il est vrai, mais toujours susceptible de se produire et toujours à redouter. 


Pour ces raisons, nous sommes absolument convaincus que l’exécution du dit projet serait de nature à vicier gravement l’atmosphère de notre région, à en compromettre l’hygiène pour le plus grand mal de ses habitants et de sa végétation, constituant ainsi un véritable danger public. 


Et cette installation nous paraîtrait d’autant plus regrettable, plus déconcertante et plus inadmissible : 


1. Que précisément notre région vaut avant tout pour la "sanité exceptionnelle" de cette ambiance privilégiée des sapinières, faite d’air pur, puissamment oxygéné et saturé d’effluves résineux (que deviennent dès lors les pauvres espoirs du mutilé de guerre, — et il en est déjà un certain nombre dans ce cas — qui, pour cette raison, est venu y fixer son foyer ?)


2. Qu’elle vaut aussi au premier chef par "son cachet esthétique", de beauté pittoresque et son attrait touristique qu’affirment suffisamment le jaillissement continu de ses jolies villas et l’installation d’une station d’hiver dans la Forêt de Chiberta : attributs et privilèges naturels qui nous précisent et promettent à ce point de vue une magnifique destinée et en antithèse flagrante avec des objectifs industriels de nature à en perpétrer la destruction et que rien ne justifie ; 


3. D’autant plus regrettable enfin, d’autant plus imprévue, qu’il apparaît comme très possible à cette société d’établir ses usines en amont de Bayonne, sur des terrains incultes et inhabités, où sans perdre le bénéfice des voies de communication par eau et fer, elle peut éviter aux populations les dangers dont elle nous menace. 


Telles sont les raisons pour lesquelles nous nous élevons avec la dernière énergie contre les prétentions de la Penarroya et posons pour l’avenir et de la façon la plus formelle, nos droits de recours pour tous torts et dommages éventuels. 


Elles nous semblent à ce point légitimes et puissantes qu’elles expliquent la protestation unanime de tous les intéressés (particuliers, groupements et municipalités) et qu’elles nous donnent toute confiance — quelque puissant que soit notre adversaire — en la clairvoyante décision que nous voulons attendre de la Commission d’enquête et de l’administration préfectorale.

Cette pétition porte plus de cinq cents signatures ! 




La protestation générale de la population de nos trois villes, en particulier de celle de Blancpignon et de tous les groupements qui s’y sont joints, se justifie par un ensemble de raisons que le Syndicat a rassemblées en un réquisitoire étudié et documenté et qui fut déposé, par ses soins, dès la première heure, au dossier de l’enquête de commodo et incommodo




Ces arguments peuvent se classer en trois ordres : 


1. Arguments tirés de la déclaration même de la Penarroya ; 

2. Arguments tirés de l'expérience et des faits observés dans les lieux où semblables installations ont été réalisées ; 

3. Arguments tirés de la loi, de la jurisprudence et des jugements déjà rendus au sujet d’industries similaires. 




Arguments tirés de la déclaration même de la Société.



1. Elle constate que les trois industries visées sont classées par la loi en première catégorie, pour deux d’entre elles (acide sulfurique et superphosphates) et en deuxième catégorie pour la troisième (fabrication du zinc) des Etablissements dangereux : ce qui est, semble-t-il, une reconnaissance implicite et indiscutable du caractère nocif de ces industries. 


2. — "Une cheminée de cent mètres de hauteur évacuera dans l'atmosphère les gaz débarrassés totalement de l'acide sulfureux et des produits nitreux et ce n’est que tout à fait exceptionnellement que la teneur en acide sulfureux et gaz nitreux sera de 0.04 % sans jamais être dépassée. Les ouvriers travailleront sous la protection de tampons composés de plusieurs épaisseurs de gaze destinés à absorber le léger brouillard d’eau acidulée entraînée par les bulles d’oxygène se dégageant sur les anodes." 

En annonçant l'édification d'une cheminée de cent mètres de hauteur, le port obligatoire des masques autour des cuves électrolytiques, en admettant la présence possible des gaz sulfureux et nitreux dans les produits expulsés, elle reconnaît encore par cela même l’existence du danger qui exige de telles précautions. 

Nous savons bien qu’elle prétend à la perfection absolue de ses procédés de fabrication et à l’efficacité totale de ses moyens de protection...Nous verrons plus loin ce qu’il faut en penser. Retenons qu'exceptionnellement, cependant, les gaz rejetés peuvent contenir des vapeurs sulfureuses et nitreuses et il nous suffit de ces exceptions possibles, jointes aux inévitables à-coups de fabrication et aux accidents toujours à prévoir, pour affirmer l’existence d’un danger non discutable. 


3. — Dans la nomenclature des produits figurant à l’analyse des blendes en traitement, elle oublie de mentionner le fluor, élément particulièrement tenace et destructif, dont il faut bien cependant qu’elle envisage plus loin l’élimination : "dans un réservoir de décantation où elles déposeront l’acide hydrofluorsilicique à l'état gélatineux."

Or, des faits constatés à Saint-Gobain par un ingénieur chargé d’étudier la question, il résulte que la destruction de la végétation observée en l’absence même d’acide sulfurique et d'acide sulfureux, était due à la présence obstinée du fluor. 


4. — La déclaration ne nous dit pas non plus que malgré toutes les précautions prises et toutes les condensations effectuées, il se trouve toujours de l’acide sulfurique entraîné, ainsi qu’en témoignent les vapeurs blanches qui, à tout instant, se dégagent visiblement de la cheminée de l’usine de Saint-Gobain. 


5. — Il faut enfin souligner que les vapeurs entraînées par l'oxygène produit dans les cuves électrolytiques et contre lesquelles le masque doit être mis en usage, se dégagent, non plus dans une cheminée de cent mètres, mais bel et bien dans l’ambiance même des locaux pour se diffuser par les portes et les fenêtres dans l’atmosphère environnante et respirée du voisinage. 



Cet exposé marque nettement qu'il suffit de lire avec attention et bon sens la déclaration même de la Penarroya pour y trouver manifestement, dans l’ensemble des moyens mis en œuvre pour les conjurer, la preuve indiscutable de l’existence même des dangers contre lesquels nous nous élevons. 



Demain il sera traité des aperçus tirés de la réalité et des faits constatés. 



Goulet, Professeur."



Je publierai la suite dans un article ultérieur.





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