PABLO DE SARASATE VIOLONISTE ET COMPOSITEUR BASQUE.
Martin Meliton Pablo de Sarasate y Navascués est un violoniste et compositeur, né à Pampelune le 10 mars 1844, mort à Biarritz le 20 septembre 1908.
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| VIOLONISTE PABLO DE SARASATE |
Je vous ai déjà parlé de Pablo de Sarasate dans un article précédent.
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Gil Blas, dans son édition du 14 mai 1892, sous la
plume d'Adolphe Tavernier :
"... Après cette rapide esquisse de la carrière artistique de Sarasate, je voudrais dire quelques mots de l'homme. Tout comme l'artiste, l'homme est un charmeur. Pour le bien juger, il faut le voir dans son cadre, dans son original "home" du boulevard Malesherbes où il vient, chaque année, passer deux fois quinze jours, entre ses grands "récitals" d'Angleterre et d'Allemagne.
Garçonnière artistique, s'il en fut, dont les meubles, les tentures, et jusqu'à certains détails — comme les appliques pour les bougies, en forme de violons — furent dessinés, choisis, harmonisés par le grand peintre Whistler, ami intime de Sarasate, dont il a fait entre autres chefs-d'œuvre un suggestif portrait — qui ira un jour au musée de Madrid.
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| VIOLONISTE PABLO DE SARASATE |
Il est difficile de rêver une pièce mieux disposée pour faire de la musique de chambre que celle où Sarasate reçoit ses intimes, dans l'après-midi, pour leur faire goûter sans apprêt la primeur de certains trios, quatuors, quintettes anciens ou modernes, qu'il joue ou déchiffre avec le même art — avec, pour partners, des interprètes comme madame Berthe Marx, MM. Widor, Diémer, Delsart, Van Wœfelghem et autres artistes de valeur.
Au milieu de la vaste pièce, un grand piano d'Erard - tout autour des divans, des fauteuils d'une étoffe jaune sobrement tonalisée s'harmonisant avec la décoration très simple du salon. Un peu partout des souvenirs offerts au virtuose par ses admirateurs cosmopolites : des coupes en bronze, des bibelots d'art, des portraits du virtuose, des tableaux, des gravures de Wagner, de Rossini —cette dernière ainsi dédicacée : "A Sarasate, géant par le talent, dont la modestie double le charme." Puis, dans une grande vitrine, les reliques les plus chères : d'étonnants petits violons grands comme le doigt. L'artiste en a toujours un sur lui, enfermé dans sa boîte, et qu'il porte dans le gousset de son gilet ; puis çà et là, le lorgnon de Paganini, des souvenirs de Beethoven, des violons étranges, des couronnes, des décorations variées et bien d'autres curiosités qui font de ce coin privilégié un petit musée dédié à l'art du violon.
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| VIOLONISTE PABLO DE SARASATE |
Voici maintenant, reposant sur le piano, la fameuse boîte enveloppée de cuir, qui a fait le tour du monde et qui contient les deux admirables stradivarius de l'artiste : une bagatelle de cent mille francs.
Le dernier (dit Stradivarius-Boissier) et que l'artiste guettait depuis de longues années lui a été vendu par Gand à la mort du propriétaire du précieux instrument. C'est un splendide spécimen de Stradivarius, grand patron, à vernis rouge, d'une conservation parfaite et qui chante, comme on sait, sous les doigts de Sarasate.
Sarasate est un causeur abondant qui, ayant beaucoup voyagé, a beaucoup vu, retenu et observé — mais il n'est pas devenu cosmopolite pour cela, il est resté à la fois bien Espagnol et bien Parisien — au fond, il est Latin dans l'âme.
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Il conte très bien l'anecdote, celle-ci entre autres :
Un jour, après un concert où il s'était montré étourdissant, une grande dame anglaise lui fait demander sa photographie pour la joindre à quelques autres, dans un album d'une richesse rare.
A quelque temps de là, Sarasate est admis à contempler ses co-locataires de l'album, et il est fort étonné de n'en connaître aucun — bien que pour souligner la faveur qui lui a été faite, la grande dame ait ajouté - qu'elle faisait pour "l'artiste une unique exception".
Sarasate s'informe adroitement sont-ce des savants ? — des hommes d'Etat ? — des diplomates ? — Enfin, il finit par apprendre que ses compagnons de l'album sont...des jockeys. Les plus fines cravaches de l'Angleterre où ces messieurs sont, comme on le sait, traités en gentlemen de haut bord. N'est-ce pas là un amusant trait de mœurs ?
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Mais revenons à l'artiste qui a interprété l'autre jour, chez Diémer, devant une assistance choisie, et avec un succès inoubliable, trois maîtresses œuvres, d'un caractère bien différent : le quintette de Brahms, celui de Schubert "la Truite" et la grande sonate de Beethoven, dédiée à Kreutzer. Dans ces œuvres où il a eu pour partners : MM. Diémer, Delsart, Rémy, Van Wœfelghem et de Bailly, Sarasate a montré la même supériorité de style et de virtuosité.
Dans les adorables variations de l'immortelle sonate à Kreutzer il a déployé une telle légèreté d'archet, une si extraordinaire limpidité de son, exécutant les traits les plus difficiles avec une telle aisance, un tel brio que l'assistance entière lui a fait une ovation méritée.
Où Sarasate est tout à fait incomparable, c'est dans l'exécution de ses fameuses "Danses Espagnoles", compositions exquises, pleines de couleur et de variété, d'une surprenante richesse de rythmes et d'accent qui évoquent tout un coin de l'Espagne, - le plus vivant, le plus sympathique, le plus captivant. Ce sont ces fameuses "Danses Espagnoles" que le pauvre roi Alphonse XIII, mort si jeune, ne pouvait se lasser d'entendre, et qu'il redemandait toujours à Sarasate.
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| VIOLONISTE PABLO DE SARASATE |
Ces fantaisies colorées, de sa composition, comme toutes les transcriptions qu'il a faites, — plusieurs nocturnes de Chopin, par exemple, — Sarasate est le seul à les jouer ainsi. A ceux qui ne les ont point entendues, il est impossible d'en donner une idée, même approximative.
Elles sont hérissées de difficultés, et Sarasate n'a pas l'air de s'en apercevoir ; il les joue, comme le rossignol chante, et la "double corde" prend sous ses doigts des douceurs inexprimables.
Ces "Danses Espagnole dont la publication se continue sous la direction de Sarasate, qui en compose de nouvelles chaque année, formeront un recueil aussi original que varié. L'éminente pianiste, madame Berthe Marx, qui a accompagné souvent Sarasate dans ses grandes tournées artistiques, en a transcrit plusieurs pour le piano, avec un plein succès.
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