SANTA-CRUZ ET LE MAIRE DE BIRIATOU.
Le curé Santa Cruz , guérillero carliste, était un personnage hors du commun, considéré en Navarre comme un héros populaire, alors que ces adversaires le surnommait "le curé cabecilla" (le curé meneur ou leader), bandit en soutane ou encore "saint cabecilla" ou "saint homme qui s'approprie charitablement le produit de ses rapines".
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal La Patrie, le 1er août 1873, sous la plume d'H.
Castillon :
"Huit jours de séquestration par ordre de Santa-Cruz.
II.
Béhobie (France), juillet 1873.
Nous arrivâmes enfin au nouveau poste-caserne, où on nous mena dans un sous-sol creusé dans le roc, une véritable caverne, où nous passâmes la nuit sous les regards de quatre factionnaires. Il nous fut impossible de dormir en ce lieu humide où tout contribuait à rendre le sommeil impossible. La fougère qui nous servait de lit était remplie de vermine, une chandelle de résine qui éclairait ce souterrain répandait dans cet espace étroit une fumée et une odeur nauséabondes ; enfin, le plancher qui se trouvait sur nos têtes retentissait, pendant toute la nuit, du piétinement des soldats de Santa-Cruz, qui dansaient, chantaient ou se disposaient à partir pour leurs expéditions nocturnes.
Mais ce qui contribua à nous rendre ce séjour très suspect, c’était les récits que les gardiens se faisaient entre eux. A vingt pas de ce poste-caserne se trouve l’endroit affectionné par Santa-Cruz pour ses exécutions sommaires. Deux mois auparavant, une jeune femme de Renteria, accusée d’espionnage y avait été fusillée ; le mécanicien français qui fut enlevé par les carlistes au déraillements du train, à Béasain, dont on n’a plus entendu parler, y avait été passé par les armes ; deux prisonniers sur trois avaient été tués en ce lieu néfaste, huit jours auparavant ; enfin, la veille de notre arrivée, une jeune fille de seize ans, sur laquelle on avait trouvé une lettre que Santa-Cruz avait déclarée suspecte, venait de recevoir, la veille, 60 coups de palos (bâtons) ; elle succomba à cet horrible traitement, le jour même de notre arrivée à ce poste-caserne, qu’entourent les tombes de tant de personnes assassinées.
CURE SANTA CRUZ ET SES GUERILLEROS |
Le lendemain, nouveau voyage. Cette fois au lieu de monter, nous descendîmes.
Nous étions trempés, et nos habits ruisselaient d’eau. Ce fut dans cet état affreux et exténués de fatigue que le commandant de ce poste, au lieu de nous conduire dans l’intérieur du bâtiment, nous fit assister à la revue qu’il passa d’environ cent hommes, dont vingt, tout au plus, étaient armés de mauvais fusils ; les autres n’avaient que des bâtons. Comme nous paraissions étonnés de ce singulier armement, le commandant, jeune homme d’une vingtaine d’années, eut la gracieuseté de nous dire :
—- Ce sont des volontaires arrivés depuis hier ; j’attends des fusils pour les armer !
Parmi ces volontaires, j’en remarquai une trentaine, au moins, qui n’avaient que quatorze ou quinze ans ; six ou sept avaient dépassé la cinquantaine ; les autres étaient dans la force de l’âge. La revue terminée, on nous introduisit dans l’intérieur du bâtiment, où notre condition de prisonniers ne changea point ; elle y fut ce qu’elle était depuis six jours.
LIVRE LA CROIX DE SANG DE GAËTAN BERNOVILLE |
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