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mardi 25 septembre 2018

DES REPRÉSENTATIONS THÉÂTRALES BASQUES À BILBAO EN BISCAYE EN JUIN 1910

REPRÉSENTATIONS THÉÂTRALES BASQUES À BILBAO EN JUIN 1910.


L'opéra Maïtena des Labourdins Etienne Decrept et Charles  Colin, créé à Bilbao le 9 mai 1909, est présenté en Biscaye en juin 1910.

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OPERA MAÎTENA 
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta le journal Comoedia, dans son édition du 18 juin 1910, sous la plume 

d'André Geiger :



Les Représentations Basques.



Comœdia signalait, il y a un an, le succès triomphal remporté sur la scène du Teatro Campos Eliséos de Bilbao par une pastorale lyrique inédite, en deux actes, Maïtena (la chérie), œuvre du poète Etienne Decrept et du musicien Charles Colin, deux Basques français qui résident à Saint-Jean-de-Luz.



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TEATRO CAMPOS ELISESOS BILBAO
PAYS BASQUE D'ANTAN

Un grand nombre de représentations n'épuisèrent pas le succès de Maïtena, œuvre d'inspiration locale, construite sur ces thèmes populaires dont le pays basque est particulièrement riche.



C'est le théâtre basque qui ressuscitait, pour la plus grande joie de tout un important petit peuple disséminé sur la frontière franco-espagnole et prolongé au Chili et à la République Argentine par des colonies nombreuses, où plutôt, qui commençait à naître.



Car le théâtre basque du passé se borne à ces quelques farces charivariques du Moyen Age, incapables de constituer une littérature dramatique, dont la principale a été étudiée et traduite par M. G. Hérelle, l'éminent traducteur des grands romanciers espagnols et italiens.




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GEORGES HERELLE
PAYS BASQUE D'ANTAN

L'œuvre nouvelle pu être montée grâce aux efforts artistiques et matériels d'une puissante association, la Sociedad Coral de Bilbao, qui, désormais, peut mettre à la disposition des auteurs et compositeurs un théâtre de dix-huit cents places, un orchestre de soixante musiciens et des décors et une mise en scène sur le modèle de l'Opéra-Comique de Paris. On croit rêver devant ce miracle de l'initiative privée !



Trois hommes dévoués à l'Art et conduits par l'amour du pays natal ont su le réaliser : D.José Power, président de la Sociedad Coral, le Mécène bilbaïnien, — marié à une Française d'origine dont nous saluons respectueusement l'intelligente influence — , D. José de Etchave, ancien président de la Société ; D. Auréliano Vallé, le vénéré chef d'orchestre qui est, depuis des années, l'âme de ce groupement musical. N'oublions pas M. Eloy Garay, qui vint à Paris et fut accrédité auprès de M. Carré pour étudier les plus récents procédés de la mise en scène.



Ce premier succès devait inciter la Sociedad Coral à poursuivre sa tâche de décentralisation artistique.



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SOCIEDAD CORAL DE BILBAO 
PAYS BASQUE D'ANTAN

Et, à côté de l'œuvre ancienne, ce sont trois œuvres lyriques nouvelles qu'elle vient de monter cette année. Le cycle de ces représentations commencé à la fin mai se poursuit à Bilbao, en ce moment même.



Il comprend quatre œuvres, inspirées toutes de la musique basque populaire, mais cependant très distinctes de facture et d'effet, quatre œuvres lyriques importantes qui ont surgi, ainsi, en deux ans. Résultat merveilleux !


Maïtena, poème de M. Etienne Colin, musique de M. Charles Colin.


Mendi-mendigan, poème de M. Power, musique de M. J.-M. Usandizaga.


Maïtena, (c'est-à-dire, en français, La Chérie) est, nous le rappelons, la délicate et dramatique aventure d'une fille de cultivateurs du Pays Basque français, dont l'amour pour le pelotari Domingo est contrarié par la volonté d'un père qui voudrait la marier à son voisin campagnard Ganich, plus fortuné. Révoltée, Maïtena prend la fuite avec son amoureux. Mais, celui-ci meurt, et elle revient au foyer familial, obtient son pardon avec l'aide de sa sœur Sabine et de son beau-frère, et se laissera toucher par la constance fidèle de Ganich, toujours prêt à la prendre pour femme, et ne quittera plus le pays natal, si beau et si cher.



La musique de Charles Colin reflète avec une exactitude profonde les thèmes et les rythmes de la musique basque populaire. Sa partition d'une forme classique, avec duos, quatuors et chœurs, fourmille de mélodies charmantes et nous croyons qu'il sera difficile d'exprimer jamais mieux.



L'âme basque est à la fois voluptueuse et simple, saine et passionnée.



Charles Colin, qui est le fils de l'éminent peintre parisien, Gustave Colin, habite, depuis son enfance, Saint-Jean-de-Luz, patrie du fandango, et il a trouvé dans sa connaissance parfaite des gens et des paysages, — et aussi dans l'habile facture du très vivant livret d'Etienne Decrept, des sources d'une inspiration vraiment émouvante.



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MAÏTENA D'ETIENNE DECREPT
PAYS BASQUE D'ANTAN

Le succès de Maïtena n'est pas près de finir, et il est question de la représenter à Biarritz ou à Bayonne.



Mendi-Mendigan (tout au fond de la montagne), l'œuvre de M. José Power, nous transporte parmi les rudes montagnards de Biscaye, d'ans les âpres solitudes des cimes ravagées par les loups. Ce drame se résume dans l'histoire des amours de la pastoure Andréa, avec José Mari, berger du voisinage, qu'un rival jalouse et finalement tue, au cours d'une romeria, c'est-à-dire d'une fête religieuse et populaire. Devant l'ermitage où l'assassiné a été enseveli, par un jour de neige, Andréa revient pleurer et est décidée à entrer en religion. Les supplications de son aïeul et de son jeune frère parviennent à la ramener au logis qui a besoin d'elle.



Sur les quatre tableaux de ce drame rapide, un jeune compositeur de Saint-Sébastien, élève de Vincent d'Indy, M. J.-M. Usandizaga a déployé, dans une partition mouvementée au possible, toute la fougue et toute la richesse de l'orchestration la plus moderne et fait songer à la manière de Puccini. Mais les thèmes conducteurs sont d'une couleur locale, bien appropriée. Et le tableau de la romeria, avec ses cantiques, avec ses danses populaires pittoresquement réglées, donne une note pittoresque intense, soulignée encore par ce fait, que tous les costumes et accessoires de la pièce ont été recueillies dans les lieux mêmes, où l'action dramatique se déroule.



Lidé ta Ixidor (Sydie et Isidore) est tout au contraire un conte d'enfants, dénué de toute complication, de toute émotion violente, que M. A. de Etchave a écrit en songeant à Humperdindn. La Sociedad Coral est allée d'ailleurs demander les conseils du maître allemand. Une dame inconnue pénètre un soir dans une chaumière que gardent un petit garçon et une petite fille, en l'absence des parents. Et les enfants la prennent pour une fée, et s'endorment, et rêvent qu'elle les transporte dans un palais, où, devenus des princes, ils ont toutes sortes d'aventures. Ils se réveillent. Mais le rêve continue : la visiteuse était une châtelaine du voisinage qui, émue de leur hospitalité charmante, secourt leur famille et leur procure une douce aisance.



M. Inchausti s'est borné à tisser sur ce conte une trame légère d'airs basques populaires qui se déroule en toute simplicité. Des chœurs d'enfants et un ballet d'enfants, où les plus jeunes membres de la Sociedad Coral se sont révélés ballerines charmantes, ont assuré le succès de cette petite histoire encadrée d'une mise en scène considérable.


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OPERA MAÏTENA
PAYS BASQUE D'ANTAN

Avec Mirenchu enfin, (prononcer : Mirentchou), nous revenons au drame lyrique. En deux actes, M. A. de Etchave expose la très mélancolique histoire d'une fille de meunier, poitrinaire, de qui un jeune homme, par compassion, feint de devenir amoureux, bien qu'il ait une maîtresse par ailleurs. La pauvre Mirenchu découvre un jour le secret et elle meurt de sa désillusion plus encore peut-être que du mal implacable, en réunissant les mains de Raimondo et de Presen sa rivale.



Sur cette histoire simple et triste — presque un peu trop triste, — un autre jeune élève de Vincent d'Indy, M. Jésus Guridi, espoir musical de Bilbao, a écrit plusieurs numéros d'une inspiration solide et charmante. M. Guridi, qui est un organiste distingué, a mis dans sa partition une sérénité, une force contenue, une science sobre, qui permettent d'augurer pour lui un avenir des plus brillants. Les "mélodrames", ses tableaux champêtres, son évocation du travail du moulin ont remporté les suffrages des critiques les plus autorisés venus de toutes les grandes villes du nord de l'Espagne.



culture basque autrefois pays théâtre opéra
OPERA MAÏTENA
PAYS BASQUE D'ANTAN

Avec ces quatre œuvres si intéressantes, le théâtre Basque possède d'ores et déjà un répertoire lyrique imposant.



On nous promet à Bilbao, un nouveau cycle, de leurs représentations, cet été en septembre, alors que les villes d'eaux et de bains de mer des Pyrénées françaises ou espagnoles regorgent de visiteurs et d'amateurs de musique. Idée excellente.



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MAÏTENA A HENDAYE 1913
PAYS BASQUE D'ANTAN

En outre, il est question de donner à Buenos-Ayres, où la colonie basque est si nombreuse, des représentations de ces opéras qui auraient lieu sans doute au Teatro de Mago. Le président du Cercle basque de Buenos-Ayres, M. Passicot, a d'ailleurs suivi les travaux de la Sociedad local de Bilbao.



Celle-ci compte persévérer dans la voie glorieusement artistique où elle s'est engagée. On nous promet pour l'année prochaine une œuvre nouvelle de nos compatriotes Decrept et Colin : Amatchi (La marraine), qui nous dépeindra la vie des petites villes basques.



Heureux pays, où des compositeurs - parmi lesquels MM. Guridi et Usandizaga n'ont pas encore atteint la trentaine — peuvent ainsi trouver à leur disposition une grande scène, un orchestre et des artistes pour produire leurs œuvres !




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JESUS GURIDI 1915
PAYS BASQUE D'ANTAN

Comme chanteurs, la Sociedad Coral a la bonne fortune de compter parmi ses membres d'excellents amateurs, le ténor Alonso, MM. Urricelqui (Molina et Portuondo, les sénoritas Badenès). Elle a en outre fait appel à des élèves du Conservatoire de Madrid, Mlles Bejar et Téresa Tellaetrho, celle-ci douée d'une voix de contralto admirable.


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CHANTEUSE BADENES DANS MAÏTENA
PAYS BASQUE D'ANTAN

L'éminent critique musical espagnol D. Gascué se félicitait, à l'occasion de ces représentations, de voir la capitale de la Biscaye, acclamer un compositeur Guipuzcoan, et proclamait, grâce à l'Art, les limites provinciales désormais effacées.



La France ne doit pas non plus oublier que la Sociedad Coral de Bilbao a commencé par accueillir deux Basques français, passant ainsi par dessus la frontière et réalisant, pour sa part, cette amitié franco-espagnole qu'on se se plaisait à voir déjà particulièrement fleurir, chaque été, à Saint-Sébastien et Biarritz, sortes de capitales d'été jumelles, mais qui se manifeste désormais en Biscaye dans le domaine du Théâtre de la Musique, où Comœdia se devait de la signaler."



(Source : http://hedatuz.euskomedia.org/7077/1/06059083.pdf)



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