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samedi 24 novembre 2018

UN DÉTOURNEMENT DE RAVITAILLEMENT À BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1942


UNE AFFAIRE DE DÉTOURNEMENT DU RAVITAILLEMENT À BAYONNE EN 1942.


Pendant la seconde guerre mondiale, le Pays Basque, à l'instar du reste de l'hexagone, a connu des affaires de marché noir et de détournement de ravitaillement.




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QUAI ST ESPRIT BAYONNE 1943
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta la presse locale, en particulier la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du 

Pays basque, dans plusieurs éditions :



  • le 31 janvier 1942 :

"Découverte d’une nouvelle affaire concernant le ravitaillement.

Une nouvelle affaire se rattachant aux affaires de ravitaillement jugées récemment par le Tribunal Correctionnel de Bayonne, vient d’être découverte. Il s’agirait en l’espèce d’agissements frauduleux commis au détriment du Trésor. Cette affaire serait appelée à avoir un sérieux retentissement."



  • le 1er septembre 1942 :

"Une importante affaire de marché noir.



Depuis quelques jours nous étions informés de la découverte par la sûreté de Bayonne d'une affaire de marché noir dans laquelle un garçon de café de notre ville le sieur E... et sa femme se trouvaient inculpés. Il s’agissait d’importantes quantités de sucre mise à la disposition des amateurs de cette denrée de première nécessité pouvant payer le prix fort demandé, prix variant de 70 à 80 francs le kilo. Les offres étaient faites par E... dont les relations, par sa profession même, sont plutôt étendues et variées. Quant au sucre il provenait du trafic de cartes que son épouse se procurait au domicile même de M. M.... contrôleur principal de la carte d'alimentation, chez lequel elle était employée comme femme de ménage.



Saisi de ces faits, plutôt troublants, le Parquet ordonna une enquête et à la suite d'un sérieux interrogatoire auquel ils furent soumis, le mari et la femme E... furent écroués et un mandat d'arrêt lancé contre le contrôleur principal M..., accusé de complicité par les inculpés. Ce mandat fut exécuté hier et, dans la soirée, le dit contrôleur fut mis en état d’arrestation. 



Nous croyons savoir qu’au cours du premier interrogatoire auquel il a été soumis, ce dernier a opposé de vives dénégations aux dires accusateurs de sa femme de ménage. Toutefois ce système de défense n’a pas convaincu le magistrat instructeur qui a signé un mandat d'écrou aussitôt exécuté."



  • le 9 septembre 1942 :

"Les affaires de détournement du Ravitaillement. 



Nous avons déjà à plusieurs reprises entretenu nos lecteurs de l’affaire dans laquelle le contrôleur général de la carte d'alimentation des services du Ravitaillement de la zone occupée des Basses-Pyrénées le sieur Mathis se trouve compromis en compagnie de sa femme de service et d'un garçon de café. Ces deux derniers, on le sait, complices du dit contrôleur, trafiquaient avec les tickets de sucre qui leur étaient remis par lui. 



Depuis son arrestation Mathis ne cesse d’opposer des dénégations aux accusations dont il est l’objet de la part de sa femme de service, mais celle-ci persiste avec une ardeur qui ne faiblit pas, à le dire coupable. D’après cette femme, son patron aurait touché une somme de 30 francs par kilo de sucre obtenu grâce aux tickets donnés par lui. Ces contradictions soumettent la perspicacité du juge d’instruction à une rude épreuve, mais il ne fait aucun doute qu’il saura en démêler le vrai du faux au mieux des intérêts de la justice. 



Dans la soirée d'hier nous avons appris que cette affaire pourrait avoir un certain rebondissement. Un quatrième personnage, dont le nom n’a pas encore été révélé, serait également compromis. 



On parle également d’une affaire d’abattage de bœuf, de liquidation de plusieurs porcs et autres "délicatesses", affaire des plus clandestines, naturellement, dont les détails connus de quelques initiés bien placés, ne manqueront pas d’intéresser l’opinion publique, dès que celle-ci en sera saisie."



  • le 25 septembre 1942 :

"L’affaire du contrôleur du ravitaillement.



Au cours d’une nouvelle perquisition effectuée au domicile de la femme E.„. complice du contrôleur principal des cartes de ravitaillement M..., de nouvelles feuilles de tickets ont été découvertes. 



Il s'agit cette fois de cartes de pommes de terre qui portaient le cachet de Boucau. Une commission rogatoire a été envoyée dans cette commune afin de déterminer s’il s'agit de cartes renvoyées au ravitaillement général à la suite de décès ou de tout autre motif. 



A côté de l’enquête judiciaire, une enquête administrative a été effectuée par le service des cartes au ravitaillement général. Les résultats en seront sans doute communiqués au magistrat instructeur pour éclairer la justice."




  • le 16 novembre 1942 :

"Cinq inculpations dans l’affaire de détournement des titres d’alimentation. 



L'affaire de détournement de titres d’alimentation commis dans le service de la carte de ravitaillement général, affaire où sont déjà inculpés le contrôleur principal Mathis, sa femme de ménage et le mari de celle-ci, est entrée depuis samedi dans une nouvelle phase à la suite de l’enquête menée par le commissaire Dehès, de la brigade mobile de Bordeaux. 



En effet, sur les accusations de la femme Mathis, femme du contrôleur principal arrêté, le chef du service de la carte, le nommé Mehedine, ainsi que sa femme, ont été conduit, samedi soir, devant M. Lepointe, faisant fonctions de juge d’instruction, et inculpé de détournement de titres d’alimentation, puis écroués. 



Tous deux sont accusés d’avoir dérobé et trafiqué des feuilles de tickets d’alimentation."



  • le 10 décembre 1942 :

"Le Directeur du ravitaillement obtient la révocation de 8 employés indélicats.



A la suite de l’enquête menée par le commissaire Déhès, de la brigade mobile de Bordeaux, et par l'inspecteur Garrigou, plusieurs chefs de service et employés du ravitaillement général ont été entendus par M. Deléris, juge d’instruction, et inculpés de trafic frauduleux de titres d’alimentation ou de denrées. 



Ce sont les nommés H. D..., C... Saint-J..., les demoiselles D...R..., J... et plusieurs autres. 



Ces chefs de service et employés ne font plus partie du ravitaillement général. Dans un but d’épuration, M. Gonfreville, directeur général, a demandé et obtenu leur démission. 



Quant au contrôleur principal Mathis, qui fut à l’origine de la découverte de ces affaires, il a été mis en liberté provisoire après trois mois de prison préventive."



  • le 5 mai 1943 :

"L'affaire du Ravitaillement devant le Tribunal Correctionnel.



L'affaire dite ces scandales du Ravitaillement, qui a tait tout le bruit que l'on sait en raison de la qualité des personnalités compromises qui comptaient parmi les hauts fonctionnaires du dit Ravitaillement Général des Basses-Pyrénées (zone occupée), est appelée ce matin devant les juges. Vingt inculpés sur vingt-deux répondent à l'appel de leur nom. 



Il est aussitôt procédé à l'audition des témoins et à l’interrogatoire des inculpés. La dame Etchepare, femme de ménage de M. Mathis, contrôleur chef du service de la carte, reconnaît avoir reçu de celui-ci des cartes qui lui ont permis d’acheter 82 kilos de sucre pour son usage personnel, dit-elle, et celui de quelques amis. Elle déclare avoir revendu ce sucre au-dessus de la taxe et avoir servi une commission de 1 500 francs au dit sieur Mathis comme convenu entre eux.



Le mari de la domestique, qui est lui-même garçon de café, est l'objet de la même inculpation de trafic de tickets. Comme sa femme il reconnaît les faits. 



La dame L... pour sa part s'est bornée à livrer du sucre contre des tickets détachés, mais au prix de la taxe et dans l’ignorance absolue de leur provenance douteuse. Elle reconnaît l’exactitude du fait. M. Mathis est à son tour interrogé. Il nie avoir dérobé des cartes au service qu’il dirigeait et oppose un démenti  formel au témoignage de la dame Etchepare. Il nie également avoir remis une enveloppe contenant des cartes qui devait être remise à un sieur Chastenet (?) par l'intermédiaire du sieur Vignes, propriétaire du Bar-Choco de Bayonne. 



A une observation du président qui lui reproche une condamnation antérieure pour émission de chèques sans provision, Mathis fait remarquer que cette condamnation était ignorée par la justice au moment de son arrestation et que c’est lui qui en a donné connaissance à l'instruction, alors que le magistrat instructeur ignorait le fait. 



En résumé Mathis nie absolument l’accusation dirigée contre lui. Après lui le contrôleur Médine comparait à la barre. Comme son collègue du ravitaillement Médine nie les laits reprochés. 



De nombreux incidents surgissent au cours de ces auditions. Sur une intervention de Me André Delmas, le tribunal suspend l’audience et dans la salle le public manifeste. 



A la reprise l’interrogatoire continue et les dépositions sont hachées par de nombreuses interventions des défenseurs. 



Avec M. Joseph Saint-J.... comptable, on apprend qu'il est aisé de maquiller la tenue des livres dont les chiffres devaient servir à marquer les irrégularités des contrôleurs du ravitaillement. Cet exercice l'a fait profiter de quelques tickets clandestins et lui valent aujourd'hui de se trouver sur la sellette. 


Enfin c'est M. Collet, 35 ans, ancien chef de service, préposé aux collectivités du ravitaillement général, inculpé d'avoir utilisé indûment des tickets de pain et de matière grasse, qui reconnaît les faits reprochés et les met sur le compte de ses besoins de famille. 



Et l’audience prend fin avec l’audition de quelques comparses qui ont peu ou prou profité de leur collaboration aux différents services du ravitaillement pour obtenir deux ou trois cartes supplémentaires de pain ou de margarine. 



L’audience de l'après-midi.



L’audience de l'après-midi débute par le réquisitoire de M. Fonade, substitut du procureur de la République. L’honorable magistrat fait le procès des actes commis dans les bureaux d'une administration de l'Etat chargée de donner à chacun son dû et rien que son dû, ainsi qu’il est déclaré dans la loi. 



Il invite le tribunal à se montrer sévère pour les inculpés qui ont alarmé et scandalisé l’opinion publique. Les sanctions doivent correspondre à la gravité des faits. 



L’audience continue."



  • le 19 mai 1943 :

"... En fin d’audience, Me Delaunay, du barreau de Paris, a présenté la défense de Mathis. contrôleur du Ravitaillement général qui est, on le sait, inculpé de trafic clandestin de cartes de ravitaillement. Me Delaunay s'est efforcé de démontrer l'inanité des accusations portées contre son client et a conclu en demandant son acquittement au bénéfice du doute. Le tribunal a mis l'affaire en délibéré. Jugement à huitaine."



  • le 2 juin 1943 :

"... Le tribunal rend son jugement dans l’affaire du Ravitaillement général. 



Le contrôleur principal M... est condamné à dix mois de prison. Le chef de service Me... est condamné à huit mois de prison. La femme E... est condamnée à quatre mois de prison et son mari, garçon de café à Bayonne, est condamné à un mois de prison. La dame K..., épouse Me... est également condamnée à un mois de prison. 



Tous les autres employés du Ravitaillement général compromis dans cette affaire sont condamnés à des amendes variant de 5 000 à 1 200 francs."







Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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