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samedi 15 octobre 2022

L'HISTOIRE DE BOLO PACHA À BIARRITZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1917 (première partie)

BOLO PACHA À BIARRITZ EN 1917.


Paul Marie Bolo, plus connu sous le nom de Bolo Pacha ou Bolo-Pacha, né le 24 septembre 1867 à Marseille et exécuté le 17 avril 1918 au fort de Vincennes, pour trahison envers la France, était un aventurier français.



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BOLO PACHA FEVRIER 1918



Voici ce que rapporta à son sujet le quotidien Le Petit Parisien, le 24 novembre 1917, sous la 

plume de Maurice Prax : 



"A Biarritz.



Les débuts de Bolo (de notre envoyé spécial).



Il faut bien reconnaître qu'au temps lointain de la paix, Bolo pacha, en dépit des quelques hautes relations qu'il entretenait à Paris, n'était pas un personnage très marquant de la vie parisienne.



Il n'était connu véritablement qu'à Biarritz.



Mais là, par exemple, il l'était fort. Certains l'auraient même trop connu et ce sont ceux, bien entendu, qui ne le connaissent plus du tout, aujourd'hui. C'est la vie, cela, c'est tout simplement la vie et il n'y a pas de quoi s'étonner.



Il y a donc des gens à Biarritz qui ne connaissent pas Bolo. Ce sont ceux qui ont dîné cent fois chez lui, bu ses sauternes et fumé ses cigares. Ces messieurs seraient incapables de dire si seulement Bolo est blond, brun, blanc ou roux. Mais, par bonheur, les humbles citoyens qui n'ont lamais mangé d'ortolans chez le pacha et qui se sont contentés d'entretenir avec lui des relations vagues de voisinage ou d'affaires, eux, l'ont connu, l'avouent et content des histoires.



C'est sans jalousie, sans mesquines rancunes qu'ils parlent de Bolo, qui n'était ni hautain ni méchant : c'est seulement avec une implacable sévérité de patriotes indignés.



Bolo ne fut point, dès son arrivée à Biarritz, un pacha de Carabas, superbe et généreux. Il fut, tout d'abord, un simple bourgeois assez calme, heureux d'avoir épousé Mme veuve Muller, née Pauline Moiriat, et plus heureux encore de profiter des soixante-dix mille francs de rente de son épouse. Une telle aisance était pour lui nouvelle, car, somme toute, ni dans l'importation des langoustes, ni dans le courtage des vins de messe, ni dans l'exercice du métier de coiffeur, il n'avait encore fait fortune.



Il se contentait donc, à cette époque, de chausser les confortables pantoufles de feu M. Muller, et les jours qu'il vivait à la villa Velléda étaient tranquilles, copieux, mais sans faste.



A la villa Velléda.



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VILLA VELLEDA BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Sa villa elle-même était un pieux et intéressant souvenir du doux M. Muller, qui l'avait fait édifier avec soin et sans penser qu'elle abriterait un jour les tendres amours de sa veuve et d'un pacha... Au reste, cette villa n'est point princière, comme il a été dit... Bâtie à l'extrémité de Biarritz, près du phare, elle est un peu écrasée par un gigantesque palace qui est collé contre elle. Son architecture est discutable, et l'on se demande, à vrai dire, si un architecte a présidé à sa construction et si ce n'est pas plutôt un ébéniste, spécialisé dans la fabrication des buffets Henri II.



Tout de même, je m'en contenterais volontiers... Bolo pacha, pendant quelque temps, vécut donc de façon assez obscure. Le ménage fréquentait assidûment le casino. Monsieur jouait au baccara ; Madame, aux petits chevaux. Et Madame était heureuse... 



- J'ai tout de même eu de la chance disait-elle. Ce pauvre Muller a été vraiment bien bon pour moi...



Et, sans dissimulation, elle racontait son histoire... Elle chantait au concert des Quinconces, à Bordeaux... On l'appelait Namouna. Un soir un spectateur demanda à lui titre présenté... C'était un brave homme, rangé, doux et malade...Trois mois plus tard, elle l'épousait. Un an après, elle héritait de lui...



La vie marche vite. La mort aussi. On s'arrange...



Et Mme Bolo continuait ses confidences... 

- J'ai encore eu de la chance, faisait-elle, en épousant Bolo. Il est si intelligent, si actif !... Evidemment, il n'a pas un sou, lui, mais il est si adroit, si entreprenant. Il va décupler notre fortune...



Cependant, petit à petit, Bolo pacha prenait pied à Biarritz. Il ouvrait peu peu sa villa - et se payait des relations... Mais il n'était point homme à se lier avec n'importe qui. Il voulait avoir des relations sérieuses, des amis reluisants et considérables, puissants, officiels, décorés - pas des rastas. 



Ce n'est donc point la clientèle spéciale et suspecte des villes d'eaux et des plages à la mode qui défila chez lui. Il ne reçut jamais que des convives de choix. Les uns amenèrent les autres - et d'autres vinrent encore après les autres...



On mangeait divinement bien à la villa Velléda et les vins y étaient délectables. Les cigares étaient aussi fameux, car le pacha en faisait préparer de spéciaux pour lui, à la Havane, qui portaient, sur une bague dorée, la simple inscription : "Pour notre pacha".



Ainsi, et par la toute excellence de ses foies gras, de ses "haut-brion" et de ses havanes, Bolo pacha devint, en moins d'une année, le plus grand seigneur de Biarritz. 



Ah ! les festins que l'on faisait chez Bolo ! J'ai eu sous les yeux quelques menus. Je ne veux point les reproduire ici. Ce serait, en ce temps de restrictions, de la cruauté presque.. Mais il paraît que le chef faisait de ces mousses de foie gras au porto et de ces homards à la Newburg !...



Pourtant, il y a des gens qui sont dyspeptiques, qui ne mangent que des nouilles à l'eau, qui suivent un régime sévère et tyrannique. Ceux-là, Bolo ne pouvait espérer les attirer chez lui par l'appât des mets rares et des antiques bouteilles. Les dyspeptiques, tout de même, se rendaient volontiers aux réceptions de la villa Velléda. Car, après le dîner, il y avait la petite partie de baccara. Et ce n'était pas une partie ordinaire. Le pacha, régulièrement, tenait la banque et non moins invariablement souriant, confus, élégant et empressé, il perdait...



C'était là le petit bénéfice des gastralgiques - et de ceux aussi qui avaient bien dîné...



Alors, dans toute la ville, on ne parlait plus que du pacha, de ce cher, de ce bon, de cet admirable ami le pacha... Une poétesse lui dédiait un sonnet qui débutait ainsi :

Pacha miraculeux, aux yeux couleur de nuit... 



Quand il rentrait de Paris par le train, cent personnes l'attendaient à la gare, - et toutes les autorités lui donnaient tendrement l'accolade.



pays basque autrefois traitre  espion biarritz
BOLO PACHA
PAYS BASQUE D'ANTAN


Le mail-coach.



Alors, solidement établi à Biarritz, fort de ses relations uniques, Bolo pacha décida de frapper un grand coup. Afin de doubler son crédit et sa renommée, il se paya un mail-coach. Il n'y a pas à dire cela fut un événement formidable. Le mail-coach du pacha était, en effet, le seul de la ville. Attelé à quatre, et magnifiquement, il produisait, par les rues, une sensation profonde...


lourdes calèche
MAIL-COACH


Bolo était ainsi devenu une des illustrations de la côte basque... C'était en 1913... C'était en juillet 1914...



Mais que devenaient dans tout cela les pauvres soixante-dix mille francs de rente de Mme Bolo ?... C'étaient, certes, d'estimables rentes pour feu M. Muller, de Bordeaux. Pour le pacha, ce n'était qu'une misère... N'y avait-il pas des mois où l'on dépensait plus de trente mille francs à la villa Velléda ?...



C'est qu'en ce temps-là, les foies gras, les poulardes et les margaux coûtaient cher...Les mail-coaches aussi, et les baccaras...



Puis, la guerre éclate... Nous verrons quelle fut la vie de Bolo, pendant la guerre, jusqu'au jour où la justice mit fin aux brillantes réceptions de la villa Velléda, aux mousses de foie gras, aux parties de baccara, au lyrisme des poétesses et aux promenades en mail-coach... voire en Amérique. 



Bolo et Cavallini. Un ordre d'informer contre le Commandeur. 


A la suite de l'arrestation du commandeur Cavallini opérée en Italie et des révélations qui ont été faites concernant les agissements de ce personnage, le général Dubail, gouverneur de Paris, a signé hier matin un ordre d'informer contre lui.



général gouverneur paris
GENERAL AUGUSTIN DUBAIL



Cet ordre a été transmis aussitôt au parquet militaire.



Dans l'après-midi, le capitaine Bouchardon a recueilli le témoignage de M. Darracq, directeur de la maison d'automobiles, sur les relations qu'il entretint, avant la guerre, avec Bolo.



On se souvient que M. Darracq passait pour avoir mis Bolo en rapport avec le financier Kochette. M. Darracq a dit n'avoir que vaguement connu Bolo qui visita, un jour, ses ateliers, comme l'ont fait, d'ailleurs, de nombreux sportsmen. Mais il ne présenta jamais le financier au pacha. 



D'autre part, le lieutenant Jousselin a reçu la déposition de M. Charley, secrétaire de M. Boussenot. Ce témoin a confirmé certaines déclarations faites par le député des Landes sur les agissements de Bolo dont il a pu avoir connaissance.



Sur sa demande, M. Chauron, ancien secrétaire de M. Dubarle, député, tué l'ennemi, a été enfin entendu par M. Bouchardon, à qui il a remis une longue note récapitulant certains griefs personnels qu'il relève contre Bolo et ses amis.



M. Chauron a fourni, au rapporteur, des explications au sujet d'une lettre qu'il a adressée, le 27 août 1915, à M. Malvy, pour dénoncer certaines des affaires d'espionnage actuellement à l'instruction. Il se trouvait alors en Hollande, après s'être évadé de Belgique, où les Allemands le retenaient. 



Le témoin a déclaré qu'il attribuait à l'envoi de cette lettre- et aux menées de Bolo ? la cause de son arrestation, opérée à Dieppe, le 6 septembre 1915. Il demeura incarcéré à Rouen, sans être jugé, jusqu'au 13 septembre 1916 et ne fut, prétend-il, remis en liberté qu'après six ordonnances de non-lieu,



La première femme de Bolo sera entendue lundi prochain."



A suivre...





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