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mardi 25 juillet 2023

LA MORT AU PAYS BASQUE EN 1895 (deuxième et dernière partie)

 

LA MORT AU PAYS BASQUE EN 1895.


La mort est un événement important dans les rituels du Pays Basque d'Antan.


pays basque autrefois mort deuil
DEUIL
PAYS BASQUE D'ANTAN




Après nous avoir parlé des enfants, des animaux domestiques et des mariages, voici ce que 

rapporta au sujet de la mort au Pays Basque, Mme d'Abbadie d'Arrast, épouse d'Antoine 

d'Abbadie d'Arrast, dans la revue bimensuelle La Femme, le 1er février 1895 :




"La mort en Pays Basque.



... Selon le voeu qu'elle avait exprimé, Gachina fut revêtue de sa robe de noce et enveloppée dans sa grande mante dont les dentelles du capuchon lui couvraient le front. Avec les rubans noirs on lia ses mains dans l'attitude de la prière, on réunit ses pieds qui ne devaient plus marcher et on fixa son menton. Les cierges allumés furent disposés autour d'elle, puis voisins et amis vinrent, selon l'usage, faire la veillée de la mort.



En général, au bout de 24 heures, l'enterrement a lieu ; le cortège se forme pour descendre à l'église. En tète marche le premier voisin chargé de la croix de bois. Douze hommes, voisins aussi du mort, le suivent ; chacun d'eux tient à la main un cierge allumé ; après vient le cercueil que huit porteurs qui se relayent chargent sur leurs épaules. Immédiatement après le cercueil prend place le clergé et le chantre. Tout le long du chemin les psalmodies de l'office des morts se mêlent au carillon des cloches dont le son, répété par les échos, monte de la vallée. Les proches parents s'avancent ensuite. Les hommes ont revêtu de longs manteaux à grands collets de velours, les femmes se sont enveloppées dans leurs mantalettas, dont les capuchons rabattus sur les visages se terminent par des voiles noirs. On arrive à l'église. Les femmes prennent place en bas sur les dalles usées, les hommes montent dans les galeries de bois, galeries qui s'étagent jusqu'à la voûte sombre. La cérémonie a lieu au milieu d'un profond recueillement. Le cimetière entoure l'église : une fosse vient d'y être creusée par le fossoyeur. C'est là qu'on porte le cercueil ; mais aucun des amis ni des membres de la famille n'assiste à cet angoissant épilogue de toute destinée humaine. Ce n'est que lorsque tout est terminé que les assistants entourent la famille et se rendent sur la tombe qu'on vient de fermer !



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MANTEAU DE DEUIL
PAYS BASQUE D'ANTAN


M. Henri O Shea, dans le volume qu'il a consacré à l'histoire de la tombe basque (Pau, veuve Lescudé, 1889), raconte qu'autrefois, dans le pays basque, les parents et les voisins du mort poussaient des cris d'alarme et parcouraient les rues pour rassembler le monde. Ceci avait probablement pour objet soit de venger le mort s'il y avait eu violence, soit à l'origine de le défendre contre la malignité du mauvais oeil, et non moins de venir en aide à son âme en faisant dire le plus de prières. On avait des pleureuses qui poussaient de grands cris de détresse et déchiraient leurs voiles. Dans quelques endroits, d'après M. O Shea, les amis intimes de la veuve, dès que son mari était enterré, la frappaient violemment dans le dos et sur les épaules en lui criant d'une voix frénétique : "Sois perdue, tu as tout perdu !" Pendant les enterrements, les femmes interpellaient le mort, le plaignaient, se plaignaient elles-mêmes. "Est-ce bien à toi de t'en aller, de nous quitter ainsi ? Lâche qui t'enfuis, qui nous abandonne. — Que deviendra ta pauvre mère, ta Magnigno ? La vieille femme, sans toi, que deviendra-t-elle ?" Ou encore : "Donne ce baiser à grand-père. — Dis à ma tante qu'elle prie pour moi, qu'elle prie pour que Petit-Pierre guérisse. — Dis à saint Martin que la pauvre vache est morte et qu'il demande à Notre-Dame de nous en envoyer une autre plus jeune et moins lourde que celle-là. — Ah ! pauvre, que tu auras froid ! — Ah ! pauvre, que tu auras soif ! — Ah ! pauvre, que tu auras faim..."



LIVRE LA MAISON BASQUE ET LA TOMBE BASQUE
D'HENRY O'SHEA



Après la cérémonie religieuse et l'ensevelissement, la famille et les amis rentrent dans la maison vide ; un repas copieux les y attend. Dans les temps antiques, ces repas avaient lieu peut-être soit dans les églises elles-mêmes, auprès du tombeau, soit dans les cimetières. On parait y avoir sacrifié des animaux et, en 1766, d'après le Père Laramendy, il était encore d'usage, dans le Guipuscoa, en Espagne, d'amener à la porte de l'église, vers la fin d'un enterrement, soit un boeuf, soit un veau qu'on ramenait à l'abattoir après en avoir donné la valeur aux prêtres officiants. 



A la maison le repas se prolonge. Plus il est abondant, plus la mémoire du mort s'en trouve honorée.



A la fin du repas, avant de quitter la table, il est d'usage que l'homme le plus considéré de l'assistance se lève et dise le "De profundis". Les convives debout et bérets à la main le répètent avec lui. C'est l'acte qui clôt les funérailles après lequel on se sépare et on retourne à ses travaux.



A l'église, pendant une année entière, on allume, à la mémoire du défunt, à la messe du matin, ces longues bougies filées, sortes de gros rats-de-cave en cire, souples, enroulés dans une corbeille ronde que l'on laisse à l'église. La benoîte, c'est-à-dire la femme qui lave les linges du culte et range le sanctuaire, est chargée du soin d'allumer les bougies.



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CAPE DE DEUIL
PAYS BASQUE D'ANTAN


Après un deuil, la famille reçoit de ses amis et de ses connaissances des dons en argent plus ou moins considérables. Cet argent sert à dire des messes et fournit au clergé des ressources qu'il ne dédaigne pas.


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COSTUME DE DEUIL SARE
BMB N3 4  1927


Nous avons encore un mot à dire des cimetières basques. Ils sont généralement très négligés ; les mauvaises herbes y abondent, les tombes sont pressées les unes contre les autres, les nouveaux morts chassent de leur couche ceux qui les ont précédés dans le dernier sommeil. Ils ne ressemblent en rien à nos cimetières parisiens, si bien tenus, ou les tombes sont ornées, soignées et fleuries, ni aux jardins mortuaires des pays du Nord. Mais ce qui les rend très curieux pour les visiteurs, c'est leur ancienneté. On y voit de très vieilles tombes marquées par des stèles arrondies. Ces stèles dressées, à moitié enfouies sous l'herbe, portent des signes gravés sur la pierre ; ces signes rappellent diverses figures géométriques d'une antiquité incontestable que l'on retrouve en Orient, vestiges du culte du jeu, symboles par lesquels on est conduit à supposer, en la retrouvant chez les Basques, que l'origine du peuple dont nous nous occupons se perd dans la nuit des temps."



pays basque avant
LA TOMBE BASQUE LOUIS COLAS
PAYS BASQUE D'ANTAN




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