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vendredi 7 juillet 2023

LES FÊTES DE LA SAN FIRMIN À PAMPELUNE-IRUÑEA EN NAVARRE AU PAYS BASQUE EN 1934

LES FÊTES DE SAN FIRMIN À PAMPELUNE EN 1934.


Les fêtes de San Fermin (ou Firmin), à Pampelune, existent depuis des centaines d'années.




pays basque autrefois navarre fêtes
AFFICHE FÊTES PAMPELUNE NAVARRE 1934
PAYS BASQUE D'ANTAN





Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien L'Action française, "organe du nationalisme 

intégral", le 6 septembre 1934, sous la plume de Jean d'Elbée :



"Pampelune en fête.



Sous son fulgurant ciel de juillet, dans ses campagnes calcinées, au milieu de ses montagnes de transparente améthyste, Pampelune en fête apparaît comme une reine d'Orient. 



Sur la route qui y mène se dressent, à un moment, de hautes gorges roses annonçant un monde nouveau, resplendissantes portes de la latinité. Désormais, les eaux coulent voluptueusement vers la mer païenne, humaine. Les monts arrêtent les nuages de l'Océan, celtique, qui gronde au loin.



Pourtant Pampelune est basque, capitale d'une des sept provinces, la Navarre. Mais ce pays et son peuple ont gardé leur caractère, si particulier que le roi de France, quand il les réunit, voulut, avec un admirable respect, leur conserver leur nom, leur titre, leur entité morale, et il se dit, ménageant, en gentilhomme qu'il était, toutes les fiertés : Roi de France et de Navarre. 



pays basque autrefois zazpiak bat 7 provinces
ZAZPIAK BAT



Les gouvernements démocratiques, les républiques ne connaissent point ces délicatesses, ces simples justices, et nous voyons actuellement les provinces basques soulevées contre un régime de liberté, en nom, mais qui, en fait, n'a de cesse qu'il ne supprime les libertés, étant faible et mensonger par nature. Un régime fondé sur la parole et sur l'élection nait, vit et meurt du mensonge et dans le mensonge. Une fois de plus, le régime républicain démontre son incapacité à décentraliser. 



Pampelune, comme Bilbao, Vitoria et Saint-Sébastien, revendique et défend ses antiques privilèges toujours reconnus par les tyrans, mais là encore la Navarre se distingue de ses provinces sœurs qui aspirent plus ou moins à devenir des républiques autonomes. Elle est en majorité carliste, elle veut remettre sur le trône des Espagnes le prétendant qui a su conserver à travers les révolutions la pure tradition monarchique, à la fois autoritaire et libérale, et libérale parce qu'autoritaire. Un César avec des fueros, un chef incontesté avec les libertés communales et provinciales, telle est la devise de la fière et juste cité, capitale de la Navarre. 



Après la chute de don Alphonse, don Jaime qui avait toujours respecté la couronne de son cousin tant qu'elle était restée sur sa tête, fit un manifeste qui n'était que le merveilleux développement de cette devise et qui aurait été le salut de l'Espagne. La Navarre n'a pas renoncé. Immédiatement après la mort de don Jaime elle a crié Vive Alfonso Carlos. Ce prince, oncle de feu don Jaime, a dépassé les 80 ans. Jusqu'à la mort de son neveu il avait vécu, n'ayant pas eu d'enfants de son auguste épouse Marie des Neiges Bourbon d'Este, en prince indépendant, consacrant une fortune et des loisirs princiers à des voyages d'étude autour de la terre. Quand l'heure sonna, le prétendant inattendu se trouva prêt : son expérience du monde et des hommes était complète. Maintenant, il est fixé dans un petit village basque français, tout proche de la frontière espagnole. Il a accepté, il assume, il remplit, tout entière, sa tâche. Don Alfonso-Carlos et Dona Maria de las Nieves ont leurs selles et leurs brides prêtes pour rentrer dans leur royaume — leurs esprits et leurs âmes aussi. 



pais vasco antes navarra guerras carlistas
GUERRES CARLISTES 
DON CARLOS ET SES GENERAUX 1874



Mais, pendant les fêtes, Pampelune oublie toute politique. Du 7 au 15 juillet, c'est la trêve du saint, du patron saint Firmin, né à Pampelune au IIIe siècle, et mort évêque d'Amiens. Pendant ces huit jours et ces huit nuits, pendant cette folle et ardente semaine vont se déchaîner les saturnales, navarraises, dans les plaisirs ininterrompus de la danse, de la musique, des nourritures et du vin, des feux d'artifice, de la pelote et des taureaux



Comme toujours en Espagne, on trouve là des traits, des couleurs, des odeurs d'Orient. Ces musiques lancinantes, ces danseurs vêtus d'oripeaux qui parcourent inlassablement les rues ont des airs de tam-tams et de derviches. Rythmes et attitudes ont quelque chose d'obsédant, de fatal, de sacré, qui fait penser aux rites mystérieux d'Afrique. A un moment de la danse les derviches se laissent tomber à terre, à même le pavé, immobiles, prostrés, dans la poussière, puis se relèvent et recommencent. 



C'est une figure de danse. Ce n'est que cela. Il ne faut pas s'y tromper. Il ne faut pas exagérer l'influence de l'Orient en Espagne. Le fond est Romain. Civilisé, courtois, noble et grave. C'est la terre du Cid, vainqueur du Maure. Un agent de police à qui l'on demandait si l'on pouvait laisser impunément manteaux et valises dans l'auto, stationnée sur la place, répondit : "Il n'y a pas de voleurs à Pampelune." 



Ni voleurs, ni, pendant toutes ces fêtes, un ivrogne. Ces jeunes gens en souquenilles poussiéreuses, coiffés de canotiers défoncés, chaussés d'alpargates éculées, avec des barbes de quarante-huit heures, si on les approche, on découvre aussitôt de purs hidalgos. Ils reconnaissent des Français qui manifestent de l'admiration et du plaisir : Que simpaticos ! Il n'est pas d'amabilités dont ils ne les comblent, vous pouvez toujours essayer de payer les consommations, les hidalgos en haillons vous auront prévenus. 



Sept heures moins le quart du matin. Pampelune ne dort pas, mais somnole, dans la moiteur qui suit l'insomnie. Le soleil déjà fort joue dans les mille accidents des vieilles architectures : tuiles, balcons de fer ornés de boules de cuivre, fenêtres grillées et fleuries, étincelants miradors, lourds écussons de granit, tandis que l'astre s'étale, morne, dur, sans nuances, sur les vastes surfaces des bâtisses modernes dont les architectes "dans le mouvement" ont doté les quartiers neufs, le long d'"artères" rectilignes, où toute fantaisie, où tout charme ont disparu. 



Sept heures moins dix. Les balcons de la petite place de l'ayuntamiento commencent à se garnir. En bas, des hommes mettent en place les planches qui barrent les rues transversales donnant dans la calle où les taureaux vont être lâchés à sept heures sonnantes. La foule se presse contre les barrières, à toutes les fenêtres. Les hidalgos en haillons, dont la noble fonction est de courir, tous les matins de course, devant le troupeau des encornés jusqu'à la plaza, jonchent le pavé, plus poussiéreux que jamais, épuisés par les danses et les libations nocturnes. A nos pieds, l'un d'eux, vêtu d'une blouse noire, tire de sa poche une carotte crue et la croque. Mais, tous, malgré la somnolence, ne quittent pas l'horloge de l'ayuntamiento du coin de l'œil, comme des chats. 



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MAIRIE PAMPELUNE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Sept heures. La bombe éclate dans le ciel. Les chats sont sur leurs pattes, et bondissent. Les taureaux galopent sur leurs talons, légers comme des antilopes. L'étrange et rapide vision disparaît dans un nuage doré. 



La grande attraction tauromachique de la saison était la rentrée de Belmonte. On ne doutait pas que Juan ne dominât, toujours, les taureaux, mais l'âge, mais le manque d'entraînement ? Eh bien, on peut dire que le Trianero a réussi à faire revivre les temps héroïques de sa jeunesse. N'ayant jamais eu de moyens physiques, le temps semble avoir touché, beaucoup moins que chez d'autres, à son toreo génial. Il a toujours le même bonheur dans ses audaces inouïes. A la course du 10 juillet, à Pampelune, il se fit accrocher, à la mort, par son taureau. Il retomba sur la tête. Il se releva, pâle, ébouriffé, la culotte de soie déchirée, une fesse à nu, zébrée d'une estafilade. Il reprit rageusement épée et muleta et retourna aussitôt au combat. Il refit quelques passes nerveuses dans les cornes, puis estoqua jusqu'aux doigts, faisant rouler la brute. On retrouvait le Belmonte sublime. Mais que Juan se méfie... s'il le peut !... Un autre vétéran de l'arène, Ignacio Sanchez Mejias, vient de se faire tuer d'une terrible cornade à la cuisse, à Manzanarès. Son corps a été rejoindre, dans son mausolée sévillan, celui de son beau-frère Joselito, tombé glorieusement dans l'arène, lui aussi. 



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MATADOR JOSELITO ET JUAN BELMONTE
Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=520328



Sanchez Mejias avait 45 ans, et 10 d'absence. C'est folie de revenir aux taureaux dans ces conditions, quand du moins on veut toréer vraiment, sincèrement, comme le fit le valeureux et malheureux Ignacio. Si l'on joue la prudence pour arriver coûte que coûte, à ramasser cinquante mille douros au bout de sa saison, il vaut mieux se nourrir d'olives et d'eau claire dans une masure de Triana. Nous parlons ici pour Rahaël Gallo, autre vétéran et ex grand artiste de l'arène. Comme Belmonte, il a été repris par la "nostalgia de las tardes de oro", — "la nostalgie des journées d'or", mais avec lui, il faut prendre le mot "or" dans tous ses sens. 



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MATADOR IGNACIO SANCHEZ MEJIAS
Par Diego Calvache Gómez de Mercado — https://www.academiacolecciones.com/fotografias/inventario.php?id=F-0248, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=121253603



Chauve, il mérita l'épithète de "divin" — el divino calvo — avec cette supériorité sur César qu'il se méfiait toujours de la Brute. Aussi est-il toujours en vie et en bon point, et sait garder avec plus de malice que jamais, son ventre doré de la corne. A côté des héros, le pitre. L'arène est un vivant et tragique microcosme. 



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MATADOR RAFAEL GOMEZ ORTEGA EL GALLO



Le dimanche 15 juillet, Pampelune célèbre sa dernière course des Fêtes, puis, pour un an, retombe à la Politique. L'égalité, la liberté, la fraternité (vraies) des saturnales navarraises ont duré huit jours et huit nuits : c'est magnifique."








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