ENQUÊTE DANS LES PROVINCES BASQUES EN 1931.
Le 14 avril 1931 est proclamée la Deuxième République espagnole, à la suite des élections municipales et le roi Alphonse XIII part en exil sans avoir abdiqué.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien Le Journal, le 16 novembre 1931, sous la plume
d'Edouard Hesley :
"Le "Journal" en Espagne.
Une force en réserve.
(De notre envoyé spécial). Saint-Sébastien, octobre.
A Pampelune, il y a une belle avenue, l'avenue de Las Navas de Tolosa. En m'y promenant, l'autre jour, je m'arrêtai devant un monument assez bizarre. Luxueux, d'une ligne harmonieuse, tout en marbre blanc, il semblait fait pour servir à la fois de socle et de cadre à une statue et j'y pus, en effet, lire cette inscription :
Navarra
A su hijo esclacerido
Don José Sanjurjo.
MONUMENT A JOSE SANJURJO PAMPELUNE NAVARRE D'ANTAN |
Ce qui veut dire : "La Navarre à son illustre enfant José Sanjurjo." Mais si la dédicace subsiste, l'effigie de celui à qui elle s'adresse a disparu. On ne voit plus sur le soubassement que des figures allégoriques d'un rigoureux anonymat.
— Ne vous étonnez pas, me dit un ami. Comme vous le savez, Sanjurjo, c'est le nom du général qui commande la garde civile et qui la commandait déjà du temps du roi. Bien qu'il se soit rallié sans retard à la République, on a cru bon de mutiler ce monument aux premières heures de la révolution. Le buste qui le surmontait a été enlevé.
Mon interlocuteur, à ce moment, prit un léger "temps", comme un acteur rompu aux finesses du classique, un "temps" accompagné d'un malicieux sourire. Puis il ajouta : -
— Ne criez pas au vandalisme. Le buste est en sûreté et le temps n'est sans doute pas loin où on le réinstallera ici en grande pompe.
On connaît la garde civile. Elle a longtemps fait trembler tous ceux qui, en Espagne, aspiraient plus ou moins ardemment à un changement de régime. C'est une troupe prétorienne, composée d'éléments triés sur le volet. Ils sont de trente à trente-cinq mille hommes robustes, courageux, bien nourris, pénétrés d'un esprit de corps exceptionnel, trente ou trente-cinq mille hommes qu'on a choisis, un par un, dès l'adolescence, cohorte qu'aucune propagande ne peut entamer, et dont l'apparition, un jour d'émeute, suffisait à mettre en fuite les foules les plus fanatisées.
Un jour, à Barcelone, j'ai vu de mes yeux un peloton de cette garde civile, rien qu'en mettant sabre au clair, disperser comme une poussière des milliers de Catalans, qui pourtant ne passent point pour avoir froid aux yeux.
La garde civile fut longtemps le suprême rempart, "le suprême espoir et la suprême pensée" de la monarchie déclinante et de ses partisans. Alphonse XIII, à l'instant décisif, ne voulut pas faire appel à elle. Il lui répugnait de verser le sang espagnol. S'il s'était servi de cette arme, nul ne peut dire comment les choses eussent tourné.
ROI D'ESPAGNE ALPHONSE XIII |
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