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samedi 7 janvier 2023

LE MONASTÈRE DE RONCEVAUX EN NAVARRE AU PAYS BASQUE EN 1908 (première partie)

LE MONASTÈRE DE RONCEVAUX EN 1908.


La Collégiale royale de Roncevaux est un édifice religieux situé à Roncevaux, en Navarre, au Pays Basque.

Fondée au 12ème par Alphonse 1er le Batailleur en tant qu'institution hospitalière, elle a été par la suite agrandie et remodelée. Elle marque une importante étape du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle.



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MONASTERE DE RONCEVAUX
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet La Revue politique et littéraire, le 7 juin 1908, sous la plume de 

Jacques Hardy :



"Roncevaux.



Au départ de Saint-Jean-Pied-de-Port, lorsqu'on fait route vers le sud, laissant derrière soi les hauteurs boisées d'Anaduy et les champs d'Uhart-Cize qu'arrosent, en s'y rejoignant, les trois rives d'Arnéguy, de Béhérobie et de Lauribar, dès les premiers pas faits sur la route de Pampelune, l'antique chemin qui unissait autrefois la Navarre espagnole à la Navarre française, on entre dans le pays de la légende. Le souvenir de Charlemagne et de Roland emplit l'esprit du voyageur. C'est ici le défilé de Cizre, que suivait la grande armée victorieuse, par une chaude journée d'août, quand se répandit, tout à coup, le bruit de la mort de Roland et du massacre de l'arrière-garde. Charlemagne était déjà dans Saint-Jean avec ses barons. Il retourna. Il refit, le coeur grondant de colère, le chemin qu'il avait parcouru dans la joie de la victoire et du retour. Après un arrêt à Luzaïde, où il prit conseil de ses capitaines, il repartit, hâtant la marche, ardent à se venger. Il revit les pentes majestueuses des monts, couvertes de forêts bruissantes, retraites faciles aux pillards basques ; il revit les rochers farouches om vinrent se briser les appels du cor de Roland, que l'écho prolongea si prodigieusement. Il arriva, montant toujours, au passage maudit. Il descendit vers l'Espagne, parcourant la vallée de Roncevaux, mais, ne trouvant partout devant lui que la solitude, il regagna la France.



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ROLAND A RONCEVAUX
PAYS BASQUE D'ANTAN



Peu à peu, la légende se forma. La défaite du grand Empereur, défaite restée impunie, grandit dans l'imagination des hommes. Le combat d'arrière-garde se changea en une lutte de géants ; les hordes de montagnards devinrent les innombrables armées de Sarrasins : la vallée de Roncevaux fut, à tout jamais, la sombre vallée. C'est avec un serrement de cour qu'on entreprend le voyage. Les grandes figures de la légende se lèvent a chaque pas que l'on fait : quand le vent, agitant les chenets, heurte leurs cimes mouvantes, on croit entendre le choc des armées ; on s'attend à voir des gorges profondes, pleines de terreur et d'ombre, entre de hautes murailles menaçantes ; et, quand les visions de l’esprit se dissipent au clair soleil, on est tout surpris du tableau enchanteur, si frais, si calme, qui s'offre aux yeux.




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LIVRE LA CHANSON DE ROLAND


La Nive coule, abondante et claire, dans une vallée peu profonde, entre des collines vertes, aux flancs desquelles de nombreux hameaux groupent leurs maisonnées. En approchant de l'Espagne, le sol  s'élève. La route qui, un peu au dessous de Saint Jean, a rejoint la rivière, longe des hauteurs abruptes qui se couronnent de forêts. Les hameaux se font plus rares et se cachent aux sommets, sous le couvert des arbres. De-ci, de-là, une ferme dans la prairie, une maison dans une clairière. Des sources jaillissent et forment de petits torrents qui vont se jeter à la Nive en roulant leurs cailloux.



La vallée se resserre, les rochers se dénudent, se rapprochent et grandissent ; la route, étranglée, fait un coude brusque au bourg d'Arnéguy, franchit la rivière et passe en Espagne. Devenue frontière, la Nive change de nom et, désormais, s'appelle le ruisseau du Val Carlos. La rive droite, cependant, reste française pendant plusieurs kilomètres encore. Sur cette rive on ne trouve plus, au sortir d'Arnéguy, qu'un étroit chemin qui, bientôt, devient un simple sentier de montagne, et le voyageur, qui se rend à Roncevaux, doit passer en Espagne avec la route.



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VUE GENERALE DE VALCARLOS
PAYS BASQUE D'ANTAN



On ne tarde pas à atteindre Luzaïde, le hameau le plus important du val Carlos. La rive française devient de plus en plus escarpée, faisant contraste avec la rive espagnole, avec la vallée de Charlemagne, où la vue s'étend sur de vastes prairies ondulées, que coupent des ruisseaux et qu'ombragent de vertes châtaigneraies. 



La route monte toujours ; elle serpente, elle s'infléchit, elle a des brusqueries singulières. Elle tourne au nord, va droit sur la France, puis revient au sud ; elle fait mille détours ; elle va vers l'est, mollement, et, le moment d'après, elle se hâte vers l'ouest. L'air devient froid. Quelques flocons de neige attardés dans les creux se dispersent au souffle du vent. Le ruisseau a disparu depuis longtemps. Montant toujours, on atteint 1 500 mètres, et l'on franchit le col d'Ibañeta. Aussitôt on redescend, et voici, barrant la route, les bâtiments irréguliers de Roncevaux. Au delà, c'est la vallée, vaste ovale qui s'allonge jusqu'aux maisons de Burguete, entre des chaînes irrégulières et boisées, d'où descendent cent frais ruisseaux qui glissent lentement sous les aunes dont les prairies s'ombragent. A l'orient, le mont Altabiscar arrondit sa croupe, que dorent les genêts. On s'attendait à un spectacle tumultueux et désolé ; et nulle part la nature n'est plus souriante.



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ALTO DE IBAÑETA RONCEVAUX
PAYS BASQUE D'ANTAN



La fondation de l'abbaye est communément attribuée à Charlemagne. Certains écrivains, cependant, en font honneur à un évêque de Pampelune qui vivait dans la première moitié du XIIe siècle. Ces deux assertions sont fausses ; toutefois, il est parfaitement explicable que Charlemagne ait pu passer pour être le fondateur de Roncevaux, et nous allons voir comment. Bien avant lui, en 638, une abbaye fut fondée en cet endroit par des chanoines. On appelait ainsi, à l'origine, les clercs inscrits sur la matricule de l'Eglise. Au siècle suivant, ce nom s'étendit à tous les clercs qui, sans prononcer de voeux formels, et dans un but d'enseignement ecclésiastique, pratiquaient la vie en commun, en obéissant à certaines règles.



En 806, Charles fonda à Ibañeta, plus haut et plus au nord, le monastère et l'hôpital du Saint-Sauveur. Les nouveaux moines portaient l'épée. Ils formaient un ordre moitié religieux, moitié militaire ; ils avaient charge d'accueillir les voyageurs et de soigner les malades, mais ils devaient aussi s'opposer aux courses des infidèles. En 921 un roi maure, traversant le col d'Ibañeta, attaque les moines-soldats, les défait et  détruit le monastère. Les religieux dispersés se réfugient à Roncevaux, se reconstituent, et voila la modeste abbaye — que sa modestie même avait préservé de la destruction — devenue monastère, le monastère de Charlemagne. L'ordre guerrier eut, pendant le cours du Moyen-Age, des fortunes diverses et souvent magnifiques. Avec les temps modernes, moins violents, moins troublés, le calme revint à Roncevaux. Les moines-soldats déposeront les armes et ne voulurent plus être qu’hospitaliers. C'est à leur charité qu'ils doivent leur vraie gloire. Au 19ème siècle, la décadence est venue. Roncevaux n'a plus ni gloire, ni richesses ; ses bâtiments immenses sont déserts ; plus de moines ; des clercs, en petit nombre, et qui vivent sans faste, sont les seuls héritiers d'un nom célèbre. Mais c'est aux chanoines ignorés du 7ème siècle qu'ils se rattachent ; ils n'ont pas les vertus actives de ceux dont ils ont pris la place, et dont l'oeuvre est à peu près oubliée. L'abbaye s'est substituée au monastère, et Roncevaux n'est plus aujourd'hui célèbre que par les chants des poètes.



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MONASTERE DE RONCEVAUX
PAYS BASQUE D'ANTAN



Ils sont là dix chanoines, sous l'autorité d'un prieur, élus, au fur et à mesure des vacances, par le chapitre que préside l'évêque de Pampelune. Ils vivent en commun, couchant sous le même toit, mangeant à la même table, assistés de quelques domestiques chargés de la cuisine et des fonctions inférieures.



L'abbaye de Roncevaux comprend un certain nombre de constructions basses et massives, sans style aucun, plantées capricieusement de chaque côté de la route de France. Au temps où Roncevaux était une des maisons les plus riches de la chrétienté, abritant un ordre de religieux-soldats puissant et respecté, les bâtiments, plus nombreux, offraient, à n’en pas douter, des types variés et des formes artistiques très pures. Mais l'abbaye dut subir tant de sièges, elle fut si souvent incendiée et pillée qu'elle garde à peine quelques souvenirs des temps anciens : l'église collégiale et la chapelle de Saint-Augustin toutes deux du XIIIe siècle, et toutes deux flanquées d'un cloître du XVIIe, fort laid, et qui a remplacé un cloître ancien magnifique, détruit à la fin du XVIe siècle ; la chapelle du Saint-Esprit, petite et sans beauté, mais infiniment vénérable, s'il est vrai, comme le veut la tradition, qu'elle ait été construite au lieu même où furent inhumés Roland et ses compagnons. Des fouilles, faites sous la chapelle à diverses reprises, ont mis au jour des ossements, des bijoux et des armes. Le prieuré, les maisons des chanoines, les communs ne sont pas antérieurs au 18ème siècle.



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MONASTERE DE RONCEVAUX
PAYS BASQUE D'ANTAN



L'abbaye possède une bibliothèque et un trésor. La bibliothèque, autrefois considérable, compte encore actuellement plus de 7 000 volumes, dont quelques-uns d'une très grande valeur. Le trésor comprend quelques tableaux et statues, des dons de divers bienfaiteurs des anciens moines, et un petit nombre d'objets très respectés qui ont appartenu, croit-on, à l'archevêque Turpin ; des sandales, une crosse, deux calices, deux patènes, deux burettes d'une pierre verte garnie d'argent et incrustée de gemmes d'un travail merveilleux, deux petites mitres garnies de pierreries et un étrier. Avec ces objets se voyaient autrefois l'épée de Roland, maintenant à Madrid, et les deux cors d'ivoire, les olifants de Roland et d'Olivier, aujourd'hui disparus. On les montrait encore au 17ème siècle.



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ARCHEVÊQUE TURPIN



Un des plus jolis dons est le manteau de la Vierge, en soie brochée d'or, que fit de ses propres mains la reine Isabelle, femme du roi du Portugal, Denis 1er. Les chanoines montrent encore avec orgueil un évangile vénérable sur lequel les rois de Navarre prêtaient serment lors de leur élévation au trône. Mais toute leur tendresse est pour une statue de la Vierge, une statue miraculeuse qu'une petite chapelle abritait jadis ; elle est aujourd'hui dans l'église collégiale, sur le retable du maître-autel. La Vierge sainte, en bois, qu'un peu d'argent recouvre, est assise sur un trône d'argent. Sans grande valeur artistique, la statuette serait peu remarquée, mais elle a une légende merveilleuse, et les cantons des alentours, qui professent pour la Vierge un culte fervent, ont, pour son image, la plus ardente vénération. Voici la légende telle qu'on me l'a contée.



Les anciens moines de Roncevaux, inquiets de voir sans cesse des bandes armées traverser leur solitude, craignant d'être de nouveau pillés et de ne pouvoir, une fois de plus, sauver la bonne Vierge, leur protectrice, que les voyageurs et les pâtres invoquaient dans le danger, résolurent de l'enlever en secret de sa petite chapelle et de la cacher. Un jour, à l'heure ou le soleil s'abaissant prolongeait les ombres de la forêt, ils sortirent en grand mystère, emportant avec dévotion la statue de leur bien-aimée protectrice, et s'en vinrent la déposer dans un trou profond, au pied des premiers arbres.



Dès ce moment, ils ne songèrent plus qu'au jour bienheureux où ils la viendraient délivrer, où la bonne Vierge, rendue à sa petite chapelle et toute brillante d'argent neuf, serait offerte de nouveau à la pieuse adoration de ses fidèles. Mais ce jour attendu ne vint pas. Les temps étaient mauvais ; le monastère était environné de périls. Les jours et les jours passèrent, sans apporter le calme tant souhaité, et les moines, qui avaient caché la statue, moururent. Soit négligence, soit crainte de malheurs plus grands encore, ils emporteront leur secret.



Et les années, à leur tour, passèrent, nombreuses. Un nouveau siècle commença. Dans le silence du cloître, aux veillées, dans les chaumières, on s'entretenait souvent de la Vierge, mystérieusement enlevée, tant son souvenir demeurait vivace. Les voyageurs qui traversaient le col de Roncevaux, et les pâtres qui menaient paître leurs troupeaux dans les solitudes, ne manquaient jamais de se mettre sous sa protection.



Une nuit, une belle nuit d'été pleine d’étoiles, un jeune pâtre gardait les troupeaux du monastère dans la prairie inclinée qui monte doucement vers la forêt. Pieusement il avait prié la Vierge Marie, et, confiant en son aide, il allait s'endormir, quand tout à coup il aperçut deux lueurs étranges qui perçaient les ténèbres sous le couvert de la forêt. Il regarda longtemps, un peu ému. Les lueurs demeuraient à la même place : elles avaient, dans l'ombre, un scintillement doux et un peu bleu ; on eut dit deux étoiles descendues du ciel. Le pâtre, s’étant levé, se dirigea à pas lents vers la forêt. Le cœur lui battait bien fort en approchant de la lisière ; il avança cependant, et quand il eut dépassé les premiers arbres, il vit une chose surprenante : un cerf de taille inaccoutumée, et qui portait, au haut de chacune de ses cornes, une étoile. Il le regardait, immobile, n'osant plus avancer, et le cerf était immobile comme lui. Il se raidit, fit un pas puis un autre, et, quand il fut près de la bête, â la toucher, elle disparut sans qu’aucun bruit décelât sa fuite. Le pâtre, troublé de cette fuite soudaine plus encore que de la mystérieuse apparition, regagna â grands pas sa cabane."



A suivre...


(Source: Wikipédia)






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