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samedi 28 janvier 2023

L'ALIMENTATION EN EAU DE BIARRITZ - MIARRITZE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN FÉVRIER 1906

L'ALIMENTATION EN EAU DE BIARRITZ EN 1906.


Dès le début du vingtième siècle, la Ville de Biarritz se préoccupe de son alimentation en eau.



pays basque autrefois labourd café
APERITIF AU CAFE ANGLAIS BIARRITZ 1906
PAYS BASQUE D'ANTAN




Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 23 

février 1906 :



"La question des eaux.



Rapport présenté par M. Tétard à la séance du Conseil Municipal du 11 Février 1906. 



Messieurs, 


Deux de nos commissions réunies à l’effet d’examiner diverses questions ont nommé une sous-commission spécialement chargée d’étudier de très près le contrat qui lie la ville de Biarritz et la compagnie des eaux et notamment l'interprétation à donner au cahier des charges relativement à un point très important sur lequel votre attention a déjà été appelée. Cette sous-commission a bien voulu me nommer son rapporteur. J’ai pensé avec M. le Maire qu’il était nécessaire qu'une lecture de ce rapport fût faite en séance du conseil et qu’il fut renvoyé par vous à l'étude de la commission des finances si vous ne croyez pas devoir en accepter les conclusions dès aujourd’hui. 



Lu compagnie des eaux ne pouvant plus, avec les sources dont elle a obtenu la concession d’exploitation le 31 mars 1890, suffire aux besoins toujours croissants de notre ville, a décidé d’obvier à cette situation en faisant des recherches d’eaux nouvelles, abondantes et saines. Sur les indications de géologues compétents, des sondages ont été pratiqués sur les terrains communaux du Moura.



On a trouvé des sources abondantes émergeant à fleur de sol et d'une eau d'excellente qualité. Il y a lieu de se féliciter d'un pareil résultat. Mais une question se posait au sein de diverses commissions chargées tour à tour d'examiner certains contrats ou projets d’amélioration de nos divers services, l’occupation des terrains du Moura par la Compagnie des Eaux, pour y pratiquer des sondages et pour y établir une usine élévatoire, était-elle la conséquence d'un droit résultant du cahier des charges, ou le fait d'une tolérance de l’administration municipale ? et, dans l’un ou l’autre cas, cette occupation ne devait-elle pas donner lieu à indemnité à payer à la Ville ? 



Une première étude du cahier des charges axait amené quelques-uns d’entre nous à penser que certaines parties d’articles pouvaient donner lieu à interprétation douteuse et ne voulant pas immédiatement conclure dans tel ou tel sens, l'administration municipale fut invitée à demander à Me Pouzac, avocat-conseil de la Ville, son sentiment sur les interprétations des articles du cahier des charges qui semblent laisser à la Compagnie un droit de sondage sur les terrains communaux. Voici le texte de la consultation de Me Pouzac que beaucoup d’entre vous connaissent déjà : 


"La Ville de Biarritz demande si le concessionnaire de son alimentation hydraulique est en droit de réclamer l’occupation gratuite des terrains du Moura (autres que ceux désignés dans le traité de concession). 


La substance de la concession faite par la Ville de Biarritz au concessionnaire est contenue dans l’article premier qui détermine les sources qui doivent être utilisées, savoir : Source Haraout, Source du Lac Mouriscot, Source de Grammont (V. article premier traité du 15 mai 1890). L’article premier du cahier des charges est plus précis et plus complet. Il stipule : 1° la source Haraout ; 2° les sources du lac Mouriscot, et il ajoute au même paragraphe : et de toutes les eaux qui, après analyse, auront été reconnues potables et propres à l’alimentation, il stipule enfin deux sources émergeant dans la propriété de Ch. Laborde, numéro 643 du cadastre, et dans celle de M. Gambier, numéro 664. Enfin, l’article premier, in fine, stipule : Le concessionnaire pourra occuper les terrains communaux qui peuvent être utilisés pour l'établissement des moteurs des conduites et des réservoirs, ainsi que pour le captage des sources qui pourraient s’y trouver. C’est cette dernière cause qui est susceptible d’interprétation. 



pays basque autrefois labourd château
CHÂTEAU DE GRAMMONT BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Dans l'esprit des contractants, la concession devait embrasser d’une façon générale l’alimentation hydraulique de la ville de Biarritz. Pour cela la ville maintiendrait deux catégories de sources, celles déjà utilisées, et celles à utiliser ou à capter au moyen de travaux d'élévation ou de captage. Parmi ces dernières, le traité mentionne les sources qui alimentent le lac Mouriscot. Et il ajoute dans le cahier des charges, et toutes les eaux qui après analyse auront été reconnues potables et propres à l'alimentation. 


Cette catégorie d’eau rentre-t-elle dans le groupe des sources du lac Mouriscot, ou est-elle généralisée en s’appliquant sans spécification à toutes les eaux quelconques qui pourraient se trouver sur le territoire de la commune ? Les sources du lac Mouriscot étaient déjà connues sinon utilisées, les autres eaux peuvent ne pas provenir de sources car les deux termes employés si près l'un de l’autre peinent être pris dans une acception différente. Ces eaux ne seraient pas connues au moment du traité. Et cependant la clause sur la mise à la disposition des terrains au profit du concessionnaire se trouve dans le même article ; elle semble s’appliquer non seulement aux sources connues, mais aussi à celles qui pourraient se trouver dans les terrains communaux, c'est-à-dire à des sources inconnues encore sans qu'il soit fait de distinction, tous les terrains communaux pourraient être utilisés par le concessionnaire. Mais cette extension est limitée par l'invention des sources." 



Une étude plus approfondie du cahier des charges rend inacceptables les conclusions du conseil de la ville. 



L’objet principal de la concession du service des eaux est établi de manière absolument nette et limitative dans l’article premier du traité : 

"M. le Maire concède à M. Hézard, qui accepte, l’établissement de l'exploitation du service d’eau potable destiné à l'alimentation publique et privée de la ville de Biarritz, au moyen des canalisations déjà existantes des sources de Haraout et de Grammont et de l'amenée avec des moteurs des eaux de la source près du lac "Mouriscot". 


pays basque autrefois lac labourd
LAC DE MOURISCOT AU BOIS DE BOULOGNE BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Toutes les autres clauses ou parties de clauses dont l’interprétation amplifiée pourrait venir détruire ou augmenter l’objet de l'article premier du traité s'appliquent soit à des eaux soit à des terrains englobés dans la formule très nette de l'article premier du traité.



L’article premier du cahier des charges est plus précis, nous dit M. Pouzac ; car il ajoute aux eaux de Haraout et de Mouriscot, toutes les eaux qui après analyse auraient été reconnues potables et propres à l'alimentation.



Si cette dernière clause formait un article séparé, nous pourrions voir là évidemment une extension de l'article premier du traité, mais cette extension serait telle qu'elle rendrait absolument inutile la limitation bien précisée du même article qui aurait été ainsi conçu :


"M. le Maire de Biarritz concède à M. Hézard qui accepte, l'établissement de l'exploitation du service d'eau potable destiné à l'alimentation publique et privée de la ville de Biarritz au moyen de toutes les eaux qui après analyse auront été reconnues potables et propres à l'alimentation et d'ores et déjà des sources de Haraout, de Grammont et de celles du lac Mouriscot."



Voici quel aurait été l'objet de cet article fondamental du contrat ; mais pour arriver à donner tant d'importance à la seconde partie de la phrase de l'article premier du cahier des charges, on est obligé de la séparer de son début qui limite bien à son tour l'endroit où sont les sources dont les eaux qui après analyse auront été reconnues potables. Je dis à dessein où "sont" et non où "pourront être" car immédiatement ces sources sont désignées. Lisons en effet :


"Toutefois, il est d'ores et déjà établi que les sources ci-après donnent des eaux remplissant ces conditions.

1° La source émergeant d'un sondage pratiqué dans la parcelle numéro 643, section C, appartenant à M. Laborde (Charles)."



Voilà, Messieurs, les sources dont il s'agit ; elles se trouvent auprès du lac Mouriscot. Le concessionnaire tient à faire stipuler par le cahier des charges qu'elles sont propres à l'alimentation. Il n'aurait nul besoin de cette stipulation si le traité lui accordait la concession de toutes les eaux potables de la commune.



Enfin si les deux sources des parcelles 643 et 664 sont les seules qui paraissent dans le cahier des charges actuellement sous vos yeux, il y avait d’autres sources que le concessionnaire tenait à faire inscrire. Mais les ingénieurs des pont y et chaussées, chargés d’examiner le cahier des charges, en demandèrent la radiation car elles ne présentaient pas les qualités requises : or, ces sources étaient à Mouriscot. 



pays basque autrefois lac labourd
LAC MOURISCOT BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN





Je crois, Messieurs, avoir montré que la fin de la phrase de l’article premier du cahier des charges n’a nullement la valeur que lui attribue M. Pouzac. Nous allons voir que l’interprétation de la fin de cet article premier ne saurait, elle non plus, être admise, M. Pouzac se basant sur ce que la concession s’étendrait non seulement aux sources de Mouriscot mais encore à celles pouvant se trouver dans le territoire communal, conclut que tous les terrains communaux peuvent être utilisés par le concessionnaire, cette extension étant toutefois limitée par l’invention des sources.



La phrase : "Le concessionnaire pourra occuper les terrains communaux qui peuvent être utilisés pour l’établissement des moteurs de la conduite et des réservoirs, ainsi que pour le captage des sources qui pourraient s’y trouver", prise seule constituera,  évidemment le droit pour le concessionnaire de faire sur tout le terrain de la commune des travaux de captage et le rendrait propriétaire des sources qui pourraient s’y trouver. Quelles seraient les conséquences de ce droit s’il avait été réellement donné. La première celle qui se présente aux yeux de tous serait la possibilité de procéder à des sondages sur des points du territoire communal où il serait inadmissible de les admettre voire même sur les chemins, sur les routes, sur la place de la Mairie. Croyez-vous qu’une pareille idée ait pu germer dans l’esprit des parties lors de l'établissement du cahier des charges et que l’administration supérieure l'aurait laissé passer ? Mais une autre conséquence découlerait de ce droit accordé au concessionnaire, ce serait de grever tous les terrains communaux d'une servitude non apparente qui aurait dû, si elle avait existé, être stipulée dans tous les actes de cession faite par la ville depuis 1890. Or jamais il n’en a été fait mention. Et pourtant la servitude du droit de sondage impliquerait celle du droit aux sources même superficielles, servitude grave qui léserait non seulement les propriétaires du fond où se trouve la source, mais encore ceux des fonds inférieurs dont les droits sont réservés par l'art. 640 du Code civil. 



Pensez-vous, Messieurs, qu’un droit aussi considérable pourrait découler d'une phrase incidente et n'aurait pas dû faire l’objet d'un article spécial que d'ailleurs nul n'aurait accepté ? Vous êtes d’accord avec moi sur ce point et je conclus négativement. 



Je vous ai montré que la fin de l'article premier même pris séparément, ne pouvait pas donner à l’article premier du traité une amplitude qui aurait des conséquences illégales ; replaçons cette phrase telle qu’elle est, non plus à la une de l’article premier, mais de suite après la phrase qui oblige le concessionnaire à acheter les terrains non "communaux" de Mouriscot et nous aurons alors sa valeur véritable. Je relis : "Le concessionnaire sera tenu d’acquérir en toute propriété les sources de Mouriscot, ainsi que les terrains communaux nécessaires pour l'installation des machines, le captage des eaux, les réservoirs, etc. Le concessionnaire pourra occuper les terrains communaux qui peuvent être utilisés pour l’établissement des moteurs de la conduite et des réservoirs qui pourraient s’y trouver". 



pays basque autrefois lac labourd
LAC MOURISCOT BIARRITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



Il y avait donc à Mouriscot des terrains particuliers et des terrains communaux "nécessaires" à l'exploitation des sources. Le cahier des charges "obligeait" le concessionnaire à acheter les terrains "particuliers" et lui "donnait la faculté d’occuper ceux communaux". Il n’y a rien de plus dans le cahier des charges et toute autre interprétation me parait plus que hasardée. 



L’occupation par le concessionnaire du terrain du Moura n’était donc pas de droit absolu. Allait-il la refuser ? Je n’hésite pas à répondre non ; car les besoins de la ville passent avant tout et il n’y avait pas lieu d’empêcher sur les terrains du Moura tous travaux de sondage et d’établissement d’usine ; l’administration municipale a donc bien fait. Sans préjuger de l'interprétation du cahier des charges et sous réserve de la production des plans de l’usine, d’autoriser en principe cette occupation. Mais le moment est venu d’examiner à nouveau et en se plaçant à un point de vue essentiellement différent de celui que nous aurions occupé si les droits du concessionnaire sur les terrains du Moura eussent été indiscutables, quelles sont les contreparties que la ville doit exiger du concessionnaire en échange de cette occupation. 



Reprenons le rapport de Me Pouzac qui termine ainsi : "Mais pour les sources autres que celles mentionnées dans le cahier des charges et prévues dans ce document la gratuité n’est pas admissible, car on ne peut stipuler que pour des choses prévues, on ne peut prendre un engagement indéterminé, cette gratuité n’est pas même mentionnée d’une façon précise ; elle découle seulement pour les sources nominalement désignées de l'esprit de la convention. Mais pour des sources hypothétiques, pour des terrains non désignés, comment aurait-on pu la stipuler d'avance. Si donc la ville doit mettre les terrains communaux à la disposition du concessionnaire, c’est seulement pour lui faciliter l'invention de nouvelles sources, et dans le cas, le concessionnaire devant en tirer un profit non prévu, il faut qu'il paie cette facilité et cette faveur." 



Vous voyez que même si les prétentions de la Compagnie au droit de sondages étaient admissibles, il ne saurait être question de la gratuité dans l'exploitation des nouvelles sources. 



Comment établir une contrepartie équitable, sur quoi la baser ? Il m’a paru que cette base devait être celle-là même qui avait pré dominé dans l'établissement du cahier des charges et de la traduire non par une somme difficile à évaluer, mais par la prise à la charge de la Compagnie des dépenses occasionnées à la ville dans son service hydraulique par cette même extension de Biarritz qui allait permettre à la Compagnie après être arrivée au maximum de rendement de la concession qu’elle avait obtenu en 1890 d’augmenter ses recettes de façon presque illimitée et cela dès le début de la concession qui a encore 45 années de durée.




J'ai pensé, d’accord avec mes collègues de la sous-commission, que Biarritz devait comme minimum de contrepartie aux avantages considérables que la Compagnie des eaux retirera de l'exploitation des eaux du Moura obtenir : 

1. l'établissement aux frais de la Compagnie de toutes les bouches d'incendie prévues dans l'avant-projet de réorganisation et dont le nombre s'élève au nombre de 50 ;

2. Etablissement immédiat de quinze autres bornes-fontaines d'ici trois ans à raison de 5 par an aux endroits indiqués par l'administration principale ;

3. Elévation du cube d'eau fourni gratuitement à la ville par la Compagnie à 1 000 m. c. par 24 heures ;

4. Etablissement aux frais de la Compagnie des canalisations et prises d'eau dans les promenades publiques pour permettre l'arrosage sans que cet établissement puisse dépasser un maximum de dix mille francs ;

5. Paiement du loyer des terrains du Moura, 125.


Moyennant ces très justes compensations, la ville reportera sur la Compagnie des charges que l'incertitude dans laquelle on se trouvait de l'avenir de Biarritz en 1890 ne permettait pas de lui imposer. Aujourd'hui l'expérience est faite. Nul n’osera dire que l'affaire des eaux de Biarritz n’est pas une affaire d’or. Il est nécessaire que le Conseil municipal soucieux des intérêts de la ville, lutte pied à pied contre les concessionnaires de toutes sortes qui réalisent au grand détriment de nos intérêts des bénéfices hors de proportion avec ceux qu’ils avaient jamais espérés au moment de la signature de leur contrat et auxquels la prospérité sans cesse grandissante de noire chère cité offre encore un champ d’accroissement presque illimité. 



Je vous prie donc, mes chers collègues, de prendre en considération les termes de mon rapport, de vouloir bien les approuver et donner mandat à M. le Maire pour traiter avec la Compagnie des eaux, aux conditions que je viens d’avoir l'honneur de vous indiquer."








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