À TRAVERS LA RÉPUBLIQUE BASQUE EN 1937.
Pendant la guerre civile espagnole, appelée aussi guerre d'Espagne, du 17 juillet 1936 au 1er avril 1939, de nombreux correspondants de presse ont publié leurs reportages.
RELIGIEUX ET MILICIENS REGARDS 4 FEVRIER 1937 |
Voici ce que rapporta à ce sujet l'hebdomadaire Regards, le 4 février 1937, sous la plume de J.-
E. Pouterman :
"A travers la République Basque.
Par notre envoyé spécial J. - E. Pouterman (photos Chim).
Religion et Guerre civile.
Je reviens d'Euzcadi. J'ai parcouru la République Autonome Basque d'un bout à l'autre de son territoire. J'ai visité ses villes et ses campagnes ; j'ai admiré le fonctionnement impeccable de son industrie ; j'ai vu l'activité fiévreuse du port de Bilbao ; j'ai parlé avec ses hommes politiques ; j'ai interrogé des ouvriers, des bourgeois, des militaires, des chefs d'entreprises ; et partout je n'ai constaté qu'une seule volonté, farouche et tenace : celle de défendre jusqu'au bout les libertés basques et la République Espagnole.
Le peuple basque n'est pas "marxiste", il n'est vendu ni à Blum, ni à Staline, comme le proclame quotidiennement le bouffon de Radio-Séville, Queipo de Llano. Le peuple basque s'est donné un gouvernement bourgeois et démocratique. Il n'a collectivisé ni terres, ni usines, et sur toute l'étendue de sa République, il n'a pas détruit une église. Il est profondément attaché à la foi catholique. Sa piété, connue dans toute l'Espagne, est plus ardente que jamais.
Est-ce cette foi authentique des ouailles qui a préservé l'église basque de la corruption politique et sociale que les républicains espagnols dénoncent chez le reste du clergé de la péninsule comme le principal ressort de la sédition militaire ?
Ou est-ce, au contraire, la probité morale des prêtres basques, qui a aidé le peuple à garder intacte sa foi chrétienne ?
Toujours est-il que dans le Pays Basque espagnol, il n'existe pas de conflit entre les aspirations républicaines de la population et l'Eglise. Nombreux sont les prêtres basques fusillés par les factieux pour avoir refusé de faire cause commune avec les ennemis du peuple. J'ai rencontré à Bilbao plus d'un prêtre qui avait dû fuir l'enfer fasciste. Et l'évêque de Vittoria lui-même a été contraint d'abandonner son évêché, aujourd'hui sous la domination de Franco, pour aller se réfugier à Rome.
Voici l'église San Vincente, à Bilbao. C'est dimanche. Les messes se suivent sans interruption. Une foule dense sort de l'église.
Une autre foule attend sur le parvis pour y entrer. Des hommes, des femmes, des enfants. A 9 heures, un bataillon, entré avec ses gradés et son commandant, quitte l'église. Un ordre bref retentit, les rangs se forment, et, d'un pas cadencé, les miliciens regagnent leur caserne située dans le bâtiment adjacent : un couvent désaffecté déjà avant la guerre.
DANS UNE ECOLE BASQUE REGARDS 4 FEVRIER 1937 |
Un quart d'heure plus tard, je puis observer les mêmes scènes devant d'autres églises de la ville.
Le lendemain, j'ai eu l'occasion d'assister à une messe de campagne célébrée sur le front. Tous les bataillons formés par le Parti Nationaliste Basque — il y en a un qui porte le nom d'Ignacio Loyola — ont leurs aumôniers. Ces prêtres accompagnent les combattants jusqu'en première ligne, sous le feu de l'ennemi. L'un d'eux m'a dit :
— Non, nous ne sommes pas armés. Pour servir Dieu, on n'a pas besoin d'armes. Il paraît que de l'autre côté, chez les rebelles, on rencontre des prêtres faisant le coup de feu, même à la mitrailleuse. Ce n'est pas à moi de les juger. Mais nous autres, prêtres basques, nous ne voulons pas marcher contre le peuple. D'ailleurs, nous ne faisons que suivre l'exemple de notre évêque.
J'ai visité aussi le cloître d'Amorebieta, situé sur une colline verdoyante, à une vingtaine de kilomètres de Bilbao. Le magnifique édifice datant du XVII" siècle était intact. Les frères, dont le noviciat est célèbre dans le monde catholique, se promenaient paisiblement dans le jardin. De temps à autre, ils s'arrêtaient pour échanger des propos avec les miliciens qui venaient de terminer leurs exercices. C'est que l'antique cloître d'Amorebieta, tout en demeurant consacré au culte, donne refuge actuellement au Bataillon de Transmissions de l'armée basque : une partie reste occupée par les frères, tandis que l'autre partie est transformée en caserne. Aucun malentendu ne vient assombrir les relations entre religieux et militaires, empreintes de respect et de bienveillance réciproques. J'ai pu assister à la messe dans la chapelle du cloître. Les miliciens s'y confondaient avec les autres fidèles. Le père supérieur m'a permis de monter au chœur. Une atmosphère de parfaite sérénité régnait sous les sombres voûtes. Un frère, les yeux fermés, était assis devant l'orgue. Ses doigts agiles couraient sur le clavier...
EXERCICES DE TRANSMISSION AMOREBIETA 1937 REGARDS 4 FEVRIER 1937 |
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