LA CHASSE À LA BALEINE AU PAYS BASQUE.
La baleine : une pêche ou une chasse ?
La terminologie est sans importance, l'homme à ses débuts vivait de chasse et de pêche. Il n'a
pas changé pour survivre.
La baleine, un animal monstrueux, par sa taille, 25 mètres de long, pesant 150 000
kilogrammes (le nouveau-né en accuse déjà 6 000), mais possédant un œsophage si étroit qu'il
ne pourrait admettre un hareng !
De quoi mettre en doute la véracité du récit de Jonas dans le ventre d'un cétacé.
JONAS SORT DE LA BALEINE |
Depuis le VIème siècle, nous avons des informations de ces prises sur nos côtes.
Il s'agissait d'un animal plus modeste, la baleine dite Sarde qui ne mesurait que 20 mètres. Ses
80 000 kilos permettaient de tirer 34 000 kilos de graisse, 27 000 kilos d'huile et 1 500 kilos de
fanons.
Une aubaine : de la viande à satiété, des matières grasses indispensables, de l'huile pour
l'éclairage, c'était aussi prisé que le pétrole aujourd'hui.
Quant aux fanons, ils servaient à la décoration des casques des guerriers et à la coquetterie de
ces dames !
Nos Bonnes Sœurs n'en étaient pas exclues de ce pêché par les Evêques de Bayonne ; lesquels,
pour leur gourmandise, se réservaient le morceau de choix : la langue de baleine.
De plus, même le sperme de la baleine était utilisé : il s'agissait en réalité d'une sorte d'huile
contenue dans l'énorme tête du cétacé et qui servait à confectionner le spermaceti à St-Jean-De-
Luz et à Bayonne pour approvisionner les fabricants de cosmétiques et de remèdes divers
dans le Royaume de France et à l'étranger.
Par ailleurs, on récoltait sur toute la côte aquitaine l'ambre gris qui est une concrétion
fabriquée dans l'intestin des cétacés et qu'ils rejetaient en s'échouant sur les plages.
Quant on sait enfin que les vertèbres servaient de sièges ou de tables et que les côtes
contribuaient à l'édification des maisons, il est aisé d'imaginer quelle Providence tombait du
ciel.
Pas étonnant que les traînières fussent toujours prêtes sur la grève, et qu'il y avait en
permanence des guetteurs sur les hauteurs (les atalayes), dans des tours (les guetarrios)
échelonnées depuis la côte du Nervion à l'Adour.
BIARRITZ TOUR ATALAYE |
GUETHARY TOUR |
Dès que s'élevait la fumée annonciatrice, de toutes les plages s'élançaient les embarcations, les
uns souquant ferme sur leurs avirons, les autres préparant leurs harpons, dont chacun portait
une marque distinctive, indispensable lors du partage des proies.
TRAINIERE PAYS BASQUE 1900 |
Arrivés à portée, à l'instant décisif, les harponneurs lançaient leur armée meurtrière avec une
précision quasi mathématique.
La bête blessée cherchait son salut dans la fuite, plongeait, dévidant derrière elle le filin la
reliant à la barque, l'entraînant à travers vague et écume, faisant surface pour replonger,
donnant de terribles coups de queue pour se débarrasser de ces intrus.
Il fallait faire preuve d'un courage peu ordinaire pour ne pas lâcher prise ; à la mort de
l'animal, le calme revenu, pour ceux qui en réchappaient, quelle baleine !
CHASSE A LA BALEINE PAYS BASQUE |
Mais quel travail pour l'échouer sur le sable !
Après quoi, chacun ayant droit à sa part, il fallait la dépecer, en grimpant sur son dos avec des
souliers ferrés : la curée scientifiquement organisée.
Chacun touchait sa part et faisait fondre son lard dans son four, au point que la cité était
remplie d'une odeur nauséabonde caractéristique.
Peu importe, les provisions étaient là, à en croire le montant des dîmes exigées par les Rois de
France ou d'Angleterre, les prébendes qu'en tiraient les Communautés, à commencer par celle
des Chanoines de Bayonne, tout laisse à penser que cette pêche était rentable.
La chasse s'intensifiant, les baleines se raréfièrent, force fut de les suivre, de plus en plus loin,
avec des bateaux de plus en plus importants.
RETOUR DE PECHE GUETHARY 1900 |
Le Spitzberg, puis la baie du Saint Laurent furent les nouveaux théâtres d'exploits, mais la
rose avait des épines, sous la forme de marins anglais et hollandais, pour qui le cétacé était
aussi une panacée.
Les différends se vidaient à l'épée ou au mousquet ; ces drames, comme toutes les épopées,
furent générateurs de solutions ingénieuses.
Martin Sopite, en 1635, inventa le four à fondre le blanc de baleine à bord : tout en arrosant le
pont pour lui éviter de se consumer, ce fut le premier navire-usine.
Toutes les pêches ont le même destin : la lassitude devant la raréfaction du produit.
Les Basques n'étaient plus les seuls ni les premiers en Europe.
La dernière, capturée lors de la signature du Traité des Pyrénées en 1659, fut surnommée
"baleine de la paix" en cette circonstance.
En 1863, une isolée, perdue dans le Golfe de Gascogne, vint s'échouer.
Napoléon III, alors en séjour a Biarritz, vint l'admirer en voisin.
C'était hier, en face de la rue qui, en souvenir, prit nom de "la baleine", un animal fabuleux,
passé à l'actif de nos contes et légendes.
BALEINE EN 1863 |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire