LES ALLEMANDS AU PAYS BASQUE SUD EN 1938.
De nombreux allemands, particuliers et sociétés, sont implantés au Pays Basque Sud depuis le début du vingtième siècle.
SAINT SEBASTIEN - DONOSTIA 1938 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que raconta à ce sujet le journal l'Ouest Eclair, dans son édition du 30 août 1938, sous la
plume de Pierre Dumas :
"Les Allemands chez les Basques.
Les biens des habitants dépossédés après la victoire franquiste sont cédés à des citoyens du Reich.
C'est ainsi que dans quinze mines, 5 000 Basques travaillent pour le compte de l'Allemagne.
Que va faire la France menacée d'encerclement ?
Nul ne pourra nier que, de tout temps, l'Allemagne n'ait voulu enserrer la France dans un étau, en se créant un Etat ami ou allié au sud des Pyrénées. La grande tentative historique et classique fut celle de Charles Quint... Une expérience plus récente et plus cruelle, mais déjà oubliée, fut celle de la grande guerre. Tout récemment encore l'ex-espionne Marthe Richard racontait quel nid d'espionnage et quel centre de ravitaillement pour les sous-marins boches avait été l'Espagne.
Mais, deux provinces péninsulaires avaient, plus encore que les autres, retenu l'attention de Berlin la Biscaye et le Guipuzcoa... autrement dit, l'essentiel du Pays Basque espagnol. C'est qu'il y a là quatorze ports, grands et petits, bien abrités, à proximité de Bayonne, quatorze ports avec un mouvement de six millions de tonnes et une marine marchande qui compte pour la moitié du tonnage total de l'Espagne ; c'est que ce sol - tout étroit qu'il est - fournit la moitié du minerai de fer de la péninsule, et qu'il produit en abondance des pyrites... en un mot ce qui manque à l'Allemagne.
Le gouvernement d'Euskadi a saisi dans une maison de Bilbao des cartes allemandes des deux provinces, des cartes datant de 1911, tamponnées du service des mines de Prusse, et où sont marqués les gisements de toute nature, même de mines inexploitées avec leur étendue, les noms des propriétaires et la densité des minerais.
HIMLER SAINT SEBASTIEN - DONOSTIA 1940 PAYS BASQUE D'ANTAN |
En 1911, ces cartes, que l'on compte par dizaines, - toutes estampillées, donc authentiques, - portent, en outre, les renseignements maritimes de toute la côte basque et française, avec les plans détaillés des ports de Bayonne et de Bordeaux.
1911... Et voici que le "soulèvement national espagnol" offre à l'Allemagne la réalisation du rêve de Charles Quint... et de ses prospecteurs d'avant-guerre, car, aujourd'hui, à la place des Basques dépossédés, voici les Allemands !
Leur nombre.
Après un voyage chez Franco, un Français éminent affirme n'avoir pas vu d'Allemands en Espagne. Or, dans les journaux du Reich énumérant les résultats du plébiscite, on relève : Vapeur "Bellona" port de Pasajes. Ont voté 423 Allemands et 53 Autrichiens. Tous ont voté "ya" sauf un bulletin nul.
Vapeur "Emden", port de Bilbao. Ont voté 453 Allemands.
Vapeur "Pluton", port de Santander. Ont voté 352 Allemands.
Il y a donc, rien que dans les régions basques et d'après les statistiques allemandes, un minimum de 1 291 Allemands.
FRANCO A SAINT SEBASTIEN - DONOSTIA 1939 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Bien entendu, je ne parle pas du plébiscite dans les autres parties de l'Espagne. Je parle seulement des Allemands qui ne sont pas des combattants, puisque les deux provinces sont acquises à Franco depuis longtemps. Il s'agit seulement de techniciens domiciliés à Irun (frontière française) et jusqu'à Bilbao.
Mais, ces gens-là, que font-ils ?
Mines et commerce.
Ces gens-là s'occupent, on peut en être certain... car les Allemands ne sont pas des touristes ordinaires.
Un édit de Franco a dépossédé officiellement et définitivement de tous leurs biens les Basques nationalistes qui ont lutté contre lui ou qui se sont enfuis. Ces biens (commerces, industries, mines) ont été vendus à des sociétés ou à des particuliers allemands.
L'hôtel d'Angleterre — le plus grand de Bilbao — est géré par un nouveau propriétaire, M. Otto Loeffler... dont le nom dit assez l'origine.
Une société allemande rachète les mines de Measuri et San Narsico à quinze kilomètres de notre frontière. J'ai vu une circulaire offrant à des Basques réfugiés à Biarritz de leur racheter à raison de 150 pesetas des actions tombées aux environs du néant.
MINE SAN BARCISO PAYS BASQUE D'ANTAN |
MINES D'ARDITURRI PEÑAS DE AIA GUIPUSCOA PAYS BASQUE D'ANTAN |
Je possède la liste de quinze mines (toujours pour le Pays Basque) actuellement exploitées au seul bénéfice de l'Allemagne.
Qu'importent d'ailleurs les détails, voici un chiffre qui résume tout. Il est, lui aussi, officiel et tiré des statistiques générales :
Les exportations d'Espagne en Allemagne ont augmenté en moyenne de 33 000 tonnes en 1936 et de 180 000 en 1937 par mois.
Voilà qui nous fixe sur l'importance de la main mise allemande sur l'Espagne... et aussi sur les buts réels de la croisade d'Hitler contre le communisme... et pour le minerai.
Je vous laisse deviner ce que vont devenir, sous l'impulsion allemande, les mines de cuivre, de mercure, de manganèse, de lignite, etc... qui marchaient jusqu'ici au ralenti.
Divers.
Mais l'emprise sur les mines et le commerce se traduit par une augmentation sensible des échanges maritimes. Maintenant, deux compagnies allemandes Neptune et Oldemburg font un service bi-hebdomadaire Bilbao-Hambourg. Le tonnage de Bilbao uniquement allemand est supérieur, mensuellement, aux tonnages du temps où toutes les flottes du monde fréquentaient ce port.
Pour donner une idée de l'étendue de la main mise, il faut lire les petites annonces des journaux espagnols. Rien que dans le numéro du "Correo espagnol" du 19 avril 1938, on compte dix-sept offres de représentations de licences ou de produits allemands.
Exemples :
"Marathon. Tous matériaux et instruments de construction. Stocks immenses. Acier Marathon"... suit l'adresse.
"Un représentant est demandé pour l'Espagne nationaliste pour la grande fabrique de papiers X... Ecrire, avec références et articles demandés, à Schatz, Duizburg (Germany)..."
Et je le répète, il y en a ainsi dix-sept !
Servitude.
Hitler, on le voit, extrait tout le minerai possible du Pays Basque espagnol. Et ce sont 5 000 Basques, qualifiés de prisonniers de guerre, qui travaillent dans ces mines et reçoivent, en paiement, la nourriture et 0,35 pesetas par jour.
Ce détail est fourni par le journal franquiste Hierro de Bilbao (mars 1938).
Vous le voyez, je ne m'insurge pas ! Je n'emploie pas de grands mots pour enregistrer ces faits. Je viens seulement de constater que, à notre frontière pyrénéenne, à la place de nos amis basques, il y a maintenant des Allemands, des techniciens de Berlin. Je constate, sur des journaux de Franco, que l'ambassadeur du Reich est entré à Bilbao avec "les nationalistes" espagnols et que le général Koeln y a établi son centre. Je constate - toujours en lisant les journaux de Franco - que, aux dernières courses de toros de Saint-Sébastien, l'hommage d'une oreille fut fait à un officier allemand et que l'assistance tout entière se leva en criant : "Heil Hitler", vous entendez bien, à Saint-Sébastien. Je constate que 1 281 Allemands ont voté pour le plébiscite, étant installés dans le Pays Basque. Je constate que Franco permet à l'Allemagne de faire extraire par 5 000 Basques, payés par la nourriture et par 35 centimes par jour, du minerai qui va, en Allemagne, couler des canons. Je constate que les nouveaux horaires de la compagnie aérienne Lufthansa portent une ligne Berlin-Bilbao, prolongée vers les Canaries espagnoles... et les habitants du Sud-Ouest de la France constatent comme moi le vol quotidien de "l'avion allemand".
SOLDATS ALLEMANDS PAYS BASQUE D'ANTAN |
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