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lundi 9 décembre 2019

AUTOUR DE BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN 1855 (deuxième partie)


AUTOUR DE BAYONNE EN 1855.


Le Pays Basque en 1855 est une destination prisée par les premiers touristes aisés, qui peuvent venir de Paris à Bayonne en train.


pays basque autrefois
BAYONNE 1843
GRAVURE ANCELY
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette nationale ou le Moniteur universel, dans son édition 

du 20 mai 1855 :



"Autour de Bayonne



...Dans le fond enfin, et sur la gauche, des masses de verdure, des campagnes riches et fertiles, et au loin, tout au loin, partout où n’est pas la mer, cet arrière-plan bleuâtre et vague, qui se confond avec les nuages, les montagnes, les derniers contre-forts de la ligne des Pyrénées, et au-dessus d'eux les deux pointes aiguës de la Rhune, le roi de la chaîne occidentale. 




Et tout ce riche tableau est animé et bruyant. On entend, à cette heure du soir où les moindres bruits se perçoivent, toutes les voix des deux villes, le son des cloches, les cris des marchands, le hennissement des chevaux. Des troupes s'exercent sur les glacis de la citadelle, des marins chargent leurs navires en s'accompagnant de chants monotones ; le sapin et le chêne retentissent sous la cognée du constructeur ; la mer gronde au loin en roulant les sables de la côte. 




Hélas ! à mesure que j’avance en âge, combien je sens que les vieilles choses sont précieuses et que leur disparition est regrettable ! Ce pont de pierre, est une belle œuvre assurément ; les gens du métier l’admirent ; les corps de grade crénelés qui en défendent les deux entrées complètent habilement, sans nul doute, les travaux militaires de la place ; mais combien il était pittoresque ce vieux pont de bateaux qui flottait jadis à la même place, et qui ondulait, balançait et sautait, comme un serpent de bois, lorsque la mer était houleuse, ou lorsque le fleuve, devenu torrent, poussait et roulait tout sur son passage ! Il y avait sur la longueur de cette vieille machine. qui craquait et gémissait sans cesse, trois lignes de solives, les trottoirs des piétons : l’une au côté d’amont, l’autre au côté d’aval, la troisième au milieu. Celle-ci partageait le pont en deux voies égales : à droite, les voitures allaient vers la ville ; à gauche, elles eu revenaient ; le piéton se rangeait sur la solive et s’effaçait. Sur cette voie étroite et malaisée, la grand’rue de la ville, la foule accourait et se pressait. 



pays basque autrefois labourd
PONT ST ESPRIT BAYONNE
PAYS BASQUE D'ANTAN




Avant qu’il fût en pierre, car maintenant le pittoresque a disparu, le mouvement qui régnait sur le pont de Saint-Esprit formait le plus heureux contraste avec ce silence et ce calme désolé des grandes laudes, c’était le plus piquant échantillon de cette vie exubérante, animée, affairée de la terre basque. C’est la galerie du Bayonnais qui. après l'heure du travail, après la bourse, après le courrier, vient y fumer sa cigarette et y perdre, sans le vouloir, ses plus doux loisirs. Les porteurs d’eau, comme les aguadores d'Espagne, s’en vont à la file s’approvisionner à Saint-Esprit, à la fontaine préférée ; des bandes de juifs, reconnaissables à leur accent outré, à leur profil aigu, s'élancent vers la ville, d’un air affamé, pour faire la place et courir les comptoirs ; le réfugié espagnol, enroulé dans son manteau de drap brun, dont sortent seulement, à hauteur de la barbe, deux doigts de la main droite, passe gravement, oubliant sa cigarette éteinte ; droit et fier, vient aussi le Basque : sa longue chevelure flotte en arrière, son front est découvert, son corps est ceint d’une large ceinture rouge, son pied chaussé d’espartilles. Il porte un bâton de néflier et marche au milieu de la voie, ne déviant d’un pouce pour personne, s’indignant d’être coudoyé, s’offensant même d’avoir à céder la place aux voitures. De jeunes garçons, bien bâtis, portant le berret bleu sur l’oreille, la veste ronde, le pantalon bien ajusté, courent au jeu de paume, et cédant à l’avance à ce besoin de mouvement et de bruit qui est le caractère de la jeunesse basque, poussent sans motif ces cris sans pareils qui ressemblent au glapissement du chacal ou aux clameurs du paon. Un essaim de jeunes filles, grisettes, servantes, artisannes, riant, criant, raillant, court vêtues, bien chaussées, coiffées le plus coquettement du monde d’un madras noué au sommet de la tête, montrant les dents les plus blanches, laissant voir la jambe la mieux faite et un bas blanc bien tendu, se jettent en travers de toutes les causeries, répondent à tout propos et lancent aux indifférents leurs fines œillades et leurs charmants sourires. 



petits metiers pays basque autrefois
PORTEUSES D'EAU
PAYS BASQUE D'ANTAN


petits metiers pays basque autrefois
MARCHANDS  D'ALCARAZAS
PAYS BASQUE D'ANTAN


petits metiers pays basque autrefois
MARCHANDS  D'ALCARAZAS
PAYS BASQUE D'ANTAN


En quelques heures, sur ce vieux pont, défilent tous les types de cette population variée, vivace, heureuse, de la frontière, de la terre basque et de la terre landaise, Basques, Souletins, Navarrais, Couziots et Maransins ; et, de loin en loin, parmi eux, quelques échantillons des races espagnoles, des Biscayens, des Aragonais aux culottes courtes et au large sombrero, des soldats délabrés que les prononcements jettent tour à tour sur notre sol, et ces pasiegas qui, conduisant de longues bandes d'ânes chétifs, importent et débitent sur leur chemin, dans des outres de cuir, les vins du nord de l’Espagne. 


pais vasco navarra antes
TYPES NAVARRAIS
PAYS BASQUE D'ANTAN



aragon antes
CONTREBANDIERS ARAGONAIS

A ce spectacle toujours nouveau, toujours animé, sert de cadre ce paysage admirable dont tout à l'heure nous avons vu l’ensemble. Ce fleuve qui coule sous nos pieds, c’est l’Adour. Il descend des vallées de Bastan, de Baréges et de Bagnères, turbulent et agité, roulant les rochers et les galets au milieu des flots d’écume. Depuis les montagnes jusqu’à Bayonne, il a dirigé au hasard sa course incertaine, promenant au milieu des contrées du midi, sous les murs des blanches villes aux toits rouges, ses méandres d’argent. Recrutant sur sa route ces innombrables cours d’eau qui sillonnent le Béarn, les torrents et les gaves bruyants, le Luy de Béarn et le Luy de France, le gave de Pau et celui d'Oloron, il arrive sous les remparts de Bayonne, tumultueux et grondeur. A cent mètres en aval du pont, il rencontre la Nive, cette jolie rivière pure, douce et souriante, l’enfant mutin des gorges d’Itsassou, la folle jeune fille des nasses de Cambo. Elle est venue en sautillant du pied des montagnes, elle courait sur les rochers eu bruyantes cascatelles ; puis arrivée à Ustaritz, parvenue au point où fut ce vieux pont de Proudines, elle s’est creusée une couche large et profonde, se cachant à l’ombre des collines et coulant sans bruit, comme si elle était honteuse d’être vue. 





Le fleuve et la rivière s’avancent côte à côte jusqu’au pied de ces dunes de sable qui nous dérobent la vue de la mer. Là, leurs eaux s’étendent et forment une anse profonde, une rade où mouillent les navires en partance ; puis s’élèvent, sur une longue étendue, deux lignes de jetées en pierre qui contiennent les sables, encaissent l’Adour, en précipitent le cours et le conduisent vers l’Océan. Alors, adieu le fleuve, adieu la douce rivière ! la goutte d’eau qu’ils apportent est confondue dans l’immensité ! 





Sur le pont de l’Adour, nous avons vu le défilé des races, un tableau de mœurs, le mouvement des affaires ; de l’autre côté de la ville, s’est fait le défilé de l’histoire, et, du haut de ses montagnes, le vieux peuple basque a assisté, calme et impassible, sur ce grand chemin de l’Espagne, à cent cortèges divers. 





Il a vu passer les rois et les ambassadeurs, les grands capitaines et les bandes guerrières, les reines et les royales fiancées. 





Louis XI venait là, au château d'Urtubi, livrer aux sarcasmes des brillants seigneurs de Castille ses grossiers vêtements et ses images de plomb ; François 1er rentrait de sa captivité, bientôt suivi de la sœur de Charles-Quint, la reine Eléonore de Portugal, dont il fit la reine de France ; Charles IX et sa mère y méditaient, avec la reine Elisabeth d’Espagne, au milieu de fêtes galantes, les horreurs de la Saint-Barthélemy ; Henri IV y quêtait les faveurs de la belle Corysandre, la femme du comte de Grammont ; Louis XIV donnait à Saint-Jean-de-Luz le spectacle de ses royales épousailles ; Philippe V allait recueillir l’héritage du débile Charles III, et Napoléon recevait à Marrac celui du vieux Charles IV pour le transmettre à Joseph.




napoleon histoire
NAPOLEON A MARRAC BAYONNE 1808
PAYS BASQUE D'ANTAN



C'est là, sur cette route, que les ambassadeurs de Dagobert se virent enlever dans une embuscade le fameux bassin d’or que les Visigoths envoyaient à leur roi ; c’est là que passèrent le connétable Anne de Montmorency avec la rançon de François Ier, et Mazarin portant le traité de paix et la convention matrimoniale conclus avec don Louis de Haro. 



histoire louis 14
ÎLE AUX FAISANS BEHOBIE 1660
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les grands capitaines, ce furent les pairs de Charlemagne ; le preux Roland, dont la légende remplit tous les souvenirs du pays; du Guesclin et les compagnies blanches ; le Prince Noir et les bandes anglaises ; Dunois et les lances de Charles VIII ; puis Bassompierre : puis encore Murat, Junot, Soult, Moncey et les bataillons de l’Empire."




A suivre...




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