EN PASSANT DEVANT CHEZ LOTI EN 1911.
Pierre Loti, nommé au commandement de la station navale d'Hendaye, s'installe dans une modeste maison de la cité frontalière en décembre 1891, maison que de nombreux touristes veulent connaître.
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| MAISON DE PIERRE LOTI HENDAYE 1911 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Les Annales Politiques et Littéraires, dans son
édition du 31 décembre 1911, sous la plume de Paul Faure :
"En passant devant chez Loti.
Notre collaborateur Paul Faure nous écrit d'Hendaye :
Oh ! le curieux spectacle auquel je viens d'assister de Hendaye, le petit port français qui regarde l'Espagne ! Aujourd'hui, c'est grande fête, en face, à Fontarabie. Fandangos sous les platanes de l'allée, corrida de novillos ; et le temps, extraordinairement beau, ajoute à la fête ; le vent du Sud qui, dans ce pays, fait de l'été en plein hiver, souffle doucement, le ciel est complètement bleu, l'air comme en velours ; les cloches des églises et des couvents sonnent à toute volée dans la lumière éblouissante ; la Bidassoa, qui sépare Hendaye de Fontarabie, scintille ; c'est un vrai temps de Pâques ; rien n'indique décembre.
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| VUE SUR FONTARRABIE HENDAYE 1911 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Je suis chez Loti. Accoudé à la terrasse ronde qui couronne une des tourelles de son jardin dont les murs trempent dans la Bidassoa, je regarde l'admirable paysage tout couvert de soleil, la rivière, le vieux Fontarabie couleur de la montagne à laquelle il s'appuie, la pointe du cap Figuier que baigne l'azur de l'air et de la mer. Au petit port de Hendaye, les bateliers attendent les touristes qui vont arriver en foule pour voir les danses et la corrida de Fontarabie ; il y aura non seulement tous les Basques de la région, mais aussi tous les étrangers qui viennent chaque année hiverner à Biarritz et à Saint-Jean-de-Luz.
Deux heures...Les bateliers s'animent ; le train de la côte vient d'arriver bondé de voyageurs qui courent à toutes jambes vers le port. En un clin d'oeil, les embarcations sont pleines. Anglais, Allemands, Français, toutes les nationalités, tous les accoutrements ; on s'empile dans les barques qui se mettent à glisser sur l'eau ensoleillée, au bruit des rires, des exclamations de toutes sortes. La marée étant haute, les barques, pour atteindre Fontarabie, filent en droite ligne ; mais voilà qu'elles hésitent, s'arrêtent, tournent à droite, viennent ici ; une a commencé son changement de route ; puis deux, puis toutes ; c'est qu'une voix, puis d'autres, ont demandé :
— Montrez-nous la maison de Loti.
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| VUE SUR FONTARRABIE HENDAYE 1911 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Les femmes ont pris leur lorgnette, les hommes leur kodak ; les barques approchent, les voici. Elles se rangent au pied de la tourelle, comme se rangent des pèlerins au pied d'un sanctuaire, et on descend sur la petite grève. Tous savent, pourtant, qu'ils n'apercevront pas Loti ; ils savent que si, par hasard, il était sur cette tourelle, il fuirait devant tout ce monde. Mais ils restent là, fascinés, devant cette petite maison muette. Les kodak fonctionnent ; j'entends les crépitements de leurs déclics pareils au bruit des machines à écrire. Un vieillard prend par la main un petit garçon, — probablement son petit-fils, — le conduit à la porte de la tourelle ; et, une fois sur l'étroit seuil :
— Maintenant, lui dit-il, tu pourras raconter que tu as vu la maison de Loti.
Une femme détache des feuilles d'une branche d'acacia, les met dans son sac à main ; une autre emporte des galets de la petite grève ; celle-ci se hisse jusqu'à la terrasse et regarde avec des yeux hypnotisés ; celle-là griffonne un mot sur un papier, l'enveloppe dans un mouchoir, le lance dans le jardin. Une Russe est debout sur sa barque ; immobile, hermétique, elle regarde la maison, elle la regarde comme éblouie par quelque apparition surnaturelle. Bien qu'ils ne voient rien, ils resteraient là, tous, si les bateliers pressés d'aller chercher d'autres voyageurs ne donnaient le signal du départ. Alors, les barques s'en vont ; mais d'autres arrivent qui, elles aussi, quittent la ligne droite pour s'arrêter devant la terrasse fameuse.
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| PONT INTERNATIONAL HENDAYE 1911 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Haltes significatives ! Dans ces contemplations, dans ces gestes, dans ces mains qui touchent ces pierres, coupent ces branches, prennent ces galets, dans ces doigts qui arment les kodak, je ne vois pas de la curiosité, de la distraction de badauds, mais l'expression spontanée d'un culte. Point de ces propos bruyants que l'on entend si souvent devant la demeure des hommes célèbres ; du respect, de la ferveur. Rien de plus naturel que cette fascination de Loti sur tous. Il ouvre les portes de notre imagination. Sa vie s'enveloppe de mystère et de féerie ; son génie est dans un halo à la fois sombre et doré. Voyageur qui a planté sa tente sur les sables de toutes les plages, au soleil de toutes les contrées, au pied des remparts des plus vieilles cités, il nous donne à rêver ; il est le poète de Rarahu et d'Azyadé, l'évocateur des pays que l'on ne verra jamais, que l'on désirera toujours. Son oeuvre contient tout ce qui nous émeut : la mer, la flûte qui gémit dans le désert, les nuits d'Afrique, les créatures qui passent au fond d'horizons enchanteurs. Il est l'Orient, la nostalgie, le lointain, le pathétique ; il est celui à qui l'amour et la mort ont fait pousser les plus déchirants soupirs.
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| CASINO HENDAYE 1911 PAYS BASQUE D'ANTAN |
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