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mardi 17 décembre 2019

A LA FRONTIÈRE FRANCO-ESPAGNOLE AU PAYS BASQUE EN SEPTEMBRE 1918 (première partie)


LA FRONTIÈRE EN 1918.


Pendant la Première Guerre mondiale, la frontière franco-espagnole au Pays Basque a été très souvent fermée, l'Espagne s'étant déclarée neutre durant le conflit.


pais vasco antes
MONT ULIA ST SEBASTIEN GUIPUSCOA 1918
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que relata à ce sujet la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans son 

édition du 14 septembre 1918 :



"Voyage en Espagne.



Fermée brusquement le mardi soir 4 septembre, par ordre de l’autorité militaire, — la frontière a été ouverte mercredi 11 depuis le matin jusqu’au soir. 




Sitôt connue, la nouvelle, comme toujours, a provoqué un exode important vers l’Espagne : étrangers qui attendent impatiemment la réouverture de la frontière pour rentrer chez eux ; commerçants appelés par leurs affaires à Irun, St-Sébastien ou plus loin, jeunes filles ou braves femmes de la ligne frontière allant aux provisions de l’autre côté de la Bidassoa et tant d’autres dont les raisons sont aussi respectables que le temps précieux. 




Ayant l’intention de reprendre contact avec des personnalités amies de St-Sébastien et avec quelques complices de nos enquêtes sur l’oeuvre Boche en Espagne, j’ai pris le train, comme tant d’autres pour profiter de la permission de sortir. Hélas ! avec les milliers de malheureux qui ont eu la malencontreuse idée de faire ce petit voyage, nous en avons vu de drôles et de longues. Je m’en console en me disant que cela fait pour les lecteurs de la "Gazette", une petite chronique inédite, un nouveau chapitre de l'histoire de la guerre, de la désorganisation sociale, de la veulerie et du sans gène des fonctionnaires de tout ordre.



pais vasco antes frontera
FONTARRABIE GUIPUSCOA 1917
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les autres n’ont même pas eu cette philosophique consolation ; c’est eux qu'il faut plaindre ; moi je me contente de "ver, oir y no callar", voir, entendre et raconter. 




Départ de Biarritz à 14 h. 48. Nous comptons être à Hendaye à  15 h. 52, à Irun avant 16 h. et demie, à St-Sébastien vers les cinq heures du soir ; presque tous avec 1'intention de rentrer en France à la fin de l’après-midi ou au plus tard dans la soirée. Il y a en effet 28 kilomètres seulement de Biarritz à la frontière et une quinzaine de la frontière à St-Sébastien. C'est une promenade, en temps normal.


guipuzcoa antes
PALAIS DE LA DEPUTATION ST SEBASTIEN GUIPUSCOA 1918
PAYS BASQUE D'ANTAN


Mais aujourd’hui ! Ceux qui sont partis de Biarritz à 11 h. 20 du matin ont pu entrer à Irun,  station frontière, à 8 heures du soir, et ceux qui sont partis à 2 h. 48, ont tout juste pu quitter Irun vers 9 heures à la nuit. 




D’abord à Hendaye. On descend du train et l’on court vers les portes de sortie, prises d'assaut par une foule de voyageurs, la plupart encombrés de valises ou autres colis. Bousculades. Pertes de temps. Etouffements.  




Puis on est dirigé dans les boxes qui mènent au contrôle des sauf-conduits et passeports. Nouvelles longueurs, pénibles surtout pour les titulaires de passe-ports ; il faut convenir cependant que les porteurs de sauf-conduits et de frontaliers passent assez rapidement.




Cela fait, nouvelle formalité. Il faut entrer un à un dans les cabines de fouille où l'on contrôle si vous n'avez ni or, ni valeurs, ni objets prohibés à la sortie.



En sortant de là, on a l'habitude de prendre le tramway qui, deux fois l’heure, va de Hendaye à Irun et Saint-Sébastien. Le tramway ne circule plus. Les ponts internationaux sont d’ailleurs également fermés au passage des piétons. Il n’y a plus qu'une voie possible pour le passage en Espagne, la grande ligne de chemin de fer, où les horaires n'existent plus qu’à l’état de souvenir ; les trains partent ou arrivent quand ils veulent et, l’on peut s’attendre à des heures de stationnements.


pays basque autrefois frontiere
BEHOBIE 1918
PAYS BASQUE D'ANTAN



(J’ouvre ici une parenthèse pour constater que seuls les contrebandiers et les espions sont privilégiés. Ils connaissent les bons chemins et ne se font pas faute d’en user sans entraves). 




Enfin, ceux qui sont arrivés à Hendaye à 3 h. 52 en peuvent repartir à 6 heures. Trois minutes après, arrivée à Irun, ou plutôt, arrêt du train à une centaine de mètres de la gare d’Irun. Ici grand branle-bas. Des carabineros, des gardes civils, des douaniers, une foule d’employés s’opposent à l’ouverture des portes des wagons. Interdiction de descendre pour quelque motif que ce soit. Un jeune homme qui rentre en Espagne avec des fractures multiples mal guéries tombe du wagon sur le sol. On se contente de le ramasser et de le réintégrer dans son compartiment. 




C’est, nous dit-on, le cordon sanitaire qui fonctionne et qui est chargé d’interdire en Espagne l’entrée de tout malade ou de toute personne dont l’état de santé parait suspect. Le renseignement nous est confirmé par un  médecin espagnol de service qui vient serrer la main à notre ami le Dr L.., de Biarritz, qui se rend à Irun pour des opérations médicales. Les deux praticiens se connaissent de longue date et s’entretiennent affablement mais, le docteur espagnol laisse en plan le Dr L. qui continue à se morfondre dans le compartiment. En France, señor medico, un confrère qui vous eut connu, se serait empressé, dans un cas pareil, de vous inviter à descendre et, au besoin, de solliciter un concours bénévole qui ne se refuse jamais. Mais la consigne était féroce. Défense de descendre pour quelque motif que ce soit. 




Cependant, des diverses voitures du train une cinquantaine de personnes descendent quand même et s’en vont entourées de prévenances ; ce sont, dit-on, des voyageurs nantis de pièces diplomatiques et qu'on dispense exceptionnellement des communes formalités. J'en vois cependant qui n’ont pas fort l’air de diplomates, et puis il faudrait croire que tout le corps diplomatique européen s'est réuni là pour faire nombre. Il est vrai que la diplomatie c’était peut-être la camaraderie ou la pièce de cent sous. Passons. 




Entre deux bâtiments dont, l’un porte l’inscription "Retretes y Banos" une longue théorie de voyageurs s’écoule sous nos yeux avec une lenteur invraisemblable, passant un à un par une porte qui conduit à la visite sanitaire. Ce sont les voyageurs qui, depuis midi et demi ou une heure moisissent dans la gare en attendant leur tour de visite. IL est 8 heures du soir quand enfin notre train entre franchement en gare avec faculté pour les voyageurs d’en descendre."



A suivre...



Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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