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vendredi 24 janvier 2025

LA CONTREBANDE EN 1932 (cinquième partie)

LA  CONTREBANDE AU PAYS BASQUE EN 1932.


En 1932, le journaliste Arthur Hérisson-Laroche fait un reportage sur la contrebande au Pays Basque.




pays basque autrefois douanes contrebande
CONTREBANDIERS 
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien La France de Bordeaux et du Sud-Ouest, dans 

plusieurs éditions, sous la plume de Arthur Hérisson-Laroche :



  • le 23/07/1932 :

"La vie audacieuse et périlleuse des contrebandiers Basques.

Grand reportage par A. Hérisson-Laroche.



... Le jour qui suivit notre expédition victorieuse, Cochequin, dont la résistance physique est légendaire dans le pays, s'était levé tôt, selon l'habitude des campagnes. Trois heures de sommeil lui avaient suffi pour récupérer toutes ses forces. Frais et dispos, il était allé soigner les bêtes, dès l'aurore.



Vers les neuf heures, il ouvrait doucement la porte de ma chambre.


"Bonjour, fils. Comment vont tes jambes ?


— La machine est en excellent état, Quin-Quin, et n'aspire qu'à tourner. Mon apprentissage m'a donné de l'appétit. Quand repartons-nous ?

— Tu es sincère ?

— Puisque je te...

— C'est bon. Tu vas être exaucé. Il faut que je sois à Sare dans l'après-midi pour voir Etchenik. Je t'emmène.

— Etchenik ?

— Oui, c'est le nom de notre trésorier. J'ai divers comptes à solder avec lui. Je vais t'expliquer. Sare est le siège de notre organisation centrale. Le métier comporte parfois de gros risques auxquels nous devons être en mesure de parer immédiatement, afin d'éviter la ruine. Il y a des coups durs et je n'ai pas besoin de t'apprendre que lorsque nous sommes pris sur le fait, les tribunaux nous salent. Nous avons donc créé, là-bas, une masse de manoeuvre et une caisse de secours que nous alimentons chaque fois que nous le pouvons.



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SARE 1932
DESSIN DE PHILIPPE VEYRIN



"Le meilleur moyen de se défendre contre la douane était de copier son organisation. De cette manière, nous sommes outillés pour lui rendre coup sur coup. A côté du trésorier, dont le rôle est capital, nous possédons, comme les autres, un capitaine et un lieutenant.


— Si j'étais un visiteur étranger, je ne maquerais pas de te demander la couleur de leur uniforme.

— Ils n'ont certes pas besoin de s'affubler d'une panoplie pour être repérés. Tout le monde, dans le pays, connaît ces trois hommes, qui ont pignon sur rue. Peu importe d'ailleurs. La vérité, c'est qu'ils ont un cran de tous les diables et cela, vois-tu, c'est l'essentiel. Pour le reste, à la grâce de Dieu.


En attendant mieux, habille-toi, car l'heure passe, et descends casser la croûte. Aussitôt après nous partirons. Le voisin, qui fait le commerce du vin, nous prendra dans son auto."



Une heure plus tard, Coquequin et moi étions confortablement installés au fond de la voiture.



Pendant la traversée du village d'Urrugne, mon compagnon, qui tenait à me signaler les moindres curiosités de son beau pays, pria notre conducteur de ralentir, dès qu'il aperçut le clocher de l'église.



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CADRAN HORAIRE CLOCHER EGLISE URRUGNE
PAYS BASQUE D'ANTAN


"Tiens, penche-toi et regarde l'inscription que porte le cadran de l'horloge.

— "Vulnerant omnes, ultima necat", ce qui veut dire Quin-Quin...

— Le latin, mon petit, c'est l'affaire du curé.

— Je ne crois pas me tromper, en traduisant ainsi : "Toutes les heures blessent, la dernière tue."



Le vieux contrebandier me donna sur l'épaule une tape affectueuse qui en disait long sur son contentement. Il parut réfléchir un instant, puis reprit la conversation d'un ton plus grave.


"Belle devise assurément pour tous ceux qui pratiquent notre métier. Mon ami Mourguy qui, il y aura de cela deux ans en septembre prochain, fut tué par nos gabelou à quelques kilomètres d'ici, prononça, avant de mourir, une parole semblable. Nous nous arrêterons à Olhette, le temps de te montrer les lieux et de tout expliquer."



J'allais demander à Cochequin quelques précisions, lorsque mon attention fut soudain attirée par un petit cheval, attelé à une charrette qui me parut appartenir à l'espèce dont j'avais fait la connaissance, au cours de la nuit.


"Tu as parfaitement raison. C'est un Bastanais.

— Qui te doit, j'imagine, de fouler aujourd'hui cette route ?

— Oui, il appartient à un de mes clients de la région. Je le lui ai vendu, il y a quelques mois.

— A propos, Quin-Quin, as-tu des nouvelles du lot de la nuit dernière, et qu'est devenu Pétié ?

— Allons, puisque je vois que tu prends goût au métier, je vais tout te dire, tout ce que je sais, car...

— Comment ? Tu as des craintes...

— Des craintes, pardieu, on en a toujours avec ces sacrés douaniers. S'il en était autrement, le métier serait trop facile et pourrait être le fait de n'importe quelle "Gaichoua". Les chevaux que tu as vus, ont du arriver à Sare, ce matin, avant l'aube. Mais, en montagne, on ne sait jamais. Une fausse manoeuvre, un accident sont vite arrivés. Et puis, je le répète, il y a la douane qui ne reste pas inactive. Je ne serai définitivement fixé sur leur sort que tout à l'heure, chez Etchenik, malgré tout, j'ai bon espoir.


Pétié, lui, s'est bien débrouillé. Dès qu'il aperçut les gabelou, il abandonna ses trois bêtes et s'échappa. Lorsque nous sommes pris, c'est toujours ainsi que nous procédons, pour éviter procès et amendes. Nous laissons la cargaison sur le terrain et nous disparaissons. Evidemment, il faut avoir un bon oeil, bonnes jambes et connaître le pays. Ne t'en fais pas pour Pétié, c'est un de mes meilleurs renards, et, avec cela, il est aussi honnête que ma propre femme.


— Honnête ?

— Oui, honnête et franc, si tu préfères. Il arrive quelquefois que des traîtres ou des ambitieux se glissent dans nos équipes. Le fait est rare, pour sûr, car nous nous connaissons tous depuis l'enfance. Mais, enfin, les hommes ne sont pas parfaits et aucune bergerie n'est complètement à l'abri des loups."



A suivre...



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