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jeudi 11 décembre 2025

UN DISCOURS PATRIOTIQUE À BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE LE 24 NOVEMBRE 1918 (deuxième et dernière partie)

UN DISCOURS PATRIOTIQUE À BAYONNE LE 24 NOVEMBRE 1918.


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L'armistice de 1918, signé le 11 novembre 1918, à 5h15, met fin provisoirement aux combats de la Première Guerre mondiale. Il reconnaît de facto la victoire des Alliés et la défaite de l'Allemagne, mais il ne s'agit pas d'une capitulation au sens propre, cet armistice étant prévu pour durer 33 jours, puis il a été ensuite renouvelé.



ARMISTICE 11 NOVEMBRE 1918





Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-

Luz, dans plusieurs éditions :



  • le 24 novembre 1918, sous la plume d'E. Seitz (suite) :

"... Les Alsaciens et les Lorrains, tels que les ont laissés 48 ans d'oppression allemande, ressemblent à ce "Mülhauser Tagblatt" ; même quand la langue parle boche, le coeur parle français.




Français, ils furent avant la défaite de 1870 ; Français ils restèrent pendant le demi-siècle d'esclavage dont ils ont payé cette défaite ; Français ils sont, plus que jamais, au lendemain de la Grande Victoire. Oui, l'Alsace-Lorraine est trois fois française ; elle sort si grande de la grande épreuve, que son nom est devenu un symbole et un drapeau, le symbole de toutes les oppressions injustes, le drapeau de toutes les revendications nationales.



L'Alsace-Lorraine, en effet, a écrit dans l'histoire la plus émouvante page du loyalisme courageux et persévérant qui brave toutes les persécutions et toutes les violences. Non seulement, par la voix de ses représentants, elle fit entendre à l'Assemblée Nationale de Bordeaux la protestation imprescriptible que tout le monde connaît, mais sa fidélité à la France ne cessa de se manifester pendant 48 ans d'oppression. A la suite du traité de Francfort, on compta officiellement, en 1872, 374 346 Alsaciens-Lorrains ayant opté pour la nationalité française, le quart de la population. Mais tous ne purent pas s'expatrier, heureusement d'ailleurs, car qui aurait défendu la tradition française aux pays annexés, s'ils avaient été abandonnés aux immigrés d'Allemagne ? Or, depuis 1872, à toutes les élections, les Alsaciens-Lorrains ne cessèrent d'élire des députés protestataires, au point que seize ans après l'annexion, sur 15 députés élus, 15 étaient des protestataires réclamant le retour à la France. Rien n'a pu modifier l'âme de nos frères annexés, ni les promesses, ni les flatteries, ni les menaces. Bismarck, en plein Reichstag, le 5 mars 1874, essayant de justifier l'annexion, disait :


"Nous avons dû rogner la pointe (la pointe de Strasbourg) qui pénétrait profondément dans les chairs de l'Allemagne, car c'est précisément dans cette pointe qu'habite une population qui, pour l'humeur guerrière et la haine contre les Allemands, ne le cède en rien aux Français. Nous avons appris à connaître, dans les guerres, l'effet de l'épée alsacienne combattant contre les Allemands qu'elle traitai en ennemis".



Il n'était pas inutile peut-être de rappeler cet hommage rendu par Bismarck à la francophilie et à la germanophobie d l'Alsace et de le rapprocher du témoignage tout récent du haut commandement allemand demandant secours à la France contre les manifestations et les soulèvements antiboches de l'Alsace-Lorraine.



Ne pouvant venir à bout de la résistance des Provinces, l'Allemagne usa contre elles des rigueurs nouvelles. Au Reichstag, en 1882, le député Antoine fit entendre la plus fière des protestations :


"... Après 11 ans, il vous plaît de prononcer le Vae Victis contre l'Alsace-Lorraine ; nous le subirons avec plus de dignité que vous n'avez mis d'ardeur à le prononcer. Nous ne cesserons de protester et, malgré vous, il nous restera ce que vous ne pourrez jamais nous enlever, l'espoir ! Nous aussi nous crierons à nos populations d'attendre, car, au-dessus de vos menées, il y a la majesté du Droit et de la Justice".



Ici encore il nous plaît de mettre en parallèle, le langage et l'attitude du représentant de l'Alsace douloureusement opprimée, avec l'attitude pleurnicheuse et suspecte des Boches d'aujourd'hui, incapables de supporter dignement les maux et les souffrances dont ils sont les auteurs responsables.



Non, la mentalité alsacienne-lorraine ne peut rien avoir de commun avec la kultur allemande. En vain, a-t-on expulsé Antoine et d'autres protestataires trop encombrants ; en vain a-t-on favorisé l'immigration intense des Prussiens aux pays annexés, la représentation législative de l'Alsace-Lorraine comprenait encore, au début de la guerre, des protestataires comme Blumenthal et l'abbé Wetterlé, que nous avons applaudis à Bayonne, comme le socialiste Weill, de vrais Français qu'attend impatiemment la tribune française.




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ENTREE DES FRANCAIS STRASBOURG
22 NOVEMBRE 1918


De cette Alsace et de cette Lorraine, nous sommes les fils, fiers depuis toujours, heureux au-dessus de toute expression depuis la journée éblouissante du 11 novembre. Aujourd'hui surtout, nous vivons en pensée l'ivresse de nos frères de Strasbourg et des deux provinces ; avec eux, de toute notre tendresse, de toute notre admiration, de toute notre éternelle reconnaissance, nous glorifions les soldats vainqueurs, qui vont défiler devant le monuments des strasbourgeois Kleber et Kellermann et devant la maison natale de notre immortelle Marseillaise, car l'Alsace, jalouse de la gloire de la Lorraine, qui avait donné à la France la sainte libératrice Jeanne d'Arc, a voulu à son tour donner à la patrie l'hymne libérateur, l'hymne glorieux d'héroïsme et de victoire.



Et nous surtout, Alsaciens-Lorrains qui avons fait de la région pyrénéenne notre seconde patrie, nous éprouvons une joie et une fierté nouvelles à partager avec toutes les Pyrénées, avec tout le midi de la France l'orgueil de voir un tarbais, le maréchal Foch acclamé par l'Univers entier comme le vainqueur du kolosse allemand, comme le libérateur de toutes les Alsaces-Lorraines.



Je m'arrête, craignant d'avoir peut-être abusé d'une trop bienveillante attention. Si j'ai été trop long et si je n'ai pas toujours été maître de mon enthousiasme ni de mon émotion, je m'en excuse.



Aujourd'hui, le coeur est à Strasbourg et j'ai dit "quel est mon pays !"



Acclamons-le, d'une seule voix, frères d'Alsace et de Lorraine : "Vive la France !"




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ENTREE DU GENERAL GOURAUD A STRASBOURG
22 NOVEMBRE 1918



  • le 25 novembre 1918 :

"Bayonne.

La fête de l'Alsace-Lorraine.



Nous avons relaté brièvement, hier, les belles manifestations par lesquelles a été fêtée à Bayonne, la libération des chères provinces et l'entrée triomphale à Strasbourg. Si la place ne nous avait pas été mesurée, nous aurions eu bien d'autres détails à relater.



Il convient, entre autres, de remercier tout spécialement M. Le consul de Portugal, le vicomte de Wildick, qui a une âme de Français et de Poilu, puisqu'il n'a pas hésité, malgré son très grand âge et ses souffrances, à venir assister à toutes les cérémonies, même à celle du cimetière ; il a prononcé, à la Place d'Armes, un discours dont nous tenons à reproduite les parties essentielles :


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PLACE D'ARMES ET JARDINS BAYONNE 1918
PAYS BASQUE D'ANTAN


"Monsieur le Maire,


Au nom du Corps Consulaire, j'ai l'honneur de vous offrir ses remerciements respectueux de l'invitation que vous m'avez chargé de lui transmettre, à assister à la manifestation patriotique du groupe d'Alsaciens-Lorrains de la région de Bayonne, pour solenniser l'entrée des armées françaises et alliées dans les deux provinces libérées. C'est avec le plus vif empressement qu'il se rend à cette invitation, qui lui donne une nouvelle occasion de témoigner publiquement son allégresse en voyant le sol français définitivement libéré de la présence du barbare étranger, et l'Alsace-Lorraine, ces deux joyaux si précieux de la couronne de gloire qui ceint le front de la France, retourner après plus de quatre ans d'oppression et d'esclavage au giron de la mère-patrie.


A l'expression de ce sentiment, les membres du corps consulaire joignent, Monsieur le Maire, leurs plus cordiales félicitations pour le triomphe obtenu par la France dans la lutte pour la sainte cause du Droit, de la Liberté des peuples et de l'Humanité...


... Quant à vous, Alsaciens-Lorrains, nous prenons une part intense à la joie que vous cause la restauration glorieuse de votre petite patrie, joie tellement communicative, qu'elle inonde aisément tous les coeurs...


... Nous, les consuls des nations alliées de la France, vous adressons nos plus enthousiastes félicitations pour le triomphe dont une large part revient à vos provinces chéries, et nous nous félicitons de ce que les pays, que nous avons l'honneur de représenter ici, ont collaboré au triomphe que vous célébrez aujourd'hui.


Notre collègue, consul de Belgique m'a chargé de vous exprimer son vif regret de ne pouvoir comparaître ici. Quelle n'eût été votre satisfaction de voir ici représenté en lui ce noble pays, dont la loyauté internationale, poussée jusqu'aux derniers sacrifices, restera désormais comme un exemple sublime et sans précédent dans l'histoire des nations !...


... Quant aux collègues, consuls des nations alliées, que ne puis-je traduire assez éloquemment leurs sentiments de cordialité et de vive sympathie envers l'Alsace-Lorraine, ainsi que leur orgueil, si légitime, de représenter des pays qui ont aidé à sa libération : de l'Angleterre, qui a contribué à la victoire finale par l'aide puissante de sa marine de guerre et de s vaillante armée, qui s'est couverte de gloire dans tous les combats auxquels elle a pris part ; de l'Italie, mère commune de la race latine, vieille alliée de la France, dont l'héroïsme, arrosé de son sang le plus généreux, a fait refleurir les lauriers de Magenta et de Solférino ; des Etats-Unis d'Amérique, accourus avec la toute-puissance de leur marine, de leur armée innombrable et valeureuse, pour porter le coup fatal à la ruée des vandales que leur sanglant mépris du droit des gens et des coutumes de la guerre, leurs déprédations et leurs atrocités, ont mis au ban de l'Humanité.


J'ai l'honneur de représenter le Portugal, dès la première heure ami et allié de la France et qui est fier de la gloire d'avoir porté le flambeau de la civilisation...


... Messieurs, la revanche est gagnée. Les grands buts de la guerre sont atteints...


... Salut aux braves qui ont fait flotter le drapeau français sur les flèches des cathédrales de Metz et de Strasbourg !


Salut aux mânes des héros tombés au Champ d'Honneur pour la Patrie française !


Salut à la pléiade de généraux dont le courage et les science militaire ont préparé et ouvert le chemin de la Victoire !


Salut aux deux généralissimes, sauveurs de la France, dont les noms seront désormais légendaires : Joffre et Foch !

Salut à Clémenceau, l'ange du triomphe !

Salut à l'Alsace-Lorraine !



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VIVE L'ALSACE ! 1918


Ajoutons que les aimables jeunes filles qui ont, avec un gracieux dévouement, quêté pour les oeuvres de guerre de la ville de Bayonne, ont fait une jolie recette ; la population de cette ville a prouvé, une fois de plus, que sa générosité était égale à son patriotisme."



(Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France)








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