LA MORT DU PEINTRE BAYONNAIS LÉON BONNAT EN SEPTEMBRE 1922 (quatrième et dernière partie)
LA MORT DE LÉON BONNAT EN 1922.
Léon Joseph Florentin Bonnat, né le 20 juin 1833 à Bayonne (Basses-Pyrénées) et mort le 8 septembre 1922 à Monchy-Saint-Eloi (Oise), est un peintre, graveur et collectionneur d'art français.
PEINTRE LEON BONNAT PAYS BASQUE D'ANTAN
Voici ce que rapporta la presse locale et nationale dans diverses éditions :
La Revue française politique et littéraire, le 24 septembre 1922, sous la plume d'A.
Mort à quatre-vingt-neuf ans, chargé de titres et d'honneurs, le portraitiste quasi officiel des célébrités contemporaines et des présidents de la République, avait eu des débuts difficiles, dont bien peu se souviennent aujourd'hui. Comme tant d'autres, c'est la volonté de ses parents qu'il voulut faire une carrière artistique, et lui fallut la plus grande ténacité pour commencer, en Espagne, l'étude de la peinture.
Léon Bonnat avait quinze ans quand son père quitta Bayonne, la ville natale du peintre, pour venir s'établir libraire à Madrid. A temps perdu, il suit les leçons de Federico Madrazzo qui discerne chez le jeune homme un précoce talent. A dix-sept ans, un Giotto enfant, que le jeune artiste exécute d'après un gamin sévillan, décide Madrazzo à lui faire obtenir de la reine Isabelle la commande de plusieurs portraits. L'avenir de Bonnat semble assuré, quand la mort de son père risque, un moment, de tout compromettre ; la famille du jeune peintre est sans fortune. Mais Bonnat a confiance dans son talent, ses amis et compatriotes aussi. La ville de Bayonne lui donne une pension de 1 500 francs pour lui permettre de venir à Paris. A l'Ecole des Beaux-Arts, dont il devait devenir, quinze ans plus tard, le directeur, Léon Bonnat n'allait pas tarder à devenir le meilleur élève de Cogniet.
Meilleur élève, terme dont on se servit plus tard contre lui, pour lui faire le reproche de n'avoir été que cela toute sa vie. Honnête artiste autant qu'il fut honnête homme, Léon Bonnat, aux yeux de ses adversaires des jeunes écoles, a toujours manqué de cette flamme, qui fait, dans la vie les héros, et les maîtres dans les arts.
C'est qu'il était devenu très vite le maître académique, dans tous les sens, bons et mauvais, que l'on attache à cette épithète. Second prix de Rome en 1858, médaillé au Salon de 1861, le peintre obtenait en 1869 la médaille d'honneur, en 1867 le ruban rouge, en 1874 la rosette. Dès 1867, il dirigeait à l'Ecole des Beaux-Arts, en 1880 il entrait à l'Institut. Il est mort président du Conseil des musées nationaux et du Conseil supérieur de l'enseignement des Beaux-Arts, grand-croix de la Légion d'honneur. En même temps, il était devenu le portraitiste nécessaire de tous les personnages représentatifs.
Portraitiste, il ne l'avait pourtant pas été tout sa vie. En sortant de l'atelier de Léon Cogniet, il s'était cru peintre d'Histoire. La Bible, l'antiquité, l'histoire de France lui avaient fourni le sujet de vastes compositions, quelque peu oubliées aujourd'hui. Ces oeuvres furent appréciées quand elles parurent. Elles valurent à Bonnat des médailles qui l'auraient encouragé à persévérer dans ce genre, si un portrait de M. Thiers en 1874, n'avait connu un succès plus éclatant encore. Ceci décida du reste de sa carrière. Il peignit, pendant plus de quarante ans, toutes les têtes connues.
PHOTO DE LEON BONNAT DANS SON ATELIER AGENCE MEURISSE
Faut-il citer les plus célèbres de ses portraits ? Le Don Carlos et le Duc d'Aumale, le Victor Hugo qui se trouve maintenant au musée de la place des Vosges, le Puvis de Chavannes en pied et le Renan assis, Pasteur, tous les présidents depuis Grévy jusqu'à Fallières, le Cardinal Lavigerie, et l'année dernière encore, un Henri Robert. Peu de femmes dans cette galerie de têtes, toutes dressées sur le même fond de caramel sombre, qui ne provoque pas seulement les plaisanteries des étudiants des Beaux-Arts, mais tous les hommes qui, dans le monde officiel avaient un nom.
Un écrivain qui n'aime pas la manière de Bonnat a dit de lui : "Il prend tous les gens célèbres pour en faire des portraits quelconques."
La tonalité volontairement sourde de son coloris justifie-t-elle cette boutade ? Le mépris de Bonnat pour la couleur est racheté par son culte du dessin. Le portraitiste professait qu'on n'est jamais un maître par la couleur seule, qui change et s'efface. "On n'est maître que par le dessin." Et il ajoutait : "Savoir dessiner, tout est là. On peut tout se permettre quand on sait dessiner." C'est vraiment le dessin qui fait toute la force de ses oeuvres, c'est le dessin qui forme dans ses têtes le modelé, dont on a pu dire qu'il est, chez Bonnat, du dessin dans tous les sens, comme la sculpture.
PEINTRE LEON BONNAT
Au reste, comme tous les grands talents honnêtes, Bonnat ne prétendait pas s'imposer comme un maître dans l'art qu'il professait. Grand travailleur, il répondait à ceux qui s'étonnaient de le voir encore à son chevalet, à près de quatre-vingt-dix ans :
— On a toujours quelque chose à apprendre. Quatre-vingt-huit ans, c'est peu pour apprendre tout le dessin et toute la peinture.
La passion avait fait réunir à Bonnat de précieuses collections. Il possédait, dans son hôtel de la rue Bassano, qu'il avait fait décorer par Puvis de Chavannes, des dessins de Rembrandt et d'Ingres, à côté de croquis de toutes sortes, appartenant à toutes les écoles. De son vivant, Bonnat avait déjà fait des dons importants au musée du Louvre et surtout au musée de Bayonne, qui porte son nom. Celui-ci est un de nos plus riches musées provinciaux. La mort de son fondateur va l'augmenter encore de collections inestimables. Le petit Basque que les Bayonnais avaient autrefois envoyé à Paris, ne les a pas payés d'ingratitude.
PHOTO DE LEON BONNAT 1895
La générosité de Bonnat n'est d'ailleurs pas près d'être oubliée de tous ceux qui ont connu le maître disparu. Le peintre, au premier abord, par sa physionomie et son accueil, pouvait tromper le visiteur non averti. Cet homme, étonnamment jeune sous le poil blanc, avait le geste brusque et la barbe bourrue. Mais il était toute franchise et toute bonté. Sa tête droite, qui rachetait sa petite taille, son pas décidé, en même temps qu'ils dénotaient sa santé vigoureuse et son infatigable activité, disaient toute sa droiture. Ils laissaient bien deviner aussi que ce bourru était, selon la formule, bienfaisant.
Ses anciens élèves, ses amis moins fortunés l'avaient toujours vu prêt à ouvrir sa bourse pour venir en aide à un artiste dans une passe difficile. Il disait, en grommelant : "J'ai eu de la chance, moi. C'est comme une dette envers ceux que la chance n'a pas visités."
Pendant la guerre, la charité de Bonnat fut sans bornes. Grâce à la Fraternité des Artistes qu'il présidait, grâce aux dons personnels du noble vieillard, que de peintres et de sculpteurs mobilisés, que de veuves et d'orphelins ont échappé à la misère. On assure que Bonnat, s'il s'était remis à peindre après la guerre, y avait été forcé pour avoir généreusement dissipé la plus grande partie de sa fortune. Mais malheur à qui lui parlait jamais de ses oeuvres charitables ! Il se fâchait en disant : "La guerre est finie. Fichez-moi la paix avec ces vieilles histoires."
PHOTO DE LEON BONNAT 1880
On peut dire à l'honneur de Léon Bonnat que s'il a eu des adversaires dans le domaine artistique, personne ne lui a jamais connu d'ennemis."
(Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France)
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