LE CHRYSANTHÈME AU PAYS BASQUE AUTREFOIS (deuxième et dernière partie)

 

LE CHRYSANTÈME AU PAYS BASQUE.

Importé sans doute de Chine en Europe vers la fin du 17ème siècle, le chrysanthème se trouve seulement décrit, en 1689, par la savant Jacob Breyn, sous le nom de "Matricaire japonaise", parmi les nouvelles espèces végétales cultivées alors en Hollande.

LE CHRYSANTHEME

Mais, ce fut seulement en 1789 que les chrysanthèmes firent leur première apparition en France, 

ramenés de Chine par le capitaine de navire Pierre Blancard.

Voici ce que rapporta au sujet du chrysanthème la presse régionale et locale, dans plusieurs 

éditions :

• La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 26 octobre 1923 :

"...Voici un parterre de géraniums offrant toute la palette des rouges. Voici des hortensias orgueilleux, bleus et roses... dans la première salle des cannas en velours chantent une symphonie en ocre et en jaune tandis que les orchidées du surtout de la table dressée modulent en mauve mineur. 

Des fleurs coupées dominent dans les deux premières salles : chrysanthèmes merveilleux, roses en boutons et roses écloses, dahlias aux tons et aux formes innombrables, œillets roses et oeillets soufrés, œillets blancs et œillets pourpres. 

EXPOSITION DE CHRYSANTHEMES

A côté de la beauté délicate et raffinée des fleurs, de la beauté sévère et distinguée des feuillages, les fruits et les légumes offrent leurs beautés plus substantielles, plus solides. Poires allongés, pommes rondes et rubicondes, raisins dorés et figues violettes, nèfles brunes et arbouses roses, noix et fraises des bois (oui, madame, des fraises !) kakis du Japon, etc., etc., de quoi tenter toutes les gourmandises — admirons ces coings à l'âpre senteur et plaignons ces tomates pudiques toutes rouges d'entendre les polissonneries de ces piments ardents. Ce candide chou-fleur ne pense à rien entre cette belle citrouille épanouie et ces froids pastèques. Un épi de maïs aux grains d’or enchâssés peureusement voisine avec des betteraves géantes et des salades frisées contait fleurette aux aubergines eu demi-deuil. 

Et justement voici une superbe couronne mortuaire et une palme élégante enrubannée de violet. 

Les instruments aratoires sont exposés dans une partie de salle et sont curieusement visités. On s’étonne qu'une exposition aussi considérable ait pu s'organiser en si peu de temps. Il a fallu beaucoup d’ordre et de méthode pour obtenir un résultat aussi complet et nous félicitons les organisateurs. 

Un vin d'honneur était offert aux membres de la Société et à leurs invités. 

M. Archier. président de la Société Horticole, remercie la municipalité de Bayonne d’avoir bien voulu hospitaliser l’Exposition. C’est une bonne fortune pour la Société d’avoir pu disposer des salons de l’Hôtel de Ville. M. Béhotéguy, adjoint, excuse M. Castagnet, maire, absent. Il dit combien la Ville a été heureuse de pouvoir mettre les salles de l’Hôtel de Ville à la disposition de la Société Horticole. Il est persuadé que cette Exposition, qui s’annonce si brillante, sera profitable et aux horticulteurs et aux Bayonnais, bien connus pour leur amour des belles choses ; et y a-t-il quelque chose de plus beau que les fleurs ? 

EXPOSITION DE CHRYSANTHEMES

Un très nombreux public a, dès aujourd'hui visité l'Exposition. Nous avons reconnu M. Le Barillier, sénateur, M. Guichenné, député, M. Béhotéguy, adjoint au maire de Bayonne, M. Archier, président de la Société Horticole, maire de Guéthary, le marquis de Fuentehermosa et Mlle de Fuentehermosa, M. Fausat, directeur des Douanes, M. Desclaux, commissaire général de l'Exposition, M. Prestat, M. Maymou, conseiller municipal, le commandant Boutaud, M. Tinchan, d'Ustaritz, M. Gaboriau, M. Lassus, M. Cochet, commissaire central etc., etc...

L'Exposition sera ouverte au public jusqu’au dimanche 28 octobre inclus."

EXPOSITION DE CHRYSANTHEMES

• La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 13 novembre 1928 :

"La parure de notre côte. Le chrysanthème au Pays Basque. Comment Chantrier l’importa à Caradoc, à Bayonne, et comment Terret, Lavignasse, etc., continuent son œuvre.

C’est la fleur de saison : éblouissante de couleurs et de tons ; on a fleuri les tombes et les monuments aux Morts, on en pare nos homes, nos hôtels, nos palaces. A Biarritz, ces jours derniers, au Congrès des Chrysanthémistes français, nous en avons admiré des collections d’une richesse incomparable. On aime au Pays Basque le chrysanthème autant que la rose et que l'hortensia. Mais qui apporta chez nous, le chrysanthème ? qui donna à sa culture l’extension qu’elle a aujourd’hui ? 

M. Jean Laborde, adjoint au maire de Biarritz, président de la Société d’Acclimatation du Golfe de Gascogne, nous a renseignés là-dessus, dans le toast qu’il prononça au banquet du Congrès, en disant : 

"Comment le chrysanthème arriva-t-il dans notre Pays Basque ? 

EXPOSITION DE CHRYSANTHEMES

En 1873, M Rotschild, propriétaire à Boulogne-sur-Seine, avait comme jardinier en chef, Lesueur, qui avait sous ses ordres un jeune apprenti jardinier, Alfred Chantrier, un toulonnais, fils d’un des grands semeurs de roses et pélargonium, jardinier chef de la Ville de Toulon. C’est là, d’ailleurs, qu’Alfred Chantrier, dès son jeune âge, s’adonne à l’amour de la culture florale. 

Alfred Chantrier ayant été engagé quelques années après par M. Emile Bocher, comme jardinier-chef de la propriété Caradoc, à Bayonne (Saint-Etienne), Lesueur lui donna une collection de vingt chrysanthèmes qui avaient été rapportés d’Angleterre par son fils, jardinier dans ce pays, où déjà cette plante était en honneur. 

Chantrier arriva donc à Caradoc, avec peu de bagages personnels, mais ayant soigneusement caché dans le fond de sa malle les vingt précieux chrysanthèmes. Tout en s’occupant d'aménager, de transformer et de créer cette admirable propriété Caradoc, Alfred Chantrier fit là ses premiers semis et put exposer pour la première fois à Toulouse, en 1884. Dès lors, Chantrier établit son premier catalogue.

En 1896, il obtient, à l’Exposition organisée par la Société Horticole de Bayonne, le grand prix d’honneur offert par M. le Président, de la République. Toutes les grandes villes de France et les principales villes étrangères où il présente ses semis, lui accordent les plus grands mérites, mérites qui furent récompensés par M. le ministre de l’Agriculture qui lui décerna le titre de chevalier, et plus tard celui d’officier du Mérite Agricole, et nous faisons des vœux pour que ce ruban vert se transforme bientôt en ruban rouge. 

C'est donc Alfred Chantrier qui, le premier, introduisit le chrysantème et qui a été le premier semeur de notre région basquaise.

Pendant quarante-six ans de service au château Caradoc, il a porté bien haut le renom du chrysanthème ; il veut que son œuvre subsiste. Félicitons-le, car il a fait des adeptes qui suivront ses conseils et allongeront la liste importante des grands semeurs chrysanthémistes français ; j’ai nommé pour notre Côte Basque, les Roumagnac, les Chambonneaux, les Bidau. 

A côté des semeurs, rendons hommage aux premiers cultivateurs de chrysanthèmes à grandes fleurs du Pays Basque : c’est Paul Terret, en 1888, jardinier chez Mme de Granderie, à Bayonne, et en 1893, Paul Lavignasse, jardinier chez M. Ricard, Villa Espérance, à Anglet. Ces deux chrysanthémistes obtinrent des spécimens magnifiques qu’ils ne tardèrent pas à présenter aux expositions organisées par les Sociétés horticoles de Bayonne et de Biarritz, nouvellement créées.

Mais l’Exposition et le Congrès des Chrysanthémistes de 1911, à Biarritz, où l’on se rappelle encore les magnifiques chrysanthèmes de Colin, chef jardinier de la comtesse de Lancey, à Louveciennes, ont été le point de départ de la culture des chrysanthèmes à grandes fleurs, sur une plus vaste échelle et pour la présentation dans les Expositions. D’ailleurs, aujourd’hui, vous pouvez admirer les remarquables chrysanthèmes présentés par les horticulteurs et jardiniers de maisons bourgeoises de Bayonne et de Biarritz ; je n’ai pas à citer leurs noms, vous les connaissez déjà ; ils ont droit à toutes nos félicitations. 

Semeurs, horticulteurs, jardiniers, continuez à créer et faire prospérer les chrysanthèmes. Ils sont, a dit un poète de vos amis, "non seulement la fleur de la mort, mais la fleur de l’amour. Ils garnissent, il est vrai, le vieux cimetière et s’ils s’épanouissent sur nos chers tombeaux, ils savent aussi égayer la maison attristée, et, grâce à leur beauté, c’est pour un instant, le printemps qui chante."

Comme on comprend qu’en achevant de porter son toast, M. Jean Laborde ait levé son verre à la Rose, au Chrysanthème et à ceux qui parent la Côte Basque de si belles fleurs !"

Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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