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dimanche 9 juillet 2017

UNE PARTIE DE L'ARCHIPEL DES GALAPAGOS APPARTIENT AUX HABITANTS DE BARCUS (BARKOXE) EN SOULE


LES HABITANTS DE BARCUS SONT PROPRIÉTAIRES D'UNE PARTIE DE L'ARCHIPEL DES GALAPAGOS.


L'oncle Uthurburu légua jadis aux pauvres de Barcus (Barkoxe en Basque) une île déserte des Galapagos.


Le journal Paris-Soir, dans son édition du 24 avril 1935 raconte l'histoire :


"Si tous les héritages des oncles d'Amérique étaient parvenues à leurs neveux basques, il y aurait en France un peuple heureux et riche. Ici, comme ailleurs, cependant, la misère côtoie l'opulence et gagne sur elle du terrain. Ici, comme ailleurs, le malheur suit la fortune comme une ombre. Plus qu'ailleurs, depuis trois ans, l'ombre grandit.


Des successions incontestables et cependant habilement contestées mettaient jadis dix et vingt ans à traverser l'Atlantique.


Et encore, dans quel état ! Quand l'oncle passait de vie à trépas, une nuée de prétendus gens d'affaires" s'abattait sur son cercueil. Que n'inventaient-ils pas, ces hommes qui ont le pouvoir de flairer à distance les morts fortunés ? Des créanciers se présentaient, remettaient leurs "droits" entre les mains d'avocats "spécialisés". Si ces héritiers fictifs mais têtus et retors ne suffisaient pas, des "enfants naturels" se présentaient. Il y avait toujours, dans les bouges d'Amérique une malheureuse femme indigène ou prostituée, mère de quelques bâtards, pour assurer que le défunt était le père d'un ou deux de ses enfants, qu'elle avait vécu maritalement avec lui dans la pampa, jadis. Des témoins suggestionnés par un pourboire généreux confirmaient les déclarations de la "pauvre femme abandonnée".


Les neveux lointains, las de payer des honoraires d'avocats, des assignations sur papier timbré, las de vieillir dans la fortune séquestrée par les malins, vendaient à des émissaires astucieux pour deux ou trois cent mille francs des successions pendantes de huit à dix millions.



C'est ainsi que depuis plus de soixante dix ans (article publié en 1935), Barcus attend son héritage, laissé par l'oncle Uthurburu.



L'oncle Uthurburu appartient au siècle dernier (19ème siècle). Mais son roman illustre non sans originalité, la vie des Basques. Il était à Barcus, cadet de fermier, fort intelligent qui, de bonne heure, pensait aux voyages...


Léon Uthurburu, quand il s'expatria, n'avait que dix-huit ans, mais son entregent, son ingéniosité, un rien de malice mêlé à beaucoup de courage le destinaient mieux aux négoces improvisés de l'Amérique Centrale qu'aux luttes âpres des grandes solitudes de l'Amérique du Sud ou du Canada.


Il partit, vers 1820, laissant au pays son frère aîné. On sut qu'il devenait un "monsieur". Après avoir prospéré dans le commerce, avoir tâté du fret, il devint banquier à Quito capitale de l'Equateur, en même temps que vice-consul de France.



Banquier en ce pays, en une contrée bouleversée par les combats des généraux improvisés et de leurs troupes d'outlaws, était synonyme d'usurier. Comme d'autres Basques d'Amérique, l'oncle Léon Uthurburu, de relations en relations, gagnait des titres et des parchemins. Il s'appela don Iturburu et prêtait de l'argent aux aventuriers qui renversaient ou soutenaient les gouvernements toujours provisoires des républiques fiévreuses, voisines de l'Equateur. Son activité s'étendait jusqu'au Mexique, jusqu'à Cuba. A New-York, où l'un de ses frères était vice-consul, on parlait de lui, on le situait comme l'éminence grise des partis politiques les plus sages d'Amérique Centrale.



Il connaissait les besoins des pays qu'il avait parcourus, puisqu'il leur devait, autant qu'à son sens de l'économie, sa situation. Et ses conseils basés sur l'expérience étaient excellents. Pourtant, à cause des remous incessants d'un continent volcanique aux révolutions saisonnières, il éprouva des revers, perdit plusieurs fois sa fortune, la refit. Longtemps, il commandita un grand diable d'Equatorien, le général Villemil, lequel pour payer la solde de ses troupes avait recours à Don Iturburu alias Léon Uthurburu de Barcus. En échange, le général signait des reconnaissances de dettes.



Le général avait un fils prodigue que la légende peint comme un enfant gâté, viveur et joueur. Le fils lui aussi, emprunta quelque argent au brave Iturburu.


Quand le banquier Basque présenta ses créances, le général Equatorien n'avait plus un sol. Mais il tenait à payer pour l'honneur et pour l'exemple. D'ailleurs, Don Iturburu était consul de France et le général se ménageait la sympathie de Napoléon III, chef du gouvernement Français.


- Je n'ai pas d'argent, don Léon, mais je possède un grand moulin sur le Guyaquil et quelques îles dans l'archipel des Galapagos. Si vous le voulez, je vous offre le moulin et la plus grande de mes îles, la Floreana, proposa-t-il.


Léon Uthurburu, faute de mieux, accepta. Le moulin de Guyaquil tournait bien. Quant à l'île, elle pouvait un jour peut-être être mise en valeur.


Quand don Iturburu commença à souffrir de rhumatismes, après quarante années d'aventures multiples, il se souvint du climat sédatif de Barcus, village douillettement pelotonné au seuil des Pyrénées, à l'abri des vents mais non du souffle chaud du Sud qui modère les rigueurs de l'hiver.


Il réalisa ce qui lui restait de sa fortune, dut en abandonner des lambeaux aux rapaces des contrées tropicales et vint honnêtement prendre sa retraite à Barcus, dans une maison qu'il fit construire près de l'église et qu'occupe aujourd'hui le curé du village.




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BARCUS - BARKOXE PAYS BASQUE AUTREFOIS





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BARCUS - BARKOXE PAYS BASQUE AUTREFOIS





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DANSEURS BASQUES DE BARCUS -BARKOXE
ET LEUR CHIRULARI PAYS BASQUE AUTREFOIS




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DANSEURS BASQUES DE BARCUS - BARKOXE
PAYS BASQUE AUTREFOIS




pays basque 1900 soule place galapagos
PLACE BARCUS - BARKOXE
PAYS BASQUE D'ANTAN




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ECOLES ET RUE PRINCIPALE BARCUS - BARKOXE
PAYS BASQUE D'ANTAN




pays basque 1900 soule galapagos église galapagos
SORTIE DE LA MESSE BARCUS - BARKOXE
PAYS BASQUE AUTREFOIS




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LES FAUCHEURS DE BARCUS - BARKOXE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Certes, Léon Uthurburu revit avec plaisir sa commune natale quoiqu'il y étouffât un peu. C'était si petit, si simple.


Il eut la joie d'assister aux pastorales qu'écrivent en langue Basque les grands poètes, félibriges modestes, de Barcus ou de Mauléon. Un beau spectacle qui commence le matin et finit le soir et qu'on suit même pendant le déjeuner, à condition d'apporter un repas froid. Cela tient des mystères moyenâgeux et de la tragédie grecque. Les personnages symboliques, travestis selon l'idée de l'auteur, défilent d'abord dans le village puis sur une scène sans décor, avec le côté des bons et le côté des méchants ; les acteurs, jeunes paysans, déclament leurs tirades en langue Basque et jouent leurs rôles avec conviction. Les chants interrompent parfois l'action, et la musique du pays : chiroula, tambouïa ou thunthun à cordes et tambours les accompagnent. Aujourd'hui encore, quand vient le printemps, la foule accourt entendre la pastorale Basque et s'émeut au souffle des poètes avec autant de force qu'autrefois.


L'oncle Uthurburu revit le défilé des mascarades avec leurs costumes caricaturaux et chamarrés.


Le "Tcherelo" exécutait, comme il exécute encore, la difficile  danse du verre pour laquelle les fils de Barcus ou de Licq s'entraînaient dès l'enfance. Le danseur fait autour d'un verre à demi plein des entrechats puis, d'un pied leste, saute sur le verre, se tient en équilibre de l'autre pied, trace dans le signe de la croix puis retombe sur le sol sans renverser une goutte de vin. Gaîté, souplesse, beautés naïves, enchantaient l'oncle Uthurburu.



Il mourut à Barcus en 1863. Par testament olographe, il léguait une part de sa fortune à son frère, vice-consul à New-York ; le moulin de Guyaquil et l'île Floreana aux pauvres de Barcus.



Va pour le moulin, un Basque sait ce que c'est. Mais cette île des Galapagos, que valait-elle ? Etait-ce au moins de la bonne terre, avec des prairies, des moutons et des boeufs ? Les édiles de Barcus en l'an 1863 ignoraient la géographie. Ils s'adressèrent aux hommes de loi, firent des démarches. Les difficultés commencèrent. Une foule d'Equatoriens se déclarèrent propriétaires du moulin et de l'île, parce que fils légitimes ou naturels du général Villemil. Les droits de propriété de Léon Uthurburu, dit Don Iturburu, furent contestés. Les Barcusiens continuèrent à penser qu'une terre est toujours une terre et qu'elle finit un jour par rapporter des écus. Ils songèrent à la procédure.



Le Conseil d'Etat consulté les en dissuada. Les frais risquaient d'être plus élevés que la valeur de l'île.



"C'est une île déserte", écrivit aux Barcusiens le vice-consul de France à GuayaquiL


Dix ans plus tard, car le Basque est tenace, les Barcusiens acceptèrent, en ce qui concerne le moulin, une transaction qui assure une rente de 9 000 francs par an à leur caisse de bienfaisance et de prêts. L'héritage de l'île Floréana fut laissé en suspens.



Quarante après, c'est-à-dire il y a quelques semaines (rappel, l'article a été publié en 1935), la baronne de Wagner et les nudistes des Galapagos défrayèrent la chronique. L'île Floréana devenait célèbre. Qui dit publicité dit profit. L'île du docteur Ritter appartient en droit à la succession de Léon Uthurburu, citoyen de Barcus. Les Barcusiens, en lisant dans Paris-Soir les aventures contées par mon confrère et ami Georges Simenon, ont repris espoir. Ils ont exhumé le dossier poussiéreux de l'oncle Uthurburu.



Les pauvres de Barcus obtiendront-ils leur île rêvée ? Souhaitons-le. Car la chance est devenue rare. Les cadets tournent dans le village et ne peuvent plus passer. Terre d'héritiers, le Pays Basque, à cause de ses fils dispersés, est secoué par toutes les crises étrangères."






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