LE CAMP DU POLO DE BEYRIS A EU PLUSIEURS VIES.
Après une période consacrée au sport de polo, puis aux sports équestres, le terrain du polo de Beyris de Bayonne a été transformé en camp d'internement, de 1939 à 1947.
Ce terrain de 8,5 hectares, situé à la limite des communes de Bayonne et d'Anglet a une
position stratégique, près de la frontière.
- Au début de l'année 1939, en raison de l'arrivée massive des réfugiés espagnols, le
préfet des Basses-Pyrénées Angelo Chiappe réquisitionne les installations du Polo de Beyris
pour créer un centre d'"hébergement".
Il les visitera d'ailleurs en personne le 14 février 1939.
Des dizaines de familles de Républicains sont alors entassées dans les écuries et les vestiaires
du club de polo.
Ils couchent sur des paillasses en paille.
REFUGIES REPUBLICAINS BAYONNE 1939 COLL PRIVEE M J DUBERNAT |
La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, dans son édition du 7 février 1939 relate :
"...L'exode tragique des réfugiés de Figueras, des armées défaites et décimées de Barcelone, refait de Bayonne et d'Hendaye des gares régulatrices de la fuite et de la misère. Depuis huit jours, c'est par trains entiers, que des êtres humains dont les éclairs des yeux manifestent les derniers souffles de vie, passent par nos gares, descendent parfois à nos stations.
Le décongestionnement des Pyrénées-Orientales aussi bien que l'acheminement, via Hendaye, aux zones franquistes, des soldats désarmés et des civils affamés, qui demandent à aller "chez Franco", ne sont cependant pas des limites à un simple transit ces trafics ferroviaires de la désolation ferroviaire.
La France, fidèle à une mission généreuse, dont on ne connaît peut-être pas tout le prix, ni le mérite, soigne les enfants, les femmes et les vieillards.
A Bayonne, hier, des locaux, jadis réservés aux splendeurs mondaines des grands tournois hippiques de polo, où les amateurs, pour deux heures de jeu, dépensaient plusieurs centaines de milliers de francs sur le tapis vert du polo de Beyris, des locaux ont été aménagés pour abriter des enfants couverts de vermine, rongés de gale et d'une misère physiologique horrible à voir. Les opérations de vaccination, de dépouillement, se poursuivent, tandis qu'on réconforte ces épaves humaines avec d'infinies précautions."
Le Populaire du 16 février 1939, annonce que 600 enfants sont hébergés à la ferme Cabana de
Beyris.
Le 30 septembre 1939, 247 femmes et enfants de combattants Républicains sont évacués et
renvoyés de force en Espagne.
Les hommes valides sont transférés dans divers camps d'internement puis sont regroupés en
compagnies de travailleurs étrangers destinées à soutenir l'effort de guerre.
Le 2 octobre 1939, le camp est "officiellement" évacué.
- L'offensive Allemande et sa victoire en mai-juin 1940 entraîne la défaite de l'armée
Française.
Les Allemands créent des camps d'internement, des Frontstalags, pour les prisonniers issus des
colonies françaises.
En zone occupée, il existe 22 camps pour 69 000 prisonniers "indigènes", parmi lesquels 50 000
Nord-Africains, 16 000 Sénégalais, Soudanais, Togolais et Voltaïques, ainsi que 3 000
Malgaches et Indochinois.
En effet, les nazis craignent les maladies tropicales ou celles portant atteinte à la "pureté du
sang aryen" et ils renvoient tous ces prisonniers dans la zone occupée.
Au polo de Beyris, c'est le Frontstalag 222 et les prisonniers y sont soumis au travail forcé pour
des constructions comme le Mur de l'Atlantique, les dépôts de munitions, les terrassements et
les travaux forestiers.
Ils sont répartis en différents commandos de travail dans une zone allant d'Hendaye jusqu'aux
Landes.
PRISONNIERS NORD-AFRICAINS CAMP POLO BEYRIS BAYONNE 1940 |
PRISONNIERS NORD-AFRICAINS CAMP POLO BEYRIS BAYONNE 1940 COLL PRIVEE M J DUBERNAT |
Il y a une cinquantaine de grandes baraques en bois, entourées de 3 rangées de barbelés et de 5
miradors.
Les conditions d'internement sont très dures : froid, nourriture insuffisante, manque de soins,
etc....
La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque du 21 novembre 1940 demande d'ailleurs
à ses lecteurs de Biarritz de penser au pain des prisonniers et d'amener à la Permanence du
Comité local d'aide aux prisonniers du pain, des victuailles, des fruits et des légumes qui
amènera ces dons à Bayonne pour le centre d'accueil qui prépare depuis des semaines des
repas pour les prisonniers.
Georges Scapini, nommé par Pétain chef du Service diplomatique des prisonniers de guerre à
Berlin, avec le rang d'ambassadeur, visite le 10 avril 1941 le camp de prisonniers de Beyris et
l'hôpital de Bayonne où sont soignés des soldats africains.
La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque du 5 août 1941 annonce une arrivée
prochaine d'officiers indigènes et un appel est encore lancé aux lecteurs du journal pour que le
Comité d'Assistance aux Prisonniers reçoive des assiettes, des serviettes de table et de toilette,
quelques vases pour mettre des fleurs, des gravures encadrées, et d'une manière générale, tout
ce qui pourrait servir à orner une salle de réunion d'officiers.
La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque du 22 août 1942 informe sur des vols
d'une centaine de colis destinés aux prisonniers Nord-Africains et sur une enquête de la
Gendarmerie.
Les habitants du Pays Basque sont encore mis à contribution en 1943 pour aider le
ravitaillement du camp de Beyris et le canton d'Ustaritz est cité en bon exemple avec 1 000
kilos de haricots, 500 kilos de pommes de terre, 600 kilos de choux, carottes, poireaux, sans
compter 800 kilos de maïs.
A partir de janvier 1943, devant les besoins grandissant sur le front de l'Est, la Wermacht
mobilise tous ses soldats et le Gouvernement Français répond favorablement à la demande
allemande de faire assurer la garde dans certains frontstalags par des officiers français.
En juillet 1944, des prisonniers noirs créent un orchestre de musique militaire et donnent un
concert à l'hôpital de Bayonne pour leurs camarades malades.
La mortalité dans ce camp aura été importante car 40 de ces prisonniers ont été enterrés au
cimetière Louillot d'Anglet et 102 sont enterrés eux au cimetière Saint-Léon de Bayonne.
Les causes de décès sont en majorité dues à la maladie, en particulier la tuberculose qui sévit
dans le camp, mais aussi aux tentatives d'évasion ou accidents de travail.
Les gardiens de ces camps sont souvent des anciens combattants allemands de 14-18 et sont
relativement cléments à l'égard des prisonniers.
Le 22 août 1944, le camp Frontstalag 222 de Beyris est libéré et vidé de tous ses
occupants.
- Le 18 septembre 1944, le camp est transformé en centre de détention des "politiques
français", la plupart accusés de collaboration.
Jusqu'au 20 avril 1945, 765 civils y sont enfermés.
C'est à la fois un lieu d'internement et un centre de triage pour les détenus en instance de
transfert devant les cours de justice de l'Epuration, ou en attente d'internement à Gurs, pour
259 d'entre eux.
On y trouve pêle-mêle des présumés collaborateurs et trafiquants de marché noir qui ont
transité par la Maison Blanche de Biarritz, le Château-Neuf ou la Villa Chagrin de Bayonne.
Ce camp "de concentration", situé sur des terrains appartenant à la Ville de Bayonne et loué à
l'Administration de la Guerre va accueillir des détenus politiques jusqu'au mois de mai 1945.
- A partir du 15 janvier 1945, la partie Nord de ce camp, composée de 15 grands hangars,
est réservée aux 310 prisonniers de guerre allemands en provenance du camp de Gurs.
PRISONNIERS DE GUERRE ALLEMANDS CAMP POLO BEYRIS BAYONNE 1945 |
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