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samedi 9 janvier 2021

LES TRAINS AU PAYS BASQUE SUD EN SEPTEMBRE 1864 (cinquième et dernière partie)

 


LES TRAINS AU PAYS BASQUE SUD EN 1864.


Dès 1845, les institutions Biscayennes promeuvent la construction d'une ligne de chemin de fer Madrid-Irun, passant par Bilbao.



pais vasco antes tren 1864
INAUGURATION DU CHEMIN DE FER ST SEBASTIEN 1864
PAYS BASQUE D'ANTAN




Voici ce que rapporta à ce sujet le Journal des débats politiques et littéraires, dans son édition 

du 14 septembre 1864, sous la plume d'Ustazade de Sancy :



"Saint-Sébastien. Vitoria. Burgos. Madrid et Tolède. 



(Deuxième article. Voir le Numéro du 9 septembre.) 




...S'il est difficile de dormir à Vitoria, on y vit en revanche très bien ; le vin lui même est assez bon ; il n'a pas ce goût insupportable provenant de son séjour dans des outres prises pour des enchanteurs et transpercées par Don Quichotte. 



La course de taureaux commençant à quatre heures de l'après-midi, il fallait songera se procurer des billets. Une bonne place à l'ombre coûte 6 fr. Impossible d'en trouver, si ce n'est du côté du soleil, côté redoutable, même aux places soi-disant garanties par un rideau de toile. Nous avons souffert, mais nous avons eu l'avantage d'être plus rapprochés du menu peuple dont l'éducation ne bride point les mouvements naturels, et nous avons pu être témoins de l'excitation voisine de la folie où le met la vue de ce spectacle mêlé d'épisodes grandioses et de détails révoltants. 



La course du 16 août présentait d'autant plus d'intérêt aux assistants, qu'un picador, la veille, avait été précipité de cheval et éventré. Il s'agissait de voir si ses compagnons témoigneraient la même intrépidité qu'avant cet affreux accident ; l'un d'eux, s'étant exposé plus que jamais, a soulevé un enthousiasme dont on ne peut se faire une idée sans l'avoir vu. Les Espagnols, d'apparence si taciturne et si grave, se passionnent facilement pour toute espèce de spectacle ; nous avons vu Tamberlik au théâtre Rossini, à Madrid, rappelé et acclamé d'une manière qui eût paru fort ridicule à Paris. Toutefois un bon taureau, un taureau méchant et dangereux qui s'acharne sur les chevaux et sur les hommes, suscite bien plus d'applaudissements que Tamberlik. 


tenor chanteur italie
ENRICO TAMBERLIK



Pour nous autres Français, une course de taureaux est une lutte assez lâche, après, tout, de dix espèces de bouchers contre un seul animal sans défense, puisque son ennemi lui échappe à chaque instant et se cache derrière une barrière, tandis que lui-même est fatalement destiné à mourir.. Il y a, je l'avoue, des intermèdes élégants ; le dernier acte du supplice, où un seul homme, la spada, joue avec le taureau furieux, s'exposant quelquefois à la mort, bien qu'il soit en apparence assez défendu par ses compagnons, a une certaine grandeur ; c'est la lutte du sang-froid et de l'agilité contre la force aveugle et brutale. Mais de quelle épithète flétrir cette barbarie qui expose de pauvres chevaux à être éventrés, qui les force, horriblement blessés, les entrailles pendantes et traînant jusqu'à terre, à parcourir l'arène pour être fouillés de nouveau, jusqu'à ce que le picador qui les monte, sentant au refroidissement de l'oreille qu'ils vont mourir, descende et les abandonne ? Bientôt le cheval s'affaisse, il lutte contre la mort dans une affreuse agonie, tantôt essayant vainement de se relever, tantôt agitant ses jambes et frappant le sol avec des spasmes hideux. Souvent cette agonie, est troublée par de nouvelles atteintes du taureau, et lorsque ce dernier s'acharne sur un cadavre, le soulevant de ses cornes recourbées, puis le laissant retomber lourdement, le public applaudit avec frénésie, se délectant de telles horreurs. Si le taureau est un animal paisible et doux, s'il devine, pour ainsi dire, le sort qui l'attend, s'il refuse un combat par trop inégal et cherche à fuir, la foule, au lieu d'en avoir pitié, exige qu'on lui laboure les flancs avec des pétards enfoncés dans la chair vive, ou le fait déchirer par des chiens. Quel plaisir trouver dans un pareil spectacle ? Et ce pendant on s'y attache, l'œil ne peut quitter ces agonies, on se sent cloué à sa place comme par un invincible cauchemar. Quels instincts de férocité peuvent réveiller chez l'homme les combats de taureaux ! 



pais vasco antes corrida alava
ARENES VITORIA GASTEIZ ALAVA
PAYS BASQUE D'ANTAN


L'année dernière, à Nîmes, El Tato est venu donner deux représentations avec son fameux quadrille. Les taureaux étaient mauvais, ils venaient de Camargue, refusaient d'éventrer les chevaux et reculaient même devant l'épée. Ce fut une véritable boucherie qu'étaient venues contempler 35 000 personnes. Aussitôt des Nîmois entreprirent de donner, à l'instar des Espagnols, des courses dans le midi. Ils vinrent à Lunel ; seulement les habitants de cette petite ville voulurent se mettre de la partie. Ils descendirent dans l'arène, enfoncèrent des banderilles enflammées dans les flancs du taureau, puis quelques uns l'ayant attrapé par la queue et d'autres par les cornes, ils s'amusèrent à le dépecer à coups de couteau ; la police fut obligée d'intervenir. Dans le moment où j'écris ces lignes, de nouvelles courses ont lieu à Nîmes avec des taureaux espagnols. Le public y prend goût et se réjouit de voir massacrer des chevaux. Allons-nous donc emprunter à nos voisins leurs mœurs sauvages ? Cette féroce comédie va-t-elle se répandre en France ? Dirons-nous un jour, comme de l'autre côté des Pyrénées : La course a été belle, il y a eu vingt chevaux et un homme éventrés ? On se passionne vite pour le taureau ; quand il lutte avec courage, on fait des vœux pour lui. Quels vœux, si ce n'est de lui voir atteindre le lâche ennemi qui se dérobe après l'avoir blessé ; en un mot, souhaiter de voir couler le sang humain ?


matador corridas
MATADOR EL TATO



gard autrefois matador corridas
EL TATO A NIMES EN 1863



En quittant les arènes, honteux comme si je venais d'être complice d'une, mauvaise action, je m'étonnais de la gaité, de la joie de cette population de Vitoria. Tous riaient et causaient avec animation, ainsi qu'ils avaient fait la veille sans doute, malgré la mort du picador ; des bandes de jeunes garçons traversaient la foule sautant et dansant ; les balcons étaient garnis de jolies femmes impatientes d'apprendre les détails du spectacle auquel elles regrettaient de n'avoir pu assister. Le soir, nous quittions la ville en fête, au bruit des salves d'un très beau feu d'artifice tiré sur les marches d'une église, et dont les étincelles retombaient en pluie sur la tète des assistants. Quatre heures suffisent pour aller de Vitoria à Burgos..."






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