CHARIVARI À HASPARREN EN 1950.
Le charivari est une démarche symbolique et bruyante des membres d'une communauté villageoise, une démonstration empreinte de violence morale et parfois physique visant à sanctionner des personnes ayant enfreint les valeurs morales et (ou) les traditions de cette communauté.
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Qui ?, dans son édition du 12 juin 1950, sous la plume
de Léo Vergez :
"Les brimades d'Hasparren contre des ménages soi-disant désaccordés se soldent par un bilan tragique.
Deux morts, deux blessés, un dément... Depuis le dramatique charivari dont nos lecteurs connaissent les détails, Hasparren, en apparence toujours paisible au cœur du riant Pays Basque, sent peser sur lui l’atmosphère hallucinante d’un drame fertile en rebondissements imprévus.
Ce site dont le charme agreste inspira Loti est devenu un lieu maudit où, derrière les volets clos, les gens restent bouche cousue, étreints par l’angoisse et la haine. Et chacun, même parmi les enquêteurs, se demande si, à la liste déjà trop longue de ces cinq victimes, le moment ne viendra pas d’ajouter d’autres noms...
Résumons brièvement les faits : le 6 mai dernier, un groupe de sept jeunes gens du quartier Eliçaberry, proche d’Hasparren, avait organisé un charivari sous les fenêtres des aubergistes de l’endroit, M. et Mme Aldax. Au retour de la bruyante expédition, vers 2 heures du matin, deux cartouches chargées de chevrotines furent tirées sur le groupe par un inconnu qui, caché dans un buisson, attendait son passage.
Bilan provisoire, un mort : Jean-Baptiste Itchorrotz, vingt et un ans ; deux blessés : Jean-Pierre Itchorrotz, frère du précédent, et Bernard Lohaïgue, un voisin.
Le commissaire Dallas et l’inspecteur principal Narp, de la 7e Brigade de police judiciaire de Bordeaux, furent chargés de l’enquête. Ils mirent successivement hors de cause un habitant du pays, qui venait de le quitter après une violente scène de sa femme, celle-ci l’accusant d’être trop assidu auprès de l’hôtelière ; puis deux proches parents de celle-ci. Après dix jours d’enquête, ils en vinrent à penser que, contre toute attente, l’auteur du coup de feu pouvait bien n’être pas un habitant du village et qu’il pouvait s'agir, non pas d’une victime du charivari en question, mais de celle d’un charivari précédent.
Nous avons dit ce qu’était le charivari : un tapage nocturne et injurieux tendant à ridiculiser un couple illégitime ou mal assorti. Cette brimade, peu courageuse d'ailleurs, est de la plus ancienne tradition.
Elle revêt parfois une autre forme, qui consiste à réunir, par une traînée de paille ou de chaux, les demeures d’un couple adultère, ou supposé tel. Parfois, sur le parcours de la traînée, sont exposés deux mannequins à l’effigie des amants coupables. Cette coutume, qui s’appelle la "jonchée", tout aussi lâche que le charivari, est également aussi ancienne, puisqu’elle date du moyen âge et rappelle l’époque où les pécheurs convaincus d’adultère étaient exposés sur le parvis des églises, cierge en main, et condamnés à faire amende honorable, étant liés par les bras au moyen d’une tresse de paille.
LES EPOUX BEHERAN HASPARREN 1950 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Or, enquêtant sur le charivari du 6 mai, les policiers apprirent rapidement que, le ler janvier dernier, un habitant du hameau de Labiry, distant de moins d’un kilomètre du quartier Eliçaberry, avait été victime d’une jonchée.
Il s’agissait de J.-B. Agarra, riche propriétaire, vivant seul avec sa vieille mère et un domestique. De caractère violent et renfermé, il ressentit cruellement l’insulte et tint des propos menaçants contre les jeunes gens qu’il soupçonnait d’être les auteurs de la jonchée qui reliait son domicile à la ferme Elissetche.
JEAN-BAPTISTE AGARRA HASPARREN 1950 PAYS BASQUE D'ANTAN |
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