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mardi 12 janvier 2021

LES CHANTIERS INDUSTRIELS ET MARITIMES DE L'ADOUR AU PAYS BASQUE EN 1927 (première partie)

 

LES CHANTIERS INDUSTRIELS ET MARITIMES DE L'ADOUR EN 1927.


En 1927, une polémique survient à Bayonne au sujet de terrains municipaux vendus à une société financière privée.



pays basque autrefois port adour
APPONTEMENT DE BLANCPIGNON ANGLET
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays basque, dans son 

édition du 26 février 1927 :


"Problèmes municipaux.



Une lettre de M. Castagnet. 


pays basque autrefois depute maire politique
GABRIEL PROSPER CASTAGNET
DEPUTE BASSES-PYRENEES
MAIRE DE BAYONNE 1919-1925


Nous recevons de M. Castagnet, député, ancien maire de Bayonne, la lettre que nous reproduisons ci-dessous, à titre de document : 


Bayonne, le 25 Février 1927. 


Monsieur le Maire, 

Messieurs les Conseillers Municipaux. 



Dans la lettre du 20 avril 1926 que j'ai eu l’honneur de vous adresser, pour vous signaler les dangers du projet de cession du domaine foncier de la Ville à une Société financière, je vous signalais certaines ressources que vous pouviez facilement réaliser.  



"La Ville n'a-t-elle pas à Blancpignon un terrain de 90 000 mètres vendu à M. de Lesseps dans des conditions qui mériteraient d’être publiées, n’est-ce pas M. le Maire ? mais qui n’a jamais été payé. Qu'attend la Ville pour en obtenir le paiement ou pour poursuivre la résiliation de vente déjà accordée par les Tribunaux, mais abandonnée provisoirement pour vous ? Il y a là 600 000 francs à récupérer du prix de vente (prix de 1918) et, si la résiliation est poursuivie, une somme bien supérieure". 



Depuis cette lettre, l’affaire de Lesseps a été liquidée dans des conditions qui ont pu vous apparaître comme satisfaisantes. J’ai toujours eu le sentiment du contraire et la solution qui vient d'être donnée par la commune d'Anglet, à une affaire identique, confirme ce sentiment et l’erreur que vous avez commise. Puisqu’il s’agit d'une question qui avait été engagée par vos prédécesseurs dans une voie autre que celle que vous avez cru devoir suivre et que votre bonne foi a sans doute été surprise, laissez-moi mettre en relief des véritables responsabilités. 



Origine du contrat liant la Ville à M. de Lesseps



Passé en 1918. Rapporté par M. Garat, maire. Contrat de location, vente pour 90 000 mètres carrés de terrain environ à 6 francs 66 le mètre. Location à raison de 4 p. 100 du prix du terrain. 



Lacunes de ce contrat.



— Taux de location de 4 p. 100 manifestement inférieur au loyer de l’argent à l’époque : oubli de l’élection du domicile d’autant plus incompréhensible que, pour d’autres terrains de la même forêt de Blancpignon, un contrat antérieur avec la Société des Chantiers Maritimes de l'Adour et un contrat postérieur avec M.Plisson ne manquaient pas de mentionner, comme le commandait la plus élémentaire prudence pour le cas de contestations ultérieures, l’élection de domicile à Bayonne. Ces contrats avaient pourtant, devant le Conseil municipal, le même rapporteur : M. Garat. Enfin, dernière lacune : la surface vendue n’était indiquée qu'approximativement et la délimitation devait se faire ultérieurement. 



MM. Simonet et Legrand qui, si je ne m'abuse, étaient conseillers municipaux à l’époque, n'ont pas été frappés par tout cela ? 



A signaler que le contrat de Lesseps spécifiait explicitement que les terrains vendus devaient recevoir une destination industrielle. A signaler également que, par l’entremise directe de M. Garat, la commune d’Anglet contracta avec M. de Lesseps une location vente en tous points identique à celle de Bayonne. 



Séance du Conseil Municipal de Bayonne du 30 Octobre 1925



Désistement de Lesseps. Rapporteur M. Garat. Il propose l’abandon du procès moyennant (extrait du registre des délibérations) : 


"Le paiement des frais du procès ; 2. Le paiement des loyers échus depuis 1918 ; 3. Acquérir les terrains au prix de 6 francs 66 le mètre carré, le paiement se faisant : 300 000 francs le 31 décembre 1925, le solde le 31 décembre 1927". 



Une seule protestation au Conseil municipal : celle de M. Labourdette fait ressortir que le prix de 1918 n'est plus le même en 1925. M. le Maire en doute et soutient qu'au point de vue juridique le procès ne peut être poursuivi ; la Ville, à son avis, ne peut se délier du contrat qu’elle a signé.


La clause relative à la destination industrielle des terrains vendus ne pouvait-elle être invoquée ? Et l’action en rescission de l'article 1674 du Code Civil lorsque le prix de la chose vendue est reconnu supérieur de l/7e à celui fixé au contrat ? M. Garat l'ignorait-il ? Et MM. Simonet et Morel, tous deux adjoints et avocats, l’ignoraient-ils aussi ? Pourquoi n’ont-ils pas éclairé le Conseil ? N'est-ce pas en s'appuyant sur cet article 1674 du Code Civil que la commune d’Anglet a obtenu des avantages supérieurs à ceux de Bayonne ? 



Séance du Conseil Municipal de Bayonne du 15 Février 1926



Texte copié sur le registre des délibérations : 



"M. le Maire fait connaître que M. de Lesseps n'a pas, comme il s'y était engagé, levé l’option sur les terrains acquis par lui avant le délai qui lui avait été à nouveau consenti. Sur sa proposition, le Conseil décide de poursuivre l’affaire. Une somme de 100 000 francs, versée en garantie par l’acquéreur, deviendra propriété de la Ville". 



De ce texte, il résulte qu'une somme en garantie de 100 000 francs avait été versée comme suite à la délibération du 30 octobre 1925. Mais versée où ? Cette délibération ne fait pas mention de ce versement ; la recette municipale n’a jamais rien encaissé à ce titre, alors ? M. Garat ou quelque officine auraient-ils reçu dépôt de cette somme ? que pensent nos Conseillers municipaux de cette gestion occulte et qu’en pense l'administration préfectorale ? Sans doute pensent-ils beaucoup de choses mais n'osent rien dire ! 



Comment expliquer les démarches répétées auprès de la commune d’Anglet par M. Garat, pour l'amener à accepter le même compromis qu’à Bayonne ? Quels intérêts défendait-il ? Pas ceux de la Ville en tout cas. 



Voyons maintenant la conclusion. 



Dans sa séance du 13 juin 1926, le Conseil municipal de Bayonne s'est définitivement désisté. La délibération porte : 


"Le Conseil renonce à invoquer l’article 1674 du Code Civil en matière de rescission pour cause de lésion". C’est donc qu’il pouvait l'invoquer en 1925 et pourquoi le Maire, répondant à la très juste observation de M. Labourdette, a-t-il dit que la Ville ne pouvait se délier de son engagement avec M. de Lesseps ? 



Le désistement a été obtenu moyennant le versement de la somme 830 000 francs et l’abandon par M. de Lesseps de 10 000 mètres carrés nécessaires au rescindement du saillant du Lazaret. Reste donc au lieu des 90 000 mètres primitivement vendus, 80 000 mètres carrés qui, au prix de 6 francs 66 le mètre correspondent à une vente de 80.000 X 6.66 = 532 800 francs lesquels, après transaction amiable, sont devenus 830 000 francs. 



Cas de la Commune d’Anglet


pays basque autrefois port
PORT SUR L'ADOUR
PAYS BASQUE D'ANTAN



D’après les comptes rendus donnés par les journaux locaux, cette commune avait primitivement vendu à M. de Lesseps 109 408 mètres carrés de terrain sur la base de 4 francs le mètre, soit au total 109 408 X 4 = 437 632 francs qui, après transaction, sont devenus : 1 050 000 francs. 



Si la Ville de Bayonne avait su défendre ses intérêts comme l'a fait la commune d’Anglet, les 532 800 francs de terrain primitifs seraient devenus 1 050 000 x 532 800 / 437632 = 1 278 334 fr.




La Ville de Bayonne n’ayant touché que 830 000 francs a donc perdu par... le silence de ceux qui devaient parler, et par la faute de celui qui, depuis 1918, n’a cessé de protéger M. de Lesseps, la somme de : 1 278 338 — 830.000 = 448 334 francs ! 



pays basque autrefois industrie
PAROISSE OUVRIERE DE ANGLET BLANCPIGNON
PAYS BASQUE D'ANTAN



Vaine critique, dira-t-on, puisque le mal est fait et qu'il ne peut être réparé. Cependant elle n’aura pas été inutile s’il m'est permis d'en tirer la morale : 


Quand on prend la suite de l'Administration d’une Ville, la sagesse commande de ne pas, par principe, suivre des voies différentes de celles où se sont engagés les prédécesseurs, surtout, sans avoir pris entière connaissance des questions. Quelle erreur ne risque-t-on pas de commettre autrement ? 



Pour en juger sans parti pris, relisez donc les lettres que vous m’avez donné l'occasion de vous adresser, et souhaitons ensemble que celle-ci soit la dernière. 



Veuillez agréer. Messieurs, l’assurance de ma considération distinguée. 

G. Castagnet.

 Ancien Maire de Bayonne."




 



Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

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