LA MORT DE PABLO SARASATE EN 1908.
Martin Meliton Pablo de Sarasate y Navascués est un violoniste et compositeur, né à Pampelune le 10 mars 1844, et mort à Biarritz (Basses-Pyrénées), le 20 septembre 1908.
J'ai déjà eu l'occasion de vous parler de ce violoniste exceptionnel, dans différents articles : le
20/09/2019, le 20/10/2019, le 20/09/2020, le 20/10/2020, le 20/09/2021 et le 20/09/2022.
Voici ce que rapporta à son sujet le journal Les Annales Politiques et Littéraires, le 4 Octobre
1908 :
"Le roi du violon — Sarasate — est mort...
Voilà quelque quarante ans qu'il fit la conquête de Paris par l'agilité merveilleuse de son archet. Il portait alors une abondante chevelure brune qui accentuait la pâleur étrange de son teint basané. Hier, sa chevelure grisonnait, mais son archet n'avait pas vieilli. Il était demeuré souple, expressif, agile. Et que cet archet traduisît avec pureté les rêves de Beethoven ou les nervosités maladives de Chopin, ou bien qu'il évoquât les danses magiques, les grâces ensoleillées et voluptueuses de l'Espagne, c'était une merveille de l'ouïr et de le voir ; c'était un enchantement, un délice.
Je me rappelle la dernière soirée où il me charma. Il nous annonça que la reine d'Espagne lui demandait de venir jouer à Madrid à l'occasion du couronnement de son fils. Ce voyage lui en rappelait un autre, très lointain, qu'il accomplit, jadis, dans la même ville et qui lui valut aussi l'honneur de comparaître devant une reine. Il avait douze ans à peine ; son père, fougueux révolutionnaire, venait d'être condamné par la justice espagnole, qui ne badine pas, comme vous le savez, à la détention perpétuelle. Sa mère sollicita une audience d'Isabelle. Elle ordonna au petit Pablo de l'accompagner. Il la suivit, son violon sous le bras. Et, après une longue attente, on les introduisit dans les appartements royaux. La reine Isabelle sourit en apercevant le jeune Sarasate.
— Tu joues du violon ? demanda-t-elle.
— Oui, Majesté.
— Et tu pourrais m'exécuter un morceau ?
— Tout ce que tu voudras.
Il commença aussitôt. Et les séguedilles, les rondes populaires, les pas redoublés, les marches triomphales, s'envolèrent dans la majesté du vieux palais. La reine Isabelle fut ravie.
— Il a du talent, dit-elle.
Et, caressant les boucles noires de l'enfant, elle ajouta :
— Que désires-tu ? Je te l'accorde d'avance. Pablo s'écria, d'une voix vibrante :
— La liberté de mon père !
La grâce fut signée. Et c'est ainsi que Pablo Sarasate dut à son violon la première et la plus noble joie de sa vie. Vous pensez s'il avait des raisons de l'aimer ! Ce mince instrument, ces quatre planches de sapin verni, lui ont procuré tout ce que convoitent les hommes : la fortune, la réputation, les honneurs et les pures joies et ivresses que l'on puise dans le commerce de l'art. Ajoutez que les femmes n'ont jamais pu écouter Sarasate sans que leur âme, leur coeur et leurs plus secrètes fibres en fussent troublés. Et vous devinez quels triomphes de tous genres ce prodigieux musicien a recueillis.
Lorsqu'il se reposait, entre deux de ses campagnes, il regagnait sa maison de Pampelune : la maison où il était né. Dès qu'il arrivait, la population était en rumeur. Les jeunes filles déposaient des corbeilles de fleurs sur son seuil, les jeunes garçons lui chantaient des sérénades. Et l'excellent Pablo Sarasate, ému de tant d'hommages, et jaloux de les mieux mériter, protégeait Pampelune, dotait sa cité d'un hôpital, d'un musée, d'un théâtre, y versait, chaque année, le superflu de ses richesses. Il lui aura légué, je présume, l'admirable stradivarius que des dilettantes anglais lui offrirent et qui leur coûta, je crois, 10 000 livres sterling.
Sarasate a composé d'exquises mélodies pour le violon. Nous en publions une, avec, son portrait..."
MELODIE REVERIE DE PABLO DE SARASATE JOURNAL Les Annales Politiques et Littéraires |
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